La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.
La séance est reprise.
L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je rappelle que l’auteur de la question de même que la ou le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente. Je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir vous en tenir à cette règle.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, en ce 4 juillet, jour de la Déclaration d’indépendance des États-Unis, et de leur fête nationale, nous saluons cette grande nation alliée et amie.
Mais nous pouvons, et devons, aussi lui poser des questions sur les écoutes téléphoniques et la surveillance des courriels qui viennent d’être révélées et qui visaient, entre autres, la France et l’Allemagne, pourtant très proches des États-Unis, ainsi, plus curieusement, que l’Union européenne et sa Commission, qui ne pensaient sans doute pas mériter tant d’attention de la part de ce pays.
Découvrir que l’un de vos alliés vous surveille secrètement, ce qui est la marque d’une défiance certaine, c’est évidemment une surprise désagréable. Néanmoins, faut-il s’en étonner ? La pratique n’est pas nouvelle. Comme le disait un ancien premier ministre anglais : « Une nation n’a pas d’alliés éternels, seulement des intérêts éternels. »
Il n’y a pas un bon espionnage et un mauvais : un bon quand on écoute les djihadistes au Sahel, et un mauvais quand on fait de même au siège de l’Union européenne…
Les États-Unis, derrière des soucis légitimes de sécurité, recherchent également des renseignements économiques sur les entreprises françaises et européennes, sur leur positionnement, ainsi que sur les actions que l’Union européenne et la Commission pourraient mener contre les grandes entreprises américaines, en particulier celles du web.
Le gouvernement français a demandé des explications au gouvernement américain. Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, si celui-ci les lui a fournies ? Si tel est le cas, quel sérieux peut-on leur accorder ?
Par ailleurs, qu’en est-il du démarrage des négociations transatlantiques ? La France, comme beaucoup d’autres, notamment le Parlement européen, a suggéré le report des négociations, qui devaient débuter le 8 juillet, constatant l’absence d’un climat de confiance propice à l’ouverture de discussions de cette nature. On lit pourtant dans la presse que la Commission européenne serait d’un avis différent. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?
Enfin, comment mieux défendre nos intérêts, ceux de la France prise isolément et ceux de la France en tant que membre de l’Union européenne, en protégeant nos données personnelles et en s’assurant que nos espaces de stockage, ce que l’on appelle le cloud, soient situés en Europe et contrôlés par elle, et non laissés entre les mains des États-Unis ?
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur les travées du RDSE.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.
Monsieur le sénateur, les récentes révélations de M. Edward Snowden sur ces pratiques d’espionnage posent en effet deux questions distinctes.
La première concerne la lutte contre le terrorisme et la protection contre les menaces qui pèsent sur notre sécurité. Dans ce cas, chacun le conçoit, le renseignement est nécessaire. Néanmoins, la plus grande vigilance s’impose pour que les droits individuels soient préservés et que la protection des libertés publiques soit garantie.
En revanche, s’agissant de la seconde question, relative aux représentations diplomatiques européennes et françaises, rien, absolument rien ne justifie, sur un plan sécuritaire, ces pratiques de renseignement et d’espionnage.
Le Président de la République et Laurent Fabius, qui sont tous deux à Tunis cet après-midi, ont pris une position très claire sur ce dossier : ces pratiques, si elles étaient confirmées, sont inacceptables, et nous ne les accepterons pas. On n’espionne pas ses alliés !
Laurent Fabius s’est d’ailleurs entretenu dès lundi dernier avec son homologue américain, John Kerry, afin de lui demander de fournir les éléments d’explication nécessaires dans les délais les plus rapides et, si la réalité de ces agissements était avérée, d’y mettre un terme immédiatement.
M. Kerry s’y est engagé. Nous veillerons, en lien avec notre ambassade à Washington, à ce que tous les éléments nous soient transmis ; nous les mettrons, bien entendu, à votre disposition.
Pour ce qui concerne l’Union européenne, nous considérons que la réponse doit être européenne.
Cette affaire montre la nécessité d’une extrême vigilance sur la protection des données personnelles.
Vous le savez, un règlement et une directive relatifs à la protection de ces données, et notamment aux fichiers souverains, est en cours de discussion. Compte tenu de l’actualité, nous demanderons à la Commission européenne d’être particulièrement intransigeante sur la protection des libertés des citoyens français et européens, comme je l’ai rappelé à Viviane Reding, que j’ai rencontrée lundi matin, à Strasbourg.
Vous m’avez également interrogé, monsieur le sénateur, sur les conséquences de cette affaire sur l’accord transatlantique, dont les négociations doivent commencer prochainement.
Cet accord, tout aussi important pour nous que pour les États-Unis, prendra du temps. Il exige également de la confiance entre nos deux pays, ainsi que l’a souligné le Président de la République.
L’ouverture de ces négociations doit donc, selon nous, s’accompagner simultanément de discussions sur les activités des services de renseignement américains dans certains pays européens. Aussi, nous mettrons en place un système parallèle entre la négociation et le contrôle de nos discussions avec les États-Unis.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur les travées du RDSE.
Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Jeudi dernier, la Commission nationale consultative des droits de l’homme a rendu un avis important sur la définition et la place de la notion d’« identité de genre » en droit français, ainsi que sur les conditions de modification de la mention du sexe à l’état civil.
Cet avis a été unanimement salué par les associations LGBT, en ce qu’il se place sur le terrain des droits humains et qu’il dénonce l’atteinte portée par la législation française à la dignité des personnes transidentitaires et à leur droit à la protection de la vie privée.
Je me félicite, tout d’abord, que la CNCDH préconise la substitution de la notion d’« identité de genre » à celle d’« identité sexuelle ». Tel était d’ailleurs l’objet d’amendements que j’avais déposés, en février dernier, lors de l’examen d’une proposition de loi relative aux délais de prescription.
Les termes d’« identité de genre » permettent de recouvrir toutes les réalités et d’octroyer une protection plus large. Avec l’introduction de cette notion, notre législation serait également en conformité avec les exigences européennes et internationales.
Madame la garde des sceaux, vous savez l’intérêt que je porte aux questions d’état civil. Je suis notamment très sensible aux difficultés de nos compatriotes nés hors de France à obtenir la transcription de leurs actes auprès de certains postes consulaires, mais aussi à celles des enfants français nés par GPA à l’étranger. J’ai d’ailleurs récemment évoqué ces situations avec vous.
Le groupe écologiste salue donc la démédicalisation complète de la procédure de changement d’état civil, recommandée par cet avis.
Entièrement soumise au droit prétorien, la procédure actuelle conduit à l’inégalité et à l’insécurité juridique et crée des situations discriminatoires. Contraintes à un long parcours médical et à la stérilisation forcée, les personnes trans sont atteintes dans leur chair et dans leur dignité.
Enfin, si la déjudiciarisation partielle constitue un net progrès au regard du droit actuel, elle peut toutefois paraître insuffisamment ambitieuse.
Je rappelle que le groupe EELV s’est prononcé, dès le mois de novembre 2012, pour que « le genre d’une personne ne [puisse] dépendre de l’appréciation d’un juge ». Dans un communiqué du 28 juin dernier, l’Inter-LGBT et Id-Trans affirment également vouloir continuer à « porter dans le débat public une solution inspirée de la loi argentine », c'est-à-dire une déjudiciarisation totale.
Madame la garde des sceaux, comment le Gouvernement se positionne-t-il face à ces trois recommandations de la CNCDH ? Engagera-t-il une réforme ou projette-t-il de soutenir des initiatives parlementaires sur ce sujet ?
Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.
Madame la sénatrice, vous m’interrogez sur l’avis que la Commission nationale consultative des droits de l'homme a remis le 28 juin dernier, à la suite de la saisine que ma collègue ministre des droits des femmes et moi-même avions décidée conjointement le 8 janvier dernier. Dans cet avis, la CNCDH propose essentiellement une démédicalisation complète de la procédure de changement de sexe à l'état civil et une déjudiciarisation partielle.
Il faut rappeler que le droit actuel repose sur l'article 99 du code civil relatif à la rectification des actes d'état civil et nécessite l'intervention du juge. Cette procédure est réputée longue et stigmatisante pour les personnes transgenres. Ceux qui la contestent reprochent surtout qu’il ne soit fait droit à la demande de changement d'état civil émanant de ces personnes qu'à partir du moment où les traitements hormonaux ont bien produit les effets physiologiques et physiques définitifs qu’ils sont censés avoir et que le changement de sexe est devenu irréversible.
Par ailleurs, deux propositions émanent des travaux de votre assemblée : soit une procédure administrative reposant sur l'officier d'état civil, mais menée sous le contrôle du procureur de la République ; soit une procédure juridictionnelle simplifiée, avec intervention d’un juge du siège.
Il faut tout de même tenir compte du fait que le sujet est lourd, qu'il fait référence à notre droit, certes, mais aussi à des principes, notamment le principe d'indisponibilité, ainsi qu’à des représentations qui sont celles de notre société. Nous devons donc traiter cette question avec précaution.
Il me paraît prématuré d'envisager le retrait du juge de la procédure, …
… y compris au nom de la protection de la personne transgenre. En outre, il est important que le juge puisse intervenir, parce que l'état des personnes inclut la question de la détermination du sexe.
Madame la sénatrice, vous savez que se tiendra très bientôt à la Chancellerie une réunion rassemblant des sénatrices, dont vous-même, des conseillères de mon cabinet et du cabinet de la ministre des droits de des femmes, ainsi que la vice-présidente de l'Assemblée nationale, Mme Laurence Dumont. Ce sera l’occasion de réfléchir à la situation des personnes transgenres en général, sans oublier celles - une vingtaine sur l'ensemble du territoire - qui se trouvent dans nos établissements pénitentiaires.
Il s'agit d'appréhender ce sujet avec précaution, en tenant compte de la souffrance de ces personnes et en sachant bien quelles transformations nous imprimons à la société.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé du budget.
Monsieur le ministre, après une année 2012 marquée par une hausse des impôts et des taxes
Oui ! sur les travées de l'UMP .
Les Barroso, Draghi, Merkel et Juncker, relayés par d'autres en France, imposent aux peuples sacrifices et reculs sociaux, sans améliorer – loin de là ! – la situation. (Vous le savez, l'austérité étouffe toute ambition de progrès et de développement.
Espagne, Grèce, Portugal, Italie : entre instabilité politique, récession économique, hausse du chômage en flèche, tous ces pays font l’amère expérience de l’inefficacité des politiques d’austérité dont ils sont même la démonstration.
L’Union européenne compte aujourd’hui 26, 5 millions de chômeurs et notre pays plus de 3, 3 millions ! Pourtant, en France, l’emploi public va être réduit, le traitement des fonctionnaires va de nouveau être gelé, des coupes claires vont avoir lieu dans maints ministères.
Pour quel résultat ?
Ces choix créent le trouble parmi toutes celles et tous ceux qui ont placé leurs espoirs dans le changement politique de mai 2012.
Ce trouble n'épargne personne, des citoyens attachés aux valeurs de progrès, qui, mes chers collègues, sont encore prêts à se rassembler autour d'un projet alternatif, jusqu'à certains membres de l'équipe gouvernementale !
Le budget de la France et celui de la sécurité sociale ne souffrent pas d’un surcroît de dépenses publiques.
Selon le rapport Queyranne, 110 milliards d’euros – deux fois le produit de l’impôt sur les sociétés – sont dépensés chaque année en « aides aux entreprises ».
Pour quel résultat ?
Selon la Cour des comptes, 106 milliards d’euros de bénéfices des sociétés échappent à l’impôt et aux cotisations sociales.
Pour quel résultat ?
Selon la commission d’enquête du Sénat sur l’évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales, 60 à 80 milliards d’euros échappent à l’impôt et aux cotisations sociales.
Monsieur le ministre, ma question est simple : au lieu de réduire les dépenses publiques au point de priver collectivités locales et services publics des moyens de leur action au bénéfice des populations, quand allez-vous, par une réforme fiscale audacieuse
Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP
, par une lutte déterminée contre la fraude fiscale et sociale, par la relance de l'investissement public, quand allez-vous rompre avec la logique d’austérité du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance ?
Applaudissements sur les travées du groupe CRC . – Très bien ! sur certaines travées de l’UMP.
Monsieur le sénateur, vous nous interrogez sur la nécessité d'engager une lutte résolue contre la fraude fiscale et de mettre en œuvre une politique nous permettant de sortir de l'austérité.
En matière de lutte contre la fraude fiscale, vous n'êtes pas sans savoir que nous engageons ici, au Parlement, un travail avec l'ensemble des sénateurs – en particulier avec des sénateurs de votre groupe, je pense à Éric Bocquet – pour renforcer l'arsenal des dispositions permettant de lutter efficacement contre la fraude fiscale. Il s'agira de moyens supplémentaires d'enquête fiscale confiés à la police judiciaire, du durcissement des peines à l'encontre des fraudeurs, de la création d'un parquet financier spécialisé qui œuvrera en articulation avec l'administration de Bercy, ou encore de la mise en place d’un dispositif incitatif à destination des fraudeurs, afin qu’ils se mettent en conformité avec le droit.
Cette circulaire et le durcissement de la législation commencent à porter leurs fruits, puisque certains citoyens qui détiennent des comptes à l'étranger viennent régulariser leur situation.
Monsieur le sénateur, vous avez raison, il est très important de lutter contre la fraude fiscale. Les organisations syndicales de Bercy estiment à 70 milliards d'euros le volume de fonds qui échappent à l'impôt et qui font par conséquent peser la charge du redressement de la situation du pays sur ceux des contribuables français qui, eux, s'acquittent de l'impôt.
Nous sommes donc absolument déterminés à lutter contre la fraude fiscale.
Vous avez également évoqué la nécessité de lancer une grande réforme fiscale. Puisque votre assemblée a eu à en débattre, vous n’ignorez pas que nous avons engagé l'année dernière une réforme fiscale de très grande ampleur qui a vocation à se poursuivre.
Dois-je rappeler la mise en place de dispositions destinées à assurer une plus grande progressivité de l'impôt sur le revenu, avec la tranche à 45 % ?
Dois-je rappeler l'alignement de l'impôt sur les sociétés des grands groupes sur celui des PME-PMI, pour inciter ces dernières à investir ?
Dois-je rappeler la réforme de l'impôt de solidarité sur la fortune ?
Dois-je rappeler l'alignement de la fiscalité du capital sur celle du travail ?
Il s'agit là d'un chantier considérable, qui n'est pas achevé et qui se poursuivra devant le Parlement tout au long des années à venir, pour que, à l’issue de ce quinquennat, nous soyons parvenus au terme de la réforme fiscale.
Donc, pas de grand soir fiscal, mais une réforme en continu.
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Je conclurai en vous indiquant, monsieur le sénateur, que, si nous sommes obligés de réaliser des économies, c'est parce que nous avons hérité d’une situation désastreuse.
Exclamations sur les travées de l'UMP.
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Les dépenses publiques ont augmenté, la dette a doublé, les déficits publics structurels sont dans la situation que l'on sait !
Applaudissementssur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Ma question s'adressait initialement à M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie
Sourires sur les travées de l'UMP.
Je regrette d’autant plus vivement son absence que je souhaite évoquer un sujet qu’il connaît particulièrement bien, la gestion des ressources en eau et l'irrigation en agriculture. En effet, il y a tout juste un mois, celui qui était encore député du Gers remettait au Premier ministre un rapport de mission sur la gestion quantitative de l’eau en agriculture ; nous approuvons l’analyse qui est développée dans ce document et partageons pleinement les conclusions de Philippe Martin.
Même si nous connaissons un début d'été pluvieux, nous savons tous que c’est dans un contexte de raréfaction de la ressource qu’il nous faut résoudre d’importants problèmes de déficit structurel. En effet, environ un tiers du territoire national est en situation de déficit quantitatif.
Dans son rapport, Philippe Martin dressait le constat suivant : chaque année, il tombe 500 milliards de mètres cubes d’eau, mais, sur cette quantité, 170 milliards de mètres cubes d’eau sont disponibles et l’irrigation pour l’agriculture en consomme seulement entre 4 et 5 milliards de mètres cubes. Contrairement à une idée reçue, l’irrigation représente peu d’eau et peu de surface, en l’occurrence moins de 6 % des surfaces agricoles.
Aussi les préconisations contenues dans le rapport Martin nous semblent-elles raisonnables. C’est d’ailleurs pour cela qu’elles méritent toute notre attention, celle de la représentation nationale, mais aussi, nous l’espérons, celle du Gouvernement.
Les préconisations contenues dans ce rapport s’articulent autour de trois axes.
Premièrement, il convient de sécuriser l’approvisionnement en eau des agriculteurs qui participent au redressement productif de notre pays.
Deuxièmement, il faut favoriser les consensus locaux en privilégiant des projets territoriaux sans polariser le débat sur les modèles agricoles.
Troisièmement, il importe de stabiliser l’environnement réglementaire en encadrant le droit de recours contre les projets de retenues d’eau et en relevant le seuil à partir duquel les porteurs de projets doivent fournir une étude d’impact.
M. Stéphane Mazars. Si la nécessité de sécuriser et d’adapter la gestion quantitative de l’eau en agriculture n’est plus à démontrer, quelles suites le Gouvernement entend-il donner aux propositions pertinentes contenues dans le rapport du député Philippe Martin, lors de la conférence environnementale du mois de septembre prochain ?
Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC et de l'UMP.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, qui est retenu par des engagements qu'il avait pris antérieurement.
Riressur les travées de l'UMP.
Par nature, l'eau est un bien commun qui peut et doit être à la disposition de tous et dont l'utilisation doit être encadrée. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous qui êtes en phase avec les territoires, vous connaissez l’enjeu : des règles de partage de la ressource sont nécessaires, qui peuvent être élaborées par l'ensemble des acteurs, à la bonne échelle territoriale.
Dans le cadre du chantier de la modernisation de l'action publique, une évaluation de la politique de l'eau a été lancée, avec, pour finalité, de remplir les objectifs fixés par la directive européenne sur l'eau et la loi du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques et, ainsi, d’obtenir un bon état de l'eau d'ici à 2015.
Cette évaluation s'appuie sur un certain nombre de textes. De ce point de vue, monsieur le sénateur, il faut insister sur la continuité des nombreux travaux engagés. Je pense à ceux du député Michel Lesage qui rendra très prochainement un rapport sur l'évaluation globale de la politique de l'eau, afin d'identifier les points de blocage et les retards observés. Je pense également au rapport de Philippe Martin, auquel vous faites référence, qui a mené une mission sur la gestion quantitative de l'eau et sur la définition d'un modèle d'utilisation de l'eau en agriculture, l’irrigation agricole.
Le Gouvernement veut agir en faveur d'une réduction des pollutions diffuses, notamment agricoles, et promouvoir la répartition équilibrée de la ressource en eau pour les usages humains et économiques.
Nous sommes convaincus de la nécessité de construire des projets territorialement partagés, avec l'ensemble des acteurs, de façon à pouvoir satisfaire les besoins humains, environnementaux et économiques liés à l'eau.
Tous les travaux menés actuellement serviront donc à alimenter la démarche globale d’évaluation de la politique de l'eau.
Vous avez souhaité faire de cette problématique un enjeu de la conférence environnementale qui se tiendra en septembre 2013. Ce sera le cas, en particulier, lors d'une table ronde qui sera spécifiquement consacrée à l'eau. Les plans d'action et de modernisation seront lancés dès le mois d’octobre 2013.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Jeudi dernier, la commission « Mobilité 21 », présidée par notre collègue député Philippe Duron, que vous aviez missionné pour réviser le schéma national des infrastructures de transport, a rendu son rapport.
Même si nous ne sommes pas satisfaits des préconisations et des délais de réalisation, je veux saluer les membres et le président de cette commission pour le travail qu’ils ont accompli.
Je me doute que vous allez nous redire qu’il n’était pas possible de financer les soixante-dix projets du SNIT, pour un investissement de 245 milliards d’euros sur vingt-cinq à trente ans, et que vos prédécesseurs, comme d’habitude, avaient menti et commis une erreur…
Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.
Je veux rappeler que l’ambition du SNIT était d’aménager pour le long terme notre pays en dotant d’infrastructures routières, ferroviaires et fluviales des territoires qui en avaient besoin, pour permettre un développement économique harmonieux allant dans le sens de l’égalité des territoires.
Il n’y avait aucune promesse sur les soixante-dix projets, ni erreur, ni mensonge, car un pays comme le nôtre doit se projeter dans l’avenir et donner des perspectives.
Une partie d’ailleurs de ces projets étaient inscrits dans les lois consécutives au Grenelle de l’environnement et avaient été votés à la quasi-unanimité au Sénat.
Ce rapport a le mérite de hiérarchiser et de prioriser les projets, mais il déçoit par son manque d’ambition et d’audace, autant dans la majorité que dans l’opposition.
On est loin de la promesse faite par le candidat Hollande de ré-enchanter le rêve français…
Monsieur le ministre, bien sûr, les finances publiques sont au plus bas ; bien sûr, cela vous oblige à faire des arbitrages ; mais, de grâce, faites-les sur le fonctionnement de l’État, et pas sur les investissements !
Nous sommes dans le renoncement, avec seulement 8 à 10 milliards d’euros de travaux d’ici à 2030 pour financer un nombre réduit de projets, alors même que la relance de la croissance passe forcément par des investissements d’avenir capables de produire de la richesse immédiatement, et surtout durablement, grâce à des financements innovants, et, pourquoi pas, un grand emprunt d’État.
Car il y a la bonne et la mauvaise dette. La mauvaise dette, c’est celle qui consiste à rembourser des dépenses de fonctionnement par l’emprunt. La bonne dette, c’est celle qui est investie dans un outil productif. Comme une entreprise, un pays qui n’investit plus, c’est un pays qui s’appauvrit et qui se meurt.
Monsieur le ministre, quel est l’avenir de ce rapport ?
Pour certains projets LGV comme l’interconnexion sud de Paris ou le Paris – Orléans - Clermont-Ferrand - Lyon, le POCL, le débat public a déjà eu lieu ; les études sont en cours et les populations attendent.
Allez-vous poursuivre les études ? Votre gouvernement est-il prêt à consacrer des moyens supplémentaires à un plan de relance des infrastructures ?
Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Jean Arthuis applaudit également.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Je vous remercie, monsieur Pointereau, de faire à la fois les questions et les réponses !
Sourires.
Vous avez vous-même souligné le caractère irréaliste et irréalisable du schéma national des infrastructures de transport tel qu'il a été présenté.
Cette critique n’émane pas seulement de la majorité ; elle est assez largement partagée, y compris par certains de mes prédécesseurs.
Le schéma national des infrastructures de transport s’apparente en effet à une liste non hiérarchisée et non financée de soixante-dix projets, dont certains n'ont même aucune réalité, puisqu’ils en sont encore au stade des études de faisabilité.
C’est pourquoi nous voyons se tourner vers nous certains territoires qui ont cru qu’ils pourraient obtenir des infrastructures, comme cela avait été annoncé dans le SNIT.
Plus grave, certains projets, dont le coût avoisine souvent plusieurs milliards d'euros, ont été lancés en même temps, notamment quatre LGV !
Vous avez passé la commande et nous payons aujourd’hui l'addition !
Aujourd’hui, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, devra acquitter un loyer de 200 millions sur vingt ans, simplement pour les quatre lignes dont je viens de parler.
Puisque vous avez été, monsieur Pointereau, coauteur avec M. Mézard d'un excellent rapport sur le lien entre les politiques territoriales et les infrastructures de transport, qui a été présenté ici même, vous êtes bien placé pour établir un lien avec les différentes attentes.
Pour tous les grands projets d'infrastructures, entre le temps du débat public et la réalisation, vous savez qu’il faut généralement compter un délai de vingt ans.
Or l'engagement du Président de la République, qui correspond aux attentes de la population et des élus, est aussi et surtout de pouvoir répondre aux enjeux des territoires au quotidien, en apportant des solutions à la dégradation continue des systèmes ferroviaire, routier et autoroutier, en mettant en avant la cohésion dans l'investissement et la contractualisation publics et en priorisant les enjeux.
Vous m'interrogez sur ce que nous entendons faire du SNIT. Dès le 9 juillet, c'est-à-dire dans quelques jours, le Premier ministre annoncera un grand plan d'investissements publics, dont l'un des volets concernera précisément les transports. À partir de cette date, un dialogue sera engagé avec les régions pour que nous puissions, dans le cadre d’une co-construction, fixer les orientations, les priorités et la réalisation.
Mais, de toute façon, vous ne manquerez pas de venir me voir au ministère, mesdames, messieurs, j'en suis persuadé.
M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. J'ai bien entendu que le SNIT ne contenait aucune promesse, mais vous auriez peut-être dû être plus raisonnables sur la soutenabilité des investissements publics, là où les déficits étaient plutôt le propre de votre politique !
Applaudissementssur les travées du groupe socialiste ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Après mon collègue Rémy Pointereau, je souhaiterais vous interroger, monsieur le ministre, sur le rapport Duron et le report de la plupart des projets.
Il est vrai que nous vivons une période critique pour les finances publiques, et nous comprenons la volonté du Gouvernement de hiérarchiser les projets, d'autant que, disons-le clairement, le précédent gouvernement n'avait pas encore défini leur mode de financement.
En même temps, je fais partie de ceux – ils sont nombreux ici, sur toutes les travées – qui se battent depuis vingt-cinq ans pour promouvoir des projets de lignes à grande vitesse, en l’occurrence les lignes TGV-Est et TGV Rhin-Rhône pour ce qui me concerne.
Les gouvernements, de droite comme de gauche, se sont succédé. Nous avons connu des avancées, mais aussi des moments difficiles. En tout état de cause, il s'agit de projets au long cours qui ne peuvent voir le jour sans vision.
Dès lors – je le dis sans esprit polémique –, il serait fort dommage de reporter aux calendes grecques un certain nombre de projets stratégiques pour l'activité de nos territoires.
Bien sûr, je comprends que vous vouliez prendre le temps de mieux définir et hiérarchiser ces projets en fonction de vos priorités, mais aussi en fonction de l'état d'avancement et des engagements déjà pris.
En tant qu'élu du Grand Est, j'ai bien entendu à l'esprit la deuxième tranche de la branche Est de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône. Ce projet a été globalement entériné ; il a fait l'objet d'engagements à travers la signature, en janvier 2012, d’un protocole d'intention de financement entre l'État et les collectivités territoriales – je rappelle que celles-ci cofinancent ce projet, comme elles le font d'ailleurs pour la suite du TGV-Est, y compris celles qui ne sont plus desservies.
Plus de 80 millions d'euros ont déjà été dépensés, non seulement pour des études et des acquisitions foncières, mais aussi pour engager les premiers travaux. Des financements européens sont en outre disponibles. Ne pas aller au bout constituerait assurément un gaspillage.
Il est vrai que la politique du « tout TGV » n'est pas réaliste ; d'autres investissements sont nécessaires, notamment pour la rénovation de voies ou la réalisation de nœuds ferroviaires. Toutefois, l'abandon de certains projets fragiliserait notre ancrage européen et pourrait même déplacer le centre de gravité de l'Europe ferroviaire hors de nos frontières.
Je ne reviens pas sur l'aspect économique. Les enjeux pour le BTP, notamment en termes d’emplois non délocalisables, sont importants. Cela ne justifie pas tout, mais, pour des projets reconnus par tous comme étant d'avenir, cet argument ne me semble pas indifférent dans la période actuelle.
Je ne veux toutefois pas m'engager dans la polémique qui a commencé à voir le jour. Comme vous le savez, j'ai cosigné, avec tous mes collègues alsaciens, quel que soit leur bord politique, une lettre au Président de la République.
Plutôt que de nous renvoyer la balle, nous souhaiterions qu'un vrai débat s’engage avec les élus, les forces vives et les porteurs de ce projet - s'il faut pour cela quelques jours de plus, prenons-les ! - afin que vous puissiez in fine rendre les bons arbitrages, sans jeter le bébé avec l'eau du bain.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP. – M. Stéphane Mazars applaudit également.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur Bockel, il me paraît important qu'une partie de votre question ne passe pas inaperçue, dans l'hémicycle et au-delà.
Illustrant d’une certaine manière ma réponse à M. Pointereau, vous venez de confirmer à l'instant que bon nombre des projets contenus dans le SNIT n'étaient pas financés.
Le Gouvernement par ma bouche ne fait que reprendre le constat adopté à l’unanimité par la commission « Mobilité 21 », laquelle était elle-même pluripartite, puisque toutes les sensibilités politiques y étaient représentées.
Ce constat était celui d’une liste d'infrastructures non hiérarchisées, et qui n’avaient pas été pensées en termes d'aménagement du territoire, de complémentarité des réseaux ferroviaire, routier et fluvial, en termes de désenclavement portuaire, d'équilibre et d'impulsion économique susceptibles de donner aux territoires une perspective, et qui en outre ne s’appuyaient pas sur une réflexion partagée avec les territoires.
Au demeurant, ce n’est pas parce que des territoires ont déjà bénéficié d'un certain nombre d’infrastructures que d'autres doivent se résigner à voir, pour des dizaines d'années encore, leur temps de relation avec la capitale, par exemple, rester plus long qu'il y a un siècle.
Nous devons lutter en faveur du désenclavement, pour un équilibre raisonné et raisonnable du territoire.
De ce point de vue, je constate simplement que, pour ce qui concerne votre région, monsieur Bockel, la première phase de la LGV est-européenne a permis, en 2007, d'engager un chantier de 4, 3 milliards d'euros, que la première phase de la branche Est de la LGV Rhin-Rhône constituait pour sa part un chantier de 2, 3 milliards d'euros, et que la deuxième phase - en cours - de la LGV est-européenne représente un chantier de 2 milliards d'euros.
Au regard du total de ces sommes, vous avouerez tout de même que certains territoires pourraient légitimement, et de manière tout à fait républicaine, revendiquer la prise en considération des enjeux qui sont les leurs en termes de mobilité du quotidien, de désenclavement et d’équilibre des territoires.
Comme vous l'avez constaté vous-même, certains enjeux sont liés aux attentes des populations en matière de mobilité urbaine. D'autres projets existent – je recevrai dans quelques jours une délégation de votre région, dont vous ferez vous-même partie –, à travers lesquels nos concitoyens expriment des attentes du quotidien que nous devons nous efforcer de satisfaire.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste – M. Stéphane Mazars applaudit également.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé de l'agroalimentaire.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, les industries agroalimentaires, ou IAA, constituent en France le premier secteur de l’industrie.
Jusqu’à présent, les IAA se sont caractérisées par une certaine robustesse dans un contexte marqué par une décroissance importante de l’industrie française, dont on sait qu’elle a perdu la moitié de ses emplois depuis 1970.
Les choses ont malheureusement évolué négativement pour ce secteur.
La France recule dans les classements mondiaux des pays exportateurs de produits agroalimentaires, et il est vrai que l’agroalimentaire traverse en France une mauvaise passe, ce qui prend un tour dramatique dans les zones à forte production animale. Je pense à la Bretagne, considérée jusqu’alors comme le fer de lance de l’agroalimentaire français.
C’est vrai de la filière « volaille », avec le dépôt de bilan de la société Doux ; c’est vrai de la filière « saumon », avec le dépôt de bilan annoncé de Marine Harvest ; c’est vrai de la filière « légumes », avec la fermeture annoncée de Boutet-Nicolas.
Toutefois, le problème le plus crucial concerne aujourd’hui la filière porcine : si rien n’est entrepris dans les prochains jours, la société Gad, spécialisée dans l’abattage-découpe, va être mise en liquidation, avec, au cœur de l’été, la suppression probable de mille emplois.
La situation est donc des plus inquiétantes, d’autant que plusieurs questions brûlantes minent la bonne compréhension du sujet.
Pourquoi faire plus de mille kilomètres aujourd’hui pour aller abattre des porcs en Allemagne plutôt qu’en France ?
Qu’a-t-on fait depuis dix ans pour mieux réguler les salaires des travailleurs en Europe ?
Pourquoi la filière porcine française est-elle incapable de mieux se structurer ?
Face à ces questions cruciales, je le sais, monsieur le ministre, le Gouvernement a élaboré un plan visant à favoriser une vraie politique de filière et une restructuration aujourd’hui indispensable. Mais permettez-moi ici d’attirer votre attention sur la détresse de plusieurs milliers de travailleurs du secteur agroalimentaire, qui risquent d’être sous peu privés de leur emploi.
Quelles dispositions le Gouvernement envisage-t-il de mettre en œuvre pour répondre à l’angoisse de tous ces salariés et de leur famille ?
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur les travées du RDSE.
Monsieur Marc, comme vous l’avez très bien rappelé, certains pans de l’industrie agroalimentaire traversent une véritable crise.
Vous avez évoqué des entreprises comme Gad, Marine Harvest ou Doux, qui sont aujourd'hui dans une situation de grande difficulté. Pour chacun de ces sites, nous sommes entièrement mobilisés. §Nous avons reçu dans chaque cas les salariés concernés, ainsi que les membres de la direction, afin de trouver les meilleures solutions pour sauvegarder un maximum d’emplois.
Nous sommes parfaitement conscients de l’inquiétude, de l’angoisse, de la détresse des salariés. Notre seule préoccupation est de trouver des solutions à la fois réalistes, concrètes et, surtout, durables.
À cette fin, nous avons pris, avec Stéphane Le Foll, des orientations fortes.
D’abord, il s’agit de relancer la production porcine de notre pays et de redonner de la compétitivité à la filière. Nous voulons en particulier faire de la performance écologique un véritable levier de la performance économique. Nous avons aussi avancé quant à la possibilité, qui sera mise en œuvre très prochainement, d’adapter les démarches administratives pour les installations classées.
En outre, le 19 juin dernier, avec Arnaud Montebourg et Stéphane Le Foll, nous avons signé ce que nous appelons le « contrat de filière alimentaire » avec l’ensemble des acteurs de la filière. Je puis vous certifier que les mesures seront mises en œuvre sans tarder dans votre région, pour apporter des réponses et de véritables perspectives à l’ensemble des départements bretons.
Je pense en particulier au Finistère, qui, vous l’avez rappelé, souffre beaucoup.
Monsieur le sénateur, nous sommes très conscients de la situation que connaît aujourd'hui la Bretagne. Sachez que nous travaillons d’arrache-pied pour consolider et développer son potentiel agroalimentaire, car la filière doit plus que jamais demeurer une force pour cette grande région !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Ma question s'adressait à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, mais je vois que c’est Mme la ministre chargée des personnes âgées et de l'autonomie qui se chargera de me répondre.
Le sujet de la fin de vie, parce qu’il concerne pour chaque individu sa propre mort comme celle des autres, est toujours très difficile à aborder. Ayons pleine conscience que la société contemporaine est plus portée à refuser l’inéluctable qu’à l’accepter !
Le sujet divise la société, essentiellement sur la question de l’euthanasie.
Justement, le Comité consultatif national d’éthique vient de rendre l’avis 121, tout en nuances et respectueux de la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie, ou loi Leonetti, dont j’ai eu l’honneur d’être le rapporteur au Sénat. Le CCNE a été saisi par le Président de la République, après un premier rapport sur le sujet, celui de Didier Sicard, datant du mois de décembre 2012.
On peut très légitimement se demander si la loi Leonetti ne renferme pas déjà quasiment toutes les solutions, sauf à vouloir passer du « laisser mourir » au « faire mourir ».
Parce qu’elle a été mal expliquée, la loi Leonetti est mal appliquée. C’est clairement démontré dans le rapport Sicard, tout comme dans l’avis du Comité consultatif national d’éthique, dont les auteurs doutent d’ailleurs de l’intérêt d’une nouvelle loi.
