Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi qui vous est aujourd’hui soumis vient compléter la loi autorisant la ratification du protocole additionnel à l’accord entre la France, Euratom et l’Agence internationale de l’énergie atomique, l’AIEA, pour l’application de garanties en France, signé à Vienne le 22 septembre 1998.
Ce texte a pour objectif de rendre opposables aux personnes publiques ou privées concernées les obligations du protocole additionnel et d’instaurer un régime de sanctions pénales en cas de non-respect de ces obligations.
Au sein du régime de garanties de l’AIEA, le protocole additionnel, dont le modèle a été adopté en 1997 à l’issue d’une réflexion lancée en 1991 après la découverte, en Irak, du programme nucléaire militaire clandestin, vient renforcer l’efficacité des accords de garanties existants. Il vise à accroître la capacité de cette agence à détecter des activités nucléaires clandestines dans les États non dotés de l’arme nucléaire, les ENDAN.
Il permet à l’AIEA d’obtenir de la part des États des informations supplémentaires, notamment sur les activités de ces derniers dans le domaine minier, le développement du cycle du combustible nucléaire et l’acquisition de certains équipements pouvant constituer des indices quant à la mise en place d’un programme nucléaire militaire. Il permet également de mener des vérifications plus étendues sur le territoire des États concernés via un dispositif d’accès « complémentaire ».
Conçu à l’origine pour les États non dotés de l’arme nucléaire, le modèle de protocole additionnel adopté en 1997 a également servi de base pour la négociation de protocoles additionnels spécifiques aux États dotés de l’arme nucléaire.
La France, déjà signataire du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, le TNP, et d’un accord de garanties avec l’AIEA et Euratom en 1978, a signé un protocole additionnel à ce dernier le 22 septembre 1998. Elle a ratifié cet instrument - entré en vigueur le 30 avril 2004 - après autorisation de l’Assemblée nationale et du Sénat par la loi n° 2003-376 du 24 avril 2003.
Cet engagement de la France dans le cadre du protocole additionnel témoigne du soutien politique et technique constant de notre pays aux efforts de renforcement des garanties, en contribuant notamment à l’universalisation du protocole additionnel et à faire en sorte que la conjonction d’un accord de garanties généralisées et d’un protocole additionnel devienne le standard de la vérification pour tous les États non dotés de l’arme nucléaire. La France a souhaité accompagner cette démarche internationale de promotion du protocole additionnel.
Enfin, l’adoption par notre pays de cet instrument permet aussi, à un niveau plus technique, d’accroître la capacité de l’AIEA à détecter des activités nucléaires clandestines dans les ENDAN.
En effet, en signant et en ratifiant le protocole additionnel, la France a pris deux séries d’engagement.
En premier lieu, elle fournit une large gamme d’informations supplémentaires portant sur les activités menées par des personnes publiques ou privées en coopération avec des ENDAN concernant tous les aspects du cycle du combustible nucléaire, ainsi que sur les exportations de certains équipements et de matières non nucléaires vers de tels États.
En second lieu, elle accorde un droit d’accès plus étendu aux inspecteurs de l’AIEA. Il s’agit d’un droit d’accès dit « complémentaire » à des emplacements indiqués par la France, afin de résoudre une question relative à l’exactitude et/ou l’exhaustivité des informations fournies au titre du protocole ou pour résoudre certaines contradictions concernant ces informations.
De même, l’AIEA peut avoir accès à d’autres emplacements, afin de prélever des échantillons pour recueillir d’éventuels indices quant à des activités nucléaires clandestines menées par des États non dotés de l’arme nucléaire ou avec eux.
Il convient de noter que cet accès peut, à la demande de la France, être réglementé pour empêcher la diffusion d’informations sensibles du point de vue de la prolifération, respecter les prescriptions de sécurité ou de protection physique ou protéger des informations sensibles du point de vue commercial.
