Intervention de Jean-Claude Requier

Réunion du 2 juillet 2013 à 14h30
Convention ospar pour la protection du milieu marin de l'atlantique du nord-est — Adoption d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la lutte contre le réchauffement climatique, et donc contre les émissions de CO2, est et doit demeurer une priorité nationale et internationale. Personne ici, je crois, ne dira le contraire.

C’est pourquoi, en complément du développement des énergies non carbonées et des efforts en matière d’efficacité énergétique, les techniques de captage et de stockage du dioxyde de carbone peuvent jouer un rôle important et ne doivent pas être négligées.

Aussi, dans le prolongement des accords internationaux conclus dans ce domaine, et en cohérence avec eux, des initiatives visant à soutenir la filière de captage et de stockage de CO2 ont vu le jour au niveau européen et en France.

La convention OSPAR, pour Oslo Paris – il m’a fallu du temps pour résoudre cette énigme ! §–, dont la France est signataire, avec quinze pays européens, a pour but de protéger le milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est.

Ratifiée le 22 septembre 1992 et entrée en vigueur le 25 mars 1998, elle a été l’objet d’une adaptation progressive visant à prendre en compte les nouveaux enjeux de la lutte pour la protection de l’environnement.

La commission OSPAR a souhaité rendre possible l’enfouissement des flux de CO2 d’origine anthropique dans les importantes capacités qu’offrent les sous-sols de l’Atlantique du Nord-Est. Les modifications apportées au texte initial, et adoptées par consensus par la commission OSPAR, autorisent donc leur stockage sûr et permanent dans les structures géologiques du sous-sol marin.

C’est sur les deux amendements relatifs aux annexes II et III de la convention OSPAR que nous sommes amenés à nous prononcer aujourd’hui.

Il s’agit d’une avancée importante, qui offre une solution durable aux problèmes de stockage des gaz à effet de serre. En effet, les études menées par le gouvernement écossais et des industriels norvégiens font état de très larges capacités de stockage, permettant d’accueillir les émissions de CO2 sur plusieurs décennies. En Europe, les projets Snøhvit et Sleipner sont déjà opérationnels dans la mer du Nord et permettent de stocker annuellement environ une mégatonne de CO2.

À l’heure actuelle, la France ne fait pas partie des pays disposant des ressources de stockage les plus importantes et accessibles. Elle ne sera donc probablement pas la première bénéficiaire des retombées de ces projets. Pour autant, les enjeux économiques n’en sont pas moins importants. Car nombre d’entreprises françaises sont considérées comme des partenaires incontournables dans le domaine de la fabrication des procédés de captage du CO2 ou de l’expertise géologique. Elles ne doivent pas être oubliées.

Par ailleurs, au regard des considérations écologiques d’acidification des océans en cas de fuite, le projet de loi n’offre pas un « chèque en blanc » aux industriels. Il prévoit des garde-fous : toute autorisation d’injection s’accompagne d’un programme de surveillance mis en place par l’opérateur et contrôlé par une autorité administrative indépendante. Le stockage doit préalablement faire l’objet d’un permis pour une formation géologique précise et pour une qualité de flux de CO2 clairement identifiée. Cette qualité doit répondre à la contrainte réglementaire selon laquelle le flux doit être majoritairement composé de dioxyde de carbone : aucun déchet, ni aucune autre matière ne peut y être ajouté en vue de son élimination. Ce texte est donc créateur d’un cadre juridique strict et protecteur en matière de stockage offshore du CO2.

Néanmoins, il faut le reconnaître, le projet de loi ouvre une possibilité supplémentaire de stockage qui demeure peu intéressante, économiquement parlant, à l’heure actuelle. Malgré des coûts difficilement évaluables, le surcoût d’une chaîne complètement offshore serait, selon une étude menée par la Zero Emissions Platform, de l’ordre de quarante et un euros par tonne de CO2, quand l’émission d’une tonne se facture environ cinq euros sur le marché du carbone. Le différentiel est important. Cependant, tout laisse à penser que le prix de la tonne de CO2 sur le marché augmentera dans les années à venir. §On va donc ouvrir les possibilités de stockage sous-marin, permettant de créer un cadre juridique stable, ce qui est nécessaire pour engager les projets de recherche et développement, bref pour préparer l’avenir, anticiper et rester compétitifs dans le futur.

Dans ces conditions, sortons de l’orthodoxie, qui nous paralyse, nous tétanise et, surtout, nous fait prendre un retard considérable que nous paierons – cher, très cher – le moment venu.

Mes chers collègues, nos sous-sols offrent des solutions énergétiques nombreuses, qui – il ne s’agit évidemment pas de nier les risques que peuvent présenter certaines techniques – méritent de faire l’objet d’un débat dépassionné concernant leur utilisation, a fortiori si l’indépendance énergétique demeure un enjeu stratégique pour notre pays.

C’est bien dans une telle perspective que se situe la question présente du traitement des gaz à effet de serre. C’est pourquoi les membres du RDSE apporteront leur soutien au projet de loi. §

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