Soit ! L’avis 121 préconise la nécessité d’une amélioration de la loi existante concernant les directives anticipées, la procédure collégiale et la sédation en phase terminale. Remarquons cependant que cette dernière s’inscrit dans le prolongement des possibilités ouvertes par la loi actuelle, qui sont, il est vrai, rarement mises en œuvre.
Une large majorité s’est dégagée au sein du comité pour refuser l’assistance au suicide, en mettant en exergue les dérives observées dans les pays où elle est légalisée.
M. Jean-Pierre Godefroy s’exclame.
On souligne également dans l’avis l’accès encore insuffisant aux soins palliatifs, malgré tout ce qui a été fait au cours des dernières années.
Le professeur Jean-Claude Ameisen, président du Comité consultatif national d’éthique, souhaite un débat à l’automne, estimant indispensable que la société entière puisse réfléchir, comme nous l’avions nous-mêmes proposé.
Le Président de la République accepte cette idée, mais il promet un texte visant à compléter la loi Leonetti pour la fin de cette année !
N’est-ce pas là relancer un débat clivant pour la société quand celui du mariage pour tous laissera des traces pour longtemps ? Nous avions cru que le Gouvernement allait enfin se concentrer sur les graves problèmes économiques qui affaiblissent notre pays et sapent sa cohésion…
Pourquoi, dans l’immédiat, ne pas mettre en œuvre une vraie pédagogie de la loi, qui est mal connue des soignants comme du public ? Cela demandera déjà beaucoup de temps et d’énergie. Mais c’est essentiel.
Madame la ministre, que comptez-vous faire pour remédier à la situation ?
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.
La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l'autonomie.
Monsieur Dériot, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Mme Marisol Touraine, qui, vous le savez, reçoit en ce moment les partenaires sociaux à Matignon sur la question des retraites. Je vous transmets donc la réponse qu’elle souhaitait vous apporter.
À la suite du rapport sur la fin de vie que lui a remis le professeur Sicard au mois de décembre dernier, le Président de la République a saisi le Comité consultatif national d’éthique de trois questions concernant une éventuelle évolution de la loi Leonetti.
La première question portait sur les directives anticipées de fin de vie et, plus spécifiquement, sur leurs conditions de recueil et d’application dans les cas où elles sont émises par une personne en pleine santé ou à l’annonce d’une maladie grave.
La deuxième avait trait aux moyens de rendre plus dignes les derniers moments d’un patient dont les traitements ont été interrompus à la suite d’une décision prise à la demande de la personne ou de sa famille ou encore par les soignants.
La troisième concernait les modalités et les conditions strictes pour permettre à un malade conscient et autonome atteint d’une maladie grave et incurable d’être accompagné et assisté dans sa volonté de mettre lui-même un terme à sa vie.
Le Comité consultatif national d’éthique, qui a rendu son avis le lundi 1er juillet, a illustré toute la difficulté du sujet. Le Président de la République a pris acte du constat unanime : la loi Leonetti est insuffisamment appropriée et l’accès aux soins palliatifs est mal connu et mal appliqué, malgré le déploiement dont ces soins ont fait l’objet au cours de ces dernières années.
Le Président de la République a également pris acte du constat dressé par le Comité consultatif national d’éthique : les soins palliatifs, bien que fondamentaux, ne permettent pas de répondre à toutes les situations de souffrance et un débat de société sur la question de la fin de vie est souhaitable.
C’est la démarche dans laquelle le Président de la République se situe aujourd'hui. Au terme de ce débat, un projet de loi sera proposé pour compléter la loi Leonetti.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Dans la nuit du 17 au 18 juin, les inondations exceptionnelles qui ont frappé la Haute-Garonne, les Hautes-Pyrénées, les Pyrénées-Atlantiques et les Landes ont été d’une puissance de dévastation rarement vue. Elles ont, hélas ! coûté la vie à trois personnes dans les Hautes-Pyrénées et causé d’énormes dégâts dans le canton de Saint-Béat, dont je suis le conseiller général, mais aussi dans bien d’autres secteurs. Des maisons, des routes, des établissements scolaires, des services publics, des commerces et des exploitations agricoles ont été gravement frappés ou détruits.
Je tiens à souligner la solidarité dont ont fait preuve nos concitoyens et leurs élus locaux ; je salue la solidarité matérielle et financière des collectivités territoriales, ainsi que l’efficacité des services de secours.
Le drame a mis en lumière l’impérieuse nécessité des services publics de proximité et des collectivités territoriales, qui sont parfois décriés, bien à tort !
La réactivité et la solidarité des pouvoirs publics ont été très appréciées par nos concitoyens dans la souffrance. M. le Président de la République est venu à Saint-Béat en compagnie des ministres de l’intérieur et de l’environnement, puis, un peu plus tard dans la journée, le ministre de l’agriculture a fait le déplacement, lui qui est à l’écoute du monde agricole.
Le Gouvernement a agi extrêmement vite, avec un arrêté de catastrophe naturelle paru au Journal officiel du 29 juin. Il a aussi annoncé sa volonté d’être financièrement aux côtés des collectivités locales, d’offrir des facilités et des délais de paiement aux entreprises et commerces pour les charges fiscales et les cotisations sociales. Pour les agriculteurs, fortement touchés, il a mobilisé le Fonds national de gestion des risques agricoles et prévu un différé immédiat des cotisations sociales.
Cependant, la saison touristique, économiquement vitale pour nos territoires, est déjà là. Le secteur touristique est très touché, les commerces ont perdu leur stock, les maisons sont ravagées et les agriculteurs connaissent des difficultés extrêmement importantes.
Même si la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle induit un délai de trois mois maximum pour l’indemnisation par les assurances, il serait vital que ces indemnisations arrivent au plus tôt.
Aussi, monsieur le ministre, et j’associe les parlementaires des territoires concernés à cette question, je souhaiterais savoir comment le Gouvernement envisage de travailler avec les assurances pour une indemnisation très rapide des sinistres. J’aimerais également savoir si des dispositifs spécifiques pour les agriculteurs figurent parmi les mesures fiscales qui sont envisagées.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le sénateur, je souhaite d’abord rendre hommage, au nom du Gouvernement, aux trois personnes qui ont trouvé la mort lors de ces inondations. J’ai une pensée pour leur famille. Je sais que les territoires concernés ont particulièrement souffert.
Je tiens également à saluer la mobilisation des préfets, des élus, des services de secours et, plus généralement, de toutes celles et de tous ceux qui ont spontanément permis l’évacuation préventive de nombreuses personnes, grâce notamment aux indications des services de prévision des crues.
L’ensemble du Gouvernement est mobilisé. Le Président de la République s’est rendu sur place pour mesurer l’ampleur, en l’occurrence exceptionnelle, des inondations. À cette occasion, et pour répondre à l’urgence, le Gouvernement a déclenché des dispositifs d’indemnisation rapide.
Ainsi que l’avait indiqué M. le ministre de l’intérieur, l’arrêté faisant la liste des communes concernées par l’état de catastrophe naturelle a été signé et publié samedi dernier. Les particuliers peuvent donc, et nous les invitons à le faire, engager les démarches auprès de leur assureur pour obtenir réparation. L’évaluation des dommages subis par les collectivités territoriales est également en cours.
Comme l’avait annoncé M. le Premier ministre la semaine dernière, l’État a débloqué une première enveloppe. Elle permettra d’effectuer un premier versement aux collectivités territoriales qui en auront fait la demande, afin de pouvoir engager sans attendre les premiers travaux de confortement.
En ce qui concerne les exploitants agricoles sinistrés, le Fonds national de gestion des risques agricoles a été mobilisé pour indemniser les pertes de récolte et de fonds. Une enveloppe de 100 millions d’euros a été mobilisée. La somme sera ajustée – M. le ministre de l’agriculture l’a souligné – autant que de besoin en fonction du niveau des pertes constatées.
Les intérêts et cotisations sociales de la Mutualité sociale agricole pourront être pris en charge, et les aides pour les agriculteurs en difficulté, activées.
Enfin, M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, a décidé d’octroyer les dérogations demandées pour circonstances exceptionnelles concernant les obligations de la politique agricole commune.
Vous le voyez, tout est mis en œuvre au niveau du Gouvernement, quel que soit le département ministériel, pour apporter des réponses aux territoires concernés et faire en sorte que les dispositifs existants puissent être mobilisés rapidement.
Sachez que, là encore, des réflexions sont en cours. Il y a l’action d’urgence – je vous en ai donné illustration –, mais il y a également l’enjeu de la prévention. Ce chantier majeur sera celui du ministre de l’écologie.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé du budget.
Je crains que nous n’ayons pas fini de découvrir les mauvaises surprises du « mauvais budget » du ministère de l’écologie, pour reprendre les mots de la première sacrifiée du budget 2014.
Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.
En voilà une surprise ! Votre gouvernement a prévu de réduire de 10 % le budget des agences de l’eau en 2014. Ce serait commettre une double faute, monsieur le ministre.
D’abord, ce n’est pas un établissement public de l’État que vous « serrez » de 10 % ; c’est un secteur économique que vous déprimez : le secteur de l’eau potable et de l’assainissement ! Les agences de l’eau sont financées par la facture d’eau et le rendent en subventions aux collectivités locales.
Le multiplicateur macroéconomique est connu : 210 millions d’euros de subventions en moins, c’est 600 millions d’euros de travaux à supprimer des programmes ! Ce sont surtout plus de 1 000 emplois que vous rayez, et des emplois très locaux, non délocalisables.
La France ne peut pas se le permettre !
La vérité, c’est qu’une fois de plus les collectivités paieront ! Le Gouvernement avait promis de répartir l’effort de réduction de 1, 5 milliard d’euros à part égale entre l’État et les collectivités. Alors pourquoi faire porter 40 % de l’effort prévu pour tous les opérateurs de l’État sur les seules agences de l’eau ? Elles financent les collectivités. De la sorte, vous renvoyez la charge de l’État sur les collectivités.
Nous ne vous demandons pas la lune, nous vous demandons de revoir votre répartition de l’effort de redressement des comptes sur une base plus juste. Le Gouvernement a validé il y a moins d’un an les dixièmes programmes des agences de l’eau, à hauteur de 13, 3 milliards d’euros en s’engageant sur six ans. Il crée aujourd'hui une instabilité brouillonne, qui risque de se reproduire dans les budgets suivants.
Nous vous invitons donc, comme le prévoit la directive européenne, à rendre l’argent de l’eau à l’eau.
Nous sommes décidément bien loin de la campagne présidentielle et de la promesse du candidat Hollande : faire de la France le pays de l’excellence environnementale. Je vous rappelle que l’eau est notre premier bien commun.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le sénateur, nous avons évoqué les défis liés à l’eau lors d’une précédente question. Les enjeux sont multiples et considérables. Je pense, notamment, à la gestion quantitative.
Nos concitoyens doivent pouvoir bénéficier d’une eau de bonne qualité à un prix raisonnable. Pour cela, la protection de la ressource et des milieux aquatiques doit être garantie, et ce d’autant plus que le contexte de changement climatique aggravera les tensions liées aux usages de l’eau.
La politique de l’eau, qui vise à protéger la ressource dans l’équilibre des usages, se décline depuis des années au niveau national, à l’échelle des bassins hydrographiques, puis des sous-bassins hydrographiques.
Les agences de l’eau jouent un rôle majeur dans la mise en œuvre de cette politique. Elles doivent, pour ce faire, disposer des moyens nécessaires pour répondre aux défis de la gestion intégrée des ressources en eau. La politique de l’eau bénéficie donc d’une ressource affectée, qui légitime la contribution des usagers selon le respect du principe pollueur-payeur.
Les dixièmes programmes des agences de l’eau, qui prévoient les investissements pour la période 2013-2018, ont été adoptés à l’automne 2012. Ils orienteront l’action des acteurs de l’eau dans le sens du respect des obligations communautaires de la France relatives à la mise en œuvre de la directive-cadre sur l’eau et à la mise en conformité des réseaux d’assainissement. Ce dernier point est un lourd défi dans les territoires, comme vous le savez.
Le plafond de dépenses des agences de l’eau sur la période 2013-2018 a été fixé à 13, 3 milliards d’euros et les comités de bassin ont adopté leurs programmes d’intervention.
Cependant, un prélèvement de 10 % des recettes prévisionnelles des agences est prévu pour 2014, ce qui correspond à un montant total de 210 millions d’euros.
Cette contribution de la politique de l’eau en 2014 s’inscrit dans le cadre de l’effort collectif demandé à tous les opérateurs de l’État…
M. Gérard Larcher. Ce n’est pas un opérateur de l’État, c’est un vase communicant !
Sourires sur les travées de l'UMP.
… et est nécessaire pour parvenir collectivement à atteindre les objectifs de redressement des finances publiques.
Philippe Martin veillera à ce que cette contribution nécessaire et solidaire puisse se décliner dans chaque bassin en respectant les équilibres des programmes d’intervention.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Le 13 avril 1987, l’État décidait de réaliser le chaînon manquant autoroutier Grenoble-Gap, l’autoroute A51, commun aux itinéraires Genève-Marseille et Lyon-Nice par les Alpes.
Vingt-six ans après, les populations de cette région et les usagers qui la traversent ou qui s’y rendent, attendent toujours et sont contraints d’emprunter la vieille route Napoléon, qui est à peu près dans l’état où l’a laissée l’Empereur !
Les services départementaux de l’Isère ont écrit, à l’occasion du débat public, que cette vénérable route ne pouvait pas être améliorée significativement et que, même aménagée, elle ne pouvait en aucun cas constituer une alternative sérieuse à l’autoroute.
C’est certainement la raison pour laquelle, le 26 janvier 2012, le candidat François Hollande s’engageait, dans un entretien accordé à un grand journal régional, à faire réaliser rapidement cette infrastructure, conformément à l’article 10 du Grenelle 1. Il déclarait, à propos de l’A51 : « Il faut terminer celles – les autoroutes – qui sont engagées. Si ces infrastructures sont indispensables pour la sécurité – ce qui est le cas –, si elles correspondent à un projet de désenclavement […] j’y suis favorable. »
Le futur Président de la République ne se doutait certainement pas que la commission « Mobilité 21 » classerait ce dossier dans la catégorie « poubelle », c’est-à-dire dans la catégorie des projets à réaliser au-delà de 2050. Ce n’est pas correct !
Faudrait-il attendre encore trente-sept ans, soit une gestation totale de soixante-trois ans, pour réaliser 92 kilomètres d’autoroute ?
Monsieur le ministre, vous comprendrez que la grande majorité des élus et les populations concernées aient reçu cette information comme une provocation et une insulte !
Dans ces conditions, je voudrais vous proposer un compromis justifié par l’ancienneté de ce dossier parfaitement étudié, fondé sur une politique de décentralisation et en n’oubliant pas que la compétitivité d’un pays est la somme de celle de tous ses territoires.
Si l’État n’a ni les moyens ni la volonté de réaliser cet ouvrage, qu’il en confie la responsabilité aux quatre départements directement concernés – l’Isère, la Drôme, les Hautes-Alpes et les Alpes-de-Haute-Provence – dont les quatre présidents, et parmi eux trois parlementaires socialistes, dont André Vallini, ici présent, sont très favorables à cette réalisation.
M. Pierre Bernard-Reymond. Je leur fais entièrement confiance, ils sauront vous démontrer que l’A51, c’est possible, tout de suite !
Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. André Vallini applaudit également, avec force.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Je vous remercie, monsieur le sénateur, de m’interpeller sur le dossier de l’A51 dont j’ai pris connaissance il y a déjà plusieurs mois.
À la fin de votre question, vous me proposez en quelque sorte d’évacuer les obstacles juridiques qui s’opposent à la prise en charge d’un tronçon autoroutier par les collectivités territoriales. C’est juridiquement impossible. Seul un réseau national répondant à un certain nombre de spécificités peut satisfaire aux caractéristiques autoroutières.
Vous avancez l’idée d’une coopération de quatre départements pour faire face à cet enjeu d’aménagement du territoire et mettre aux normes autoroutières le barreau manquant de 90 kilomètres de l’A51.
Ces 90 kilomètres représentent 2, 5 milliards d’euros d’investissement, mesdames, messieurs les sénateurs. Or 75 % de ce coût doit être équilibré par les contributions des collectivités, pour un trafic qui est faible, de 9 000 à 14 000 véhicules par jour. À euro constant, cela signifie que le bouclage financier s’élève à environ 2 milliards d’euros.
Cette proposition me paraît plutôt un effet de style. Comment les conseils généraux pourraient-ils s’engager durablement au travers d’un soutien financier de 2 milliards d’euros ? Je vous invite à ne pas trop creuser cette piste, car on pourrait vous le reprocher par la suite…
En revanche, d’autres solutions sont envisageables. Je pense, notamment, à la proposition avancée par certain élus, sans avoir une vision trop exigeante, dans le cadre des adossements limités à un certain nombre de kilomètres de tronçons, car, judiciairement et financièrement, cela répond à des règles européennes. Je pense surtout à la modernisation de la RN85, via un cofinancement, ce qui permettrait de satisfaire les attentes de la population en termes d’aménagement du territoire.
Quoi qu’il en soit, le 9 juillet prochain, le Premier ministre annoncera un projet d’investissement. Contrairement à ce qui s’est pratiqué en d’autres périodes, nous souhaitons avoir un discours responsable, soutenable, afin d’instaurer un rapport de confiance avec les collectivités.
C’est pourquoi une mission sera confiée à chacun des préfets de région pour que puisse être engagée une phase de contractualisation des financements entre les différentes collectivités, qu’il s’agisse des programmes de modernisation des itinéraires, des contrats de projets État-région, de la modernisation du ferroviaire, mais également des projets autoroutiers, en concertation avec les territoires et en tenant compte de leurs priorités, dont j’ai pu comprendre qu’elles pouvaient être extrêmement discutées.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de Mme Bariza Khiari.
M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 4 juillet 2013, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution le Conseil d’État a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article L. 2125-5 du code général de la propriété des personnes publiques (Domaine public fluvial) (2013-341 QPC).
Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.
M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 4 juillet 2013, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article L. 12-2 du code de l’expropriation publique (Transfert de propriété) (2013-342 QPC).
Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.
Acte est donné de ces communications.
L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2012 (projet n° 710, rapport n° 711).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.
Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous retrouvons cet après-midi pour évoquer ensemble le projet de loi de règlement pour 2012, ainsi que les orientations budgétaires pour 2014.
Je forme ici le vœu que, comme ce fut le cas à l’Assemblée nationale, ce débat soit l’occasion pour nous d’approfondir nos questionnements, nos réflexions sur la situation de nos finances publiques, et ce en toute transparence.
Je tiens beaucoup, comme ministre du budget, à ce que cette transparence prévale à chacune des étapes de la construction de nos lois de finances.
Nous avons besoin de cette transparence, car nous savons la situation des comptes publics et l’inquiétude profonde que leur dégradation a suscitée, au cours des dix dernières années, dans notre pays.
On sait la situation de nos déficits, notamment ceux des comptes sociaux ; les déficits publics se sont accrus de façon considérable entre 2002 et 2012.
On sait également la situation de compétitivité de nos entreprises : notre commerce extérieur enregistre un déficit de près de 75 milliards d'euros, alors que celui de l’Allemagne affiche un excédent de 150 milliards d'euros.
Il y a dans cette dégradation des finances publiques une source d’inquiétudes légitimes qui minent la confiance que les Français peuvent avoir dans la gestion du pays et qui nous imposent de prendre les bonnes décisions afin de procéder au redressement qu’ils attendent de nous.
Ce redressement ne peut pas se faire sans cette exigence de transparence que j’évoquais à l’instant.
Lors des multiples occasions qui nous ont été données, à Pierre Moscovici et à moi-même, de venir devant la commission des finances de votre assemblée, cette transparence a pu se matérialiser à la faveur de nos échanges. La séance d’aujourd’hui est une nouvelle occasion de faire ensemble le point sur la situation de nos finances publiques et, en préambule, je tiens, mesdames, messieurs les sénateurs, à vous assurer de nouveau de ma totale disponibilité : tout au long de l’année, je serai prêt, chaque fois que vous me solliciterez, à venir devant votre commission des finances rendre compte des conditions d’exécution des engagements budgétaires que nous avons pris devant la représentation nationale.
Je dois reconnaître que cet effort de transparence est grandement facilité par le nouveau cadre législatif et réglementaire européen dans lequel s’inscrit la démarche qui est la nôtre.
Le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, que nous avons adopté voilà quelques mois et qui concerne notre engagement en Europe, nous impose des obligations nouvelles auxquelles nous devons nous conformer, avec le « six-pack » et le « two-pack ».
Le TSCG crée les conditions d’un dialogue permanent entre le Gouvernement, la représentation nationale et les institutions de l’Union européenne, notamment la Commission, concernant les finances publiques.
Il instaure également, avec la Cour des comptes et le Haut Conseil des finances publiques, un dialogue nouveau, fait d’exigences et de recommandations, qui nous conduit à être nous-mêmes plus exigeants encore dans notre effort de transparence. Nous faisons en sorte que les documents adressés à Bruxelles soient de haute qualité et qu’ils permettent de créer les conditions de la confiance à l’égard de ceux qui nous contrôlent ou plutôt qui apprécient la fiabilité de nos comptes – je pense au Haut Conseil – mais également à l’égard de nos partenaires de l’Union européenne, notamment la Commission.
La loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques définit le cadre de cette relation avec le Haut Conseil ainsi que le calendrier des obligations qui s’imposent à nous.
Je salue toutes ces évolutions et ces progrès comme autant de pas nouveaux faits dans la direction de la transparence et du contrôle des engagements pris par le Gouvernement, devant la représentation nationale comme devant le Haut Conseil des finances publiques, sur l’évolution et la trajectoire de nos comptes.
Je veux également souligner que la progression de la transparence, par-delà la procédure, résulte aussi du travail réalisé par la Cour des comptes et notre administration de Bercy qui nous permettent ainsi de garantir la qualité des informations transmises à la représentation nationale.
Le fait que nos comptes soient certifiés, qui fait de la France une exception européenne, témoigne de la volonté de notre pays de garantir la fiabilité des informations financières qui vous sont communiquées.
Nous avons, en matière de certification, une position particulière qui nous conduit d’ailleurs à jouer, au sein de l’Europe et des institutions européennes, un rôle moteur, d’avant-garde, afin que de nouvelles normes comptables – je pense aux normes IPSAS – soient adoptées dans les meilleures conditions, en tenant compte du retour d’expérience dont nous bénéficions nous-mêmes en raison de l’avance dont nous disposons.
Je veux d’ailleurs souligner que le travail de contrôle effectué par la Cour de comptes a permis de lever un certain nombre des réserves qui s’étaient exprimées, l’an dernier, sur les comptes de l’État. Sept réserves substantielles avaient ainsi été formulées par la Cour des comptes à l’occasion des précédentes échéances budgétaires ; elles ne sont plus que cinq cette année en ce qui concerne les comptes 2012.
Il en est de même pour les comptes de la sécurité sociale. La Cour des comptes a certifié les comptes de la branche famille, de la branche recouvrement et de la branche maladie, ce qu’elle n’avait pas nécessairement fait les années précédentes – je pense aux comptes de la branche famille – en levant, là aussi, un certain nombre de réserves substantielles.
L’an dernier, cinq réserves substantielles avaient été exprimées sur les comptes de la branche famille et huit sur la branche recouvrement ; il n'y en a plus, cette année, que quatre et six respectivement. Cela témoigne aussi de l'effort de transparence que nous avons engagé. Je tiens à remercier les services de l'administration de Bercy de la qualité du travail qu'ils ont accompli, lequel a contribué à lever ces réserves substantielles.
Par ailleurs, je veux rappeler que l’effort de transparence se traduit également par l’introduction, dans tout texte à caractère financier, d’un article liminaire indiquant les soldes structurel et nominal de nos comptes. Cet article permet au Parlement de prendre connaissance de l’évolution des déficits de notre pays.
Toujours en matière de transparence, nous avons voulu faire en sorte de vous fournir des informations systématiquement fiables, même en cours d'année, lorsque des évolutions interviennent par rapport aux hypothèses sur lesquelles a été fondée la loi de finances initiale, justifiant un ajustement des perspectives de trajectoire.
J'ai donc souhaité, avec Pierre Moscovici, expliquer devant les commissions des finances des deux assemblées, à l'occasion de la présentation du programme de stabilité, pour quelles raisons nous proposions de corriger les prévisions de recettes sur lesquelles nous avions bâti la loi de finances pour 2013. Je vous ai alors indiqué que nous rectifiions les perspectives de recettes de TVA et autres recettes fiscales à hauteur de 8 milliards d'euros, compte tenu de l’évolution de la croissance, celles de nos comptes sociaux à hauteur de 3 milliards d'euros, en raison de l’augmentation du chômage, et le montant attendu des recettes de droits de mutation à titre onéreux à hauteur de 2 milliards d'euros.
Au total, nous avons donc corrigé à concurrence de 14 milliards d'euros la trajectoire de nos recettes par rapport à la loi de finances initiale pour 2013. Cela nous paraissait justifié compte tenu de l’évolution de la croissance. Nous considérons que le nouveau cadre juridique, avec la création du Haut Conseil des finances publiques, nous impose un devoir de transparence qui doit nous conduire à vous informer, presque en temps réel, de l’évolution du solde de nos comptes publics.
C’est pourquoi je suis surpris d’entendre certains groupes de l'opposition, moins d’ailleurs dans cette enceinte que dans d'autres, demander que soit présenté un projet de loi de finances rectificative, sous prétexte d’établir la transparence.
Je tiens à indiquer à la représentation nationale qu'il n'est pas besoin, dès lors que le nouveau cadre juridique impose une transparence permanente, de recourir à une loi de finances rectificative, sauf à vouloir procéder à des ajustements, lever de nouveaux impôts ou réaliser des économies en cours d'année, ce qui aurait un effet récessif majeur.
Le président Carrez nous a d'ailleurs indiqué, à l'occasion du débat qui s’est tenu voilà quelques jours à l'Assemblée nationale, que l'opposition demandait non pas une correction de trajectoire, que ce soit par le biais d’économies nouvelles ou par celui d’impôts supplémentaires, mais simplement la transparence. Or la transparence existe déjà !
Nous n'avons pas l'intention de prendre des mesures nouvelles, parce que nous voulons faire jouer les stabilisateurs budgétaires. En outre, cela aurait pour effet d’aggraver la récession et le chômage, et partant les déficits, surtout s’il s’agissait de remédier aux dérapages fantasmatiques évoqués par certains.
Il n’y a donc pas de sérieux budgétaire possible sans transparence, ni sans volonté de réduire les déficits de façon méthodique et déterminée. Il n'y a pas de tournant dans la politique budgétaire du Gouvernement : elle est marquée par une cohérence et une continuité qui traduisent un engagement fort du Président de la République, pris lors de la campagne présidentielle et rappelé par le Premier ministre dans cette enceinte, à l'occasion de son discours de politique générale.
Cette cohérence, cette continuité, cette persévérance dans le temps fondent le sérieux budgétaire qui permettra le redressement de nos finances publiques. Nous avons suffisamment dénoncé, pendant la campagne présidentielle, les dérapages qui se sont produits au cours des dix dernières années…
… pour ne pas souhaiter résolument procéder aux corrections qui s'imposent et faire en sorte que le redressement de nos comptes puisse s’inscrire dans la réalité des chiffres du budget, année après année.
De ce point de vue, j’aimerais rappeler un certain nombre de données incontestables.
Entre 2007 et 2011, le déficit structurel de l'État – celui qui n'est pas imputable à la crise et à la conjoncture, mais qui résulte des choix faits par le gouvernement précédent – a augmenté de deux points, passant de 30 milliards à 100 milliards d'euros. À aucun moment, entre 2009 et 2012, le déficit nominal n’a été inférieur à 4, 5 %.
Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, nous avons demandé à la Cour des comptes de réaliser un audit incontestable de la situation dont nous héritions. Son rapport relevait un risque de dérapage des dépenses publiques de 2 milliards d'euros pour 2012 et une surestimation des recettes attendues des impôts supplémentaires – 20 milliards d'euros en 2011 et près de 13 milliards d’euros en 2012 – décidés par la précédente majorité. À cet égard, il est donc caricatural de prétendre que nous vivions dans un nirvana fiscal avant 2012 et que nous sommes entrés dans un enfer fiscal depuis lors. La responsabilité de l'augmentation de la pression fiscale au cours des trois dernières années est partagée entre les deux majorités successives.
Si nous n'avions pas procédé au gel de 2 milliards d'euros de dépenses en 2012 et pris des dispositions fiscales dans la loi de finances rectificative pour 2012, le déficit nominal aurait gravement dérapé en fin d'année. Grâce à ces dispositions, le déficit, qui était de 5, 3 % en 2011, a pu être ramené à 4, 8 % en 2012.
S’il existe un décalage de 0, 3 % entre l’objectif de 4, 5 % que nous nous étions assigné et le déficit réel de 4, 8 % constaté en fin de période, c'est pour des raisons tout à fait claires : la recapitalisation de Dexia, qui représente une part non négligeable de ce décalage, et la prise en compte, dans le budget de 2012, d'un certain nombre de dépenses liées à notre engagement européen qui affecteront sans doute également le budget de 2013.
Le précédent budget européen, qui couvre la période 2007-2013, représentait un volume global de crédits d'engagement de 486 millions d'euros et un montant de crédits de paiement de 940 millions d'euros. En novembre 2010, le précédent Président de la République avait adressé à la Commission européenne, avec d'autres dirigeants conservateurs de pays de l'Union européenne, une lettre par laquelle il annonçait sa décision de ne pas verser la totalité des crédits de paiement nécessaires à l'exécution du budget voté pour la période 2007-2013. Ce rabotage a conduit à l'apparition d'un déficit du budget de l'Union européenne, constaté en octobre 2012. L’existence de ce déficit vous a amenés à interroger le Gouvernement sur la difficulté de financer le programme Erasmus et d'honorer tous les engagements pris par notre pays à l'égard de ses territoires en matière de fonds structurels. Il a par conséquent fallu adopter un budget rectificatif à l'automne 2012, pour prévoir un abondement qui explique dans une large mesure le décalage de 0, 3 % que j’évoquais à l’instant.
Ce décalage s’explique aussi, pour être parfaitement rigoureux et honnête, par l’écart entre les prévisions de croissance établies en juin 2012 et le taux réel constaté en fin d'année.
Malgré cela, le déficit nominal a diminué et le déficit structurel s'est réduit de 1, 2 point en 2012. Nous prévoyons une baisse comprise entre 1, 6 et 1, 9 point en 2013, l'ajustement structurel devant se prolonger à hauteur de 1 % par an en 2014 et en 2015 : jamais notre pays n’aura connu un tel effort de redressement de ses comptes publics. Il n’y a pas de raisons de penser que nous ne parviendrons pas à atteindre ces objectifs. La Cour des comptes estime d'ailleurs, dans son rapport, que nous sommes en ligne avec nos prévisions d'ajustement structurel.
À cet égard, je rappelle que le déficit structurel était supérieur à 5 % en 2011 et qu'il retrouvera en 2013 son niveau de 2007. La réduction très forte de ce déficit à laquelle nous avons procédé permettra d'atteindre les objectifs que je viens d'indiquer.
Le sérieux budgétaire passe non seulement par la transparence et la réduction des déficits, mais également par la maîtrise des dépenses.
Certains, estimant certainement qu’en perpétuant à l’infini ce bruit de fond il finira par devenir vérité, affirment que, après des années de maîtrise de la dépense, celle-ci déraperait désormais. Je m’appuierai là aussi sur les chiffres incontestables fournis par le rapport de la Cour des comptes : les dépenses publiques ont augmenté de 170 milliards d'euros entre 2007 et 2012 ; au cours de la même période, la révision générale des politiques publiques a permis de dégager une économie nette de 12 milliards d'euros, redistribuée pour partie en mesures catégorielles, à hauteur de 1, 9 milliard d'euros.
C’est donc au final une économie de 10 milliards d'euros sur cinq ans, soit de 2 milliards d'euros par an en moyenne, qu’a apportée l’application de la RGPP, tandis que, parallèlement, la dépense publique augmentait de 2, 3 % par an entre 2002 et 2007, et de 1, 7 % par an entre 2007 et 2012, soit d'un peu plus de 2 % en moyenne annuelle sur dix ans. En 2012, les efforts qui ont été faits ont permis de limiter l’augmentation de la dépense publique à 0, 7 % en volume, contre 0, 9 % en 2011, et nous avons la volonté de la ramener à environ 0, 5 % en 2013 et les années suivantes.
Ainsi, le rythme d'augmentation de la dépense publique a été divisé par quatre entre la moyenne des dix dernières années et le début du quinquennat, ce qui est considérable ! C’est la raison pour laquelle j’ai quelque difficulté à entendre les leçons que nous prodigue de façon réitérée, presque litanique, une opposition qui, …
… pendant dix ans, a largement contribué à creuser les déficits du fait d’une absence de maîtrise de la dépense publique…
Je voudrais donner deux autres chiffres tout à fait emblématiques de l’effort inédit entrepris depuis le début de la législature.
En 2012, la dépense publique a diminué de 300 millions d'euros, charge de la dette et pensions comprises, et le projet de budget pour 2014, dont nous allons débattre des orientations, prévoit une diminution nette des dépenses de l’État de 1, 5 milliard d'euros, grâce à un effort d'économie de 9 milliards d'euros permettant d'absorber – et au-delà – l'évolution tendancielle de ces dépenses.
Dois-je également rappeler que les dépenses d'assurance maladie ont été parfaitement contenues en 2012, comme elles le seront en 2013 ? En effet, en 2012, elles ont été inférieures de 1 milliard d’euros à l'objectif national des dépenses d'assurance maladie que la précédente majorité s'était assigné. Pour 2013, la commission des comptes de la sécurité sociale a montré qu’elles étaient de 200 millions d'euros inférieures à l’ONDAM.
Les dépenses de l’État et celles de l’assurance maladie ont donc été tenues en 2012 et en 2013, mais nous voulons aller au-delà en 2014. Je voudrais, à cet égard, évoquer quelques enjeux pour l’année à venir.
En 2014, nous accentuerons l'effort d'économie. On nous reproche souvent de ne pas faire d'économies…
Monsieur Marini, les propos de Mme Batho témoignent que nous faisons bien des économies !
Ces économies, je les assume devant vous ! Nous sommes engagés dans une trajectoire de maîtrise des finances publiques et de réduction de nos déficits. Mais je constate que lorsque nous faisons des économies, vous les contestez immédiatement !
Vous demandez toujours plus d'économies, mais chaque fois que l’on vous en propose, vous les refusez ! Je me souviens avoir entendu, dans cet hémicycle, des sénateurs nous interpeller sur notre intention de simplement maintenir le budget de la défense, sans en faire davantage.
J'ai récemment participé à un débat avec François Fillon. Quand je lui ai dit qu’il nous faudrait bien procéder à des ajustements pour combler le déficit de 2, 5 milliards d'euros de la branche famille qu’il nous avait laissé, il m'a répondu qu’il n’en fallait surtout rien faire, qu’il n’y avait pas d'urgence à s'occuper des déficits de la branche famille…
Parce que vous aviez engagé 245 milliards d'euros de dépenses non financées pour réaliser des infrastructures de transport, d'ailleurs mal subventionnées, nous avons décidé de procéder à une remise en ordre. Or tout à l'heure, dans cet hémicycle, lors des questions d’actualité, vous avez interpellé le Gouvernement pour contester toutes les économies envisagées !
