Intervention de Christiane Taubira

Réunion du 4 juillet 2013 à 9h30
Attributions du garde des sceaux et des magistrats du ministère public — Article 2

Christiane Taubira, garde des sceaux :

J’essaierai d’être brève, mais claire.

Madame Cukierman, les rapports particuliers sont nécessaires, d’autant plus que ce projet de loi a pour objet de reconnaître la responsabilité des procureurs généraux dans le ressort de leur cour d’appel et des procureurs de la République dans leur parquet. Le garde des sceaux restant responsable tant de la politique pénale que du fonctionnement du service public de la justice, il faut qu’il soit informé, ne serait-ce que pour prendre un certain nombre de décisions utiles au bon fonctionnement des juridictions.

Les rapports particuliers ne peuvent pas être versés au dossier de la procédure, pour la simple raison qu’ils ne sont pas liés à la procédure. En général, ils interviennent même après.

Par exemple, lorsque le Conseil constitutionnel a abrogé les dispositions législatives relatives au harcèlement sexuel, j’ai interrogé les parquets généraux pour qu’ils m’indiquent comment ils avaient requalifié les faits, mais je ne me suis pas immiscée dans les procédures en essayant d’orienter les réquisitions. Concrètement, les parquets avaient enregistré un certain volume de plaintes et la décision du Conseil constitutionnel provoquait la suppression de l’incrimination : une circulaire a demandé, dans un premier temps, d’envisager une requalification des faits afin d’éviter l’abandon pur et simple des poursuites, puis les parquets ont été invités à expliquer combien de requalifications étaient intervenues et sur quelles bases.

Ce type de rapport n’a donc pas à figurer au dossier, puisqu’il ne représente aucun intérêt pour la procédure. En revanche, ces rapports particuliers sont nécessaires à l’information du garde des sceaux : dans le cas que j’ai cité, ils m’ont permis de renseigner la représentation nationale et d’ajuster les dispositions du projet de loi créant la nouvelle incrimination. Dans la circulaire d’application que j’ai diffusée après l’adoption de la nouvelle loi, j’ai pu mettre en garde les parquets contre le risque de sous-qualification, notamment afin d’éviter que le viol ne soit requalifié en tentative d’agression sexuelle ou en agression sexuelle.

Voilà à quoi servent ces rapports particuliers !

De même, pour organiser le procès des prothèses mammaires PIP, à Marseille, nous avons dû prendre un certain nombre de dispositions urgentes et coûteuses, du fait du nombre des victimes, qui est de surcroît passé de trois mille à six mille. Il m’a fallu réunir des financements afin de trouver un nouvel espace pour accueillir l’audience.

Les rapports particuliers sont donc indispensables pour le bon fonctionnement du service public de la justice et je vous demande donc de retirer vos amendements, madame la sénatrice.

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