Le projet de loi d’application du protocole additionnel aujourd’hui soumis à votre approbation, mesdames, messieurs les sénateurs, est nécessaire pour rendre opposables aux personnes publiques ou privées concernées les obligations de cet instrument international et instaurer un régime de sanctions pénales en cas de non-respect.
Plus précisément, ce projet de loi d’application définit l’obligation pesant sur les personnes physiques ou morales de transmettre des informations à l’autorité administrative compétente, ainsi que la nature des informations à transmettre. Il comporte également des dispositions visant à organiser le déroulement des vérifications internationales en France.
Enfin, il donne aux autorités françaises les moyens juridiques adaptés pour résoudre les difficultés éventuelles de mise en œuvre du protocole additionnel : des sanctions pénales sont prévues en cas de défaut de déclaration, par les exploitants, des renseignements demandés ou en cas de refus opposé par toute personne à la venue des inspecteurs chargés d’effectuer des contrôles internationaux.
L’adoption de ce projet de loi permettra la finalisation du dispositif légal national visant à aider l’AIEA à détecter des activités nucléaires clandestines dans un ENDAN et, par conséquent, contribuera au renforcement du régime international de lutte contre la prolifération des armes nucléaires.
Le Gouvernement a déposé quatre amendements au texte adopté par la commission des affaires étrangères, le 4 juin dernier.
L’article 11 prévoit que le résultat des opérations de vérification est consigné dans un procès-verbal. Or il n’est pas possible, pour des raisons juridiques et pratiques, de prévoir la consignation des résultats des opérations à l’issue de la vérification. Les résultats des accès complémentaires sont élaborés non pas par le chef de l’équipe d’accompagnement, mais par l’AIEA elle-même, dont c’est la responsabilité. Par ailleurs, ils sont connus dans certains cas, non pas directement après la vérification, mais plusieurs jours après, notamment lorsque des analyses en laboratoire sont nécessaires.
Il est, en revanche, souhaitable d’assurer une traçabilité des opérations effectuées par l’AIEA : tel est l’objet du document spécifique qui sera remis à l’exploitant.
En outre, nous vous proposerons de supprimer, à l’article 12, certaines dispositions superflues, car elles relèvent du droit commun ou sont de nature réglementaire.
Nous souhaitons également modifier le champ d’application de cet article, afin de prendre en compte tous les cas d’opposition possibles à un contrôle réalisé par un inspecteur international.
De plus, nous vous proposerons d’amender l’article 14, afin de ne pas faire peser sur le chef d’équipe d’accompagnement une responsabilité en matière de sécurité, de sûreté nucléaire et de radioprotection lors des accès complémentaires, qui doit rester du seul ressort de l’exploitant. En effet, seul ce dernier connaît de manière précise son installation et tous les risques inhérents, ainsi que les prescriptions applicables. Cette responsabilité de plein droit découle notamment de la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire.
Concernant les sanctions prévues à l’article 20 en cas d’obstacle à l’accomplissement d’un contrôle réalisé par un inspecteur international, nous souhaitons ramener la peine d’emprisonnement maximale de cinq ans à deux ans et supprimer le principe d’une peine plancher.
En effet, les peines minimales n’existent plus dans notre code pénal depuis l’entrée en vigueur du nouveau code pénal en 1994.
En outre, avec une peine maximale de deux ans, cet amendement tend à maintenir une cohérence avec la peine d’emprisonnement de deux ans prévue en cas d’entrave à l’exercice du contrôle national des matières et installations nucléaires et à rester en phase avec les peines prévues par nos principaux partenaires européens : deux ans au Royaume-Uni, six mois en Suède, un mois en Belgique et aucune peine en Allemagne et en Slovaquie notamment. Enfin, cet amendement vise à fixer à 200 000 euros le montant maximum de l’amende encourue.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu’appelle le projet de loi portant application du protocole additionnel aujourd’hui soumis à votre approbation. §