Justement, le Président Sarkozy était venu au Havre annoncer à grand bruit la création de ce train modulaire, …
Annoncer de grands projets qui font rêver les gens sans les financer, c’est à la portée de tout le monde, monsieur le sénateur ! Il est plus difficile de maîtriser les comptes publics et de ne faire aux Français que des promesses que l'on sait pouvoir tenir !
C'est précisément parce que nous ne voulons pas prendre d'engagements qui ne seraient pas financés que nous avons décidé, avec Philippe Duron, à la demande du Président de la République et du Premier ministre, de faire des propositions concernant le financement de nos infrastructures de transport qui soient raisonnables et responsables !
Nous menons donc une politique très différente de la vôtre, qui consiste, pour tous les projets sur lesquels nous nous engageons, à prendre des décisions dont nous savons financer la mise en œuvre et à documenter les économies qui doivent être faites. Il y va en effet de la crédibilité de notre pays au sein de l'Union européenne, du redressement de ses comptes et du retour à la croissance de son économie. Voilà ce que nous faisons !
C’est dans cet esprit que nous proposons 9 milliards d'euros d'économies pour l’État. Mais ces économies, vous les contestez toutes, tout en en demandant par ailleurs davantage. Allez comprendre ! Pendant la campagne présidentielle, certains proposaient de réaliser 10 milliards d'euros d'économies sur les collectivités territoriales, mais selon vous ce n’était pas assez.
Aujourd’hui, nous proposons un effort d’économie de 1, 5 milliard d’euros pour les collectivités territoriales, mais vous estimez maintenant que c'est trop ! Allez comprendre, là encore, où est la cohérence !
Nous proposons des économies supplémentaires sur les dépenses d'assurance maladie, mais vous nous expliquerez bientôt que l'hôpital, que vous avez mis à genoux, ne fonctionne plus !
Vous avez mis en œuvre la révision générale des politiques publiques, dont j’ai indiqué les glorieux résultats, mais, dans le même temps, vous avez laissé les effectifs des opérateurs de l’État s’accroître de 6 % ! Leurs dépenses de fonctionnement ont ainsi augmenté de 15 % ! Pour notre part, nous entendons réduire les dépenses des opérateurs de l’État de 4 %, car nous voulons œuvrer au rétablissement des comptes publics. Mais j'ai également compris tout à l'heure, au travers d'une question d’actualité posée par l'un d'entre vous, que ces économies sur les opérateurs de l’État, vous les contestiez aussi !
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Vous contestez toutes les économies précisément documentées que nous proposons, tout en en demandant davantage ! Quelle est la cohérence de l'opposition ?
Applaudissementssur les travées du groupe socialiste. – M. Francis Delattre rit
Comme je l'ai dit devant l’Assemblée nationale, à l'occasion de la présentation du projet de loi de finances pour 2014, nous proposerons un programme d’économies qui témoignera de notre volonté de rétablir les comptes publics dans la justice, en finançant les priorités. Ces économies, vous devrez bien alors les constater et nous indiquer celles que vous contestez, quitte, éventuellement, à nous en proposer d'autres, ce que vous avez été incapables de faire jusqu'à présent !
Nos efforts en matière d’économies et de sérieux budgétaire s’accompagnent du souci permanent de ne pas obérer les chances de la croissance.
Lorsque nous décidons des économies budgétaires, ce n’est pas en suivant une logique de rabot qui s'appliquerait sans distinction à tous les ministères. Nous le faisons en finançant les domaines prioritaires que sont pour nous l'éducation nationale, la justice
M. le président de la commission des finances et M. Francis Delattre s'exclament.
Ainsi, entre 2012 et 2013, plus de 28 000 emplois ont été supprimés dans la fonction publique et 2 545 au sein des opérateurs de l’État, mais, dans le même temps, nous en aurons créé, en 2014, 9 800 dans l'éducation nationale, 590 dans la justice, 405 dans la police et dans la gendarmerie. Les économies que nous décidons n’obèrent pas notre volonté d'honorer nos engagements et de financer nos priorités.
Il en va de même pour la politique de l'emploi. Parce que le chômage mine notre pays et sème partout la désespérance, nous donnons au service public de l'emploi, dont le budget augmentera de plus de 1 milliard d'euros, les moyens d’accomplir sa mission.
Telles sont les propositions qui vous sont faites. Le sérieux budgétaire est assez simple à concevoir, mais parfois difficile à mettre en œuvre, parce qu’il y faut de la détermination, du courage, de la persévérance.
La transparence est une exigence qui s’impose à nous. Devant vous, je m'engage à me tenir toujours à la disposition des parlementaires pour la rendre possible.
Le sérieux budgétaire, c’est la maîtrise des déficits et la réduction de la dépense : je vous ai dit quels étaient nos objectifs et notre stratégie à cet égard.
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Je forme le vœu que le débat de cet après-midi soit l'occasion de soulever toutes les questions, d'y apporter toutes les réponses, et qu’il soit, par-delà nos différences, à la hauteur de l’enjeu du redressement des finances publiques, que les Français attendent !
Applaudissements
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi de règlement qui nous est soumis est particulier, car la responsabilité de la gestion de l’exercice 2012 est partagée, compte tenu du changement de majorité intervenu un peu avant le milieu d’année.
Signalons aussi que ce projet de loi comporte, pour la première fois, un article liminaire qui traduit dans notre droit les évolutions récentes de la gouvernance budgétaire européenne. Cet article liminaire vise à rendre compte de notre trajectoire d’ajustement structurel et permet au Haut Conseil des finances publiques d’examiner si un écart important est constaté par rapport à la trajectoire de solde structurel définie par la loi de programmation des finances publiques. Dans un tel cas, le Gouvernement devrait présenter des mesures de redressement dans le rapport préalable au débat d’orientation des finances publiques, puis en tenir compte dans les textes financiers examinés à l’automne.
Pour 2012, il s’agit presque d’un exercice à blanc, car les écarts pourront s’apprécier sur deux années consécutives, ce qui n’est pas possible pour cette première année d’application. Mais la loi de règlement aura, demain, ce nouveau et important rôle de contrôle de nos engagements en matière de redressement de nos finances publiques.
Je pense, mes chers collègues, que chacun peut en convenir : l’année 2012 n’a pas été une année facile…
… pour l’économie, ni pour le budget de l’État. La croissance est en effet la meilleure alliée du redressement des finances publiques, or force est de constater que, après le rebond consécutif aux mesures de relance adoptées à partir de 2009, nous sommes entrés dans une phase de désendettement public et privé très marquée.
La rechute de la croissance est intervenue alors que notre déficit public et notre dette s’étaient considérablement creusés au cours des années précédentes. Cet héritage a pesé de tout son poids au moment où nous devions faire face au retournement de la conjoncture. Rappelons que celui-ci a surpris tout le monde au second semestre de 2011 : en mai, la Commission européenne prévoyait encore, pour la zone euro, une croissance de 1, 8 % en 2012, alors qu’elle a finalement connu une récession de 0, 6 %.
Les politiques économiques de l’ensemble des pays européens ont en fait évolué selon une séquence assez similaire, ce qui a considérablement accru l’incidence des consolidations sur la croissance et donné lieu au débat que nous savons sur l’ampleur des multiplicateurs budgétaires.
Nous nous rendons compte aujourd’hui des erreurs d’appréciation qui ont été commises dans la gestion de la crise de la zone euro, qui, il est vrai, avait atteint un paroxysme à la fin de l’année 2011, lorsque notre pays voyait le coût de sa dette s’envoler. La politique budgétaire d’austérité généralisée instituée alors comme seule et unique perspective pour l’Europe fait aussi partie de cet héritage avec lequel nous avons dû composer.
Mes chers collègues, la France a finalement plutôt mieux résisté que la moyenne des pays de la zone euro. Elle a connu une croissance nulle, alors que le projet de loi de finances pour 2012 prévoyait un taux de croissance de 1, 75 %, ramené à 1 % dès la fin du mois d’octobre 2011, puis à 0, 5 % en mars 2012 et, enfin, à 0, 3 % l’été suivant. En fait, tous les moteurs de la croissance se sont éteints, ce qui a entraîné une phase de stagnation assez longue, puisque nous n’espérons commencer à en sortir qu’à la fin de cette année.
Ce rappel du contexte économique est important pour analyser nos résultats, car il montre que si le redressement de nos comptes a été moins marqué que prévu – le déficit public s’est élevé à 4, 8 % du PIB, alors que l’objectif était de le ramener à 4, 5 % –, il est tout de même très significatif au regard de ces conditions très difficiles, sans parler de quelques éléments exceptionnels comme la recapitalisation de Dexia ou la contribution complémentaire au budget européen. Aussi les comparaisons avec 2011, année où la croissance a atteint 2 %, n’ont-elles pas grand sens.
En 2012, l’effort structurel a été de 1, 1 % du PIB et a porté principalement sur les recettes, les mesures nouvelles ayant été pour deux tiers introduites sous la précédente majorité et, pour le reste, à l’été 2012.
S’agissant du budget de l’État, le choix d’introduire des mesures fiscales nouvelles à l’été 2012 était pleinement justifié, car il n’était pas possible d’improviser des économies dans l’urgence et il était tout de même nécessaire de redresser le budget de l’État. En effet, compte tenu de l’amélioration du déficit budgétaire à hauteur de 3, 5 milliards d’euros, ce sont bien ces mesures prises au début de l’été 2012 qui ont permis de réduire le déficit, ainsi bien entendu que la très grande maîtrise des dépenses de l’État, sur laquelle je reviendrai dans quelques instants.
Au total, pour cette année 2012, les recettes fiscales nettes ont progressé de plus de 13 milliards d’euros, mais cela est entièrement dû aux mesures nouvelles de l’année 2012, car l’évolution spontanée des recettes de l’État a été légèrement négative, c’est-à-dire que, sans mesures nouvelles, le rendement aurait diminué. Ce phénomène, plutôt rare, montre que la stagnation du PIB peut entraîner une diminution des recettes fiscales et justifie en retour l’attention qu’il nous faut porter au soutien à la croissance. Cela doit nous instruire pour l’avenir : il convient de tenir compte de l’élasticité des recettes fiscales.
Quant aux dépenses de l’État, elles ont été plus faibles en 2012 qu’en 2011, ce qui est, mes chers collègues, historique. Les dépenses publiques n’ont augmenté que de 0, 7 %, alors qu’elles avaient crû en moyenne de 1, 7 % les cinq années précédentes, hors éléments exceptionnels. C’est un point qu’il faut souligner.
Cette performance est la conséquence d’un pilotage très exigeant en cours d’année, avec notamment la mise en réserve, à l’été 2012, de 1, 5 milliard d’euros, au-delà de la réserve de précaution, pour faire face aux risques de dérapage identifiés par la Cour des comptes juste après le changement de majorité.
Je vois dans cette performance la preuve de notre détermination à suivre notre trajectoire d’ajustement structurel vers l’objectif à moyen terme, c’est-à-dire le retour à l’équilibre structurel en 2017. C’est elle qui nous a permis de prendre la tête du combat en faveur de la prise en compte de la croissance dans la zone euro, en assurant nos partenaires européens de notre sérieux budgétaire.
L’exercice 2012 est donc riche d’enseignements, notamment pour la présente année 2013, qui, du point de vue de la croissance économique, se présente malheureusement sous des auspices comparables. À cet égard, discuter du projet de loi de règlement et avoir le débat sur l’orientation des finances publiques le même jour fait pleinement sens.
Ces enseignements portent sur les aléas concernant les recettes et sur le fait que le Gouvernement sait à la fois tenir la dépense et prendre des initiatives, y compris coûteuses : le redressement de nos comptes ne doit pas nous faire renoncer à faire évoluer notre pays et à œuvrer en faveur de la jeunesse et de ceux que la crise a le plus affectés. C’est ainsi qu’ont été financés plusieurs milliers de créations de poste dans l’enseignement ou la revalorisation de l’allocation de rentrée scolaire dès l’automne 2012.
Ces enseignements portent enfin sur l’absurdité qu’il y aurait à vouloir à tout prix s’accrocher à des prévisions de solde, fût-ce de solde structurel, car cela reviendrait à définir notre politique uniquement en fonction de données statistiques, qui sont disponibles parfois bien tard dans l’année. Une telle politique entraînerait un pilotage erratique de nos finances publiques, au moment où nous avons besoin, au contraire, de tenir un cap vers le moyen terme.
C’est ainsi, mes chers collègues, que nous refermons en quelque sorte aujourd’hui le livre budgétaire de l’année 2012, qui a posé les jalons du redressement des finances publiques dans lequel nous sommes pleinement engagés.
Pour conclure, j’indique que la commission des finances invite le Sénat à adopter le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2012. §
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’année 2012 a été particulière à bien des égards, notamment parce que le budget a été préparé et voté par une majorité différente de celle qui en a poursuivi et terminé l’exécution, ce qui n’a pas été une tâche facile !
Par ailleurs, l’exécution budgétaire de 2012 est marquée par une transparence accrue. En effet, s’il s’agit de la septième année de certification des comptes de l’État par la Cour des comptes, qui en garantit la sincérité et la régularité en application de la LOLF, c’est la première fois que le Haut Conseil des finances publiques s’est prononcé sur le respect de la trajectoire de solde structurel.
Dans son avis du 23 mai dernier, cette nouvelle institution indépendante a souligné que l’écart de 0, 3 point constaté par rapport à l’objectif fixé en loi de programmation pour le solde structurel ne peut pas être qualifié d’« important » au sens de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques. Ce constat implique que la procédure de correction des écarts prévue par la loi organique et le traité budgétaire européen n’a pas à être déclenchée. C’est un signal positif quant à la qualité des prévisions et au sérieux de l’exécution qui caractérisent désormais nos textes financiers.
J’en viens maintenant aux améliorations qui sont perceptibles dans l’exécution du budget de 2012.
Tout d’abord, la Cour des comptes a formulé sept réserves, identiques à celles de l’année précédente, mais dont seulement cinq sont désormais qualifiées de « substantielles ». Faut-il rappeler que treize réserves avaient été exprimées en 2006, à l’occasion de la première certification ? Les progrès réalisés sont donc loin d’être négligeables, même s’il reste, nous en convenons, beaucoup à faire. D’ailleurs, après s’être inquiétée du ralentissement des efforts d’amélioration de la qualité des comptes en 2011, la Cour des comptes a constaté « un véritable redémarrage des chantiers » en 2012.
Cependant, malgré ces quelques points positifs, les principaux résultats de l’exécution budgétaire pour 2012 nous donnent peu de raisons d’être optimistes.
Tout d’abord, même si le déficit budgétaire a été réduit de 3, 57 milliards d’euros, il reste très élevé ; surtout, le rythme de sa diminution s’est nettement ralenti. Il est vrai que la dégradation de la conjoncture économique a été bien plus importante que l’on pouvait l’imaginer. Faut-il rappeler que l’hypothèse de croissance qui sous-tendait le budget de 2012 a dû être revue à la baisse à deux reprises, pour être finalement fixée à zéro ? Didier Migaud nous a fait part de son inquiétude à ce sujet lorsque nous l’avons auditionné, monsieur le président de la commission des finances. Il a souligné que « cette réduction du déficit est insuffisante pour enrayer la progression de la dette et sortir l’État de la zone dangereuse dans laquelle il se trouve ».
En outre, malgré les nouveaux prélèvements et les augmentations d’impôts décidés par les majorités précédente et actuelle – chers collègues de l’opposition, permettez-moi de vous rappeler, avant que vous ne montiez sur vos grands chevaux, que vous décidé 15 des 22 milliards d’euros de hausses d’impôts de 2012 –, le faible dynamisme de certaines recettes est très préoccupant.
Le rendement des principaux prélèvements, comme l’impôt sur les sociétés ou la TVA, est même en diminution. De plus, sur les 5, 7 milliards d’euros de recettes de TVA qui manquent par rapport aux prévisions, la non-perception de 1, 3 milliard d’euros reste inexpliquée.
Monsieur le ministre, vous avez considéré, devant notre commission des finances, que cette part inexpliquée de la diminution des recettes n’est pas significative au regard des masses concernées : elle ne représenterait que 1 % du produit total de la TVA. Le caractère erratique et incertain des recettes de TVA, qui persiste manifestement en 2013, me semble néanmoins très préoccupant.
Enfin, dans le domaine qui nous donne des raisons d’espérer, c’est-à-dire la maîtrise des dépenses de l’État, la Cour des comptes nous invite une fois de plus à faire preuve de la plus grande prudence. En effet, si nous pouvons nous réjouir que les dépenses d’intervention aient été réduites de 2, 5 % ou que la masse salariale ait été quasiment stabilisée en valeur, la réduction des dépenses en 2012 résulte surtout de l’annulation de crédits « gelés ».
En outre, l’année 2012 a été caractérisée par des dépenses exceptionnelles très importantes, de l’ordre de 9 milliards d’euros, qui ont été réalisées en dehors des normes de dépenses « zéro volume » et « zéro valeur », ce qui pose manifestement question. Ces dépenses exceptionnelles ont contribué à la recapitalisation de Dexia, d’une part, et à la participation de la France aux mécanismes de soutien aux États de la zone euro en difficulté, d’autre part.
En matière de dépenses, comme l’a souligné la Cour des comptes, la France – quelle que soit la majorité en place – a tendance à trop mettre l’accent sur les moyens alloués aux politiques publiques et pas assez sur les résultats obtenus. Si la France se classe au deuxième rang des pays de l’OCDE en termes de niveau de la dépense publique par rapport au PIB, elle arrive rarement en tête de classement au regard du critère de l’efficacité de celle-ci.
Le Gouvernement a mis en place la MAP, la modernisation de l’action publique ; c’est une démarche importante, mais n’oublions pas qu’il y a urgence à réaliser des réformes structurelles ambitieuses et courageuses pour redresser durablement nos finances publiques et éviter ainsi un emballement de la dette qui pèserait sur les générations futures.
Si personne ne doit nous dicter le contenu de ces réformes, il ne faut pas pour autant en tirer prétexte pour s’arrêter en chemin au lieu d’aller de l’avant. La France a besoin de ces réformes ; les générations futures nous seront reconnaissantes du courage dont nous aurons fait preuve en les engageant dès aujourd’hui.
L’exécution du budget de 2012 a donc été marquée par de nombreuses incertitudes et difficultés, difficultés qui persistent d’ailleurs en 2013 et pourraient rendre nécessaire l’élaboration d’un collectif budgétaire, monsieur le ministre.
Les augmentations de prélèvements ayant déjà lourdement pesé sur le moral des ménages et des entreprises et affecté tant la consommation que l’activité économique, qui n’étaient déjà guère florissantes, il est désormais indispensable, pour réduire le déficit, de centrer nos efforts sur les dépenses –mais j’anticipe ici sur le débat sur l’orientation des finances publiques que nous aurons tout à l’heure.
Parce que nous soutenons fermement la politique économique mise en place par le Gouvernement pour gagner la bataille de la croissance et de l’emploi, la grande majorité des membres du RDSE approuvera le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2012.
Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat sur le projet de loi de règlement est pour nous tous l’occasion de porter un regard rétrospectif sur l’année budgétaire 2012. Cet exercice d’approbation des comptes publics est salué par le groupe écologiste, car, comme vous le savez, en matière de finances comme dans les autres domaines de la vie publique, la transparence est pour nous une question essentielle.
L’année 2012 n’a pas été banale : la France ayant élu une nouvelle majorité parlementaire, cela a été une année de transition. À cette occasion, un tournant a été pris. Je pense notamment à la rupture avec la révision générale des politiques publiques, que nous critiquions très fortement, tant les dégâts causés par cette réforme drastique ont été importants dans tous les secteurs.
Depuis, la RGPP a été remplacée par la politique de modernisation de l’administration publique, dont nous attendons que l’exécution soit plus flexible. Afin de mesurer l’efficacité de nos politiques publiques, de nouvelles normes comptables internationales vont d’ailleurs être mises en place. Membre de la commission des affaires européennes, je suis particulièrement sensible à cet enjeu qui, malgré des apparences très techniques, est hautement démocratique.
M. Migaud, Premier président de la Cour des comptes, a tenu à alerter les élus sur ces normes qui sont tout à la fois complexes, instables et assez inadaptées au secteur public et aux spécificités des comptes publics, puisqu’elles émanent d’organismes privés. De ce point de vue, il nous paraît peu légitime, voire pas du tout, de les appliquer aux budgets des États. Je referme la parenthèse, mais j’attends du Gouvernement qu’il s’engage à veiller à l’adoption de normes véritablement adaptées aux spécificités des politiques publiques, au cœur desquelles se trouve la notion d’intérêt général.
Monsieur le ministre, vous avez invoqué la faiblesse de la croissance pour justifier une partie des résultats de l’année 2012, notamment en termes de recettes. Il suffit de reprendre les discours des écologistes, notamment ceux de Jean-Vincent Placé, notre chef de file en matière de finances, pour comprendre que miser sur une hausse de la croissance était assez illusoire.
Depuis longtemps, nous nous gardons de céder aux sirènes du traditionnel dogme productiviste de la « croissance à tout prix ».
Les facteurs de la croissance sont d’ailleurs en train d’évoluer sous nos yeux, prenant des formes qui échappent aux critères habituels d’évaluation du PIB. Je pense notamment à la consommation collaborative et aux indices alternatifs de développement.
Si l’on ne peut ou ne veut compter sur la croissance dans le contexte actuel, il faut en effet maîtriser les dépenses. Encore faut-il faire les bons arbitrages.
Parlons tout d’abord du positif.
Je tiens à féliciter le Gouvernement pour son soutien affirmé aux PME, notamment via la création de la Banque publique d’investissement, la BPI. Cela étant, en matière de politique économique, vous connaissez la position très critique de mon groupe à l’égard de la mise en place du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE.
Je me réjouis également que l’une des priorités du Gouvernement soit de compenser les charges transférées dans le cadre de la décentralisation et d’accompagner l’investissement, notamment en milieu rural.
Je me félicite aussi que l’État ait versé une dotation de 25 millions d’euros au titre de sa participation au fonds de soutien aux collectivités locales ayant contracté des emprunts toxiques.
Je m’interroge toutefois sur les conséquences de la réforme territoriale en cours sur les finances des collectivités locales. Peut-être pourriez-vous, monsieur le ministre, sans anticiper sur le débat sur l’orientation des finances publiques, nous en dire quelques mots ?
Enfin, je salue l’attribution de crédits supplémentaires à la mission Sécurité, notamment pour la création des zones de sécurité prioritaires, dispositif qui accorde une plus grande place à la prévention.
J’en viens maintenant aux arbitrages un peu plus polémiques. Sans surprise, je vais vous parler d’écologie. L’actuel gouvernement ne semble pas vouloir véritablement la valoriser, malgré son intérêt au regard du développement de l’emploi et du dynamisme économique de la France. Le budget de l’écologie subit une baisse constante de ses crédits. Le rapport annuel de performances 2012 témoigne d’un manque d’ambition évident pour les secteurs liés à l’écologie ; je ne parle même pas du budget de 2014… Mon collègue Jean-Vincent Placé aura l’occasion de revenir sur cette question lors du débat sur l’orientation des finances publiques.
Malgré l’affichage d’une volonté de réduire les émissions de gaz à effet de serre et d’amorcer la transition énergétique, je constate que rien n’est fait pour promouvoir le ferroviaire, les voies navigables, la biodiversité et les politiques énergétiques de substitution.
En matière d’arbitrages, nous pourrions également évoquer le budget de la défense. Le rapport annuel de performances du ministère de la défense reste encore très flou. Rappelons d’ailleurs que l’une des réserves substantielles émises par la Cour des comptes concerne les actifs et les passifs de ce dernier.
Par ailleurs, monsieur le ministre, vous semblez valoriser les gels et les surgels qui ont été effectués. Je tiens à vous alerter sur les risques que fait courir cette méthode en termes de dégradation indifférenciée des politiques publiques, alors qu’il faudrait définir des priorités et cibler les secteurs dans lesquels les économies peuvent être réalisées.
J’ai beaucoup évoqué les dépenses, mais n’oublions pas une chose concernant les recettes : je crois que les électeurs qui ont voté pour l’actuelle majorité ne sont pas foncièrement réticents à l’idée de contribuer à l’effort public, autrement dit à « payer des impôts », si, et seulement si, ils bénéficient en contrepartie d’un système de solidarité et de services publics d’une qualité irréprochable. C’est sur cette exigence que nous devrions nous concentrer dans les mois et années à venir.
L’année 2012 a marqué une rupture, mais également, d’étrange façon, une continuité, avec une hausse de la TVA, un accroissement de la rigueur, des discours réitérés sur la compétitivité et la flexibilité…
Le gouvernement actuel a, selon M. Moscovici, fait le choix de « ne pas ajouter l’austérité à la récession », afin de ne pas accroître le risque d’effet récessif.
Certes, mais il nous faut être vigilants, car de la rigueur à l’austérité, il n’y a qu’un pas ! Dès lors que l’on met en œuvre une politique d’austérité, les effets multiplicateurs sont très importants.
La stratégie économique et budgétaire sera plus amplement discutée lors du débat de tout à l’heure ; je ne m’étends donc pas davantage sur ce sujet.
En conclusion, monsieur le ministre, le groupe écologiste vous réitère sa confiance et salue la sincérité des comptes publics de l’année 2012. Nous nous réjouissons que la Cour des comptes n’y ait trouvé finalement que très peu à redire. Fort naturellement, nous voterons ce projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2012. §
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la France a toujours été un pays de rhétorique, mais avec le verbalisme de la gouvernance actuelle, l’action ne suit jamais ou presque les paroles abondamment versées lors des émissions télévisées en prime time. Le discours présidentiel ne prépare pas les esprits aux décisions : il brûle toute son énergie dans sa seule énonciation pour ensuite s’éteindre en moult et moult renoncements et, depuis hier, en admonestations.
Cet ultime avatar nous conduit tout droit au chaos des réalités, et des actes plutôt symboliques, telle la hausse des impôts sur les hauts revenus, illustrée par la fameuse taxation à 75 %, peuvent entraîner des conséquences terriblement réelles.
Avec un taux de prélèvements obligatoires atteignant aujourd’hui 45, 6 % du PIB et des dépenses publiques en accélération constante, représentant 56 % du même PIB, nous allons dépasser l’emblématique Danemark, pour nous installer en tête des pays de l’OCDE et, surtout, nous éloigner encore un peu plus des fondamentaux de l’économie allemande, notre principale partenaire et, on l’oublie souvent, concurrente.
Ici, au Sénat, nous assistons, au-delà de l’étonnement, au retour d’un jacobinisme d’un autre temps. Pendant une longue année, nous avons enduré vos ressentiments, souvent fort peu républicains, contre vos opposants et, plus grave encore, contre ceux qui assurent le bien-être de la nation : les entrepreneurs, cette infime minorité qui, au quotidien, affronte les risques de la confrontation mondiale.
Nourrir un électorat de la stigmatisation des riches repose sur un concept dépassé de l’exploitation, car la richesse des uns est en elle-même la source de la richesse des autres. « Mon ennemi, c’est la finance » : ce slogan a aussi trouvé ses exactes limites dans un projet de loi dit de séparation et de régulation des activités bancaires qui devait disjoindre la gestion des dépôts de celle des activités de marché mais qui, permettez-moi de vous le dire, chers collègues de gauche, porte plus la marque des Visiteurs du soir que le sceau du hallebardier du Bourget…
Le ministre est très satisfait, mais tous les voyants sont au rouge : chômage record, endettement record, baisse record du pouvoir d’achat, baisse record de la consommation des produits manufacturés, diminution record du taux de marge des entreprises, hausse record des impôts, niveau record de la dépense publique…
La Cour des comptes et le Haut Conseil des finances publiques vous disent, monsieur le ministre, que vos choix ne sont pas les bons, mais vous prétendez que tout va bien, qu’il faut laisser les stabilisateurs automatiques opérer et qu’il n’est pas besoin d’un collectif budgétaire, car les orientations retenues en 2012 étaient les bonnes…
Mes chers collègues, la gauche est forte où le peuple est faible. À travers ce projet de loi de règlement, le Gouvernement nous présente un premier bilan, qui démontre à l’envi que le parti socialiste n’est plus à même de vraiment traiter la question sociale.
Votre stratégie budgétaire a provoqué une perte historique de pouvoir d’achat de 0, 9 % en 2012. Il s’agit du premier recul depuis 1984, équivalent à celui qui avait été constaté à la suite du tournant de la rigueur opéré par Pierre Mauroy.
En vérité, le parti socialiste se transforme en parti sociétal afin de capter de nouvelles clientèles électorales, démarche utile à sa seule pérennité, et se révèle incapable d’assumer les réformes de structures indispensables au pays.
La ligne politique, à l’issue de douze mois de couacs, est non pas la justice, encore moins la cohérence susceptible d’indiquer un cap, mais un attentisme qui nous conduit directement à la récession et au triomphe, même pas discret, des égoïsmes.
Comment comprendre cette gouvernance qui, depuis douze mois, diffère, louvoie, stigmatise et renvoie à des comités Théodule les décisions les plus urgentes, alors que la variable temps est d’une importance décisive dans l’équation de l’économie réelle ?
Que penser d’une gouvernance qui commande un rapport sur la compétitivité de nos entreprises pour le faire discréditer par une partie de sa majorité avant même sa publication ? En réalité, vous alimentez les controverses avec des idées fausses.
Faute d’étude d’impact, le CICE concernera non pas les emplois délocalisables, de nature industrielle, mais les emplois de la grande distribution, des travaux publics et des entreprises publiques, comme EDF ou La Poste. Ces erreurs, mes chers collègues, nourrissent la défiance envers le discours politique.
Que penser d’une gouvernance qui érige la création d’une banque publique d’investissement en priorité absolue et qui décide la non-déductibilité fiscale des intérêts des prêts conclus par les entreprises pour financer leurs investissements ? Il n’est pas inutile de rappeler que les capacités d’intervention de la BPI se situeront entre 20 milliards et 40 milliards d’euros et que les banques prêtent environ 1 000 milliards d’euros par an aux entreprises pour financer leurs investissements.
C’est une réalité, mes chers collègues, et la douzaine d’énarques – il paraît qu’ils sont treize, en fait ! – siégeant au conseil d’administration de la BPI n’y changera rien, pas plus que la location de 10 800 mètres carrés de locaux supplémentaires, boulevard Hausmann, pour 6, 6 millions d’euros par an, …
… sans parler des 350 000 euros dépensés pour la création d’un logo et des 7 millions d’euros consacrés à une campagne de communication sur le lancement de cette nouvelle structure. Monsieur le rapporteur général, vous avez raison : l’austérité, ce n’est pas pour tout le monde, en tout cas pas pour la nomenklatura de ce pays !
Que penser d’une gouvernance qui taxe jusqu’à concurrence de 60 % les cessions de fonds d’entreprises petites et moyennes, souvent familiales, pour déplorer ensuite les départs massifs de talents ou le faible renouvellement des équipes âgées ?
Que penser d’une gouvernance si soucieuse de transparence, qui amène pourtant la Cour des comptes à déclarer qu’elle n’a pu obtenir communication ni des prévisions internes de la direction générale du Trésor, ni de celles de la direction du budget sur l’exécution du budget de l’État, ni même de l’information des contrôleurs budgétaires et comptables ministériels ? Il s’agit là d’un inquiétant glissement à la grecque, monsieur le ministre. Si telle est votre conception de ce que doit être un État transparent, permettez-moi de vous dire que nous ne la partageons pas.
Que penser d’un gouvernement qui s’obstine à refuser de présenter, pour assurer la sincérité des comptes, un projet de loi de finances rectificative, alors même que les documents les plus récents publiés par la Cour des comptes montrent que nous sommes en présence d’un dérapage ? Une quinzaine de milliards d’euros de recettes relève désormais du virtuel, la prévision de croissance de 0, 8 % pour 2013 est illusoire, tandis que les rentrées fiscales s’essoufflent et que les dépenses nouvelles s’amoncellent, avec la création de 10 000 postes supplémentaires dans l’éducation nationale, le financement de places de crèche, les emplois d’avenir, un complément de financement pour le budget européen.
Que penser d’un gouvernement qui oublie la baisse historique de 0, 9 % en 2012 du pouvoir d’achat des Français –à titre de comparaison, celui-ci avait progressé de 0, 7 % en 2011 et de 0, 9 % en 2010 –, corrélée à une baisse de la consommation de 0, 4 % faisant directement écho à la suppression de l’exonération fiscale des heures supplémentaires pour 9 millions de salariés, ces nouveaux riches créés par la loi TEPA en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat ?
Que penser d’une loi censée protéger les citoyens des dérèglements bancaires qui confie à cinq hauts fonctionnaires de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution la possibilité d’utiliser le fonds de garantie des dépôts pour procéder à des recapitalisations de banques ou d’institutions financières ? Vous admettrez que ce dispositif, qui figure à l’article 6 de la loi en question, n’est pas sans risque pour les millions de déposants.
Ainsi, une loi censée protéger les déposants pourrait, au contraire, dans certaines circonstances, les priver de la garantie de leurs dépôts jusqu’à 100 000 euros, sans qu’ils en soient même informés. Voilà comment le pouvoir agit pour faire plier les banques !
La mondialisation est une réalité irréversible. Elle impose un nouveau partage du travail et des richesses, qui s’opérera dans l’égalité de la consommation et du travail. En un mot, nous ne pouvons plus consommer au-delà de ce que nous produisons. Le déficit de notre balance commerciale s’établit désormais à quelque 80 milliards d’euros. Vous auriez dû, monsieur le ministre, redéployer des moyens substantiels pour soutenir la production des biens. Au lieu de cela, avec votre matraquage fiscal, vous avez privé les entreprises de moyens importants qui leur étaient nécessaires pour financer leurs investissements et les emplois de demain.
Je dois néanmoins féliciter M. le rapporteur général pour sa dextérité à manier, selon les circonstances, les concepts de solde structurel et de solde conjoncturel. Il parvient toujours à démontrer que le solde structurel s’améliore invariablement quand le déficit nominal s’aggrave.
Il me semble pourtant que l’on emprunte pour combler le solde déficitaire effectif ! Or celui-ci va considérablement s’aggraver, alors que nos besoins en prêts sont déjà de l’ordre de 180 milliards d’euros. Rappelons qu’une augmentation d’un point des taux d’intérêt entraîne à terme un alourdissement de 2 milliards d’euros de la charge annuelle de la dette, soit de 4 milliards d’euros en deux ans et de 10 milliards d’euros en cinq ans !
Notre rapporteur général a aussi beaucoup de mérite – c’est un travail très compliqué, par les temps qui courent – à baliser sur des graphiques la loi de finances, la loi de programmation annuelle, adressée aux autorités européennes, un programme de stabilité assorti d’engagements et d’objectifs, dont la caractéristique principale est une très grande instabilité… Félicitations, monsieur le rapporteur général !
Qui se souvient des assurances formelles données par M. Moscovici, il y a six mois, sur le respect intangible, par la France, de ses engagements envers l’Europe et les Français ? Je pense, bien sûr, aux fameux 3 % de déficit. Ce chiffre n’est pas un totem : il s’agit du seuil de déficit à compter duquel on n’aggrave pas la dette du pays.
Que penser des déclarations de M. Hollande, annonçant une trêve fiscale, alors que nombre d’excellences n’écartent pas un recours à des impôts supplémentaires, d’autres appelant de leurs vœux le « grand soir fiscal » que constituerait la fusion de la CSG et de l’impôt sur le revenu, assortie bien entendu d’une très forte progressivité ?
