Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 27 juin 2013 à 15h00
Représentation des français établis hors de france — Adoption définitive en nouvelle lecture d'un projet de loi

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais en premier lieu déplorer l’échec de la commission mixte paritaire entre nos deux assemblées sur un texte qui a, certes, des limites, mais qui traite tout de même, me semble-t-il, d’un sujet important : le mode de représentation de certains de nos concitoyens dans une grande démocratie comme la nôtre.

Bien que le phénomène soit habituel dans ce type d’élections, les récentes législatives partielles de deux députés représentant nos compatriotes résidant à l’étranger ont une nouvelle fois démontré que le système fonctionnait mal. En effet, au second tour, le taux d’abstention a été considérable, atteignant 86, 11 % dans la circonscription d’Amérique du Nord et près de 91 % dans celle qui va de l’Italie à Israël.

À mon sens, l’explication ne réside pas simplement dans la volonté de sanctionner une option politique par rapport à une autre. La cause est plus profonde. Il y a incontestablement une désaffection et une défiance généralisées de nos concitoyens envers ceux qui les représentent pour gérer les affaires publiques, ici comme ailleurs. Nous en connaissons tous les raisons, qui excèdent le cadre de notre débat.

Néanmoins, il est évident qu’un mode de représentation juste dans lequel les électeurs ont confiance peut être un important élément pour revivifier la démocratie dans notre pays. Telle était l’ambition initiale de ce texte, auquel le travail parlementaire a permis d’apporter d’utiles modifications. En effet, tout le monde, en particulier les associations représentant nos compatriotes expatriés, s’accordait sur la nécessité de modifier rapidement et en profondeur le système.

Pourtant, la réforme reste marquée par son manque d’ambition et de clarté, notamment dans le redécoupage des circonscriptions. Ce sont, me semble-t-il, ces raisons qui peuvent expliquer la situation de blocage dans laquelle nous nous sommes trouvés.

Promouvoir une démocratie de proximité, rapprocher les élus de leurs électeurs, conforter leur légitimité en renforçant leur représentativité par l’élargissement du collège électoral des sénateurs, établir des liens plus étroits entre les Français de l’étranger et la communauté nationale… autant d’objectifs auxquels le texte qui nous vient de l’Assemblée nationale répond pour l’essentiel. Il en va de même pour la réelle transformation de l’Assemblée des Français de l’étranger, dont l’indépendance à l’égard des pouvoirs publics a été renforcée et dont les compétences d’expertise ont été reconnues et clarifiées.

Cependant, je regrette toujours que la réforme ne soit pas tout à fait à la hauteur des problèmes à résoudre.

Au préalable, je voudrais redire que la disposition de la révision constitutionnelle du mois de juin 2008 créant de nouveaux députés chargés de représenter spécifiquement nos compatriotes expatriés modifiait l’équilibre et la cohérence du système, en superposant différents niveaux de représentation.

Au nom de quel principe républicain était-il justifié d’accorder ainsi une représentation supplémentaire à une catégorie spécifique de citoyens en leur réservant des députés ? La question reste posée.

En outre, le nombre de députés n’ayant pas augmenté, la mesure a eu pour conséquence d’affaiblir la représentation des Français sur le territoire national.

Pourquoi avoir voulu à ce prix créer un nouveau niveau de représentation ? À la lumière des résultats électoraux récents, je reste convaincue que la vie démocratique n’en a aucunement été améliorée…

C’est en grande partie ce déséquilibre néfaste qui a accentué la nécessité de modifier le mode de représentation dont nous discutons.

Mais j’en viens au texte à proprement parler.

La création des conseils consulaires et l’élection de leurs membres au suffrage universel direct à la proportionnelle vont naturellement dans le bon sens ; vous connaissez notre attachement à ce mode de scrutin. Les pouvoirs de ces conseils devraient être plus étendus. Et, pour assurer un meilleur contrôle démocratique et faire en sorte que les électeurs puissent se sentir concernés, l’avis des conseillers dans la procédure d’élaboration des budgets aurait gagné à ne pas être simplement consultatif.

Il faut souligner tous les inconvénients de ce qui prévalait en matière de mode de scrutin et de périmètre des circonscriptions. Le collège électoral était réduit à la portion congrue et les écarts démographiques étaient intolérables, comme l’avait relevé avec force la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique.

Mais la réforme proposée est très limitée sur ce point, donnant l’impression d’être encore inachevée. Pour véritablement rapprocher les électeurs de leurs élus, il aurait été nécessaire d’en augmenter le nombre dans des proportions beaucoup plus importantes.

Je regrette également que la réforme soit incomplète sur l’élargissement du collège électoral des sénateurs.

De son côté, l’opposition sénatoriale a voulu y voir une manœuvre politicienne pour conserver, paraît-il, le Sénat à gauche… (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.) Nos 12 collègues ont été élus par moins de 200 grands électeurs ; 26 ont suffi à élire une sénatrice ou un sénateur. Dans ces conditions, on comprend mieux les raisons d’une telle polémique, qui masque mal la volonté de ne pas toucher à un système dans lequel 8 des 12 sénateurs représentant les Français de l’étranger sont… UMP !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion