Intervention de Francis Delattre

Réunion du 4 juillet 2013 à 15h00
Règlement du budget et approbation des comptes de l'année 2012 — Rejet d'un projet de loi en procédure accélérée

Photo de Francis DelattreFrancis Delattre :

Dès juillet 2012, vous avez supprimé d’un trait de plume le dispositif fiscal de « TVA sociale », qui aurait pourtant permis de transférer, dès le mois d’octobre dernier, 13 milliards d’euros de charges sociales vers la fiscalité et de doper ainsi la compétitivité des entreprises, puis vous découvrez, à l’automne, le rapport Gallois, qui vous alerte sur ce sujet devenu brûlant.

À grands sons de trompe, vous inventez le CICE, pour remplacer ce que vous avez supprimé, mais en ratant la cible, l’industrie. La mise en place de ce dispositif qui s’apparente à une usine à gaz a exigé la rédaction d’une instruction fiscale de quarante et une pages…

Nous étions d’accord sur le principe d’un choc de compétitivité, pour un montant de 20 milliards d’euros par an. Aujourd’hui, nous en sommes bien loin. De questionnement en questionnement sur la réalité du financement et sur son montant, la Cour des comptes évoque un coût de 7 milliards d’euros pour 2014. Qu’en pensez-vous, monsieur le ministre ?

Dans ce débat, au-delà des ratios macroéconomiques, il n’est pas inutile d’observer les résultats, les conséquences concrètes de la forte pression fiscale exercée d’abord sur les particuliers, puis sur les entreprises.

La forte pression fiscale subie par les ménages est dans une large mesure à l’origine d’un net fléchissement de la consommation. Les dépenses de consommation des ménages ont ainsi reculé de 0, 2 % en 2012, après être restées stables en 2011. Pour les seuls produits manufacturés, les dépenses ont diminué de 0, 8 % en 2012, après une augmentation de 0, 9 % en 2011 ; c’est la plus forte baisse annuelle depuis 1993.

La pression fiscale a également provoqué une perte historique de pouvoir d’achat, ayant pour conséquence une diminution de 5, 7 milliards d’euros des recettes de TVA en 2012.

La pression fiscale sur les entreprises a entraîné, quant à elle, un recul des investissements et des créations d’emplois. Nous avons assisté à une diminution de 13 % des implantations d’entreprises en France en 2012 par rapport à 2011, alors que le recul n’a été que de 3 % en moyenne en Europe. La baisse s’élève à 25 % pour les implantations industrielles.

La pression fiscale exercée sur les entreprises a également eu pour effet une baisse de 20 % du nombre d’emplois créés et de 9, 6 % du montant des investissements des business angels en 2012. Sur l’ensemble de cette même année, le taux de marge des entreprises s’établit, en moyenne, à 27, 9 %, ce qui marque un étiage depuis 1985, contre 28, 5 % en 2011. En conséquence, les recettes de l’impôt sur les bénéfices des sociétés ont baissé de 3, 6 milliards d’euros en 2012.

Ce repli de la consommation et des investissements a des effets récessifs sur l’économie française. Il démontre que l’outil fiscal ne peut suffire à redresser les comptes du pays. Ce redressement exige des réformes structurelles courageuses.

Là réside votre grave erreur en matière de stratégie budgétaire : vous avez, d’abord, presque tout misé sur l’impôt, au point d’arriver à un niveau de prélèvements tel que le rendement fiscal diminue désormais, ce qu’illustre parfaitement la célèbre courbe de Laffer, dont l’enseignement est que trop d’impôts tue l’impôt.

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