Que penser, monsieur le ministre, de cet héroïsme déployé dans les médias par un gouvernement aux prises avec une situation gravissime qu’il aurait héritée de ses prédécesseurs ? Selon la Cour des comptes, il a « très modestement » réussi à réduire le déficit de 3, 57 milliards d’euros en 2012 – montant à rapprocher des 14 milliards d’euros d’économies réalisées en 2011 –, tout en prélevant 22 milliards d’euros d’impôts et de taxes supplémentaires. Héroïque encore, la diminution nette des dépenses de l’État, qui s’élèveront à 371, 4 milliards d’euros, soit une économie de 100 millions d’euros par rapport à l’année précédente. C’est fantastique !
L’amorce du redressement des comptes repose essentiellement, en réalité, sur une fiscalité supplémentaire, sans qu’aucun effort notable soit réalisé sur la dépense publique. Ainsi, notre dette a continué d’augmenter. Elle est passée de 85, 8 % à 90, 2 % du PIB en un an, soit une hausse de 4 %, alors que, au sein de la zone euro, l’augmentation de la dette n’a été que de 2 % en moyenne.
Les dépenses publiques représentent 56, 6 % du PIB, soit dix points de plus qu’en Allemagne. Il devrait donc être permis de comparer la qualité de nos services publics respectifs : éducation, formation professionnelle, service emploi, transports, recherche. Pensez-vous, monsieur le ministre, qu’ils soient meilleurs en France qu’en Allemagne ? La réponse à cette question devrait nous amener à une réflexion intelligente sur le sujet.
Nous notons aussi un moindre rendement de l’impôt sur les sociétés. Plus alarmant encore, les recettes de TVA ont diminué de 6 milliards d’euros environ, évolution caractéristique d’une économie en récession.
Naturellement, vous allez invoquer la responsabilité de vos prédécesseurs.
L’esprit de revanche ayant marqué vos six premiers mois au pouvoir vous a conduits à prendre des décisions, notamment à l’égard des entreprises et des entrepreneurs, qui ont aggravé et accéléré le processus menant au marasme économique.
Dès juillet 2012, vous avez supprimé d’un trait de plume le dispositif fiscal de « TVA sociale », qui aurait pourtant permis de transférer, dès le mois d’octobre dernier, 13 milliards d’euros de charges sociales vers la fiscalité et de doper ainsi la compétitivité des entreprises, puis vous découvrez, à l’automne, le rapport Gallois, qui vous alerte sur ce sujet devenu brûlant.
À grands sons de trompe, vous inventez le CICE, pour remplacer ce que vous avez supprimé, mais en ratant la cible, l’industrie. La mise en place de ce dispositif qui s’apparente à une usine à gaz a exigé la rédaction d’une instruction fiscale de quarante et une pages…
Nous étions d’accord sur le principe d’un choc de compétitivité, pour un montant de 20 milliards d’euros par an. Aujourd’hui, nous en sommes bien loin. De questionnement en questionnement sur la réalité du financement et sur son montant, la Cour des comptes évoque un coût de 7 milliards d’euros pour 2014. Qu’en pensez-vous, monsieur le ministre ?
Dans ce débat, au-delà des ratios macroéconomiques, il n’est pas inutile d’observer les résultats, les conséquences concrètes de la forte pression fiscale exercée d’abord sur les particuliers, puis sur les entreprises.
La forte pression fiscale subie par les ménages est dans une large mesure à l’origine d’un net fléchissement de la consommation. Les dépenses de consommation des ménages ont ainsi reculé de 0, 2 % en 2012, après être restées stables en 2011. Pour les seuls produits manufacturés, les dépenses ont diminué de 0, 8 % en 2012, après une augmentation de 0, 9 % en 2011 ; c’est la plus forte baisse annuelle depuis 1993.
La pression fiscale a également provoqué une perte historique de pouvoir d’achat, ayant pour conséquence une diminution de 5, 7 milliards d’euros des recettes de TVA en 2012.
La pression fiscale sur les entreprises a entraîné, quant à elle, un recul des investissements et des créations d’emplois. Nous avons assisté à une diminution de 13 % des implantations d’entreprises en France en 2012 par rapport à 2011, alors que le recul n’a été que de 3 % en moyenne en Europe. La baisse s’élève à 25 % pour les implantations industrielles.
La pression fiscale exercée sur les entreprises a également eu pour effet une baisse de 20 % du nombre d’emplois créés et de 9, 6 % du montant des investissements des business angels en 2012. Sur l’ensemble de cette même année, le taux de marge des entreprises s’établit, en moyenne, à 27, 9 %, ce qui marque un étiage depuis 1985, contre 28, 5 % en 2011. En conséquence, les recettes de l’impôt sur les bénéfices des sociétés ont baissé de 3, 6 milliards d’euros en 2012.
Ce repli de la consommation et des investissements a des effets récessifs sur l’économie française. Il démontre que l’outil fiscal ne peut suffire à redresser les comptes du pays. Ce redressement exige des réformes structurelles courageuses.
Là réside votre grave erreur en matière de stratégie budgétaire : vous avez, d’abord, presque tout misé sur l’impôt, au point d’arriver à un niveau de prélèvements tel que le rendement fiscal diminue désormais, ce qu’illustre parfaitement la célèbre courbe de Laffer, dont l’enseignement est que trop d’impôts tue l’impôt.
Le rendement diminuant, vous ne pouvez être au rendez-vous de vos objectifs !
Nul besoin de tergiverser, le constat est sans appel : nous observons en 2012 un net fléchissement de vos résultats en matière budgétaire, clairement imputable aux choix de ce gouvernement, ainsi qu’à des discours souvent malencontreux, qui sapent la confiance des acteurs de l’économie réelle et les découragent d’investir.
Certes, avant la crise de 2008, durant la période 2002-2006, mais aussi bien avant, nos dépenses publiques étaient trop élevées. Pendant de nombreuses années, nous avons tous été coresponsables d’un manque de vertu budgétaire, quel que fût le gouvernement en place. Après la crise, en revanche, un effort sans précédent a été accompli sur les dépenses, et vous bénéficiez encore de son prolongement en 2012.
S’il est vrai que nos dépenses, en moyenne annuelle, ont augmenté plus fortement entre 2007 et 2011 qu’en 2012, c’est parce que nous avons subi, en 2008, une crise qui a imposé la mise en place, dans l’urgence, d’un plan de relance pour sauver notre économie.
Ce plan de relance avait d’ailleurs été jugé insuffisant par les socialistes, …
… qui prônaient l’engagement de plus de dépenses, financées en grande partie par l’emprunt.
Du reste, le plan de relance du gouvernement d’alors avait été salué par tous les commentateurs internationaux pour son équilibre et son efficacité. Il a même permis à la France de mieux résister aux conséquences de la crise que l’Allemagne.
Monsieur le ministre, la crédibilité d’un gouvernement repose sur le respect des objectifs qu’il s’est fixé. Il y a deux jours, lors de l’examen à l’Assemblée nationale de ce même texte, Pierre Moscovici a dit que la crédibilité devait « rester la boussole des orientations de nos finances publiques ». Pardonnez-moi cette boutade, mais lui-même n’est pas crédible : c’est raté pour 2012 et 2013 !
En un an, vous n’avez respecté aucun de vos objectifs. Pour notre part, nous avions atteint et même dépassé les nôtres, les années précédentes.
Là encore, les chiffres sont implacables. La loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 fixait un objectif d’endettement public de 82, 9 % du PIB en 2010 ; nous avons fait 82, 4 %. Pour 2011, l’objectif était de 86, 2 %, et nous avons réalisé 85, 8 %. Pour 2012, l’objectif en matière d’endettement public était fixé à 87, 4 % du PIB ; à votre arrivée au pouvoir, vous l’avez révisé à 89, 9 % dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017. Au final, vous atteignez le chiffre de 90, 2 % !
Pour en finir avec les comparaisons, je rappellerai que, après l’explosion du déficit public en 2009, imputable à la crise de 2008, tous les objectifs de réduction du déficit transmis à Bruxelles ont été atteints, et même nettement dépassés. Ainsi, le déficit public s’est élevé à 7, 1 % en 2010, au lieu des 7, 7 % prévus dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014. Il fut de 5, 3 % en 2011, au lieu des 6 % prévus.
Il y a un an, dans sa déclaration de politique générale, M. Ayrault annonçait le redressement dans la justice. Aujourd’hui, à l’heure d’un premier bilan, le redressement amorcé par vos prédécesseurs est brisé. Ce sont les plus démunis d’entre nous, les 320 000 chômeurs supplémentaires que compte notre pays, qui souffrent le plus de vos impérities graves et multiples.
C’est donc au regard du non-respect de vos engagements, de votre inaptitude à réformer pour le bien de tous, de votre crédibilité évanouie que le groupe UMP votera contre ce projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2012. §
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en mai 2012, les Françaises et les Français, dans leur diversité, ont signifié leur rejet de la politique menée par la droite, qui était au pouvoir depuis dix ans.
Le vote de mai, confirmé lors des élections législatives de juin, a conduit à confier à François Hollande et à une partie de la gauche la responsabilité de mener une politique nouvelle, s’écartant des choix jusqu’alors opérés.
Les membres du groupe CRC ont, dès le début de la nouvelle législature, défendu leur vision des profonds changements dont notre pays a besoin.
Nous prenons chaque texte pour ce qu’il est, pour ce qu’il comporte de mesures que nous pouvons juger positives.
Les positions que nous avons prises au cours de l’exercice budgétaire de 2012 ont d’ailleurs été l’illustration de cette attitude. Nous avons approuvé le projet de loi de finances rectificative de juillet, qui contenait notamment des mesures de justice fiscale que nous avions toujours demandées. Il n’en fut pas de même pour le collectif de fin d’année, celui-ci comportant, entre autres dispositions, une hausse de la TVA et la création du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, un dispositif d’allégement des cotisations sociales des entreprises qui ne nous semble pas être l’outil adéquat pour redresser notre économie, mais dont pourraient bénéficier certaines grandes entreprises.
Au cours des six derniers mois de l’année 2012, nous avons assisté à une sorte de raccourci des orientations politiques du Gouvernement, d’abord ouvert à la justice sociale et fiscale, taxant les plus hauts revenus et patrimoines, puis beaucoup moins enclin à poursuivre dans cette voie, comme l’a illustré sa capitulation face au mouvement des patrons « pigeons » refusant de verser les impôts dus sur les plus-values de cession d’entreprise, qui a entraîné une perte de recettes de 750 millions d’euros.
Les salariés qui créent la richesse de l’entreprise payent, eux, leurs impôts. Ils sont d’ailleurs de plus en plus nombreux à le faire, à la suite du gel du barème décidé en 2011, sur lequel vous n’avez pas voulu revenir.
Quant aux prélèvements supplémentaires, ils n’ont pas contribué à l’amélioration des services publics.
Le Gouvernement entend réduire le déficit, mais l’effet récessif de la hausse des prélèvements n’est contrebalancé par aucun effet positif sur la dépense publique.
L’exécution de la loi de finances pour 2012, marquée par un déficit supérieur à 87 milliards d'euros, atteste d’une prévision initiale trop optimiste, notamment en termes de croissance. En effet, la progression du PIB a été nulle en 2012, alors que le cadrage de la loi de finances reposait sur une hypothèse de croissance de 1 %.
Le PIB stagne depuis la fin de 2007, et cinq années de sarkozysme n’ont conduit qu’à une dispendieuse distribution d’argent public, sans résultat concret en termes d’innovation, de croissance et d’emploi. M. Delattre s’est bien gardé de le relever !
La baisse du taux de marge des entreprises, sans réduction des dividendes versés – ils représentent 40 milliards d'euros pour les entreprises du CAC 40 –, la moindre productivité du travail ne sont pas dues à une soudaine « paresse » qui gagnerait les salariés. Ce sont les choix fiscaux et sociaux qui favorisent le développement de l’emploi sous-qualifié au détriment de l’emploi qualifié, l’externalisation croissante de certaines activités de logistique ou d’entretien, le développement des emplois précaires dans le champ de l’action sociale.
L’augmentation du crédit d’impôt recherche dissimule mal les opérations d’optimisation des dépenses d’innovation, l’externalisation des coûts vers des sociétés plus précaires et plus fragiles. Il faut éliminer ces gaspillages de fonds publics sans portée économique réelle.
Dire que le déficit public constaté en 2012 témoigne d’un médiocre état de santé de l’économie constitue évidemment une lapalissade. Avec une croissance nulle, un PIB en stagnation depuis 2007, nous ne pouvons pas présenter des comptes publics améliorés, malgré les hausses d’impôts. Cela confirme qu’il est grand temps de changer notre fusil d’épaule si nous voulons parvenir à la fois à réduire les déficits publics, à relancer l’activité économique et à créer les conditions d’une réduction du chômage. Quel que soit le point de vue retenu, ce dernier constitue la clé de voûte de nos difficultés.
Le débat sur l’orientation des finances publiques de tout à l’heure sera probablement l’occasion, pour certains, de justifier encore et toujours la logique d’austérité qui guide les politiques publiques en Europe. Toujours plus d’impôts, toujours moins de dépenses publiques, loi de programmation des finances publiques et traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance : tel est le contrat social version Commission européenne !
Or ce type de projet politique ne peut que susciter des tensions sociales et l’incompréhension de la plupart de nos compatriotes. Il est donc temps que nous envisagions les choses autrement, à la lumière des faits.
Le déficit public est de 87 milliards d'euros. Soit ! Mais notre législation fiscale comporte des dispositions dérogatoires qui soulignent la nécessité d’engager une vraie réforme fiscale.
Aux multiples niches fiscales s’ajoutent le remboursement de la TVA dite « déductible », à hauteur de 52, 4 milliards d’euros, le report en arrière des déficits, dont le coût, jamais évalué précisément, peut être estimé, bon an mal an, entre 10 milliards et 12 milliards d’euros. Cet ensemble de dépenses fiscales et assimilées représente plus de 200 milliards d’euros…
Où se situe la vérité, quand le rapport Queyranne, pour sa part, évoque 110 milliards d'euros d’aides aux entreprises, incluant aussi celles qui sont versées par les collectivités territoriales – 6, 5 milliards d'euros –, les allégements généraux de cotisations sociales – 21 milliards d'euros –, les aides budgétaires – 23 milliards d'euros –, qu’elles soient directes, par le biais de subventions, ou indirectes, sous forme de bonifications de prêts ou de ressources fiscales affectées.
C’est bel et bien cette politique de réduction continue de la recette publique, qu’il s’agisse de nos impôts ou des cotisations sociales, qui est aujourd’hui clairement sur la sellette, et non un prétendu excès de la dépense publique, comme voudraient nous le faire croire les économistes bien-pensants.
Il est vrai que, pour imposer le recours à l’assurance maladie individualisée et à la retraite par capitalisation, il faut passer par la phase critique de destruction des solidarités que la dépense publique soutient et favorise.
Pour notre part, nous estimons nécessaire d’inverser la tendance et de rendre à l’action publique tout son sens. Comme la grande majorité des élus, nous sommes évidemment opposés à la remise en question des concours budgétaires de l’État aux collectivités locales, concours qui ne sont que la compensation d’évolutions fiscales et contribuent à maintenir une activité économique sur tout le territoire national, tout en apportant un soutien aux populations.
Nous sommes partisans d’une profonde réforme fiscale, accompagnée d’un effort d’investissement public peut-être sans précédent dans les domaines des grandes infrastructures, du logement, de la protection de l’environnement, ce dernier étant créateur d’emplois, de nouveaux métiers et porteur d’un projet pour la jeunesse de ce pays.
L’argent existe : n’oublions pas que 300 milliards d’euros de recettes fiscales alimentent les comptes de l’État et que les pertes engendrées par l’évasion fiscale atteignent au moins 80 milliards d'euros.
Par ailleurs, en raison de la position de la France en Europe, il est évident que nous devons obtenir des concours de l’Union pour la réalisation d’infrastructures utiles à notre pays comme à nombre de nos voisins.
Mais nous avons aussi d’autres outils : des dizaines de milliards d’euros déposés sur les livrets A et les livrets de développement durable ont été laissés à la libre disposition des banques. Cette situation doit cesser et la centralisation des fonds déposés doit être renforcée en vue de faire un usage intelligent des sommes disponibles. De même, la Banque publique d’investissement doit être un véritable établissement de crédit. Est-il impossible de concevoir des formes de prêt à taux zéro pour certaines entreprises, voire de mettre en place un différé d’amortissement pour certaines opérations ?
Agir sur les deux leviers que sont la réforme fiscale et l’outil bancaire est, sans nul doute, le plus sûr moyen de réduire le déficit public. Il l’est bien plus, en tout cas, que la mise en œuvre des logiques de réduction de la dépense publique, dont ne résulte, in fine, qu’une longue série d’atteintes au pouvoir d’achat des plus modestes et à la solidarité nationale.
Pour toutes ces raisons, les membres du groupe CRC s’abstiendront sur le présent projet de loi de règlement. §
Monsieur le ministre, vous êtes dans votre rôle quand vous relevez les points positifs du présent projet de loi du règlement.
Vous avez tout d’abord insisté sur la certification des comptes publics par la Cour des comptes, démarche que la France est quasiment le seul pays au monde à pratiquer. À cet égard, on peut noter avec satisfaction une réduction du nombre des réserves substantielles sur les comptes qui avaient été formulées en 2011. Dont acte !
Vous avez ensuite mis en valeur une légère amélioration de la situation financière de notre pays. Il est vrai que celle-ci est un peu moins catastrophique qu’elle ne l’était en 2011… On enregistre ainsi une réduction de 3, 6 milliards d'euros du déficit, lequel s’établissait à 14 milliards d'euros en 2011. Dans une conjoncture difficile, avec une croissance presque nulle, ce résultat peut être considéré comme honorable.
Vous voyez donc le verre à moitié plein ; pour ma part, je vais expliquer pourquoi il me semble surtout à moitié vide.
Selon moi, le présent projet de loi comporte quatre signaux d’alerte.
Premièrement, le déficit s’établit à 87, 2 milliards d'euros, soit trois mois de dépenses de l’État, financés à crédit. La France fait partie des mauvais élèves de l’Union européenne, plutôt des cancres que des premiers de la classe. Or quand on prétend donner des leçons à l’Europe, il faut rapidement mettre de l’ordre dans ses comptes !
Deuxièmement, la dette publique atteint aujourd’hui 1 834 milliards d'euros, soit 70 000 euros par ménage. On en a peu parlé jusqu’à présent, alors que l’on a abondamment reproché au précédent gouvernement de l’avoir portée à 1 600 milliards d'euros.
En 2012, nous avons eu la chance de bénéficier de taux d’intérêt très bas, ce qui nous a permis d’économiser 2, 5 milliards d'euros. Cela explique pour partie la baisse du déficit. Cependant, je ne suis pas sûr que cette situation favorable perdure. Nous observons d’ores et déjà les prémices de tensions sur les marchés obligataires. Personne ne l’a souligné, mais une épée de Damoclès plane au-dessus de nos comptes. Le jour où les taux remonteront, certains, cherchant comme à l’habitude un bouc émissaire, insulteront les marchés, les accuseront de nous étrangler. Aujourd'hui, on ne les remercie d’ailleurs guère de nous faire bénéficier de taux bas… Quoi qu’il en soit, si demain nos charges d’intérêts explosent, il ne faudra pas leur en imputer la responsabilité.
Troisièmement, le taux de prélèvements obligatoires, qui s’établit désormais à 45 %, n’a jamais été aussi élevé. L’augmentation des impôts a un effet récessif beaucoup plus important que la baisse des dépenses publiques. Pour ma part, je considère qu’alourdir sans cesse les impôts constitue une erreur économique majeure. Si l’on veut sortir notre pays du marasme économique dans lequel il se trouve, il faut plutôt consacrer ses efforts à la réduction des dépenses.
J’appelle moi aussi de mes vœux une grande réforme fiscale, mais, contrairement à Mme Beaufils, je souhaite qu’elle consiste avant tout en un choc de simplification, en vue de retrouver une fiscalité économiquement efficace et socialement juste. Lors du débat budgétaire de l’automne, nous aurons l’occasion de faire des propositions sur ce sujet d’une importance majeure pour l’évolution économique de notre pays.
Quatrièmement, les engagements hors bilan, évalués aujourd’hui à 3 000 milliards d’euros, ont triplé en moins de dix ans, puisque, dans son rapport de 2005, M. Pébereau les estimait à 1 000 milliards d’euros.
Au sein de ces engagements hors bilan, on trouve un peu de tout, mais on n’identifie rien !
Par exemple, fort opportunément, Jean Arthuis a mis en évidence qu’EDF a constitué dans ses comptes pour 2012 une créance de 4, 9 milliards d’euros à l’égard de l’État. Or nous ne constatons pas cette dette dans les comptes de l’État. Vous nous avez dit, monsieur le ministre, qu’elle figurait dans les engagements hors bilan, mais on ne l’y retrouve pas. Cela nous inquiète au regard de la sincérité des comptes de l’État.
Par ailleurs, la dette de l’UNEDIC, qui s’établissait à 14 milliards d’euros à la fin de l’année dernière et devrait atteindre quelque 20 milliards d’euros au terme du présent exercice, est garantie par l’État. Quelles limites fixe-t-on aux partenaires sociaux qui gèrent cette association afin qu’ils cessent d’alourdir la dette de l’État ?
Toujours dans le même esprit, la dette de l’entreprise publique RFF s’élevait à 31, 5 milliards d’euros à la fin de l’année 2012, mais on ne trouve nulle part trace de cette dette dans les comptes de l’État !
Nous nous interrogeons donc sur l’exhaustivité, la sincérité et la fidélité des comptes de l’État. Ces qualités, qui caractérisent la comptabilité des entreprises, je ne les retrouve malheureusement pas totalement dans la comptabilité publique nationale.
Je voudrais en outre insister sur deux notions apparues récemment, qui me surprennent beaucoup : celles de « nouvelles économies » et de « déficit structurel ».
S’il existait un livre intitulé Les Finances publiques pour les nuls, ses auteurs auraient du mal à expliquer en quoi consistent les nouvelles économies. Si je comprends bien, pour le Gouvernement, faire des économies, c’est ne pas dépenser plus qu’avant, parce que les dépenses publiques sont censées suivre l’évolution de l’inflation. Certes, mais les ménages et les entreprises qui ont du mal à boucler leurs fins de mois et se serrent la ceinture n’entendront jamais un tel discours : pour eux comme pour moi, faire des économies, c’est diminuer les dépenses. Je pense qu’il est possible de le faire. Notre groupe serait prêt à vous suivre dans cette voie, monsieur le ministre, même si elle est difficile. Il faut du courage et de l’audace pour l’emprunter, mais nous pensons que la situation l’exige.
La distinction entre déficit structurel et déficit conjoncturel m’étonne également. J’ai fini par comprendre que, dans l’esprit du Gouvernement, il est vertueux de réduire le déficit structurel, mais que l’on peut laisser filer le déficit conjoncturel. De fait, aujourd'hui, le déficit structurel baisse, tandis que le déficit conjoncturel augmente.
C’est ce qu’observe la Cour des comptes dans son rapport, monsieur le ministre. En tout cas, le déficit conjoncturel ne baisse pas comme le déficit structurel, qui a diminué de 1, 2 %, ainsi que vous l’avez indiqué tout à l'heure.
En poussant le raisonnement jusqu’à l’absurde, on pourrait imaginer retrouver bientôt un excédent structurel tout en gardant un déficit conjoncturel. Monsieur le ministre, vous nous expliquerez sur quelles bases est déterminé le déficit conjoncturel. Je pense pour ma part que la croissance nulle que nous connaissons aujourd’hui n’est pas si conjoncturelle que cela… Si nous ne réalisons pas dans les mois à venir les réformes de structures majeures qui auraient déjà dû être entreprises par le Gouvernement, notre taux de croissance restera très faible et le déficit structurel augmentera fortement.
En conclusion, je dirai que nous sommes assez inquiets. Le déficit dérape, la dette atteint des sommets et les impôts n’ont jamais été aussi élevés. Nous avons des doutes sur la sincérité, l’exhaustivité et la fidélité d’une partie du budget. Dans ces conditions, et en l’absence de vision claire des programmes d’économies que vous allez nous proposer, nous voterons contre ce projet de loi de règlement. §
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de règlement porte sur un exercice budgétaire particulier, celui de l’année 2012. L’examen des projets de loi de règlement ne relève pas du simple exercice formel ; c’est particulièrement flagrant dans le cas du présent texte, qui nous permet – enfin, ai-je envie de dire – d’en finir avec la confrontation de nos intentions au bilan de dix années de gestion du pays par la droite, qui pouvait être agaçante, j’en conviens, pour nos collègues de l’opposition.
Le projet de loi de règlement du budget de 2012 nous offre un comparatif « sur pièces » entre ce qui a été fait, ou pas, par les uns et par les autres : exécution budgétaire contre exécution budgétaire, en toute transparence. L’état des lieux de l’exécution du budget de 2012 constituera également une mise en jambes indispensable avant les débats que nous aurons dans la soirée sur les perspectives pour 2014 et les exercices suivants.
Au risque d’être fastidieuse – mais je tiens à être précise –, je reprendrai les principaux axes de l’exécution budgétaire de l’année 2012, et je me permettrai de répondre, non par des déclarations d’intentions, mais bien par des résultats, aux critiques parfois caricaturales qui nous ont été adressées l’été dernier, lors de notre arrivée aux responsabilités.
S'agissant du déficit public, que n’avons-nous entendu il y a exactement un an, mes chers collègues ! Tenu d’une main de fer par les gouvernements de droite successifs, il aurait dû allègrement dériver une fois la gauche arrivée au pouvoir. Mais il n’en a rien été : le déficit budgétaire a été réduit en 2012.
Voilà un an, la Cour des comptes craignait non pas qu’une affaire aussi sérieuse que le pilotage du budget tombe aux mains de la gauche, mais que les erreurs de budgétisation commises par la droite lors de la préparation du budget de 2012 soient à l’origine d’un dérapage du déficit. En effet, les prévisions de croissance avaient été largement surestimées par le gouvernement précédent : celle-ci a été non pas de 1 %, comme espéré, mais nulle.
Si nous n’avions pas pris des mesures d’urgence à l’été 2012, le déficit aurait risqué de déraper de près de 2 milliards d’euros et d’approcher 5, 5 % du PIB en fin d’année. Vous le voyez, il ne faut donc pas avoir peur : nous faisons de la bonne gestion ! Alors que vous nous accusiez de défaire pour le plaisir de défaire, nos mesures budgétaires et fiscales visaient simplement à remédier à votre défaut d’anticipation.
Il faut également souligner l’effort structurel massif réalisé en 2012, le déficit structurel étant passé de 5, 1 % à 3, 9 %. C’est l’effort le plus important consenti depuis quinze ans. Pour éclairer le mauvais chemin parcouru ces dix dernières années, j’oserai une dernière mise en perspective, ou en abyme, en rappelant que le déficit public, qui atteignait près de 91 milliards d’euros en 2011, s’élevait – cela fait rêver aujourd'hui – à 32 milliards d’euros en 2001…
Cette discussion, si elle est difficile pour certains, n’en reste pas moins nécessaire pour que l’on puisse aborder en parfaite connaissance de cause le débat d’orientation qui suivra.
Pour rappel, aucune mesure d’économie substantielle n’avait été envisagée par le précédent gouvernement lors de la préparation du budget de 2012, alors qu’il était évident, dès le débat d’orientation sur les finances publiques du printemps de 2011, que l’objectif de ramener le déficit à 4, 5 % en 2011 ne pourrait être atteint.
Je souhaite maintenant évoquer la dépense publique, qui bien sûr aurait également dû, une fois sa gestion placée sous notre responsabilité, filer de dérapage en dérapage. Cela n’a pas été le cas : la Cour des comptes a souligné « l’effort de maîtrise de la dépense significatif » réalisé en 2012.
Qui plus est, cet effort a été réalisé avec des normes de dépenses plus contraignantes que par le passé : dans le périmètre de la norme « zéro valeur », qui inclut les dépenses de l’État hors pensions et charge de la dette, une baisse des dépenses d’environ 2 milliards d’euros a été obtenue ; dans le périmètre de la norme « zéro volume », qui comprend les pensions et la charge de la dette, les dépenses ont été réduites de 100 millions d’euros.
Cette baisse des dépenses relevant du périmètre de la norme « zéro volume » constitue une première historique. La Cour des comptes a salué des « économies significatives ». Permettez-moi de mettre en avant la réactivité dont nous avons su faire preuve durant l’été 2012, en procédant à un « surgel » de crédits pour un montant de près de 1, 5 milliard d’euros, ce qui a permis d’absorber l’essentiel des dérapages auxquels nous destinaient les anticipations erronées sur lesquelles avait été bâti le budget de 2012.
Nous nous sommes fixé un objectif ambitieux dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques pour la période 2012-2017 : ne pas augmenter la dépense publique de plus de 0, 5 % par an sur le quinquennat. Les bases sur lesquelles nous sommes partis lors de ce premier acte nous permettent d’être optimistes quant à l’atteinte de cet objectif. À ceux qui voudraient minimiser sa portée, je rappellerai que, au cours des dix dernières années, la dépense publique a progressé de 2 % par an en moyenne.
Mon analyse de la dépense publique serait incomplète si je n’évoquais une autre tare congénitale que vous nous attribuez : notre incapacité supposée à maîtriser les dépenses de personnel, la gestion de la masse salariale. Soyez sans crainte, en 2012, les dépenses de personnel ont été contenues dans une mesure plus importante que prévu. Un mouvement progressif de décélération de la masse salariale a été engagé ; celle-ci a été quasiment stabilisée en 2012, puisqu’elle n’a progressé que de 0, 1 %, c'est-à-dire de 340 millions d’euros, contre une hausse de 800 millions d’euros en 2009, de 968 millions d’euros en 2010 et de 400 millions d’euros en 2011.
Je ne résiste pas à l’envie d’ajouter un mot sur la RGPP, dont on nous dit monts et merveilles et que nous aurions abandonnée en dépit de ses glorieux résultats. Comparons, chers collègues : la RGPP a permis d’économiser 2 milliards d’euros par an sur la durée du dernier quinquennat, tandis que nous avons économisé 10 milliards d’euros sur le seul exercice 2013. Nous avons même pour objectif d’atteindre le seuil des 14 milliards d’euros en 2014 ; ce sera l’un des sujets du débat de ce soir.
Nous avons déjà expliqué pourquoi l’effort n’a pas été concentré sur les dépenses dès les premiers mois de notre action, mais les résultats de l’année 2012 donnent plus de portée à nos propos : pendant ces premiers mois, l’effort a d’abord porté – nous l’assumons – sur les recettes publiques, car cette approche a moins d’effet récessif qu’un ajustement abrupt des dépenses.
En parallèle, nous avons engagé un large processus de modernisation de l’action publique, dont nous reparlerons plus en détail ce soir. Ce processus ne se déroulera pas en un jour ; soyez sûrs que nous serons attentifs aux mesures qui seront progressivement mises en place. J’ai trop eu à déplorer, en tant que rapporteur du budget de l’administration générale et territoriale de l’État, des coupes aveugles réalisées sans concertation par le précédent gouvernement, dont nos territoires, notamment ruraux, souffrent particulièrement aujourd’hui.
En ce qui concerne la politique fiscale que nous menons, dont nous avons posé les premières bases lors de l’exercice 2012, je souhaiterais répondre au sempiternel procès en « matraquage fiscal » qui nous est fait par les membres de l’opposition. Cette caricature ne résiste pas une seconde à la réalité des chiffres de l’année 2012.
Un effort fiscal important a certes été demandé aux Français, mais un tiers seulement des 14 milliards d’euros de hausses d’impôts résultant de mesures nouvelles est dû aux dispositions que nous avons votées, les deux autres tiers découlant de celles que vous aviez adoptées. J’espère que ces chiffres simples, parlants, incontestables, faciliteront la tâche de l’opposition, en lui permettant de se défaire d’un cliché qui a la vie dure, comme on peut le constater lors de nos échanges sur les questions financières.
Occupez-vous de votre propre formation politique, l’opposition se débrouille bien toute seule !
J’ajoute que cette confrontation des dispositions fiscales adoptées en 2012 est éclairante quant aux motivations et aux objectifs des uns et des autres. Les mesures que nous avons votées à l’été puis à l’hiver 2012 étaient inspirées par la volonté de réinstaurer de la progressivité et de l’équité dans le système fiscal français, fragilisé par dix ans de gestion par la droite. Ainsi, l’impôt de solidarité sur la fortune avait été détricoté, quelques mois avant que le barème de l’impôt sur le revenu ne soit gelé. Nous avons, dès la discussion de la loi de finances rectificative d’août 2012, voté l’institution d’une contribution exceptionnelle sur la fortune. La justice fiscale est une ligne directrice dont nous ne dérogerons pas ; nous y reviendrons à l’occasion du débat de ce soir.
Je ne saurais conclure cette analyse, que j’ai voulue la plus objective possible, sans parler de la dette. Aucun de nos camps ne peut se féliciter du niveau atteint par l’endettement public. Nos débats gagneraient à ce que vous fassiez, chers collègues de l’opposition, sinon l’inventaire, du moins l’analyse de dix années d’endettement qui ont conduit à doubler la charge de celui-ci. Le constat est particulièrement terrible pour nos comptes sociaux, la dette s’élevant à ce titre à 210 milliards d’euros. Je rappelle que les régimes obligatoires de base étaient en situation d’excédent entre 1999 et 2001.
Que nos collègues de l’opposition ne se méprennent pas, il ne s’agit pas pour nous de nous accorder un satisfecit. Beaucoup reste à faire, et l’exercice 2012 a uniquement marqué le cap que nous souhaitons tenir pour la gestion des finances de notre pays.
Des sujets majeurs restent à aborder. Outre celui de la MAP, la question des opérateurs de l’État, qui représentent près de 49 milliards d’euros de dépenses, reste problématique. S’ils ont été soumis à des normes de dépenses aussi contraignantes que celles qui s’imposent à l’État, il reste difficile, voire impossible, de quantifier leur contribution à l’effort d’assainissement demandé à toutes les administrations. Un rapport sur la fiscalité affectée, notamment aux opérateurs, a été remis aujourd’hui même par le Conseil des prélèvements obligatoires ; ce sujet devra être traité dans le cadre du prochain projet de loi de finances.
Les dépenses fiscales, quant à elles, ont été stabilisées à un peu plus de 70 milliards d’euros en 2012. Il est prévu de s’attaquer en profondeur à ce sujet, qui préoccupe particulièrement la commission des finances du Sénat, dans le cadre de l’examen du prochain projet de loi de finances.
La discussion de ce projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2012 est donc tout sauf un simple exercice formel. Pour toutes les raisons que j’ai évoquées, nous voterons bien entendu ce texte. §
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne suis pas membre de la commission des finances, mais je souhaitais profiter de ce débat pour vous faire part de quelques observations.
Eu égard à la teneur de certaines interventions – je pense notamment à celle de M. Delattre –, je commencerai par faire un état des lieux.
En dix années de gestion par la droite, la dette publique s’est accrue de 600 milliards d'euros, au rythme de 2 % par an en moyenne. Une atteinte profonde a été portée à la dimension redistributive de l’impôt, ce qui a pesé sur nos possibilités de relance par la consommation. La compétitivité à l’international de nos entreprises s’est trouvée gravement affectée : c’est en 2003 que le solde de notre balance commerciale a été positif pour la dernière fois, son déficit atteignant un montant record de 70 milliards d'euros en 2011, avec les conséquences sur l’emploi que cela implique.
Vous oubliez le rôle joué par la plus belle crise que le monde ait jamais connue !
Tant les prélèvements obligatoires que la dette publique atteignent des niveaux très élevés dans notre pays. Si l’on établit une comparaison avec nos partenaires, on observe que chez certains d’entre eux, comme la Suède, par exemple, les prélèvements obligatoires sont plus lourds, mais la dette publique moindre, tandis que chez d’’autres la dette est plus élevée, mais les prélèvements obligatoires sensiblement plus faibles. Le bilan de dix ans d’exercice du pouvoir par l’UMP, c’est que nous n’avons aucune marge de manœuvre : la France se classe aux premiers rangs de l’Union européennes en termes de lourdeur des prélèvements obligatoires et d’ampleur du déficit.
Un tel bilan justifierait que vous fassiez preuve d’un minimum d’humilité !
Souvenez-vous de Jospin : c'est son gouvernement qui a le plus privatisé !
Je vous parle du bilan de l’action des dix dernières années, qui nous a conduits à la situation que nous connaissons.
J’ajoute que les entreprises françaises, aujourd’hui, seraient même incapables de répondre à une éventuelle stimulation de la consommation, car elles ne sont plus en mesure de produire, faute d’avoir investi au cours de ces dix dernières années. Elles ont ainsi beaucoup perdu en compétitivité.
Tel est votre bilan, …
… qui handicape aujourd’hui notre action, mais les Français savent à quoi s’en tenir.
On constate que, en 2012, le rendement des impôts a été globalement moindre qu’auparavant. En particulier, les recettes de TVA ont été beaucoup plus faibles que prévu, la consommation des personnes physiques s’orientant davantage vers les produits de première nécessité et les entreprises connaissant des tensions de trésorerie qui ont amené une forte hausse des demandes de remboursement anticipé de TVA.
Dans ce contexte pourtant difficile, le déficit est passé de 5, 3 milliards d’euros en 2011 à 4, 8 milliards d’euros en 2012, grâce au projet de loi de finances rectificative que nous avons adopté à l’été 2012.
Je voudrais maintenant soulever deux questions plus spécifiques.
Monsieur le ministre, il faut bien entendu faire des économies, mais la LOLF est-elle un outil adéquat pour orienter cet effort ? Par ailleurs, je m’interroge sur les engagements hors bilan de l’État.
En ce qui concerne la LOLF, l’un des dogmes qui la fondent est que pour réduire la dépense publique, il faut diminuer le nombre d’emplois publics. Toutefois, force est de constater que, comme en témoigne, pour le ministère des affaires étrangères, la lettre adressée par M. Migaud à M. Fabius, les baisses d’effectifs, très significatives au cours des dernières années, ont engendré de fortes dépenses de fonctionnement supplémentaires, par le biais de l’externalisation. Il faut donc bien comprendre que ce n’est pas simplement en abaissant la masse salariale de l’État que l’on parviendra à réaliser des économies.
De surcroît, la suppression de certains postes entraîne une perte de recettes. Ainsi, un fonctionnaire du service des visas rapporte jusqu’à 500 000 euros à l’État ! Pourtant, il en manque ! On supprime aussi, au nom de la LOLF, des postes qui ne coûtent rien au budget de l’État, parce que la dépense est prise en charge par la structure extérieure auprès de laquelle les personnels concernés sont détachés, et servent notre influence.
Dans la même veine, le plafonnement d’un certain nombre de taxes dédiées n’a finalement rapporté au budget de l’État que 100 millions d’euros, au lieu des 414 millions d’euros attendus.
Nous devons donc être vigilants en matière d’application de la LOLF : ce n’est pas simplement en réduisant le nombre d’emplois que l’on fait des économies. Il faut toujours essayer d’identifier les centres de profit, les actions les plus pertinentes.
Si ces observations sont prises en compte dans la modernisation de l’action publique, la MAP, qui remplace la RGPP, nous pourrons réaliser des économies beaucoup plus importantes que celles, assez ridicules, que Michèle André évoquait tout à l’heure.
Il faut également veiller à ne jamais privilégier le court terme au détriment des moyen et long termes. Ainsi, la vente de biens immobiliers ne doit pas servir à financer la location ou l’entretien d’autres jugés plus indispensables. Je pense en particulier à la Maison de France, à Berlin, élément essentiel de notre présence en Allemagne, que nous vendons l’année même du cinquantième anniversaire du traité de l’Élysée…
J’en viens aux engagements hors bilan, qui représentent plus de 3 000 milliards d’euros, montant à comparer aux 1 800 milliards d’euros de dettes de l’État.
En 2012, nous nous sommes engagés à hauteur de plus de 100 milliards d’euros au titre de notre contribution au mécanisme européen de stabilité, le MES. Cela était indispensable pour stabiliser l’euro et lutter contre la spéculation. Si l’euro était en danger, c’est parce que l’union monétaire n’est pas parfaite. Il a donc fallu parer au plus pressé en créant le MES pour compenser l’absence de supervision bancaire. Cependant, le fait que les normes régissant la prise en compte du hors-bilan au titre des déficits publics ne soient pas homogènes au sein de la zone euro pose un grave problème, d’autant que l’on recourt de plus en plus aux engagements hors bilan. Je tenais à tirer la sonnette d’alarme.
Monsieur le ministre, le sérieux budgétaire consiste à ne pas faire peser nos décisions sur les générations futures, à s’attaquer aux fondements de la crise plutôt qu’à créer de la monnaie et, partant, de nouvelles bulles. C’est absolument indispensable dans une économie mondialisée où nous constatons aujourd’hui que les BRICS et les pays émergents ne seront peut-être pas autant qu’anticipé les ferments de la croissance des prochaines années. La croissance viendra peut-être de chez nous, de notre capacité à rester ouverts à l’international, à innover, à remettre la production au centre de notre politique économique, à faire de l’Europe non pas un bouc émissaire, mais la solution à nos problèmes.
Parce que ces principes guident l’action du Gouvernement, parce que la fiscalité a été réorientée pour la rendre plus juste, le groupe socialiste votera ce projet de loi de règlement. §
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous vivons aujourd’hui une séquence assez étrange, car l’essentiel devrait être le débat sur l’orientation des finances publiques. Celui-ci concerne l’avenir et les grands éléments d’arbitrage pour l’année prochaine. Or nous allons le mener un jeudi soir, pauvrement, sans qu’il soit conclu, comme il le faudrait, par un vote.
Regardons ce qui se passe chez nos partenaires européens : les gouvernements soumettent souvent, au cours du premier semestre, les orientations de l’année à venir au vote des assemblées parlementaires.
Au demeurant, en 2011, dans cette période tant honnie par les puissants d’aujourd’hui, le Sénat avait été consulté et s’était exprimé par un vote.
Nous n’aurons pas de vote à émettre sur les orientations. En revanche, nous allons voter sur le passé, c’est-à-dire sur une loi de règlement et portant rapport de gestion.
À la vérité, les chiffres et les comptes étant ce qu’ils sont, dans un monde normal, tout le monde devrait voter l’arrêté des comptes, …
Après tout, dans un monde normal, je le répète, nous voterions sur les orientations et nous considérerions l’arrêté des comptes comme un document purement factuel, dans lequel chacun devrait en tout état de cause se reconnaître. Or ce n’est pas ce qui se passe cet après-midi !
Monsieur le ministre, le seul vote que nous allons émettre concernera le projet de loi de règlement. J’avoue m’être interrogé sur l’attitude à adopter à l’égard de ce texte, mais, lorsque je vous ai entendu, tout à l’heure, vous exprimer avec tant d’autosatisfaction – j’ai ensuite été renforcé dans mon opinion par l’excellente plaidoirie de Francis Delattre –, formulant les questions de l’opposition et donnant les réponses, montrant une telle assurance devant une situation tellement difficile, hélas ! avec un chômage qui augmente, des comptes qui dérapent et un endettement qui est plus que préoccupant, je me suis dit qu’il n’était pas possible de ne pas suivre mes collègues des deux groupes de l’opposition, qui, pour l’un de façon assez véhémente, mais, à mon avis, bien ciblée, et pour l’autre de manière plus modérée et technique, par la voix de Vincent Delahaye, ont conclu au rejet de ce projet de loi de règlement.
Mais où est cette transparence que vous avez prônée, monsieur le ministre, quand le Gouvernement ne veut même pas nous dire ce que sont ses prévisions de cadrage macroéconomique ? Nous avons pourtant voté une loi de finances pour 2012 fondée sur des prévisions aujourd’hui démenties. Le grand mérite d’une loi de finances rectificative serait non pas de créer des recettes supplémentaires, voire de prendre des mesures de rigueur qui feraient encore partir plusieurs ministres du Gouvernement, mais d’assumer l’évolution de la situation économique.
Or vous ne voulez pas le faire et vous prétendez que votre démarche est transparente !
Il n’y a pas si longtemps, l’alpha et l’oméga de la gestion sérieuse des finances publiques étaient d’atteindre un objectif de 3 % de déficit à la fin de l’année 2013. Vous vous êtes targué d’avoir obtenu de la Commission européenne un sursis de deux années. À mon sens, l’octroi de ce sursis est la plus mauvaise nouvelle que la France aurait pu recevoir, mais, dans vos prévisions officielles, vous annoncez toujours un objectif de déficit de 3 % à la fin de l’année 2014.
Or les estimations plutôt bien argumentées issues des travaux de la Cour des comptes et même les propos très sérieux du rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale convergent vers une prévision de déficit à 3, 5 % du PIB à la fin de 2014. Monsieur le ministre, si vous êtes transparent, il faut nous dire quel est votre objectif de déficit public ! Là aussi, je relève une lacune dans votre transparence, ou plutôt des « noyaux d’opacité », si vous me permettez cette image.
Enfin, en matière de maîtrise des dépenses publiques, des efforts ont bien entendu été faits, en particulier à la fin du quinquennat précédent ; ils se poursuivent, c’est tout à fait logique, et nous devons les assumer, les uns et les autres. Mais que nous dit l’exécution de l’année 2012 ? La progression en volume des dépenses publiques a été de 1 %, pour un objectif de 0, 4 %. Le fait de se situer à 1 % révèle en soi un réel effort, mais vous nous dites que vous parviendrez en 2014 à limiter cette progression à 0, 5 %. Très sincèrement, je ne suis pas aussi sûr que vous que la manière dont vous devrez procéder et la répartition de cet effort soient très convaincantes ou transparentes.
Il semble clair que l’État, qui, certes, s’efforce de contenir ses dépenses, exporte une part très significative, bien plus que proportionnelle, de cet effort sur ses opérateurs, mais aussi sur les collectivités territoriales. Nous devons le constater, car ce point mérite d’être discuté.
Le dernier point au sujet duquel vous invoquez la transparence est le rendement des recettes publiques, en lien direct avec les estimations du contexte économique. Alors que la conjoncture financière est difficile et que l’état des marchés est aléatoire – malgré les efforts de la Banque centrale européenne et de son gouverneur, que nous devons remercier particulièrement –, le retour sur les marchés des pays périphériques de l’Europe est sans doute plus difficile qu’on ne le croyait il y a quelques semaines. Des interrogations très lourdes pèsent sur la situation du Portugal et de la Grèce. Dans un tel cadre, l’intérêt de notre pays ne serait-il pas d’assumer de manière plus claire l’état de ses finances publiques et, surtout, de ne pas rester dans le flou ? Ne prenons-nous pas des risques supplémentaires quant à l’appréciation des investisseurs et des agents économiques du monde sur notre monnaie et sur la solidité des titres représentatifs de notre dette publique, en biaisant un peu, par habileté, et en évitant la démarche de transparence par excellence qui consisterait à présenter et assumer, dans un contexte économique nouveau, une loi de finances rectificative ?
Certes, la technicité de nos finances publiques rend encore plus complexe que par le passé leur examen par le Parlement. Il convient de rappeler à l’ensemble de nos collègues que nous travaillons à présent dans un cadre dont nous nous sommes dotés nous-mêmes, à la suite de la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, et que nous avons décliné grâce à une loi organique que l’opposition, monsieur le ministre, malgré toutes les critiques très cruelles et très injustes que vous lui adressez, a votée ! Sans l’opposition, cette loi organique n’aurait pas pu être adoptée par les deux chambres du Parlement.
Cette loi organique nous conduit, comme l’a expliqué notre collègue Vincent Delahaye, à raisonner en termes d’effort structurel, de solde structurel et de solde conjoncturel. Lorsque Jean Arthuis et moi-même avons été associés aux réflexions qui ont abouti à la définition de ces méthodes, dans le cadre du groupe de travail que présidait le gouverneur honoraire de la Banque de France Michel Camdessus, nous avons cru devoir donner l’alerte sur la technicité et la complexité de ces méthodes. En effet, il nous semblait que dire qu’une économie ne consiste plus en une réduction nominale de la dépense publique, mais en une inflexion par rapport à une tendance créerait des difficultés de compréhension pour nos concitoyens et rendrait plus délicate la mobilisation des énergies, tant ces concepts sont intellectuellement complexes.
Mais telle est bien la réalité dans laquelle nous sommes. Cette réalité est nécessaire, puisqu’elle permet de comparer les décisions prises dans le cadre de l’Union économique et monétaire par les différents États qui ont l’euro en partage. Dans un souci pédagogique d’organisation du dialogue démocratique et pour que l’opinion assume les efforts, ne serait-il pas préférable de s’exprimer à la fois dans le cadre des notions techniques que je viens d’évoquer et, plus directement, en termes de solde nominal, de dépenses nominales ? En effet, il serait souhaitable de rendre accessible au raisonnement de bon sens des efforts qui sont sans doute nécessaires dans leur principe, mais qui, pour réussir, ont besoin de la compréhension et de la mobilisation de toutes et de tous.
Considérant que la transparence, malgré vos propos, monsieur le ministre, a encore beaucoup de progrès à faire, je me prononcerai donc, comme mes collègues de l’opposition, contre l’adoption de ce projet de loi de règlement, sans nier les difficultés réelles des temps que nous vivons. Ce n’est pas en biaisant avec les réalités, en contournant le fait que les déficits s’approfondissent que l’on simplifiera la situation pour demain ! Ce n’est pas en laissant filer en 2013 que l’on sera en mesure de mieux maîtriser les choses en 2014 ! Les écarts seront encore plus importants à résorber, les efforts plus importants. Comme le disait une sénatrice auvergnate, il n’est certainement pas d’économie qui soit indolore…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, nous ne faisons que commencer ce type de débat. À la rentrée, nous poursuivrons cet exercice, en espérant obtenir de votre part une feuille de route plus claire et plus nette !
Applaudissementssur les travées de l’UMP et de l’UDI-UC.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous remercier de la qualité de ce débat, qui a permis à toutes les sensibilités de cet hémicycle de s’exprimer. Vous avez tous apporté une contribution utile à notre réflexion.
Je souhaite que ceux d’entre vous qui ont abordé le thème de la transparence sachent que mes débuts en politique ont été inspirés par la pensée et la démarche de Pierre Mendès France. Je considère que la vérité existe et que nous devons au Parlement la transparence en matière de gestion des finances publiques, plus particulièrement dans le contexte de crise auquel nous sommes confrontés. Nous pouvons légitimement nous adresser des reproches et nous opposer sur les orientations de la politique économique, mais nous n’avons pas le droit de nous intenter des procès qui remettent en cause la sincérité de ceux qui s’expriment et leur honnêteté intellectuelle sans preuves.
En matière de transparence, nous n’avons d’ailleurs pas besoin de nous faire de procès : le rapport de la Cour des comptes et le rapport du Haut Conseil des finances publiques contiennent des informations extrêmement précises sur l’évolution des déficits et sur la situation de nos comptes publics, très différentes ce que vous avez dit dans votre intervention, monsieur le président Marini.
Prenons des exemples très concrets. Vous nous avez reproché de nier le fait que les déficits continuaient à augmenter et que nous mélangions, tels des joueurs de bonneteau, déficit structurel, déficit conjoncturel et déficit nominal pour dissimuler cette augmentation.
Monsieur Marini, en votre qualité de président de la commission des finances, vous recevez les rapports du Haut Conseil des finances publiques et de la Cour des comptes. Vous savez donc mieux que quiconque que, depuis 2012, les déficits diminuent.
Je vais donner à la Haute Assemblée les chiffres précis que nous pouvons trouver dans les rapports publiés par le Haut Conseil des finances publiques et la Cour des comptes et qui ont été communiqués à votre commission des finances.
En 2012, le solde structurel s’établit à 3, 9 % du PIB, contre 5, 1 % en 2011. En 2013, il s’établira à 2, 2 % et la projection pour 2014 est de 1, 2 %.
Le solde conjoncturel, qui mesure les implications de la situation économique sur l’évolution des déficits, s’établissait à 0, 8 % du PIB en 2012 ; il sera de 1, 4 % en 2013 et de 1, 6 % en 2014. Vous avez raison, le solde conjoncturel augmente, parce que la croissance est faible et que la situation globale de l’économie n’est pas satisfaisante.
Quant au solde nominal, dont vous nous dites souvent qu’il est le seul qui vaille, il s’établissait à 5, 3 % du PIB en 2011, à 4, 8 % en 2012, et il serait compris entre 3, 7 % et 4 % en 2013, selon le rapport de la Cour des comptes. Entre 2012 et 2013, le déficit nominal diminuerait donc de 0, 8 point et, si nous continuons les efforts d’ajustement structurel et de maîtrise de la dépense, il s’établirait à 2, 9 % en 2014.
Par-delà toute considération polémique, je ne crois qu’aux chiffres lorsqu’il s’agit de questions budgétaires. Ceux que je viens de citer figurent dans les rapports qui sont à votre disposition. Dans ces conditions, comment pouvez-vous dire que les déficits augmentent ? Comment pouvez-vous dire que nous nous employons, dans une sorte d’opération de prestidigitation, à masquer l’augmentation des déficits en essayant de créer la confusion entre déficit conjoncturel et déficit structurel ?
Si vous cherchez à laisser planer un doute sur notre volonté de transparence – transparence à laquelle je tiens, parce qu’elle est pour moi une question d’éthique personnelle, un dû à la représentation nationale –, comment voulez-vous que je ne réagisse pas sans quelque passion ?
Si je me suis exprimé comme je viens de le faire devant votre assemblée en présentant le projet de loi de règlement pour 2012, c’est parce que, il y a dix jours, votre homologue de l’Assemblée nationale, Gilles Carrez, qui, en sa qualité de président d’une commission des finances, doit garder, comme sa fonction l’impose consubstantiellement, une distance, une capacité d’arbitrage, un refus de la polémique, a tenu une conférence de presse avec les seuls députés de l’opposition pour expliquer que nous voulions dissimuler les choses et que nous ne faisions pas preuve de transparence. Ce sont des propos que je ne peux pas accepter, tout simplement parce qu’ils ne correspondent pas à la vérité.
Vous venez à votre tour de dire des choses inexactes au sujet des déficits.
Ce n’est pas la même chose de dire que les déficits sont différents de nos projections et d’affirmer qu’ils augmentent !
Vous avez dit qu’ils augmentaient. Or ils n’augmentent pas !
Non, le président de la Cour des comptes ne dit pas que les déficits augmentent. Il dit que, comparativement aux objectifs que nous nous sommes fixés, pour des raisons qui tiennent à la conjoncture, il peut exister des décalages.
Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, je voudrais simplement vous rappeler que le projet de loi de finances pour 2012 a été élaboré avec une hypothèse de croissance de 1, 5 %, qui a ensuite été ramenée à 1 %. Le projet de loi de finances rectificative, présenté quelques semaines plus tard, a été fondé sur une hypothèse de croissance de 0, 5 %. Quelques semaines après, lorsque vous avez présenté le programme de stabilité budgétaire, l’hypothèse de croissance retenue était de 0, 7 %.
Lorsque vous évoquez la nécessité de la transparence, lorsque vous adossez vos arguments sur des prévisions qui changent, vous oubliez simplement de rappeler qu’il est normal, en période de crise, lorsque des incertitudes pèsent sur la croissance et sur l’évolution de la situation économique, qu’il puisse exister un décalage entre les hypothèses sur lesquelles est fondée l’élaboration du projet de loi de finances et la réalité constatée par la suite.
Je le répète, nous pouvons être en désaccord sur les orientations de la politique économique, mais il n’est pas acceptable de nous faire un procès d’intention. Le Gouvernement transmet à la commission des finances avec une célérité exceptionnelle tout élément qu’elle demande. Pierre Moscovici et moi-même sommes venus aussi souvent que vous l’avez souhaité ! Récemment encore, nous étions devant la commission des finances du Sénat pour répondre, chiffres en mains, à toutes les questions que vous étiez légitimes à poser.
Je voudrais maintenant donner quelques éléments concernant le déficit de 2012.
J’ai entendu un certain nombre de groupes annoncer qu’ils ne voteraient pas le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2012. La posture politique, je peux la comprendre, c’est la motivation que je comprends moins.
J’ai déjà indiqué quelles avaient été les hypothèses de croissance en 2012. Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, nous avons demandé à la Cour des comptes un audit, qui a fait apparaître un risque de dérapage sur les dépenses de 2 milliards d’euros. Son rapport évoquait, alors que cela n’avait jamais été dit clairement devant la représentation nationale, une sous-évaluation notoire des recettes qui nous a obligés, pour tenir les objectifs de déficit, à procéder à des augmentations d’impôt et à un gel des dépenses. C’est parce que nous avons pris cette décision que le déficit est de 4, 8 %. Sans cela, il aurait peut-être été supérieur à 5, 3 %, c’est-à-dire que, entre 2011 et 2012, il aurait augmenté !
Par ailleurs, vous avez raison d’évoquer le fait qu’il y a des dépenses exceptionnelles qui doivent être intégrées dans le raisonnement pour expliquer la dégradation du déficit nominal : 2, 5 milliards d’euros de recapitalisation de Dexia ou l’abondement du budget de l’Union européenne en raison d’un rabotage délibéré des crédits de paiement. À cet égard, je vous renvoie à la note envoyée à la Commission en 2010 et au montant de 940 millions d’euros des crédits de paiement pour la période 2007-2013, alors que le cadrage global des dépenses communautaires s’est élevé à 865 milliards d’euros.
Il y a un décalage exceptionnel, que l’Union européenne n’a jamais connu, entre le niveau des crédits de paiement qui devaient être mobilisés et la réalité de ce qui a été dépensé. C’est considérable ! D’ailleurs, si nous réalisons, par l’effet de la flexibilité entre les rubriques et entre les années, les 910 milliards d'euros de crédits de paiement prévus pour la période 2014-2020, nous dépenserons près de 60 milliards d'euros de plus que durant la période précédente. Telles sont les raisons qui expliquent ce décalage !
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous invite à tirer profit, en contraste avec ce qu’a dit le président Marini, du projet de loi de règlement pour faire preuve de plus d’objectivité et de rigueur dans nos débats. Le texte qui vous est soumis aujourd’hui couvre une période pendant laquelle vous et nous, mesdames, messieurs de l’opposition, avons été aux responsabilités pendant six mois. Durant ce laps de temps, nous avons pris des mesures pour corriger des dérapages et limiter le déficit nominal, ce que la Cour des comptes reconnaît dans son rapport.
Je nous invite mutuellement à ne pas nous laisser aller aux effets de la petite politique, laquelle nous incite à prendre des postures dictées par les places que nous occupons dans cet hémicycle. Je nous invite à essayer de faire en sorte que, la qualité de nos débats aidant, la sincérité de nos propos le favorisant, la rigueur intellectuelle que nous devons aux Français sur ces sujets y contribuant, le projet de loi de règlement puisse être adopté.
Pour conclure, je tiens à dire que je sais gré à tous les orateurs de la majorité – M. le rapporteur général, Mme Michèle André ainsi que tous ceux qui partagent notre sensibilité – d’être intervenus pour montrer les corrections que ce gouvernement a apportées en 2012 et pour souligner les efforts de gestion que nous avons faits, notamment en matière de dépense. Ils ont mis en évidence l’inflexion des dépenses d’assurance maladie, que nous exécutons près de 1 milliard d'euros sous la norme envisagée par la précédente majorité.
Nous avons également tenu, hors assurance maladie, l’ensemble des dépenses de l’État, à tel point que, en 2012, pour la première fois depuis le début de la Ve République, celles-ci, dette et pensions comprises, diminuent de 300 millions d’euros. Cela montre à quel point la dépense a été tenue !
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Le solde structurel et le solde effectif de l’ensemble des administrations publiques résultant de l’exécution de l’année 2012 s’établissent comme suit :
En points de produit intérieur brut
Exécution 2012
Soldes prévus par la loi de programmation des finances publiques
Écart avec les soldes prévus par la loi de programmation des finances publiques
Solde structurel (1)
Solde conjoncturel (2)
-0, 8
-0, 8
0, 1
Mesures ponctuelles et temporaires (3)
-0, 1
-0, 1
0, 0
Solde effectif (1+2+3)
L'article liminaire est adopté.
I. – Le résultat budgétaire de l’État en 2012 est arrêté à la somme de -87 149 974 441, 19 €.
II. – Le montant définitif des recettes et des dépenses du budget de l’année 2012 est arrêté aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après :
En euros
Dépenses
Recettes
Soldes
Budget général
Recettes
Recettes fiscales brutes
À déduire : Remboursements et dégrèvements d’impôts
Recettes fiscales nettes (a)
Recettes non fiscales (b)
Montant net des recettes hors fonds de concours (c) = (a)+ (b)
À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne (d)
Total net des recettes, hors prélèvements sur recettes (e) = (c) – (d)
Fonds de concours (f)
Montant net des recettes, y compris fonds de concours (g) = (e) + (f)
Dépenses
Dépenses brutes, hors fonds de concours
À déduire : Remboursements et dégrèvements d’impôts
Montant net des dépenses (h)
Fonds de concours (i)
Montant net des dépenses, y compris fonds de concours (j) = (h) + (i)
Total du budget général, y compris fonds de concours
Budgets annexes
Contrôle et exploitation aériens
Publications officielles et information administrative
Montant des budgets annexes, hors fonds de concours
Fonds de concours
Total des budgets annexes, y compris fonds de concours
Comptes spéciaux
Comptes d’affectation spéciale
Comptes de concours financiers
Comptes de commerce (solde)
Comptes d’opérations monétaires, hors Fonds monétaire international (solde)
Total des comptes spéciaux, hors Fonds monétaire international
Solde d’exécution des lois de finances hors Fonds monétaire international
–
Adopté.
Le montant définitif des ressources et des charges de trésorerie ayant concouru à la réalisation de l’équilibre financier de l’année 2012 est arrêté aux sommes présentées dans le tableau de financement ci-après :
En milliards d’euros
Exécution 2012
Besoin de financement
Amortissement de la dette à long terme (y compris rachats de titres d’échéance 2012 avant leur maturité)
Amortissement de la dette à moyen terme (y compris rachats de titres d’échéance 2012 avant leur maturité)
Amortissement de dettes reprises par l’État
Variation des dépôts de garantie
Variation d’autres besoins de trésorerie
Impact en trésorerie du solde de la gestion 2012
Total du besoin de financement
Ressources de financement
Émissions à moyen et long termes (obligations assimilables du Trésor et bons du Trésor à taux fixe et intérêts annuels), nettes des rachats
Variation des bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés
Variation des dépôts des correspondants (EPIC, EPA, collectivités territoriales) et assimilés
Autres ressources de trésorerie
Variation du solde du compte du Trésor
Total des ressources de financement
–
Adopté.
I. – Le compte de résultat de l’exercice 2012 est approuvé tel que présenté dans le tableau ci-après. Le résultat comptable de l’exercice 2012 s’établit à -92 769 669 977, 60 €.
Charges nettes
En millions d’euros
Charges de fonctionnement nettes
Charges de personnel
Achats, variations de stocks et prestations externes
Dotations aux amortissements, aux provisions et aux dépréciations
Autres charges de fonctionnement
Total des charges de fonctionnement direct (I)
Subventions pour charges de service public
Dotations aux provisions
Total des charges de fonctionnement indirect (II)
Total des charges de fonctionnement (III = I + II)
Ventes de produits et prestations de service
Production stockée et immobilisée
Reprises sur provisions et sur dépréciations
Autres produits de fonctionnement
Total des produits de fonctionnement (IV)
Total des charges de fonctionnement nettes (V = III - IV)
Charges d’intervention nettes
Transferts aux ménages
Transferts aux entreprises
Transferts aux collectivités territoriales
Transferts aux autres collectivités
Charges résultant de la mise en jeu de garanties
Dotations aux provisions et aux dépréciations
Total des charges d’intervention (VI)
Contributions reçues de tiers
Reprises sur provisions et sur dépréciations
Total des produits d’intervention (VII)
Total des charges d’intervention nettes (VIII = VI - VII)
Charges financières nettes
Intérêts
Pertes de change liées aux opérations financières
Dotations aux amortissements, aux provisions et aux dépréciations
Autres charges financières
Total des charges financières (IX)
Produits des immobilisations financières
Gains de change liés aux opérations financières
Reprises sur provisions et sur dépréciations
Autres intérêts et produits assimilés
Total des produits financiers (X)
Total des charges financières nettes (XI = IX - X)
Total des charges nettes (XII = V + VIII + XI)
Produits régaliens nets
En millions d’euros
Impôt sur le revenu
Impôt sur les sociétés
Taxe intérieure sur les produits pétroliers
Taxe sur la valeur ajoutée
Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes
Autres produits de nature fiscale et assimilés
Total des produits fiscaux nets (XIII)
Amendes, prélèvements divers et autres pénalités
Total des autres produits régaliens nets (XIV)
Ressource propre de l’Union européenne basée sur le revenu national brut
Ressource propre de l’Union européenne basée sur la taxe sur la valeur ajoutée
Total ressources propres du budget de l’Union européenne basées sur le revenu national brut et la taxe sur la valeur ajoutée (XV)
Total des produits régaliens nets (XVI = XIII + XIV- XV)
Solde des opérations de l’exercice
En millions d’euros
Charges de fonctionnement nettes (V)
Charges d’intervention nettes (VIII)
Charges financières nettes (XI)
Charges nettes (XII)
Produits fiscaux nets (XIII)
Autres produits régaliens nets (XIV)
Ressources propres de l’Union européenne basées sur le revenu national brut et la taxe sur la valeur ajoutée (XV)
Produits régaliens nets (XVI)
Solde des opérations de l’exercice (XVI - XII)
II. – Le résultat comptable de l’exercice 2012 est affecté au bilan à la ligne « Report des exercices antérieurs ».
III. – Le bilan, après affectation du résultat comptable, s’établit comme suit :
En millions d’euros
31 décembre 2012
Brut
Amortissements
Net
Dépréciations
Actif immobilisé
Immobilisations incorporelles
Immobilisations corporelles
Immobilisations financières
Total actif immobilisé
Actif circulant (hors trésorerie)
Stocks
Créances
Redevables
80 773
24 809
55 964
Clients
9 519
963
8 556
Autres créances
16 653
141
16 512
Charges constatées d’avance
Total actif circulant (hors trésorerie)
Trésorerie
Fonds bancaires et fonds en caisse
Valeurs escomptées, en cours d’encaissement et de décaissement
Autres composantes de trésorerie
Équivalents de trésorerie
Total trésorerie
Comptes de régularisation
Total actif (I)
Dettes financières
Titres négociables
Titres non négociables
Dettes financières et autres emprunts
Total dettes financières
Dettes non financières (hors trésorerie)
Dettes de fonctionnement
Dettes d’intervention
Produits constatés d’avance
Autres dettes non financières
Total dettes non financières
Provisions pour risques et charges
Provisions pour risques
Provisions pour charges
Total provisions pour risques et charges
Autres passifs (hors trésorerie)
Trésorerie
Correspondants du Trésor et personnes habilitées
Autres
Total trésorerie
Comptes de régularisation
Total passif (hors situation nette) (II)
Report des exercices antérieurs
Écarts de réévaluation et d’intégration
Solde des opérations de l’exercice
Situation nette (III = I - II)
IV – L’annexe du compte général de l’État de l’exercice 2012 est approuvée. –
Adopté.
I. – Le montant des autorisations d’engagement engagées sur le budget général au titre de l’année 2012 est arrêté par mission et programme aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les autorisations d’engagement ouvertes sont modifiées comme indiqué dans ce même tableau.
En euros
Ajustements de la loi de règlement
Désignation des missions et des programmes
Autorisations d’engagement engagées
Ouvertures d’autorisations d’engagement complémentaires
Annulations d’autorisations d’engagement non engagées et non reportées
Action extérieure de l’État
– Action de la France en Europe et dans le monde
– Diplomatie culturelle et d’influence
– Français à l’étranger et affaires consulaires
– Présidence française du G20 et du G8
Administration générale et territoriale de l’État
– Administration territoriale
– Vie politique, cultuelle et associative
– Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur
Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales
– Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires
– Forêt
– Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation
– Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture
Aide publique au développement
– Aide économique et financière au développement
– Solidarité à l’égard des pays en développement
– Développement solidaire et migrations
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation
– Liens entre la Nation et son armée
– Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant
– Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale
Conseil et contrôle de l’État
– Conseil d’État et autres juridictions administratives
– Conseil économique, social et environnemental
– Cour des comptes et autres juridictions financières
Culture
– Patrimoines
– Création
– Transmission des savoirs et démocratisation de la culture
Défense
– Environnement et prospective de la politique de défense
– Préparation et emploi des forces
– Soutien de la politique de la défense
– Équipement des forces
Direction de l’action du Gouvernement
– Coordination du travail gouvernemental
– Protection des droits et libertés
– Moyens mutualisés des administrations déconcentrées
Écologie, développement et aménagement durables
– Infrastructures et services de transports
– Sécurité et circulation routières
– Sécurité et affaires maritimes
– Météorologie
– Urbanisme, paysages, eau et biodiversité
– Information géographique et cartographique
– Prévention des risques
– Énergie, climat et après-mines
– Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer
Économie
– Développement des entreprises et de l’emploi
– Tourisme
– Statistiques et études économiques
– Stratégie économique et fiscale
Engagements financiers de l’État
– Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)
– Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)
– Épargne
– Majoration de rentes
– Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité
– Recapitalisation de Dexia
Enseignement scolaire
– Enseignement scolaire public du premier degré
– Enseignement scolaire public du second degré
– Vie de l’élève
– Enseignement privé du premier et du second degrés
– Soutien de la politique de l’éducation nationale
– Enseignement technique agricole
Gestion des finances publiques et des ressources humaines
– Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
– Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État
– Conduite et pilotage des politiques économique et financière
– Facilitation et sécurisation des échanges
– Entretien des bâtiments de l’État
– Fonction publique
Immigration, asile et intégration
– Immigration et asile
– Intégration et accès à la nationalité française
Justice
– Justice judiciaire
– Administration pénitentiaire
– Protection judiciaire de la jeunesse
– Accès au droit et à la justice
– Conduite et pilotage de la politique de la justice
– Conseil supérieur de la magistrature
Médias, livre et industries culturelles
– Presse
– Livre et industries culturelles
– Contribution à l’audiovisuel et à la diversité radiophonique
– Action audiovisuelle extérieure
Outre-mer
– Emploi outre-mer
– Conditions de vie outre-mer
Politique des territoires
– Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire
– Interventions territoriales de l’État
Pouvoirs publics
– Présidence de la République
– Assemblée nationale
– Sénat
– La Chaîne parlementaire
– Indemnités des représentants français au Parlement européen
– Conseil constitutionnel
– Haute Cour
– Cour de justice de la République
Provisions
– Provision relative aux rémunérations publiques
– Dépenses accidentelles et imprévisibles
Recherche et enseignement supérieur
– Formations supérieures et recherche universitaire
– Vie étudiante
– Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires
– Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources
– Recherche spatiale
– Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables
– Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle
– Recherche duale (civile et militaire)
– Recherche culturelle et culture scientifique
– Enseignement supérieur et recherche agricoles
Régimes sociaux et de retraite
– Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres
– Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins
– Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers
Relations avec les collectivités territoriales
– Concours financiers aux communes et groupements de communes
– Concours financiers aux départements
– Concours financiers aux régions
– Concours spécifiques et administration
Remboursements et dégrèvements
– Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)
– Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)
Santé
– Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins
– Protection maladie
Sécurité
– Police nationale
– Gendarmerie nationale
Sécurité civile
– Interventions des services opérationnels
– Coordination des moyens de secours
Solidarité, insertion et égalité des chances
– Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales
– Actions en faveur des familles vulnérables
– Handicap et dépendance
– Égalité entre les hommes et les femmes
– Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative
Sport, jeunesse et vie associative
– Sport
– Jeunesse et vie associative
Travail et emploi
– Accès et retour à l’emploi
– Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi
– Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail
– Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail
Ville et logement
– Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables
– Aide à l’accès au logement
– Développement et amélioration de l’offre de logement
– Politique de la ville et Grand Paris
Total
II. – Le montant des dépenses relatives au budget général au titre de l’année 2012 est arrêté par mission et programme aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après.Les crédits de paiement ouverts sont modifiés comme indiqué dans ce même tableau.
En euros
Ajustements de la loi de règlement
Désignation des missions et des programmes
Dépenses
Ouvertures de crédits complémentaires
Annulations de crédits non consommés et non reportés
Action extérieure de l’État
– Action de la France en Europe et dans le monde
– Diplomatie culturelle et d’influence
– Français à l’étranger et affaires consulaires
– Présidence française du G20 et du G8
Administration générale et territoriale de l’État
– Administration territoriale
– Vie politique, cultuelle et associative
– Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur
Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales
– Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires
– Forêt
– Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation
– Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture
Aide publique au développement
– Aide économique et financière au développement
– Solidarité à l’égard des pays en développement
– Développement solidaire et migrations
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation
– Liens entre la Nation et son armée
– Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant
– Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale
Conseil et contrôle de l’État
– Conseil d’État et autres juridictions administratives
– Conseil économique, social et environnemental
– Cour des comptes et autres juridictions financières
Culture
– Patrimoines
– Création
– Transmission des savoirs et démocratisation de la culture
Défense
– Environnement et prospective de la politique de défense
– Préparation et emploi des forces
– Soutien de la politique de la défense
– Équipement des forces
Direction de l’action du Gouvernement
– Coordination du travail gouvernemental
– Protection des droits et libertés
– Moyens mutualisés des administrations déconcentrées
Écologie, développement et aménagement durables
– Infrastructures et services de transports
– Sécurité et circulation routières
– Sécurité et affaires maritimes
– Météorologie
– Urbanisme, paysages, eau et biodiversité
– Information géographique et cartographique
– Prévention des risques
– Énergie, climat et après-mines
– Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer
Économie
– Développement des entreprises et de l’emploi
– Tourisme
– Statistiques et études économiques
– Stratégie économique et fiscale
Engagements financiers de l’État
– Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)
– Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)
– Épargne
– Majoration de rentes
– Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité
– Recapitalisation de Dexia
Enseignement scolaire
– Enseignement scolaire public du premier degré
– Enseignement scolaire public du second degré
– Vie de l’élève
– Enseignement privé du premier et du second degrés
– Soutien de la politique de l’éducation nationale
– Enseignement technique agricole
Gestion des finances publiques et des ressources humaines
– Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
– Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État
– Conduite et pilotage des politiques économique et financière
– Facilitation et sécurisation des échanges
– Entretien des bâtiments de l’État
– Fonction publique
Immigration, asile et intégration
– Immigration et asile
– Intégration et accès à la nationalité française
Justice
– Justice judiciaire
– Administration pénitentiaire
– Protection judiciaire de la jeunesse
– Accès au droit et à la justice
– Conduite et pilotage de la politique de la justice
– Conseil supérieur de la magistrature
Médias, livre et industries culturelles
– Presse
– Livre et industries culturelles
– Contribution à l’audiovisuel et à la diversité radiophonique
– Action audiovisuelle extérieure
Outre-mer
– Emploi outre-mer
– Conditions de vie outre-mer
Politique des territoires
– Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire
– Interventions territoriales de l’État
Pouvoirs publics
– Présidence de la République
– Assemblée nationale
– Sénat
– La Chaîne parlementaire
– Indemnités des représentants français au Parlement européen
– Conseil constitutionnel
– Haute Cour
– Cour de justice de la République
Provisions
– Provision relative aux rémunérations publiques
– Dépenses accidentelles et imprévisibles
Recherche et enseignement supérieur
– Formations supérieures et recherche universitaire
– Vie étudiante
– Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires
– Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources
– Recherche spatiale
– Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables
– Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle
– Recherche duale (civile et militaire)
– Recherche culturelle et culture scientifique
– Enseignement supérieur et recherche agricoles
Régimes sociaux et de retraite
– Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres
– Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins
– Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers
Relations avec les collectivités territoriales
– Concours financiers aux communes et groupements de communes
– Concours financiers aux départements
– Concours financiers aux régions
– Concours spécifiques et administration
Remboursements et dégrèvements
– Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)
– Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)
Santé
– Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins
– Protection maladie
Sécurité
– Police nationale
– Gendarmerie nationale
Sécurité civile
– Interventions des services opérationnels
– Coordination des moyens de secours
Solidarité, insertion et égalité des chances
– Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales
– Actions en faveur des familles vulnérables
– Handicap et dépendance
– Égalité entre les hommes et les femmes
– Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative
Sport, jeunesse et vie associative
– Sport
– Jeunesse et vie associative
Travail et emploi
– Accès et retour à l’emploi
– Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi
– Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail
– Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail
Ville et logement
– Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables
– Aide à l’accès au logement
– Développement et amélioration de l’offre de logement
– Politique de la ville et Grand Paris
Total
–
Adopté.
I. – Le montant des autorisations d’engagement engagées sur les budgets annexes au titre de l’année 2012 est arrêté par mission et programme aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les autorisations d’engagement ouvertes sont modifiées comme indiqué dans ce même tableau.
En euros
Ajustements de la loi de règlement
Désignation des budgets annexes
Autorisations d’engagement engagées
Ouvertures d’autorisations d’engagement complémentaires
Annulations d’autorisations d’engagement non engagées et non reportées
Contrôle et exploitation aériens
– Soutien aux prestations de l’aviation civile
– Navigation aérienne
– Transports aériens, surveillance et certification
– Formation aéronautique
Publications officielles et information administrative
– Edition et diffusion
– Pilotage et activités de développement des publications
Total
II. – Les résultats relatifs aux budgets annexes au titre de l’année 2012 sont arrêtés par mission et programme aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les crédits ouverts sont modifiés comme indiqué dans ce même tableau.
En euros
Ajustements de la loi de règlement
Désignation des budgets annexes
Dépenses
Recettes
Ouvertures de crédits complémentaires
Annulations des crédits non consommés et non reportes
Contrôle et exploitation aériens
– Soutien aux prestations de l’aviation civile
– Navigation aérienne
– Transports aériens, surveillance et certification
– Formation aéronautique
Augmentation du fonds de roulement
21 332 083, 06
21 332 083, 06
Publications officielles et information administrative
– Edition et diffusion
– Pilotage et activités de développement des publications
Augmentation du fonds de roulement
37 166 236, 89
37 166 236, 89
Total
–
Adopté.
I. – Le montant desautorisations d’engagement engagées sur les comptes spéciaux dont les opérations se poursuivent en 2013 est arrêté, au 31 décembre 2012, par mission et programme aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les autorisations d’engagement ouvertes sont modifiées comme indiqué dans ce même tableau.
En euros
Ajustements de la loi de règlement
Désignation des comptes spéciaux
Autorisations d’engagement engagées
Ouvertures d’autorisations d’engagement complémentaires
Annulations d’autorisations d’engagement non engagées et non reportées
Comptes d’affectation spéciale
Aides à l’acquisition de véhicules propres
– Contribution au financement de l’attribution d’aides à l’acquisition de véhicules propres
– Contribution au financement de l’attribution d’aides au retrait de véhicules polluants
Contrôle de la circulation et du stationnement routiers
– Radars
– Fichier national du permis de conduire
– Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers
– Contribution à l’équipement des collectivités territoriales pour l’amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routière
– Désendettement de l’État
Développement agricole et rural
– Développement et transfert en agriculture
– Recherche appliquée et innovation en agriculture
Engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique
– Projets de lutte contre la déforestation dans le cadre du financement précoce
– Actions des fonds environnementaux contre la déforestation dans le cadre du financement précoce
Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale
– Électrification rurale
– Opérations de maîtrise de la demande d’électricité par des énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d’utilité publique et intempéries
Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage
– Péréquation entre régions des ressources de la taxe d’apprentissage
– Contractualisation pour le développement et la modernisation de l’apprentissage
– Incitations financières en direction des entreprises respectant les quotas en alternance
Gestion du patrimoine immobilier de l’État
– Contribution au désendettement de l’État
– Contributions aux dépenses immobilières
Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien
– Désendettement de l’État
– Optimisation de l’usage du spectre hertzien
Participation de la France au désendettement de la Grèce
– Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre
– Rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France
Participations financières de l’État
– Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État
– Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État
Pensions
– Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité
– Ouvriers des établissements industriels de l’État
– Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions
Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs
– Exploitation des services nationaux de transport conventionnés
– Matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés
Total des comptes d’affectation spéciale
Comptes de concours financiers
Accords monétaires internationaux
– Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine
– Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale
– Relations avec l’Union des Comores
Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics
– Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune
– Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics
– Avances à des services de l’État
Avances à l’audiovisuel public
– France Télévisions
– ARTE-France
– Radio France
– Contribution au financement de l’action audiovisuelle extérieure
– Institut national de l’audiovisuel
Avances aux collectivités territoriales
– Avances aux collectivités et établissements publics et à la Nouvelle-Calédonie
– Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes
Prêts à des États étrangers
– Prêts à des États étrangers, de la réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d’infrastructures
– Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France
– Prêts à l’Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers
– Prêts aux États membres de l’Union européenne dont la monnaie est l’euro
Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés
– Prêts et avances pour le logement des agents de l’État
– Prêts pour le développement économique et social
– Prêts à la filière automobile
– Prêts et avances au fonds de prévention des risques naturels majeurs
Avances aux organismes de sécurité sociale
– Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée prévue au 3°de l’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale
– Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée prévue au 9° de l’article L. 241-6 du code de la sécurité sociale
– Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée affectée aux organismes de sécurité sociale par l’article 53 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008
Total des comptes de concours financiers
Total général
II. – Les résultats des comptes spéciaux dont les opérations se poursuivent en 2013 sont arrêtés, au 31 décembre 2012, par mission et programme aux sommes mentionnées dans les tableaux ci-après. Les crédits de paiement ouverts et les découverts autorisés sont modifiés comme indiqué dans ces mêmes tableaux.
En euros
Opérations de l’année
Ajustements de la loi de règlement
Désignation des comptes spéciaux
Dépenses
Recettes
Ouvertures de crédits complémentaires
Annulations de crédits non consommés et non reportés
Comptes d’affectation spéciale
Aides à l’acquisition de véhicules propres
– Contribution au financement de l’attribution d’aides à l’acquisition de véhicules propres
– Contribution au financement de l’attribution d’aides au retrait de véhicules polluants
Contrôle de la circulation et du stationnement routiers
– Radars
– Fichier national du permis de conduire
– Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers
– Contribution à l’équipement des collectivités territoriales pour l’amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routière
– Désendettement de l’État
Développement agricole et rural
– Développement et transfert en agriculture
– Recherche appliquée et innovation en agriculture
Engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique
– Projets de lutte contre la déforestation dans le cadre du financement précoce
– Actions des fonds environnementaux contre la déforestation dans le cadre du financement précoce
Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale
– Électrification rurale
– Opérations de maîtrise de la demande d’électricité par des énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d’utilité publique et intempéries
Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage
– Péréquation entre régions des ressources de la taxe d’apprentissage
– Contractualisation pour le développement et la modernisation de l’apprentissage
– Incitations financières en direction des entreprises respectant les quotas en alternance
Gestion du patrimoine immobilier de l’État
– Contribution au désendettement de l’État
– Contributions aux dépenses immobilières
Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien>
– Désendettement de l’État
– Optimisation de l’usage du spectre hertzien
Participation de la France au désendettement de la Grèce
– Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre
– Rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France
Participations financières de l’État
– Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État
– Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État
Pensions
– Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité
– Ouvriers des établissements industriels de l’État
– Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions
Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs
– Exploitation des services nationaux de transport conventionnés
– Matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés
Total des comptes d’affectation spéciale
En euros
Opérations de l’année
Ajustements de la loi de règlement
Désignation des comptes spéciaux
Dépenses
Recettes
Ouvertures de crédits complémentaires
Annulations de crédits non consommés et non reportés
Comptes de concours financiers
Accords monétaires internationaux
– Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine
– Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale
– Relations avec l’Union des Comores
Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics
– Avances à l’Agence de service et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune
– Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics
– Avances à des services de l’État
Avances à l’audiovisuel public
– France Télévisions
– ARTE-France
– Radio France
– Contribution au financement de l’action audiovisuelle extérieure
– Institut national de l’audiovisuel
Avances aux collectivités territoriales
– Avances aux collectivités et établissements publics et à la Nouvelle-Calédonie
– Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes
Prêts à des États étrangers
– Prêts à des États étrangers, de la réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d’infrastructures
– Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France
– Prêts à l’Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers
– Prêts aux États membres de l’union européenne dont la monnaie est l’euro
Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés
– Prêts et avances pour le logement des agents de l’État
– Prêts pour le développement économique et social
– Prêts à la filière automobile
– Prêts et avances au Fonds de prévention des risques naturels majeurs
Avances aux organismes de sécurité sociale
– Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée prévue au 3° de l’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale
– Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée prévue au 9° de l’article L. 241-6 du code de la sécurité sociale
– Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée affectée aux organismes de sécurité sociale par l’article 53 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008
Total des comptes de concours financiers
en euros
Désignation des comptes spéciaux
Dépenses
Recettes
Majorations du découvert
Comptes de commerce
– Approvisionnement des armées en produits pétroliers
– Cantine et travail des détenus dans le cadre pénitentiaire
– Couverture des risques financiers de l’État
– Exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l’État
– Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État
– Gestion des actifs carbones de l’État
– Lancement de certains matériels aéronautiques et de certains matériels d’armement complexes
– Liquidation d’établissements publics de l’État et liquidations diverses
– Opérations commerciales des domaines
– Régie industrielle des établissements pénitentiaires
– Renouvellement des concessions hydrauliques
Total des comptes de commerce
Comptes d’opérations monétaires
– Émission des monnaies métalliques
– Opérations avec le Fonds monétaire international
– Pertes et bénéfices de change
Total des comptes d’opérations monétaires
III. – Les soldes des comptes spéciaux dont les opérations se poursuivent en 2013 sont arrêtés, à la date du 31 décembre 2012, aux sommes ci-après :
en euros
Soldes au 31 décembre 2012
Désignation des comptes spéciaux
Débiteurs
Créditeurs
Comptes d’affectation spéciale
Aide à l’acquisition de véhicules propres
Contrôle de la circulation et du stationnement routiers
Développement agricole et rural
Engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique
Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale
Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage
Gestion du patrimoine immobilier de l’État
Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien
Participation de la France au désendettement de la Grèce
Participations financières de l’État
Pensions
Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs
Comptes de concours financiers
Accords monétaires internationaux
Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics
Avances à l’audiovisuel public
Avances aux collectivités territoriales
Prêts à des États étrangers
Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés
Comptes de commerce
Approvisionnement des armées en produits pétroliers
Cantine et travail des détenus dans le cadre pénitentiaire
Couverture des risques financiers de l’État
Exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l’État
Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État
Gestion des actifs carbones de l’État
Lancement de certains matériels aéronautiques et de certains matériels d’armement complexes
Liquidation d’établissements publics de l’État et liquidations diverses
Opérations commerciales des domaines
Régie industrielle des établissements pénitentiaires
Renouvellement des concessions hydroélectriques
Comptes d’opérations monétaires
Émission des monnaies métalliques
Opérations avec le Fonds monétaire international
Pertes et bénéfices de change
Totaux
IV. – Les soldes arrêtés au III sont reportés à la gestion 2013 à l’exception :
– d’un solde débiteur global de 656 209 527, 48 € concernant les comptes de concours financiers suivants : « Prêts à des États étrangers » (655 833 958, 62 €) et « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » (375 568, 86 €) ;
– d’un solde débiteur de 792 316, 54 € relatif au compte de commerce « Lancement de certains matériels aéronautiques et de certains matériels d’armement complexes» ;
– d’un solde créditeur de 9 637 411, 73 € afférent au compte d’opérations monétaires « Pertes et bénéfices de change ». –
Adopté.
Le solde du compte spécial « Avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres » clos au 1er janvier 2012 est arrêté au montant de -1 458 342 981, 34 €. –
Adopté.
I. – L’article L. 141-5 du code des juridictions financières est ainsi modifié :
1°
2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – Les agents des services financiers sont également déliés du secret professionnel à l’égard des experts désignés par la Cour des comptes, en application de l’article L. 141-4, qui sont habilités à consulter dans les locaux de l’administration les données fiscales nominatives nécessaires à l’exercice de la mission de certification des comptes de l’État prévue au 5° de l’article 58 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances et de la mission de certification des comptes des branches des caisses nationales du régime général de la sécurité sociale prévue au VIII de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale. »
II. – Après le premier alinéa de l’article L. 140 du livre des procédures fiscales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du II de l’article L. 141-5 du même code relatives aux experts désignés par la Cour des comptes sont également applicables. » –
Adopté.
Au premier alinéa de l’article 72 de la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles, la référence : « et 22 » est remplacée par les références : «, 22 à 38, les II et III de l’article 39 et les articles 40 ». –
Adopté.
Pour prolonger mon propos précédent, je souhaite rappeler que le projet de loi de règlement pour 2012 sur lequel nous allons nous prononcer prend en compte la gestion de la droite pour une partie de l’année et de l’actuel gouvernement pour l’autre partie de l’année. Dans sa sagesse, la commission des finances propose d’adopter ce texte. Il serait en effet raisonnable de pouvoir accorder quitus à la gestion opérée alternativement par deux équipes gouvernementales.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
L’ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, sur l’orientation des finances publiques.
La parole est à M. le ministre.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous retrouver ce soir pour ce débat d’orientation des finances publiques, qui est, pour nous tous, un moment important.
Nous avons eu dans cette enceinte, il y a un peu plus de deux mois, une discussion sur le programme de stabilité et le programme national de réforme de la France. Ces échanges sont, je n’en doute pas, encore frais dans vos mémoires, et vous venez d’évoquer nos orientations futures dans le cadre du débat sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2012.
Lors du débat sur le programme de stabilité, nous avons pris acte collectivement – je dis bien « collectivement » – d’une réalité qui nous marque, qui marque l’ensemble des économies européennes et qui marque la France : la dégradation rapide et généralisée du contexte économique dans la zone euro.
La zone euro connaîtra en 2013 une nouvelle année de récession, dont la France subit bien sûr les conséquences. Chacun sait en effet ici, quelle que soit son appartenance politique, que notre pays n’est pas un isolat : nos principaux clients et fournisseurs se trouvent dans la zone euro. Notre économie en dépend donc étroitement. Cela m’avait conduit à réviser à la baisse la prévision de croissance à 0, 1 % et la prévision de déficit public à 3, 7 % pour l’année 2013. Je le dis à tous ceux qui pourraient être un peu amnésiques à ce sujet – je partage à cet égard les propos de Bernard Cazeneuve –, comme si nous n’avions pas évolué depuis le vote du projet de loi de finances ! J’aurai d’ailleurs l’occasion d’y revenir et de préciser les aléas qui entourent ces prévisions, et ce en toute transparence.
Au cours de la séance consacrée au programme de stabilité, nous avons eu une discussion franche, animée même, au-delà des questions de chiffres et de décimales, sur les conséquences à tirer de ces évolutions conjoncturelles pour la conduite de la politique budgétaire. Je voudrais rappeler aujourd’hui que l’opposition avait alors pris position en faveur de l’adoption de mesures de redressement supplémentaires pour tenir, coûte que coûte, l’objectif de 3 % de déficit du PIB en 2013. Chacun conviendra que ces observations, relatives à un débat passé, sont factuelles.
Le Gouvernement, soutenu par la majorité, avait jugé que, dans le contexte économique actuel de récession, la voie du plan de rigueur ou du plan d’austérité – appelons les choses par leur nom ! – aurait supposé d’adopter dès cette année des mesures, soit de hausse d’impôts, soit de coupe dans les dépenses de près de 15 milliards d’euros. En clair, cette voie aurait conduit à enfoncer notre économie dans la récession, à aggraver le chômage et, in fine, à ne réduire que très marginalement le déficit. En effet, ce que nous aurions gagné par ce plan de rigueur ou d’austérité supplémentaire, nous l’aurions perdu, en grande partie, par l’effet induit de ces décisions sur les rentrées fiscales, dans une logique fondamentalement récessive.
Le Gouvernement a donc fait le choix de refuser cette logique, qui, je le crois, est vouée à l’échec et que j’appellerai le « nominalisme », pour privilégier à la place un pilotage structurel des comptes publics.
Nous avons choisi le sérieux, ce qui suppose de faire des ajustements structurels et de conduire les réformes nécessaires. Nous refusons donc l’austérité – je le dis avec force en me tournant vers la majorité –, qui aggraverait encore la situation économique et précipiterait notre économie dans la récession. C’est pourquoi je répète à l’opposition qu’elle se trompe en réclamant un collectif budgétaire au nom de la vérité.
La vérité, qui est la même pour tous, nous la disons sur les comptes publics au fur et à mesure qu’elle se dévoile, compte tenu de la situation dans la zone euro et dans notre pays. Ce qui nous sépare, ce n’est donc pas le prétendu rapport à la vérité. C’est un désaccord profond, qui n’est pas illogique, sur la politique économique qu’il convient de mener dans cette circonstance.
Vous privilégiez, selon moi de manière erronée, les cibles nominales à la croissance. Nous voulons, quant à nous, que l’économie française se redresse et crée des emplois. C’est pourquoi nous acceptons, et nous le revendiquons, de laisser jouer les stabilisateurs automatiques dans la conjoncture dégradée que nous connaissons. L’une des leçons que nous pouvons tirer des années écoulées – chacun devrait le faire ! – est que la multiplication des collectifs budgétaires ne garantit en rien le redressement des comptes publics. L’opposition reste sourde à cette leçon, peut-être pour avoir usé, voire abusé de cette mauvaise méthode.
Avec Bernard Cazeneuve, nous avons donc plutôt défendu une gouvernance rénovée, qui s’appuie sur deux principes.
Le premier, c’est une gestion sérieuse et scrupuleuse des dépenses publiques. Je regrette à cet égard, à la place qui est la mienne, le vote qui vient d’intervenir sur le projet de loi de règlement du budget. Nous sommes ou avons été, pour la plupart d’entre nous, élus locaux et, parfois, responsables d’exécutifs de collectivités locales. Pour ma part, je n’ai jamais voté, même lorsque j’étais dans l’opposition, contre un compte administratif, ce qui est la transposition au plan local, toutes choses étant égales par ailleurs, de la loi de règlement. Le rejet du projet de loi de règlement est donc l’expression d’une démarche politique que je ne saurais approuver.
Le second principe est que nous voulons laisser les recettes fiscales s’ajuster en fonction de l’évolution de la conjoncture et ne pas prendre de mesures d’austérité quand l’économie est en difficulté. C’est pourquoi nous n’avons pas accédé à la demande de ceux qui réclamaient un collectif budgétaire.
Je voudrais profiter de ce propos liminaire pour prendre un peu de recul et vous rappeler d’où nous venons. Je serai bref, car Bernard Cazeneuve a dit l’essentiel lors du débat précédent.
Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, en mai 2012, l’enjeu était de parer à l’urgence, c’est-à-dire de répondre aux risques les plus pressants, qui étaient, pour l’essentiel, d’ordre financier, à la fois au niveau européen et au niveau national.
Au niveau européen, la priorité absolue qui s’est immédiatement, presque « physiquement », imposée à nous, c’était d’assurer la survie de l’euro. Je me souviens des premières réunions, européennes ou internationales, auxquelles j’ai participé, comme le G20 de Los Cabos. Nos partenaires étaient inquiets et nous demandaient si l’euro allait survivre encore six mois ou un an. Cette question était légitime : il y avait des raisons de douter.
Pour assurer la survie de l’euro, il fallait prévenir l’instabilité des pays en difficulté financière et éviter la propagation des chocs ainsi que le décrochage d’une partie des membres de la zone euro, ce qui fut fait.
J’ai consacré beaucoup de mon temps et de mon énergie – il m’en reste ! – à chercher, dans le cadre du Conseil Ecofin, des solutions pour la Grèce, pour Chypre, pour les banques espagnoles, et à faire avancer l’union bancaire. Cette volonté de sauvetage de la zone euro n’est pas éloignée des préoccupations des Français. J’ai en effet une conviction profonde : il n’y aura pas de sortie de crise pour la France si nous ne trouvons pas en Europe, et d’abord dans la zone euro, une issue convaincante. Ces deux agendas sont liés.
Au niveau national, les risques les plus immédiats étaient aussi financiers. Il fallait desserrer l’étau qui nous menaçait, éviter une hausse des taux d’intérêt à long terme, c’est-à-dire un scénario à l’italienne ou à l’espagnole, qui n’était pas une vue de l’esprit, tant les comptes publics étaient dégradés. C’est pourquoi nous avons adopté, en 2012, cette trajectoire exigeante et demandé aux Français les efforts rudes qui ont permis la réduction des déficits. Bernard Cazeneuve l’a dit, si nous n’avions pas agi, le déficit aurait été nettement supérieur à 5, 3 % ; il aurait peut-être atteint 5, 5 %.
Nous avons dû faire face à cette crise et conduire cet effort de grande ampleur dans un contexte de dégradation des perspectives de croissance.
Pour l’année 2012, le consensus sur la croissance de la zone euro était de 1 % en janvier 2012. La zone euro a finalement connu une récession de 0, 6 %.
Pour l’année 2013, les conjoncturistes prévoyaient en juin 2012 une croissance de 0, 7 % dans la zone euro. Aujourd’hui, les mêmes anticipent une récession de 0, 6 % pour 2013, et, pour la France, quelque part entre – 0, 1 % et + 0, 1 %.
Ce contexte européen défavorable a pesé assurément sur les perspectives de la France. De même, les hausses d’impôts votées depuis 2011 pèsent sur l’activité et sur le pouvoir d’achat des ménages. Je dis bien depuis 2011, et j’y insiste ! Je ne demande pas à l’opposition d’adhérer à nos choix, mais n’oublions pas qu’aux responsabilités elle n’a pas hésité à recourir à des hausses d’impôts massives. Sur les deux dernières années, 2011 et 2012, la précédente majorité a en effet voté 35 milliards d’euros de hausse des prélèvements obligatoires. Ce sont les mêmes qui nous reprochent aujourd’hui le matraquage fiscal !
Nous n’avons d’ailleurs pas procédé de la même façon puisque nous avons fait en sorte, pour notre part, d’orienter les efforts vers les catégories ayant la propension à consommer le moins, autrement dit de préserver les couches populaires et moyennes.
La baisse du pouvoir d’achat est d’abord la conséquence de la poussée du chômage, à laquelle nous résistons. Le Gouvernement mobilise sur ce sujet à la fois les ressources de la politique économique et celles de la politique de l’emploi.
Dégradation de la situation européenne, déficit de compétitivité, poussée du chômage : c’est bien cette situation que nous avons trouvée.
L’économie française reste une grande économie. Je le rappelle à tous ceux qui se complaisent dans le french bashing, qui pensent que tout va mal en France et qui se font parfois les faux prophètes de notre déclassement. Jouer contre son camp et dénigrer son pays n’est jamais de bonne politique !
Il est vrai que notre économie s’est affaiblie, qu’elle a perdu en compétitivité, qu’elle s’est endettée au cours des dix années écoulées.
Oui, il y a des problèmes, et il faut les traiter ! Non, l’économie française n’est pas en situation de dépôt de bilan, ni même de faillite, comme le disait un ancien Premier ministre, cinq ans avant d’ajouter 600 milliards d’euros de dettes !
Nous sommes confrontés à un double défi : redresser le pays et ses comptes publics ; redresser son tissu productif. Notre réponse est à la hauteur de ces défis.
Nous voulons d’abord réorienter la construction européenne en faveur de la croissance. Une réalité doit en effet nous frapper, quelles que soient nos sensibilités politiques : par rapport aux autres grands pôles économiques de la planète – États-Unis, Japon, Chine –, l’Europe prise dans son ensemble cumule à la fois la croissance la plus faible, le chômage le plus élevé, les déficits les plus bas, et même un excédent commercial. Le policy mix de la zone euro, c’est-à-dire la combinaison de politiques monétaires et de politiques budgétaires, est donc trop restrictif.
La France n’a cessé, depuis mai 2012, de demander une réorientation des politiques macroéconomiques.
Les lignes ont commencé à bouger au sein de la Commission européenne, sous l’impulsion du Président de la République, notamment grâce au dialogue nourri que j’ai conduit avec le commissaire chargé des affaires économiques et monétaires, Olli Rehn. La Commission européenne a en effet décidé de donner plus de temps à plusieurs pays européens, dont la France, pour ramener leur déficit en deçà de 3 %, et a mis l’accent sur la réduction des déficits structurels. Par ailleurs, nous avons obtenu un pacte pour la croissance et l’emploi, dont la mise en œuvre a été confirmée, notamment en direction du chômage des jeunes, lors du dernier Conseil européen qui s’est tenu voilà quelques jours.
Il faut à présent conforter cette avancée auprès de la Commission européenne. Tel est l’objet de ce pacte pour la croissance et l’emploi, mais aussi de l’union bancaire européenne, tout à fait essentielle pour lutter contre la fragmentation financière.
Il me paraît légitime que la Commission demande à un pays de faire des réformes. Mais il revient au Gouvernement et à la représentation nationale de les accomplir.
On nous demande de réformer le marché du travail ? Cela tombe bien : nous l’avons fait, comme aucun autre gouvernement avant le nôtre depuis quarante ans.
On nous demande d’agir pour la compétitivité ? Là encore, cela tombe bien : nous l’avons fait, grâce au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE.
On nous demande de réformer les retraites ? Les négociations sont en train de s’ouvrir !
On nous demande de faire des réformes dans le domaine de l’écologie ? Une fois de plus, cela tombe bien, puisque nous menons un processus de transition énergétique.
Demander des réformes, c’est légitime. Demander de réduire les déficits structurels, c’est normal. Ce qui l’est moins, en revanche, c’est d’adopter une approche trop prescriptive, trop intrusive, et de tenir la main des États.
S’agissant des retraites, par exemple, ce qui compte, c’est de résorber le déficit et de résoudre le problème de financement qui nous a été légué par le précédent gouvernement, après une réforme Fillon prétendument définitive. Nous n’avons pas à recevoir de recommandations sur la manière de procéder ou sur le recours à un unique moyen d’y parvenir, qui ne pourrait être que l’allongement de l’âge légal de départ à la retraite.
Nous devons poursuivre avec la Commission ce dialogue ferme, qui n’est pas exempt de rapports de force, dans le respect de l’institution et avec la volonté d’engager un processus de réformes.
Apporter une réponse à la hauteur des défis, c’est aussi prendre à bras-le-corps notre problème de compétitivité. Nous faisons ainsi un effort de 20 milliards d’euros pour la compétitivité avec le CICE, qui, contrairement à ce que laisse entendre l’actuelle campagne de dénigrement de la politique gouvernementale, est en train de « prendre ». J’ai pu constater, au cours de mes déplacements sur le terrain, que 800 millions d’euros de préfinancement ont d’ores et déjà été accordés à des PME et que la Banque publique d’investissement, qui est à l’offensive dans ce domaine, se tient aux côtés des acteurs concernés pour les aider à résoudre leurs problèmes de trésorerie.
Par ailleurs, nous avons pris de nombreuses décisions pour améliorer le financement de l’économie : la création de la Banque publique d’investissement, le plan de renforcement de la trésorerie – 250 millions d'euros –, la réforme bancaire que vous avez votée par deux fois et dans des conditions très satisfaisantes – c'est un texte véritablement réformateur – ou encore la mobilisation des assureurs.
Je veux aussi parler de l’enveloppe de 20 milliards d’euros sur fonds d’épargne pour le soutien au financement à long et très long terme des collectivités locales, qui, rappelons-le dans cette assemblée qui est celle des collectivités, réalisent 70 % de l’investissement public.
C'est en route, puisque la Caisse des dépôts et consignations a validé des dossiers qui représentent déjà 1, 1 milliard d’euros d’investissement, dont 500 millions d’euros financés sur fonds d’épargne. C’est un guichet pour les collectivités qui fonctionnent !
Voilà donc le cadre dans lequel s'inscrit ce débat.
Nous l'expliquions ce matin au nouveau président du MEDEF : Bernard Cazeneuve et moi, lorsque nous bâtissons un budget, c'est avec la croissance, l'emploi, l'investissement comme finalité économique. Il ne s’agit pas de je ne sais quelle politique d'austérité. Le sérieux n'est pas une fin en soi : il est un impératif, mais, surtout, un moyen. Notre objectif est toujours de tirer l’économie de son marasme ou de ses difficultés et de lui permettre de se redresser.
Dans ce contexte, nos orientations visent à confirmer les premiers signaux positifs sur la politique économique. Tout laisse à penser que la zone euro, lentement – trop lentement sans doute –, est en train de sortir de la récession. Le second semestre de cette année devrait voir le retour de la croissance, là encore trop lent, que nous devrons conforter par notre politique de compétitivité ; nous le faisons d’ailleurs déjà. En effet, le Gouvernement maintient complètement l'objectif de l'inversion de la courbe du chômage d'ici à la fin de 2013, avec la mobilisation des objectifs de la politique de l'emploi que vous connaissez.
À cet égard, je souhaite revenir sur les aléas qui entourent la trajectoire que nous traçons pour 2013 et 2014, trajectoire qui est l’objet du débat de ce jour.
La Cour des comptes a publié la semaine dernière son rapport annuel sur la situation et les perspectives des finances publiques. Elle a souligné ces aléas que nous n’ignorons pas : nous avançons les yeux ouverts. On peut discuter de l’appréciation que nous portons sur ces aléas, mais je veux dire ici dans ce débat que certaines critiques sont profondément injustes.
À mon tour, je veux m'en prendre à ce fameux rapport qui critique notre trajectoire et notre politique budgétaire, ce que nous ne pouvons pas accepter.
Si la France se distingue, c’est plutôt en ce qu’elle a mieux résisté que ses partenaires directs. Certes, notre croissance a été de - 0, 2 % au dernier trimestre de 2012, puis de - 0, 2 % au premier trimestre de 2013. Pour la même période, elle a été de - 0, 7 % et de + 0, 1 % en Allemagne ; de - 0, 9 % et de - 0, 8 % en Italie ; de - 0, 6 % et de - 0, 4 % aux Pays-Bas, qu’on nous présente souvent comme le parangon de toutes les vertus. Et je ne donne pas les chiffres de l'Espagne !
Prétendre que nous nous accrochons à une prévision de 3 % de déficit public pour 2013, alors que nous avons débattu voilà deux mois, ici même, d’un programme de stabilité reposant sur une prévision de déficit de l’ordre de 3, 7 %, je ne peux l’accepter. À mon tour, j'affirme que l’exécutif a parfaitement rempli son devoir d’information vis-à-vis du Parlement.
Prétendre que les dépenses de l’État dérapent et déraperont, je ne peux, nous ne pouvons l’accepter. Nous avons tenu la dépense en 2012, le ministre du budget l'a montré avec beaucoup de précision. Nous tiendrons la dépense en 2013 : des mesures permettant de sécuriser nos objectifs ont déjà été prises. Si l’on ajoute la réserve de précaution de 2 milliards d’euros de crédit, le « surgel », nous pouvons faire face à des dépenses imprévues.
En bref, nous savons tous bien qu’il existe des risques sur la croissance, sur les recettes fiscales en 2013, donc sur le déficit public. Néanmoins, je le répète, la dépense est tenue, et c’est là l’essentiel. L’important, c’est de tenir le cap de l’effort structurel et des réformes structurelles.
J’ai donc la conviction que les choix que nous avons faits sont les bons. En faire moins aurait eu pour conséquence de mettre en doute notre résolution à redresser nos comptes publics ; en faire plus aurait fait prendre un risque inutile à la croissance et à l’emploi, alors que nous connaissons déjà un niveau de chômage qui n’est pas tolérable et contre lequel nous luttons de toutes nos forces.
Voilà pour l’année 2013.
Pour l’année 2014, nous nous tiendrons à l’effort structurel prévu dans le programme de stabilité. Si la croissance n’est pas au rendez-vous, nous ne sur-ajusterons pas pour tenir coûte que coûte l’objectif de 3 %, grâce au délai obtenu au niveau européen, qui nous offre cette souplesse, cette marge de manœuvre, pour soutenir la croissance et exploiter au maximum le potentiel de croissance disponible pour la France.
Ainsi, l’année 2014 sera une année de tournant et de basculement dans la répartition de nos efforts entre recettes et dépenses. Notre effort structurel reposera principalement sur des économies de dépenses publiques. Notre objectif est en effet de limiter, autant qu’il est possible, la hausse du taux des prélèvements obligatoires. Nous prévoyons en 2014 une légère augmentation du taux de prélèvements obligatoires, de l’ordre de 0, 2 point à 0, 3 point de PIB ; cela figure, mesdames, messieurs les sénateurs, dans le document qui vous a été transmis.
Il s’agira de compenser l’effet des mesures fiscales adoptées en loi de finances initiale. Au-delà, nous concentrerons les efforts sur les réductions des niches fiscales, sur la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, à laquelle je le sais, le président de la commission des finances est particulièrement attaché.
Il n'est pas le seul : le Gouvernement y est également très attentif. Nous préciserons d’ailleurs ces mesures à l’automne, au moment du projet de loi de finances pour 2014.
En matière de maîtrise de la dépense, avec Bernard Cazeneuve, nous construisons un budget de l’État particulièrement ambitieux pour l’année 2014. En effet, celui-ci permet 9 milliards d’euros d’économies par rapport à l’évolution tendancielle des dépenses de l’État, et ce grâce à la baisse des dépenses, hors dette et pensions, de 1, 5 milliard d’euros. Je souligne que c’est la première fois qu’un budget est construit sur une base aussi ambitieuse.
De la même façon, les administrations de sécurité sociale et les collectivités territoriales participeront à l’effort de redressement.
Au total, ce sont donc 14 milliards d’euros d’économies que nous dégagerons en 2014.
La montée en puissance du processus de modernisation de l’action publique, la MAP, jouera un rôle clé à l’avenir pour dégager dans cette optique des économies pérennes. La MAP permettra d’évaluer, d’ici à 2017, l’intégralité des politiques publiques menées par les administrations, en associant étroitement les usagers, les agents, les acteurs de ces politiques au diagnostic porté sur l’efficacité de la politique concernée. À ce stade, 20 % de la dépense publique est couverte par ces évaluations.
J'insiste sur le fait qu'il ne s'agit pas d'un exercice punitif : réduire le poids des dépenses publiques n’est pas une fin en soi. C'est autre chose : c’est une condition de notre croissance et de notre compétitivité future. Dans le même temps, ce doit être un exercice efficace, pertinent économiquement, avec du rendement budgétaire. C’est la condition pour ramener, comme nous en avons l'ambition et comme nous nous y sommes engagés, les comptes publics à l’équilibre structurel d’ici à la fin de la législature.
Mesdames, messieurs les sénateurs, tel est le contexte macroéconomique dans lequel s’ouvre ce débat sur l’orientation des finances publiques. Cette année, ce débat se déroule dans un contexte de transparence accrue, et nous voulons travailler dans cet esprit. Ce sera le cas pour le Haut Conseil des finances publiques, nouvelle institution que nous avons voulue et qui vient éclairer le débat parlementaire, mais notre devoir est avant tout d’informer le Parlement et de lui rendre compte de notre situation économique et de la stratégie mise en œuvre pour répondre aux difficultés que nous traversons.
Nous voulons aussi montrer la cohérence de notre approche, sa robustesse, sa crédibilité, la volonté qui est la nôtre de conduire les réformes structurelles nécessaires pour redresser à la fois nos comptes publics et l’économie réelle. Tel était le sens de mes propos. Tel est le sens de mon action, le sens de l'action du ministre du budget qui se trouve à mes côtés, le sens de l'action du Gouvernement tout entier !
Voilà les observations que je souhaitais formuler pour introduire ce débat dont j’attends beaucoup, comme à chaque fois que je suis dans cet hémicycle.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Acte est donné de la déclaration du Gouvernement.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.
Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce débat intervient deux mois après l'examen par notre assemblée du programme de stabilité européen. Depuis lors, la situation économique n’a pas fondamentalement évolué et les perspectives restent incertaines, ce qui explique que le Gouvernement n’ait modifié qu’à la marge sa trajectoire des finances publiques. En effet, le Gouvernement tient compte de l’exécution 2012, qui, comme nous l’avons exposé lors de l’examen du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2012, s’est révélée un peu moins bonne que prévu. Pour autant, il ne révise pas la trajectoire, par exemple en fonction d’hypothèses concernant l’évolution des recettes fiscales en 2013.
Personne, et cela est assumé pleinement, ne nie les risques liés à l’évolution des recettes. Force est toutefois de reconnaître qu’il est bien difficile de tirer des conséquences des indications que nous avons à ce stade de l’année, d’autant que certaines d’entre elles, concernant par exemple la TVA, laissent songeur tant elles sont volatiles ces derniers mois. Ainsi, aux mois d'avril et de mai derniers, la situation était tout à fait contrastée, la situation du mois de mai s'étant fortement améliorée par rapport à celle du mois précédent.
Une partie de cet hémicycle nous presse de retenir tout de même les hypothèses les plus pessimistes pour procéder au plus vite à de nouveaux ajustements dans le cadre d’un collectif budgétaire. Peut-être certains de nos collègues sont-ils nostalgiques des années où nous examinions trois ou quatre projets de loi de finances rectificative, alors que cela n’avait permis ni de maîtriser totalement les dépenses publiques ni de rétablir les recettes à leur niveau du début de la législature.
Ce n’est évidemment pas une solution. En effet, vouloir, à chaque baisse des prévisions de croissance, mettre un « tour de vis » supplémentaire, qu’il soit budgétaire ou fiscal, pour garder inchangé un objectif de déficit public par rapport au PIB serait absurde. Au-delà de l’absence de visibilité et de consistance, disons clairement qu’une telle politique serait totalement procyclique et nous entraînerait dans une inquiétante spirale de décroissance.
De plus, une telle politique n’est ni réclamée par nos partenaires ni recommandée par les institutions internationales. Au contraire, une prise de conscience a eu lieu, notamment grâce à la position constante de la France portée par le Président de la République dès le lendemain de son élection, qui vise à concilier sérieux budgétaire et soutien à la croissance en Europe. Chacun peut aujourd'hui reconnaître que ce discours de la France, dès le mois de juin 2012, a été progressivement partagé par nombre de nos partenaires européens, ce dont on peut se réjouir.
Ainsi, une mission récente du FMI estime que « la stabilité des finances publiques exige que l’effort de consolidation soit poursuivi à moyen terme. Après trois années d’ajustement budgétaire substantiel, il existe une marge pour modérer à l’avenir le rythme de la consolidation, à condition que l’effort soit concentré sur les dépenses et soutenu par la poursuite des réformes structurelles ». Pour sa part, l’Union européenne devrait nous accorder, comme à quelques autres États, deux années supplémentaires pour revenir sous la barre des 3 % de déficit public.
Ce délai ne doit pas nous conduire à dévier de notre politique, qui est résolument engagée vers le retour à l’équilibre structurel, car nous prendrions immédiatement le risque d’en payer le prix, vis-à-vis de nos partenaires européens comme de nos créanciers. Au contraire, il confirme le bien-fondé de notre trajectoire, que l’on pourrait résumer dans deux phrases figurant dans les lettres plafonds que le Premier ministre a envoyées aux ministres il y a quelques jours : « Le ralentissement économique qui touche l’ensemble de l’Europe depuis l’été 2011 pèse sur la réduction de notre déficit nominal et justifie que le rythme de sa réduction soit adapté afin de ne pas fragiliser la reprise économique. Dans ce contexte, nous devons confirmer notre engagement de maîtrise de la dépense publique comme levier principal de la réduction de notre déficit structurel et du redressement de nos finances publiques. »
Nous pouvons tous partager un constat, celui de la difficulté de procéder au redressement de nos comptes publics dans une conjoncture économique très déprimée, en Europe et dans le reste du monde. Dans ce contexte, nous devons éviter deux excès inverses : le laxisme et l’austérité. Le premier mettrait en cause notre crédibilité et nos engagements européens, sans compter qu’il reporterait une fois de plus la charge de l’ajustement sur les générations futures ; le second favoriserait une récession qui nuirait en retour à notre capacité à redresser nos comptes publics et à la reprise attendue en 2014.
Par conséquent, la seule option nous permettant de concilier sérieux budgétaire et croissance économique consiste à respecter notre trajectoire d’ajustement structurel, qui permet de sécuriser notre retour vers l’équilibre tout en laissant jouer les stabilisateurs automatiques, donc en limitant l’impact récessif.
Cet ajustement, on le sait, portera désormais principalement sur les dépenses, à hauteur de 70 % dès 2014. Le choix de faire principalement porter l’effort sur les recettes en 2012 et en 2013 était pleinement justifié : d’abord, parce qu’une baisse des dépenses publiques aurait eu un impact négatif plus important sur la croissance ; ensuite, parce que les réductions de dépenses publiques ne se décrètent pas. Pour être acceptées, durables et intelligentes, elles supposent une réflexion et une concertation, que le Gouvernement a engagées dans le cadre de la modernisation de l’action publique. Nous voyons d’ailleurs les résultats très concrets des premiers travaux menés dans ce cadre, s’agissant par exemple des aides aux entreprises. La suite de ces travaux, dont le champ est très large, permettra d’éclairer les choix que nous devrons faire au cours des prochaines années pour amplifier et consolider notre effort sur les dépenses publiques.
Le niveau d’ajustement prévu pour 2014 a vocation à satisfaire à l’objectif, ambitieux, des 3 % en fin d’année. Il est possible que nous n’atteignions pas cet objectif, tant les recettes dépendent de la croissance et, de surcroît, d’une élasticité qu’il est impossible de prévoir. Toutefois, en retenant les hypothèses de croissance les plus dégradées disponibles actuellement – nous avons débattu de cette question hier en commission des finances –, nous respecterions les conditions fixées par l’Union européenne, sous réserve toutefois que nous respections bien l’effort prévu, en particulier concernant les dépenses de l’État et de sécurité sociale, sur lesquelles le Gouvernement a le plus de maîtrise.
S’agissant de la capacité à maîtriser l’évolution des dépenses publiques et, dès demain, à réduire les dépenses de l’État, il me semble que la démonstration n’est plus à faire : comme nous l’avons vu, pour la première fois, l’État a dépensé moins en 2012 que les années précédentes, y compris en tenant compte de la charge de la dette et des pensions. En 2014, les dépenses, hors charge de la dette et pensions, devraient diminuer de 1, 5 milliard d’euros, effort qui mettra à contribution non seulement l’État, mais aussi les collectivités territoriales et les opérateurs.
Les plafonds de crédits des missions qui nous ont été communiqués montrent que cette réduction n’empêche pas le Gouvernement de financer ses priorités et de respecter ses engagements, comme les créations d’emplois dans l’enseignement, la justice et la sécurité. Mais ce choix exigeant devra, pour être approfondi, s’appuyer dès 2015 – permettez-moi d’insister sur ce point – sur des réformes structurelles revisitant le périmètre et les modalités d’intervention de l’ensemble des acteurs publics.
S’agissant des recettes, il faudra trouver des recettes nouvelles en 2014. Je considère pour ma part qu’il est nécessaire, dès le prochain projet de loi de finances, d’engager la transition vers la fiscalité écologique, en fixant une trajectoire sur plusieurs années. Je précise bien qu’il ne s’agit pas d’augmenter les impôts au-delà de ce qui doit être fait pour assurer notre trajectoire, d’autant que la fiscalité écologique constitue une partie de la compensation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, qui a permis de réduire le coût du travail pour les entreprises.
D’aucuns considèrent qu’il serait beaucoup plus facile et acceptable de le faire dans une période de forte croissance et de faible pression fiscale ; j’en conviens volontiers, mais il ne me semble pas qu’il faille renoncer pour autant à l’idée que la fiscalité peut contribuer à transformer nos comportements. Notre détermination à tenir le cap vers l’équilibre structurel ne doit pas nous empêcher de transformer notre pays et de le préparer aux défis de demain. C’est ce que le Gouvernement entend faire à travers l’investissement en faveur de l’école, la modernisation de l’action publique, l’amélioration de la compétitivité des entreprises ou encore l’annonce prochaine d’un plan d’investissement pour les dix ans à venir, qui concernera le numérique, la transition énergétique, la santé, les grandes infrastructures et, d’une manière générale, les nouvelles technologies.
Mes chers collègues, j’ai le sentiment, conforté par les propos tenus aujourd’hui par Pierre Moscovici et Bernard Cazeneuve, que la France prépare l’avenir dans de bonnes conditions. Les réformes structurelles sont engagées, la situation budgétaire du pays s’améliore déjà et s’améliorera encore plus en 2014.
Ces dernières semaines, nous avons reçu Olli Rehn à la commission des finances, nous avons rencontré le président de la Banque centrale européenne, nous avons effectué un déplacement aux États-Unis, nous avons entendu des économistes et des experts du FMI et de l’OCDE. Nombre de nos interlocuteurs nous ont dit que la France devait avoir davantage confiance en elle-même.
Au cours de ces entretiens, j’ai donc acquis la conviction que la confiance est un privilège.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. C’est un privilège pour ceux qui la reçoivent – messieurs les ministres, nous sommes prêts à vous accorder la nôtre – et aussi pour ceux qui, comme nous, croient en l’avenir de notre pays et veulent offrir de nouvelles perspectives à notre jeunesse. Veillons sur ces travées à faire partager le plus largement possible ce sentiment !
Applaudissementssur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.
Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, cette année encore, la commission des affaires sociales a la volonté de contribuer au débat sur l’orientation des finances publiques, en apportant un éclairage particulier sur la situation des finances sociales.
Je souligne que la couverture des risques sociaux constitue, à ce jour, le premier poste de dépenses des administrations publiques et que, en 2014 comme en 2013, les organismes de sécurité sociale participeront de manière substantielle à l’effort structurel annoncé par le Gouvernement.
Cet effort me paraît bienvenu.
Il correspond d’abord à l’application des lois de la République. Je vous rappelle à cet égard – nous avons une fâcheuse tendance à l’oublier – que le principe d’équilibre des différentes branches qui composent le régime général est inscrit dans le code de la sécurité sociale.
Cet effort répond ensuite à la mise en œuvre d’un principe de bonne gestion. Si le poids de la dette sociale ne représente aujourd’hui que 10 % du PIB, il nous expose en effet à des risques financiers importants et affaiblit considérablement la crédibilité de notre système de protection.
Cet effort répond enfin à un principe de justice. Financer les prestations sociales d’aujourd’hui par des déficits et de la dette revient – nous l’avons souvent souligné dans cet hémicycle – à reporter des charges sur les générations à venir, tout en hypothéquant le niveau de leur protection sociale. Une telle situation est économiquement, socialement et moralement inacceptable.
J’ai détaillé dans mon rapport écrit la situation des comptes du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse, le FSV, au vu de la clôture de l’exercice 2012 et des prévisions présentées, au début du mois de juin, par la commission des comptes de la sécurité sociale. J’y rappelle que les prévisions fixées en loi de financement ont été atteintes en 2012. Le déficit d’ensemble des différentes branches du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse est ainsi repassé, pour la première fois depuis 2008, sous le seuil symbolique des 20 milliards d’euros, pour s’établir à 17, 5 milliards d’euros. À lui seul, le solde des différentes branches du régime général s’est amélioré de plus de 4 milliards d’euros par rapport à 2011.
Ce déficit reste sans doute trop élevé. Toutefois, dans un contexte économique pourtant moins favorable, il marque une amélioration de plus de 10 milliards d’euros par rapport au point bas historique atteint en 2010. Cette amélioration de la situation financière du régime général est pour partie liée à la maîtrise des dépenses d’assurance maladie. L’ONDAM, l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie, a ainsi été établi à 170 milliards d’euros en 2012, soit 870 millions d’euros de moins que l’objectif fixé par la loi de financement.
Reste que cette amélioration des comptes sociaux est surtout le fruit des nouvelles recettes votées dans le cadre du collectif budgétaire du 16 août dernier. Les mesures de suppression des niches sociales et le relèvement des taxes sur le capital, que la majorité sénatoriale avait déjà proposé en vain dans le cadre du PLFSS pour 2012, ont largement contribué à la croissance des produits du régime général.
Le découvert de trésorerie de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, s’est quant à lui établi à plus de 16 milliards d’euros au 31 décembre 2012.
En ce domaine, nous devons garder à l’esprit que si la reprise annuelle des déficits de la CNAV, la Caisse nationale d’assurance vieillesse, et du FSV est programmée jusqu’en 2018, rien à ce jour n’est prévu pour celle des déficits des branches maladie et famille. Ces déficits, financés en trésorerie par l’Agence, contribuent donc à peser sur les résultats de l’ACOSS et à dégrader les comptes du régime général. Certes, au regard des taux courts particulièrement attractifs dont bénéficient les organismes publics, la question du transfert des déficits résiduels à la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, est sans doute moins stratégique qu’il y a quelques années. Toutefois, dette et trésorerie ne doivent pas être confondues, et nous devons nous interroger, comme nous y incite d’ailleurs la Cour des comptes, sur les conditions d’un éventuel transfert à la Caisse d’amortissement de l’ensemble des déficits constatés.
Si l’année 2012 a connu un recul considérable des déficits sociaux, l’année 2013 sera marquée par leur stabilisation.
Pénalisé par une croissance atone et une progression de la masse salariale moins dynamique que prévue, le déficit du régime général et du FSV devrait s’établir à 17, 3 milliards d’euros en fin d’année, soit une amélioration de 200 millions d’euros par rapport à 2012.
En dépit de 5 milliards d’euros de recettes nouvelles, le solde du régime général devrait quant à lui se dégrader de 1 milliard pour atteindre 14, 3 milliards d’euros.
Tous postes confondus, les dépenses de l’ONDAM seront pourtant à nouveau contenues. Cependant, le très faible dynamisme des ressources de la CNAM, la Caisse nationale d’assurance maladie, en particulier la faible progression des recettes de CSG, contribuera à aggraver le déficit de la branche.
Le même paradoxe est perceptible concernant les comptes de la Caisse nationale d’allocations familiales, la CNAF. En dépit du ralentissement des dépenses, les comptes de la branche famille seront pénalisés par la décélération de ses recettes.
Les comptes du régime général sont, en temps de crise, une illustration du mythe de Sisyphe !
Malgré les recettes supplémentaires, malgré la maîtrise des dépenses, le déficit diminue à peine, traduisant l’importance de l’évolution de la masse salariale et l’existence de déficits structurels non corrigés en période de conjoncture favorable.
Au total, près de 13 milliards d’euros de recettes nouvelles auront été votées entre septembre 2011 et septembre 2012, pour une réduction effective des déficits de 3 milliards d’euros. Nous n’avons certes pas à regretter ce choix. En l’absence de mesures correctrices, le déficit avoisinerait les 26 milliards d’euros et les perspectives financières seraient de nouveau catastrophiques. Néanmoins, l’écart entre les efforts réalisés et les résultats obtenus met en évidence le chemin restant à parcourir pour atteindre l’équilibre des comptes sociaux.
Cet équilibre comptable n’est certes pas une fin en soi. En période de crise, notre système de protection doit bien évidemment jouer son rôle « d’amortisseur » social. C’est l’un des piliers de notre « pacte républicain » ! Mais comment pourrait-il continuer à garder son efficacité lorsque le niveau des déficits est tel qu’il remet en cause la soutenabilité des politiques qu’il porte ?
Dans ces conditions, il convient de saluer les réformes engagées par le Gouvernement et le respect, par celui-ci, de la feuille de route déterminée à l’issue de la conférence sociale de juillet 2012. Je pense en l’occurrence à la réforme de la politique familiale, largement inspirée par les travaux menés par Bertrand Fragonard, qui devrait en améliorer le caractère redistributif et procéder à des adaptations conformes aux besoins d’aujourd’hui. Les mesures proposées par le Gouvernement permettront ainsi de garantir des ressources supplémentaires aux familles les plus vulnérables, tout en améliorant les comptes d’une branche en déficit chronique depuis dix ans.
Je tiens à le préciser, en proposant la réduction du montant du plafond de l’avantage fiscal accordé au titre du quotient familial plutôt que la mise sous condition de ressources des allocations, la réforme envisagée me paraît opportune, et ce pour au moins trois raisons. D’abord, elle confirme le principe d’universalité des prestations familiales, auquel nous sommes toutes et tous attachés. Ensuite, elle conforte les acquis d’une politique familiale qui a donné d’excellents résultats. Enfin, elle évite de faire peser sur les CAF, les caisses d’allocations familiales, de nouvelles contraintes administratives susceptibles d’altérer leur fonctionnement.
La réforme des retraites sera l’autre grande réforme de l’automne, et les conclusions rendues par la commission Moreau ouvrent la voie à une dernière phase de concertation. Après l’accord conclu entre les partenaires sociaux le 13 mars dernier sur les régimes complémentaires, il s’agira d’une nouvelle étape vers la réduction des déficits d’une branche susceptibles de passer, tous régimes confondus, de 15 milliards d’euros en 2013 à plus de 20 milliards d’euros dès 2016.
Famille, retraites et, je me permets de l’ajouter, renégociation de la future convention d’assurance chômage, programmée en fin d’année, tels sont, mes chers collègues, les dossiers qui seront au menu de nos discussions de l’automne. Il s’agit de sujets sensibles sur lesquels chacun prendra ses responsabilités, d’enjeux essentiels sur lesquels nos concitoyens pourront nous juger et de thèmes structurants qui conditionneront l’avenir de notre pays.
Puisque nous sommes réunis aujourd’hui pour préparer les textes financiers de l’automne, je souhaiterais conclure mon propos en faisant état des récents travaux du Haut Conseil de financement de la protection sociale, qui, dans son rapport d’étape du 3 juin dernier, a dégagé quelques principes de bon sens susceptibles de guider l’évolution de la structure de financement des régimes sociaux.
Alors que nous dénonçons régulièrement la complexité des modalités de financement de notre protection sociale, de telles recommandations, si elles étaient suivies, permettraient sans doute de gagner en cohérence et intelligibilité. Le Haut Conseil préconise ainsi la définition de schémas de financement pérennes pour chacun des grands risques de la protection sociale. Il appelle également à la prise en compte de la dynamique des diverses sources de financement. Il nous est en effet arrivé – certains s’en souviennent certainement – de substituer des produits peu dynamiques à des ressources en forte progression. Je pense plus particulièrement au préciput assurance vie, attribué à la CNAF en lieu et place d’une part de CSG, …
… dont le rendement diminue de 200 millions d’euros par an, pour s’éteindre définitivement en 2020.
Le Haut Conseil préconise enfin, et surtout, l’amélioration de la gouvernance des modes de financement de la protection sociale, grâce à la publication dans une annexe du projet de loi de financement de la sécurité sociale des données relatives aux dépenses et aux recettes de l’ensemble des régimes de protection sociale, y compris les régimes complémentaires de retraite et d’assurance chômage.
Cette innovation, que j’avais déjà appelée de mes vœux lors de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques, est essentielle. Compte tenu des effets sensibles de l’évolution des résultats de l’UNEDIC et des régimes AGIRC et ARRCO sur les comptes de la protection sociale, une telle publication permettrait enfin à la représentation nationale d’assurer un suivi global, rapproché et régulier des modes de financement de l’ensemble des dépenses de protection sociale par grands risques.
J’ai bon espoir que ces principes guident notre action au cours des mois à venir, afin de renforcer la lisibilité et, par conséquent, l’acceptabilité de notre système de protection sociale.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, réduire la dépense publique par tous les moyens parce qu’il faut réduire les déficits et la dette, voilà le leitmotiv ! Même si cela a quelque peu l’apparence de la rengaine, voyons ce qu’une telle perspective pourrait donner pour 2014, s’agissant de l’État comme de la sécurité sociale.
Dès lors que l’on a approuvé le traité budgétaire européen, on doit être prêt, en 2014, à soutenir une énième réforme des retraites qui va allonger la durée de cotisation, repousser l’âge de départ et mettre en cause le pouvoir d’achat des retraités. Tant pis pour les jeunes diplômés qui attendent d’occuper les emplois auxquels les « seniors » seront contraints de s’accrocher !
Ajoutons la hausse des droits sur le tabac, du forfait hospitalier, quelques déremboursements de plus, et voilà pour la Sécu !
Pour l’État, relevons, outre la baisse des crédits de l’écologie, les 2, 5 milliards d’euros pris sur les concours aux collectivités locales, une mesure antiéconomique et anticroissance par excellence, le gel du point d’indice des fonctionnaires, une fois de plus en attendant de refaire le coup en 2015, le gel du barème de l’impôt sur le revenu et la suppression de plusieurs milliers d’emplois publics.
Une fois encore, avec 2 634 suppressions de postes, c’est Bercy qui, si j’ose dire, montre l’exemple dans les coupes claires imposées au service public, comme c’est le cas depuis vingt ans. Allez donc lutter contre la fraude fiscale, à petite comme à grande échelles, avec des services fiscaux de plus en plus dépourvus d’agents en activité !
Pour faire « fiscalité écologique », on ajoutera 2 centimes au prix du gazole, ce qui aura l’avantage de faire tomber 15 à 20 centimes de plus par plein en TVA.
La grande réforme fiscale est donc reportée à une date ultérieure et l’on attend sans doute d’avoir inversé la courbe du chômage et, peut-être, réduit les déficits d’ici à 2016 pour que la loi de finances pour 2017 puisse apparaître comme une loi ambitieuse, comprenant même des baisses d’impôts.
Mes chers collègues, il y a quelque chose que, en dépit tous mes efforts, je n’arrive pas à comprendre. Malgré cinq années de croissance atone, le PIB de la France est de 2 000 milliards d’euros, et nous devrions convenir de faire supporter aux salariés de ce pays, aux jeunes, aux retraités – au peuple français ! –, des sacrifices sans cesse plus insupportables et plus injustes et des mesures de restriction permanente du service public.
Les caisses ne sont jamais vides ! Il rentre tout de même 300 milliards d’euros d’impôts dans les caisses de l’État, et plus encore dans celles des organismes sociaux.
M. le ministre délégué a indiqué lors du débat précédent qu’il ne croyait qu’aux chiffres. Prenons le cas de la Caisse nationale d’assurance vieillesse. En 2012, le déficit est en baisse : 4, 8 milliards d’euros, contre 6 milliards d’euros en 2011. Un chiffre à comparer avec des versements de prestations pour 100 milliards d’euros…. Dans son fameux déficit, la Caisse doit notamment imputer près de 4, 6 milliards d’euros – 4, 593 milliards d’euros exactement – qui correspondent à sa contribution au soutien financier aux régimes de retraite déficitaires. En clair, le déficit hors compensation de la CNAV, en 2012, est d’un peu plus de 200 millions d’euros. On est encore loin du gouffre !
Prenons le cas de la Caisse nationale d’assurance maladie. En 2011, les comptes consolidés de l’assurance maladie ont présenté un déficit de 8, 8 milliards d’euros, pour 187 milliards d’euros environ de prestations servies, ce qui nous donne un déficit situé à moins de 5 % de ce total. Sur ces 8, 8 milliards d’euros, 3, 2 milliards d’euros provenaient des compensations versées aux autres régimes, majorées d’une part des 3 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales non compensées.
En 2012, le déficit de la CNAM s’est contracté à 5, 9 milliards d’euros, et la Cour des comptes évalue à plus de 2, 6 milliards d’euros le montant des compensations versées aux régimes déficitaires, comme celui des exploitants agricoles par la branche maladie, la branche accidents du travail-maladies professionnelles étant autorisée à apporter son obole pour 500 millions d’euros de mieux, soit plus que son déficit, aujourd’hui fixé aux alentours de 174 millions d’euros.
Cela fait donc belle lurette que les régimes de salariés – je pense non seulement au régime général, mais aussi au régime des fonctionnaires de l’État, sans parler de la véritable saignée subie depuis près de trente ans par la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, la CNRACL – viennent au secours de la faiblesse des régimes de non-salariés en péril.
Le tableau, noirci à l’excès et dramatisé – combien de fois n’avons-nous pas entendu : « Mais qui va payer nos retraites ? » –, n’est jamais présenté que pour un seul objectif : imposer aux salariés, à notre peuple, des reculs sociaux que rien ne justifie !
Foin de l’austérité, de la rigueur et de la réduction des dépenses publiques, qui seraient, s’il fallait en croire les Barroso, Juncker, au demeurant spécialiste de l’évasion fiscale et défenseur du secret bancaire, et quelques autres, la seule solution, la panacée à tous les maux du temps !
Examinons ce qui se passe en Grèce, revenue en termes de richesse à l’année 2002, en Espagne, où plus d’un jeune sur deux est sans emploi et où il y a 27 % de chômeurs, ou au Portugal, avec la démission du ministre des finances et de celui des affaires étrangères après un mois de grève générale particulièrement suivie. Ces exemples montrent à l’envi que les politiques d’austérité des Barroso, Draghi, Monti, Merkel, Almunia et autres Juncker sont en train de tuer l’idéal européen et de créer une fracture irrémédiable avec les citoyens. Songeons simplement aux 8 milliards d’euros annoncés pour l’emploi des jeunes sur plusieurs années, et ce sans effet devant la profondeur du mal. Si l’Europe n’a que 8 milliards d’euros à mettre sur la table pour l’emploi des jeunes, autant ne même pas essayer !
La poursuite des politiques d’austérité, guidée par la rente des fonds de pension allemands et la rentabilité financière du capital, est l’outil de la division de la majorité politique et populaire qui a voulu le changement en mai 2012, après avoir subi pendant dix ans, et de manière accentuée pendant cinq ans, la vaine agitation de gouvernements de droite incapables de répondre aux attentes populaires.
Pour le gouvernement actuel, poursuivre l’austérité, c’est se couper de ceux-là mêmes qui l’ont élu, lesquels se partagent désormais entre attentistes, déçus, indifférents et révoltés.
Messieurs le ministre, vous pouvez suivre ainsi la pente fatale de la social-démocratie européenne, incapable un temps de reprendre le pouvoir aux Pays-Bas, en chute libre en Grèce ou en Espagne, au purgatoire au Portugal et qui s’apprête – je le crains sérieusement – à subir à l’automne en Allemagne une défaite majeure face aux unions chrétiennes, dont elle n’arrive pas à se distinguer en termes de propositions formulées.
Vous pouvez continuer de mener une politique qui, faute de combattre les injustices – je parle des vraies injustices, pas des « privilèges » dont jouiraient les fonctionnaires à la retraite avec 1 800 euros par mois en moyenne –, accroît les tensions, les divisions au sein même de la population et fait le lit de l’extrême droite aussi sûrement qu’un commissaire européen candidat au secrétariat général de l’OTAN. Mais vous pouvez aussi décider de changer de cap.
Les comptes sociaux et les comptes publics sont, nous dit-on, en déficit. Comment pourrait-il en être vraiment autrement ? Nous avons dans ce pays plus ou moins 3, 3 millions de chômeurs officiels, catégories A, B et C, comme l’on dit, et plus ou moins 5 millions de personnes sans emploi, à commencer par ceux et celles qui ne pointent même plus à Pôle emploi faute d’y trouver réponse à leur situation.
Je partage, dois-je le dire, l’opinion de Gérard Rivière, président de la Caisse nationale d’assurance vieillesse, qui disait voilà peu qu’aucune réforme d’ampleur de notre système de retraite n’avait de sens avec un tel niveau de chômage.
Si le schéma économique et social en vigueur consiste à intégrer la persistance d’un tel niveau de chômage, il est évident que nous ne nous en sortirons jamais qu’en imposant des reculs sans cesse plus vifs aux garanties collectives et à la qualité de notre sécurité sociale.
La modération salariale est à l’œuvre dans le secteur public, donnant des idées aux entreprises et aux patrons. De la même manière, nous ne pouvons que constater que la part du travail salarié est sans cesse plus faible dans la richesse créée. Et ce n’est pas la loi dite de « sécurisation de l’emploi », qui a donné de nouvelles armes au patronat pour licencier à sa guise – je vous rappelle les récents cas de Michelin à Joué-lès-Tours, de PSA à Aulnay-sous-Bois ou de la FNAC –, qui va améliorer la situation ! C’est pourtant au niveau des entreprises que nous disposons, avec les comités d’entreprise, les délégués du personnel, l’ensemble des instances représentatives du personnel, des premiers éléments d’inversion de la tendance.
Qu’on y songe, avec un exemple relativement simple : en 2013, 131, 2 milliards d’euros devraient être consacrés à la rémunération des fonctionnaires, comme au règlement des pensions des fonctionnaires de l’État aujourd’hui à la retraite. Et voilà qu’a été publié, le 18 juin dernier, un rapport de Jean-Jack Queyranne, président de la région Rhône-Alpes, sur les aides de l’État aux entreprises, aides évaluées dans ce rapport à un total de 110 milliards d’euros ! Encore un effort, et l’État dépensera beaucoup plus à « aider » les entreprises au nom de l’emploi et de l’investissement qu’à rémunérer ses propres agents… Le plus intéressant est que le rapport Queyranne, censé définir quelques pistes d’économies budgétaires – entre 1 milliard et 2 milliards d’euros, si l’on en croit la lettre de mission d’Arnaud Montebourg –, a sanctuarisé les dépenses du type « taux réduits de TVA », « exonération des cotisations sociales » et « crédit d’impôt recherche ».
Mais quand va-t-on enfin écouter les salariés qui subissent, dans la trappe à bas salaires ouverte en grand par les exonérations, les effets pervers de la modération salariale ?
Quand va-t-on écouter les techniciens et cadres, qui savent que les dépenses de recherche n’ont de sens, dans trop d’entreprises, qu’à hauteur de la rentabilité immédiate qu’elles rapportent ?
Quand va-t-on entendre ceux qui savent fort bien que la baisse de la TVA dans la restauration n’a pas résolu les problèmes d’emplois et d’activité du secteur ?
Mais allons plus loin, puisque les aides du rapport Queyranne, qu’il faut soumettre à la surveillance des comités d’entreprise et des représentants du personnel, ne représentent que deux fois – je dis bien « deux fois » – le produit de l’impôt sur les sociétés...
Le rapport Queyranne n’épuise pas le sujet puisqu’il n’évoque pas, par exemple, le reversement de la TVA déductible – 52, 4 milliards d’euros –, les effets du régime des groupes sur l’impôt sur les sociétés – 44, 3 milliards d’euros en 2012 –, l’exonération des plus-values de cessions de participation – 6, 95 milliards d’euros en 2012 –, ni beaucoup d’autres choses comme le moindre poids de la contribution économique territoriale, la CET, à l’égard de l’ancienne taxe professionnelle – 11 milliards d’euros.
Rappelons-nous, mes chers collègues, que, à la demande du Conseil des prélèvements obligatoires, la Cour des comptes avait évalué les dépenses fiscales destinées aux entreprises à 35, 4 milliards d’euros en 2010 et les effets des dispositifs de calcul de l’impôt à 71, 5 milliards d’euros de plus, soit rien moins que près de 107 milliards d’euros.
De cet ensemble, on retrouve peu de chose dans le rapport Queyranne !
De 2005 à 2010, entre dépenses fiscales et mesures particulières de calcul de l’impôt, ce sont 505, 5 milliards d’euros qui ont été laissés à la disposition des entreprises.
À la fin de 2004, la dette publique était de 833 milliards d’euros. À la fin de 2010, son encours s’élevait à 1 229 milliards d’euros, soit une hausse de 396 milliards d’euros sur la période.
Tous les efforts accomplis pour préserver les capacités financières de nos entreprises, pour faciliter l’investissement et les créations d’emplois auront donc abouti à la hausse des déficits et de la dette publique, ainsi qu’à l’accroissement du chômage. Il est donc temps que nous arrêtions de dispenser sans regards et sans évaluations l’argent public en direction des entreprises, au vu de l’usage médiocre qui en a été fait jusqu’ici.
Laurence Parisot, elle-même, s’est plainte, peu de temps avant son départ, de la « baisse du taux de marge » de nos entreprises. Qu’ont-elles fait, mes chers collègues, de l’argent public ?
Nous devons également mener la chasse à la fraude fiscale et sociale, fraude qui plombe durablement les comptes publics depuis trop longtemps. Quand il y a crise, il est anormal que les entreprises optimisent leurs résultats pour échapper à l’impôt, que de riches particuliers soustraient leurs revenus et leurs patrimoines à l’application du droit commun. Il faut donc mener la lutte contre la fraude de manière déterminée, sans mansuétude à l’égard de tous ceux qui trompent le fisc, et donc la France, ses institutions, son administration, son peuple.
Nous voulons donc le remboursement des aides publiques par les entreprises fraudant l’impôt. Nous souhaitons aussi davantage de recettes fiscales et sociales dans la justice, plus de recettes pour plus de dépenses utiles et que des milliers d’emplois, notamment dans le secteur public, soient pourvus.
La sortie de crise, mes chers collègues, passe par l’audace ainsi que par l’abandon pur et simple des orientations « austéritaires » qui minent les politiques publiques depuis trop longtemps. Poursuivre dans la voie fixée par la loi de programmation des finances publiques reviendrait à nous exposer à des difficultés insurmontables et à des tensions sociales particulièrement fortes.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, le protagoniste de notre débat, tel qu’il a été posé, c’est incontestablement la croissance.
C’est la croissance qui réduira le déficit et résorbera la dette ; c’est la croissance qui endiguera le chômage ; c’est la croissance qui vaincra les inégalités ; c’est la croissance qui sauvera l’Europe. La croissance est aujourd’hui notre unique horizon. L’horizon, cette ligne qui recule à mesure que l’on s’avance ! Comment croire encore que nous pourrons l’atteindre ? L’effleurer peut-être, mais l’atteindre ? Et durablement ?
La croissance se déprécie sans discontinuer, en moyenne décennale, depuis quarante ans. Le pays est même en récession. Nous, les écologistes, n’avons pas la foi qui nous permettrait de croire à un retour de la fille prodigue.
Au premier rang des causes de cette progressive mais inexorable atonie de la croissance figure l’épuisement des ressources naturelles dont la croissance s’est repue sans limite ni conscience. Le cycle insensé de l’économie de la quantité, du volume, du « toujours plus » trouve là une intangible limite physique qui se traduit tout simplement par un prix de l’énergie et des matières premières progressivement rédhibitoire.
L’agriculture, notamment, illustre bien cette dérive, ses illusions et son déclin. La révolution productiviste consiste à produire aujourd’hui le même kilo de blé qu’hier, mais en remplaçant les hommes par des machines dispendieuses en pétrole et en substituant à l’agronomie raisonnée une utilisation massive d’intrants chimiques, qui polluent les nappes phréatiques, annihilent les insectes et stérilisent les sols. Les paysans d’hier qui ne sont pas au chômage réclament aujourd’hui des exonérations de taxes sur le carburant pour leurs tracteurs et se découvrent une prévalence de cancers très supérieure à la moyenne.
Revenir sur ce modèle absurde ne consiste pas à retourner au Moyen Âge. Cela revient simplement à retrouver le bon sens. Développer enfin une agriculture nourricière qui préserve l’environnement et la santé des hommes, c’est possible, et c’est là que réside le vrai progrès. Nous devons aujourd’hui substituer à la production de quantité, c’est-à-dire au productivisme, une production de qualité.
C’est vrai de la production de biens matériels, artificiellement alimentée par la publicité et malhonnêtement soutenue par l’obsolescence programmée, mais c’est également vrai de tous les emplois tertiaires : pour un enseignant, pour un garde-malade, pour un policier, le productivisme, la croissance, le « toujours plus » n’ont aucun sens. Leur métier n’est pas de faire du chiffre !
C’est précisément cela l’écologie politique. Constatant à la fois l’échec et l’impossibilité du modèle productiviste, elle consiste à encourager, à favoriser, à accompagner la transition de la société vers un modèle de la mesure et de la tempérance, qui respecte les hommes et préserve le milieu qui les fait vivre.
Vous comprendrez, monsieur le ministre de l’économie, que cette analyse et les mesures qu’elle implique s’accommodent mal de la vision que vous avez décrite. Le chemin, l’orientation que vous nous proposez, puisque tel est le titre de notre débat, se fonde sur le double dogme que la seule faille de notre modèle est l’excès de dépenses publiques et que la croissance nous attend au coin de la rue. Dans ce schéma, l’écologie n’est qu’un coûteux supplément d’âme, si ce n’est une simple concession agaçante à un allié prétendument agité.
Le budget que vous esquissez comprend environ 13 milliards d’euros de coupes dans les dépenses de l’État et les prestations sociales. Qu’il n’y ait pas de malentendu : nous ne considérons pas que toute coupe serait par essence à bannir. Je l’ai dit à l’instant, l’efficacité des politiques publiques doit être sans cesse questionnée. Pour autant, les coupes que vous nous proposez ne nous convainquent pas. Certes, vous avez transmuté la révision générale des politiques publiques, la RGPP, en modernisation de l’action publique, ou MAP. J’imagine que l’on trouvera dans quelques années un autre acronyme du même type. Certes, vous avez à la rigueur substitué le sérieux, ou le sérieux à la rigueur... Comment toutefois cela pourrait-il suffire à nous faire admettre que, sur vingt-huit missions, l’écologie soit servie en vingt-septième position, alors que, dans le même temps, vous sanctuarisez le budget militaire, qui plus est en lui affectant des ressources exceptionnelles, provenant notamment de la vente du patrimoine public que constituent les fréquences hertziennes ? Assurément, d’autres choix étaient possibles. Car si l’on accepte de prendre un peu de recul, on s’aperçoit que les marges de manœuvre existent.
Le déficit de la balance commerciale française tourne autour de 70 milliards d’euros, soit exactement le même ordre de grandeur que la facture énergétique de notre pays. La France, qui investit trois fois moins que l’Allemagne dans les énergies renouvelables, se voit contrainte d’importer une énergie de plus en plus chère. N’y aurait-il pas là un gisement d’économies plus sérieux que dans le budget de l’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie ?
Dans le même genre d’idée, une étude récente a montré la gabegie que représente le remboursement des médicaments en France, notamment du fait de l’absence de recours systématique aux génériques et de la politique, pour le moins discutable, de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, qui distribue avec largesse ses autorisations de mise sur le marché. Ma collègue du Parlement européen, Michèle Rivasi, propose à ce sujet une réforme simple, qui permettrait de dégager la bagatelle de 10 milliards d’euros par an à très court terme. Prendre en considération ce genre d’initiative avant d’élaguer les prestations sociales ne pourrait-il pas également relever d’une forme de sérieux ?
De la même manière, on sait aujourd’hui que les polluants de l’air déclenchent nombre de pathologies respiratoires et cardio-vasculaires. Sans même parler des vies emportées ou abîmées, ces maladies occasionnent évidemment des coûts pour la société. Il s’avère que ces coûts, monsieur le ministre, peuvent être estimés, a minima, entre 20 milliards et 30 milliards d’euros par an pour la France métropolitaine. Ces chiffres n’ont pas été fomentés dans le secret du laboratoire d’un lanceur d’alerte exalté : ils émanent d’un rapport de 2012 du Commissariat général au développement durable. Si une politique de prévention sérieuse était mise en place, en plus de sauver des vies, nous économiserions à terme de quoi couvrir le déficit des quatre branches de la sécurité sociale et rembourser allègrement sa dette.
Enfin, pour terminer cette liste loin d’être exhaustive, je manquerais à mon devoir si je ne vous rappelais pas ici les quelques milliards d’euros que nous pourrions économiser en supprimant la composante aérienne de la force de frappe nucléaire. Entendons-nous bien, les écologistes sont évidemment favorables à l’abandon complet de la dissuasion nucléaire, dont je ne suis pas sûr qu’elle nous ait beaucoup aidés au Mali ou ailleurs. Mais ce n’est pas à ce changement de doctrine que je vous invite. Il s’agirait seulement, par pragmatisme, de supprimer le volet aérien de la force, dont les experts militaires eux-mêmes s’accordent à considérer qu’il est dépourvu d’intérêt stratégique, pour ne conserver que la composante sous-marine.
Voilà, messieurs les ministres, brossées à grands traits quelques propositions d’économies substantielles, qui présentent pour les écologistes l’intérêt de s’inscrire dans le cadre de la transition sociétale qu’ils appellent de leurs vœux. Les marges de manœuvre qui seraient ainsi dégagées devraient, à notre sens, être réinvesties pour accompagner la transition et en amortir les effets collatéraux. Une fraction pourrait être affectée à la réduction de la dette. J’ai déjà eu l’occasion de dire à cette tribune à quel point les écologistes déplorent que les rudes efforts demandés aux ménages français servent aujourd’hui à financer un crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, consenti sans conditions aux entreprises, …
… alors même que la transition écologique de l’économie nécessite un pilotage stratégique subtil.
Nous ne partageons donc pas les orientations fondamentales qui nous sont ici présentées, mais ce n’est pas pour autant que nous nous sentons isolés, loin s’en faut, au sein de la majorité.
Le rapporteur général des finances de l’Assemblée nationale, Christian Eckert, vient en effet d’écrire sur son blog tout le mal qu’il pense du CICE. Mieux vaut tard que jamais !
Arnaud Montebourg, qui travaille avec vous à Bercy, a critiqué avec franchise l’austérité. Un collectif de différentes tendances de députés socialistes, représentant à peu près le tiers du groupe à l’Assemblée nationale, appelle à retrouver l’esprit de la campagne présidentielle en menant une véritable réforme fiscale, en lieu et place de l’ajustement structurel social-libéral qui fait désormais office de cap.
Le groupe socialiste, toujours à l’Assemblée nationale, a cosigné avec le groupe écologiste une résolution volontariste exhortant à avancer sans tarder sur la voie de la fiscalité écologique.
Delphine Batho, …
… à qui j’adresse de cette tribune un salut amical, a critiqué avec beaucoup de courage, dans les conditions que l’on sait, le sort réservé à l’écologie.
Comme tous ces parlementaires et ministres socialistes, les écologistes n’ont pas oublié le François Hollande du Bourget, qui s’attaquait à la finance, le François Hollande de Châlons-en-Champagne, pour qui la compétitivité ne se confondait pas avec le coût du travail, …
… le François Hollande inaugurant la conférence environnementale, qui rappelait « l’urgence » et la nécessité de faire de la France « la nation de l’excellence environnementale ». Comme eux, nous sommes encore prêts à y croire.
Comme le disait Charles Pasqua, mais ce n’est pas ma référence !
Mais il nous faudra désormais des actes. Tous les sujets s’y prêtent. Le projet de loi d’orientation agricole constituera une opportunité de changer radicalement notre modèle alimentaire. Le projet de loi relatif à la consommation permettra de vérifier si mes propositions sur l’obsolescence programmée, qui visent à sortir, à l’heure des économies tous azimuts, de la civilisation du gâchis, rencontrent un écho. À cet égard, et sans vouloir préjuger les débats du Sénat, la teneur de la discussion qui vient de s’achever à l’Assemblée nationale a de quoi intriguer : le Gouvernement refuse d’augmenter les délais de garantie des biens de consommation afin de ne pas entraver la compétitivité des industriels... Dont acte, les Français apprécieront !
En ce qui concerne les finances, qui nous occupent ici, il nous semble impératif que la France puisse à très court terme rattraper son retard en matière de fiscalité écologique et quitter enfin l’inquiétante avant-dernière place – place qui est d'ailleurs souvent la nôtre sur de nombreux sujets – qu’elle occupe en Europe. Il ne serait pas concevable que le projet de budget pour 2014 restreigne les maigres crédits de la mission « Écologie » – comme j’ai eu l’occasion de le dire dans la presse, je ne voterai pas les crédits de l’écologie à la baisse – ni qu’il ne mette en place dès à présent les structures d’une telle fiscalité : le rattrapage de l’imposition du diesel par rapport à l’essence, une contribution climat-énergie – laquelle figure parmi les soixante fameux engagements du Président de la République –, la préservation de la biodiversité et des terres agricoles, sans oublier l’amorce de la suppression des niches fiscales anti-écologiques. Dans le souci constant d’accompagner la transition et de préserver la justice sociale, sa montée en charge devra se faire progressivement, sur plusieurs années, avec un produit largement redistribué.
Voilà, messieurs les ministres, comment les écologistes envisagent les orientations à donner à nos finances publiques. Rendez-vous nous est désormais donné à l’automne, et j’espère sincèrement que nous aurons alors le plaisir de défendre les mêmes ambitions en continuant à travailler ensemble ; sinon nous prendrons, les uns et les autres, d’autres dispositions.
M. Thierry Foucaud remplace Mme Bariza Khiari au fauteuil de la présidence.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le débat sur l’orientation des finances publiques est notre rendez-vous de prospective budgétaire. Il est le moment où les propositions de réformes et d’arbitrage doivent être confrontées. Or c’est peu dire que les contraintes économiques et financières n’ont jamais été aussi vives.
D’ores et déjà, nous savons que l’année 2013 présente de forts risques de dérives : le déficit public, qui avait été estimé à 3 % du PIB, pourrait s’établir aux alentours de 4 %. C’est la Cour des comptes qui l’affirme.
Notre endettement va poursuivre sa progression à un niveau tel que, en dépit de taux d’intérêt historiquement bas, la charge de la dette sera supérieure aux crédits de la plus importante des missions de l’État, à savoir la mission « Enseignement scolaire ». Si, malheureusement, les taux d’intérêt venaient à augmenter, je vous laisse imaginer les conséquences qui en résulteraient pour nos comptes publics.
On dit souvent que l’Europe nous oblige à mettre de l’ordre dans nos finances publiques. Permettez-moi de souligner que c’est peut-être l’Europe qui est responsable de certaines des transgressions que nous avons commises dans les années 2000 ; je pense que, sans l’euro, la France ne se serait pas autorisé de tels déficits autour des années 2003-2005. Nous avons ainsi participé à la transformation du pacte de stabilité et de croissance en une sorte de « pacte de menteurs et de tricheurs ». Il aura fallu l’avènement de la crise des dettes souveraines, dont la Grèce fait figure de symbole, pour mettre un terme à cette dérive.
C’est notre situation qui nous oblige à mettre bon ordre. Cessons ces procès contre la gauche, contre la droite ! Convenons, mes chers collègues, que nous avons tous participé à cette dérive de la gouvernance publique, à cet irréalisme, comme si toutes les promesses formulées pouvaient être exaucées.
Sans réformes structurelles profondes et courageuses, le retour à l’équilibre est une utopie. À cet égard, il me semble que nous avons deux priorités à assumer.
La première est de restaurer la compétitivité afin d’engendrer cette croissance dont nous avons besoin pour recréer enfin des emplois et inverser la courbe du chômage.
La seconde priorité est naturellement d’assainir nos comptes publics afin de parvenir à désendetter progressivement la France.
Ces deux impératifs sont indissociables.
Il n’y aura pas d’amélioration de nos comptes publics sans croissance économique. Et sans croissance, il n’y aura pas d’inversion de la courbe du chômage ! Or nous partons de loin. Le diagnostic cinglant établi par Louis Gallois dans le rapport qu’il a rédigé à la demande du Premier ministre est sans appel : il préconise un « choc de compétitivité ». Je regrette personnellement que son examen ne couvre que les dix dernières années, car s’il avait bien voulu porter son regard sur les cinq années précédentes, sans doute eût-il émis une appréciation critique sur les 35 heures.
Notre économie est en danger de décrochage. À cet égard, je voudrais rappeler que les marges des entreprises n’ont jamais été aussi faibles depuis 1985 et que, parmi les dix-sept pays de la zone euro, c’est en France que les marges sont les plus faibles.
Il faut impérativement rétablir ces marges pour retrouver des capacités d’investissement. On évoque souvent les difficultés de financement des entreprises. Permettez-moi de vous dire que les entreprises rentables n’ont pas de difficultés de financement. Le premier problème des entreprises, c’est la rentabilité !
Dans ces conditions, nous devons prendre des mesures fortes en matière de prélèvements obligatoires et cesser de financer notre protection sociale par des prélèvements sur les salaires, qui sont des impôts de production. Taxer la production à l’heure de la mondialisation, c’est organiser assez méthodiquement la délocalisation des activités et des emplois.
Je salue l’initiative que vous avez prise, messieurs les ministres, d’instituer un crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi à hauteur de 20 milliards d'euros, mais, il faudrait aller, à mon avis, au moins jusqu’à 50 milliards d'euros. L’instauration de ce crédit d’impôt traduit toutefois deux avancées que je crois prometteuses. Pour la première fois, la gauche reconnaît que les charges sociales sont excessives. C’est un acquis important, que je salue comme tel. En outre, la gauche reconnaît que l’augmentation des taux de TVA n’est plus un chemin interdit, n’est plus un tabou de la République. Nous avançons dans la bonne direction, mais, de grâce, allons jusqu’au bout de ce chemin, renversons la table et donnons-nous les moyens de rétablir la compétitivité !
J’en viens à l’assainissement de nos finances publiques.
Il convient de sécuriser à la fois nos prélèvements obligatoires et leur structure. Je pense que vous avez renoncé à aller plus loin dans ce qu’on pourrait appeler le matraquage fiscal. Sécuriser les ressources, réduire les risques de fraude et les dérives de l’optimisation fiscale, c’est simplifier la fiscalité, c’est supprimer cette kyrielle, cette mosaïque de niches fiscales qui coûtent si cher à nos recettes, qui inspirent tous les mécanismes possibles de défiscalisation et qui nous font perdre des ressources considérables.
Opérons une réforme fiscale qui cessera de taxer la production et imposera les produits. Je l’ai dit, imposer les produits, c’est avoir recours à un impôt de consommation, c'est-à-dire à la TVA, que vous appellerez TVA de compétitivité, TVA anti-délocalisation, pour ne pas l’appeler TVA sociale. De toute façon, que l’impôt porte sur la consommation, sur le revenu ou sur le patrimoine, il est toujours payé par les ménages !
Nous avons besoin d’assiettes plus larges avec des taux aussi faibles que possible, une fiscalité qui soit lisible, compréhensible, claire et prévisible. Or, messieurs les ministres, je vous rends attentifs au fait qu’en douze mois vous avez donné des signes très contradictoires, notamment en ce qui concerne l’imposition des plus-values immobilières. Il faut mettre un terme à cette instabilité permanente qui fait fuir les investisseurs.
Concernant la dépense publique, il nous faudra sortir de la méthode du rabot. Les limites de l’exercice sont aujourd’hui largement atteintes : ces coupes plus ou moins claires, ces annonces aux effets souvent optiques sur des milliards qui ne se transforment jamais en économies réelles ne permettent pas d’améliorer la situation de nos finances publiques. Des réformes structurelles sont donc nécessaires.
Le reflux de la dépense publique est vital, incontournable. Nous devons restructurer nos pouvoirs publics et mener une réflexion en profondeur sur leur rôle, notamment au regard des besoins de la société française, des citoyens comme du secteur marchand. Tous les acteurs publics doivent être mobilisés autour de cette exigence, qu’il s’agisse de l’État, des collectivités territoriales et naturellement de la protection sociale. Oserai-je y ajouter l’Union européenne, qui a fait des efforts, messieurs les ministres ? M. Cazeneuve doit s’en souvenir : on a fait pression sur la Commission pour qu’elle réduise les frais administratifs, et c’est ainsi qu’elle a décidé de porter la durée du travail hebdomadaire des fonctionnaires européens de 37, 5 heures à 40 heures.
Voilà qui pourrait sans doute inspirer un autre sujet de réflexion, et peut-être de réforme. Je pense que nous ne pourrons pas tenir la réduction nécessaire des finances publiques si nous ne remettons pas en cause la durée du temps de travail dans les trois fonctions publiques, d’État, territoriale et hospitalière. Puis-je rappeler que, lors de l’institution des 35 heures, il n’était pas question d’appliquer cette mesure dans la sphère publique ? Le fait d’avoir étendu les 35 heures au secteur public crée chaque année plus de 20 milliards d’euros de dépenses publiques supplémentaires.
En matière de dépenses sociales, nous devons également faire preuve de courage. L’évolution de la situation démographique nous fait obligation de réformer courageusement notre système de financement des pensions et des retraites. Je fais confiance à la commission des affaires sociales pour nous faire des propositions. Mais j’ai peur qu’une fois encore on aille d’atermoiements en hésitations, qu’il ne se passe pas grand-chose et que les décisions ne soient pas à la hauteur des problèmes que nous avons à résoudre.
J’en viens aux normes, si nombreuses, qui sont des activateurs de dépenses publiques et des freins à la compétitivité. Combien de chantiers, de travaux, d’équipements ont-ils été retardés parce qu’il y a des procédures à respecter ?
Avant-hier, lors du débat que nous avons eu sur la réforme de la politique agricole commune, on s’est interrogé sur la compétitivité de l’agriculture allemande par rapport à l’agriculture française. Pour construire des bâtiments d’élevage en Allemagne, il faut quelques mois, alors qu’en France il faudra cinq ou six ans avant d’aboutir.
Il peut arriver aussi que des exigences liées à l’archéologie préventive retardent certains projets. Monsieur le président de la commission des finances, je ne remets pas en cause l’archéologie préventive, mais je peux vous citer de très nombreux cas de chantiers routiers qui sont stoppés parce qu’on n’a pas trouvé le temps ou les moyens de procéder aux diligences nécessaires.
J’attends, messieurs les ministres, que vous donniez une impulsion décisive face à ces pratiques administratives trop lourdes. Il y a sans doute nécessité d’alléger les administrations centrales qui concentrent des experts, des agents publics qui sont des édicteurs, des rédacteurs de normes. Il y a là, me semble-t-il, des économies considérables à réaliser.
Avec tout ce qui n’allait pas, heureusement qu’on a changé de gouvernement !
Monsieur le rapporteur général, permettez-moi de vous dire que vous êtes encore dans le temps des annonces, phase exaltante, moment délicieux par lequel passent tous les gouvernements.
Mais nous attendons des actes !
Allons donc jusqu’au bout de la décentralisation et laissons aux élus territoriaux le pouvoir d’innover dans l’organisation des services publics locaux. Ils ont besoin de liberté et ils sont prêts à assumer leurs responsabilités en fonction des attentes de leurs concitoyens et des moyens financiers dont ils disposent. La raréfaction des moyens sera sans doute le levier le plus efficace des réformes des collectivités territoriales.
Je salue bien sûr le travail de notre commission des finances et de notre commission des affaires sociales. Il nous éclaire et nous met face à nos responsabilités. Notre lucidité est également avivée par les excellentes recommandations de la Cour des comptes, qui nous appelle à nos devoirs.
Au fond, mes chers collègues, nous savons ce qu’il faudrait faire mais nous ajournons sans cesse l’acte décisif. La lucidité sans le courage ne sert à rien. Alors, messieurs les ministres, osons les vraies réformes !
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
M. Francis Delattre applaudit.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en ce 4 juillet, nous abordons la discussion du traditionnel débat d’orientation des finances publiques pour l’exercice 2014, à une heure tardive, un jeudi soir.
Si la raison d’être de cet exercice est bien d’informer le Parlement en lui communiquant les orientations de politique économique et budgétaire sur lesquelles le futur budget sera construit, nous doutons encore, monsieur le ministre, que, à la fin de nos échanges, nous serons beaucoup plus avancés et mieux informés, tant le Gouvernement multiplie les annonces tout en repoussant la résolution de l’équation de leur financement.
Ont ainsi été annoncés 10 000 postes supplémentaires dans l’éducation nationale, comme nous l’a indiqué M. Peillon récemment, en plus des 60 000 promis pendant la campagne électorale, …
… 2 000 postes de plus à Pôle emploi, 100 000 places de crèches, une réforme des rythmes scolaires à la charge des collectivités locales – elle coûtera au moins un milliard d’euros –, en période de baisse des dotations… La liste n’est pas exhaustive, car il faut bien constater qu’il ne se passe guère de semaine sans annonce qui aura forcément un coût et un impact sur le déficit public.
D’un côté, on affirme réduire les dépenses publiques ; de l’autre, on continue à promettre pour calmer la grogne des déçus, qui semblent assez nombreux. Voilà qui ne manque pas de nous inquiéter pour les années à venir, mais, pour tout dire, monsieur le ministre, ce que nous attendions d’abord, c’est une loi de finances rectificative.
Car enfin, comment parler sérieusement du budget 2014, alors que la plus grande incertitude règne sur le bouclage de l’exercice 2013 ?
On nous a parfois reproché, dans le passé, de multiplier les lois de finances rectificatives, mais celles-ci permettent d’ajuster le budget au plus près de la réalité de la conjoncture économique.
Je sais bien qu’il n’est jamais agréable de devoir constater la dégradation de la situation, comme c’est le cas actuellement, et en tirer les conséquences, mais c’est aussi cela la véritable sincérité budgétaire, c’est aussi cela la transparence dont vous nous avez tant parlé, c’est aussi cela la gestion prudente, qui s’appuie sur des données économiques actualisées et les plus fiables possible, avant de fixer les orientations pour l’année suivante et à plus long terme.
Nous le savons aujourd’hui, les recettes attendues pour 2013 s’annoncent bien moindres que ce qui a été prévu à l’automne dernier. Cela s’explique principalement par des prévisions de croissance trop optimistes, que nous avions d’ailleurs dénoncées à l’époque.
Pour justifier votre refus d’une loi de finances rectificative, vous nous dites que vous avez déjà effectué les corrections nécessaires à l’occasion de la présentation du programme de stabilité, au printemps dernier.
Cet argument nous paraît d’autant plus irrecevable que le programme de stabilité est un document de prévision présenté aux instances européennes, même si nous en avons débattu ici, toutefois sans vote.
En outre, ce document n’est déjà plus d’actualité, puisque, depuis sa présentation, le Gouvernement a annoncé, et c’est heureux, une réforme des retraites et la probable modification du régime fiscal des plus-values de cession, après la révolte dite « des pigeons », qui coûtera probablement plusieurs centaines de millions d’euros.
Par ailleurs, si le déficit budgétaire pour 2013 a été revu à la hausse de près de 7 milliards d’euros dans le programme de stabilité, ce sont très vraisemblablement plus d’une dizaine de milliards d’euros qui pourraient manquer en recettes, du fait des mauvaises rentrées de recettes de TVA, d’impôt sur les sociétés, d’impôt sur le revenu, mais aussi de droits de mutation.
Aussi, on peut se demander quel sera le montant du dérapage budgétaire cette année : 7 milliards d’euros, 10 milliards d’euros, ou davantage encore ? La question reste posée !
Cependant, la bataille de chiffres, à laquelle vous vous êtes livré avec le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, notre collègue Gilles Carrez, dans le sens duquel la Cour des comptes est plutôt allée, nous laisse craindre une très mauvaise surprise.
Dans ces conditions, le gel programmé de certains crédits sera-t-il suffisant ? À l’évidence, il ne permettra pas de tenir les 3, 7 % de déficit. Pourra-t-il nous éviter de dépasser les 4 %, chiffre maintenant avancé par le Gouvernement ? Nous n’en sommes pas convaincus, et nous aimerions, hypothèses à l’appui, que vous nous en fassiez la démonstration en présentant une loi de finances rectificative.
Voilà pourquoi nous ne pouvons pas nous contenter de vos déclarations de bonne tenue des dépenses, d’autant que nous pouvons craindre aussi une vraisemblable envolée des dépenses sociales.
Comment être rassuré également alors que votre politique de modernisation de l’action publique balbutie tout juste – vous l’avez d’ailleurs dit – et ne donne guère de résultats pour le moment ?
À ce sujet, on aurait envie de vous demander, monsieur le ministre, pourquoi vous avez supprimé le principe du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Que n’avez-vous continué la RGPP ! Vous en auriez fait porter la responsabilité à vos prédécesseurs, comme c’est si souvent le cas maintenant, et vous auriez pu y apporter les modifications que vous souhaitiez. Cela vous aurait permis d’éviter de perdre au moins deux ans dans la maîtrise de la dépense publique.
La RGPP est morte, vive la MAP ! Au fond, les termes nous importent peu. Ce qui nous intéresse, c’est que, au lieu de nous parler d’objectifs et de les considérer comme étant quasiment acquis, vous nous donniez un calendrier précis et des exemples de résultats concrets de votre politique de modernisation de l’action publique.
À l’évidence, pour 2013, des ajustements budgétaires importants sont indispensables, et la Cour des comptes ne dit d'ailleurs pas autre chose. Ils légitiment, à nos yeux, un collectif budgétaire. Le Parlement, de même que l’opposition assurément, est bien dans son rôle lorsqu’il vous demande des chiffres actualisés et des mesures tangibles. Il pourrait alors exercer ses prérogatives constitutionnelles, dans le cadre d’une procédure législative.
Tout cela justifie, à nos yeux, un vote des assemblées, ce qui n’a pas été le cas sur le programme de stabilité, malgré la demande du président de la commission des finances Philippe Marini, et qui ne le sera pas non plus aujourd'hui sur ce débat d’orientation.
L’ajustement que nous réclamons, monsieur le ministre, c’est – vous vous en doutez ! – non pas une augmentation des recettes, ce qui, sans croissance, signifie nécessairement une augmentation des impôts et des taxes, mais une maîtrise des dépenses. Nous savons bien que c’est plus difficile, mais vous n’avez pas d’autre choix.
Vous justifiez le refus du Gouvernement de présenter une loi de finances rectificative par deux arguments : laisser jouer les stabilisateurs budgétaires et ne pas recourir à l’impôt dans le contexte actuel.
Dans notre pays, il est vrai que le gel d’une partie des crédits ouverts, à titre de précaution, a démontré son utilité dans le passé. Vous nous parlez maintenant de « surgel », mais ces mesures ne constituent pas une politique en tant que telle.
S’il n’y a pas de rationalisation sérieuse de la dépense publique sur le moyen et le long terme, ces gels et surgels ne sont que des pis-aller qui pourraient laisser croire que, comme le disent certains, le Gouvernement tergiverse, attendant le retour de la croissance, comme certains le retour du soleil après la pluie.
Nous pensons, pour notre part, que pour faire revenir la croissance, il faut nous en donner les moyens en rendant à nos entreprises des marges de manœuvre pour investir et être plus compétitives.
Quant à la hausse des impôts, c’est, jusqu’à présent, la méthode que vous avez presque exclusivement utilisée pour améliorer le solde budgétaire, et nous en voyons aujourd’hui les limites.
Les entreprises et les particuliers n’en peuvent plus du véritable « matraquage fiscal » – j’ose employer le terme – que vous leur avez infligé, avec pour résultat une croissance qui ne repart pas et, en prime, une baisse de la consommation des ménages.
Bien sûr, vous dites maintenant aux Français que les impôts n’augmenteront plus. Pourtant, restent à venir la hausse de la TVA à partir du 1er janvier 2014, la deuxième baisse du quotient familial dans le cadre de la réforme des allocations familiales, la hausse des cotisations AGIRC-ARRCO, pour sauver les régimes, et la hausse, au 1er janvier 2014, de 10 % de l’écotaxe, seulement trois mois après sa mise en place.
Pour toutes ces raisons, il nous semble que la situation économique de la France justifie de ne pas attendre l’automne prochain : les ajustements budgétaires et les réformes doivent être engagés le plus tôt possible, c’est-à-dire dès maintenant, tout simplement pour qu’ils produisent des effets au plus vite.
Que nous disent d’ailleurs les autorités européennes pour que notre pays retrouve le chemin de la compétitivité ? Selon la Commission européenne, « le budget 2013 doit être exécuté de manière rigoureuse et les efforts d’assainissement résolument poursuivis dans les années à venir » et « la composition de l’ajustement budgétaire devrait évoluer progressivement vers des réductions de dépenses, contrairement à ces dernières années, où les mesures d’accroissement des recettes ont représenté l’essentiel de l’effort ».
Dans cette perspective, « la stabilité du cadre fiscal et de l’environnement réglementaire des entreprises devrait conserver une priorité élevée ». Ce n’est pas moi qui le dis, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, je cite un document de travail des services de la Commission !
La Cour des comptes ne dit d’ailleurs pas autre chose, permettez-moi de le souligner. Selon elle, la France ne pourra tenir ses engagements et objectifs que si des mesures fortes, portant désormais essentiellement sur la dépense publique, sont rapidement prises.
Voilà une convergence de vues qu’il faut souligner entre un organe national, la Cour des comptes, et les instances européennes. Elle est d’autant plus intéressante que les déclarations de certains membres de la majorité, fustigeant la Commission européenne qui prétendrait nous « dicter » notre politique, étaient très malvenues, au moment même où vous deviez aller expliquer à nos partenaires que nous ne tiendrions pas nos engagements.
Et que dire des déclarations de certains ministres, qui ont contraint le Président de la République à rassurer nos partenaires, en leur expliquant que, en France, un membre du Gouvernement peut dire n’importe quoi, pour peu qu’il appartienne à un courant du parti socialiste assez puissant, mais que, finalement, ce n’est pas bien grave...
Tout cela est d’un effet déplorable et ne sert pas la France. Aussi, de grâce, cessons les guerres picrocholines avec les instances européennes!
L’engagement européen de la France implique que l’on accepte le regard des autres sur nos propres choix, qu’on le perçoive non comme une ingérence, mais comme un dialogue constructif, qui doit être utile aux Français et aux Européens.
Par ailleurs, on ne défendra la souveraineté de notre pays qu’en réduisant notre déficit et notre dette publique.
Personne ne le fera à notre place, et c’est non seulement la condition du retour de la croissance, mais aussi l’assurance que la voix de la France portera en Europe.
Sur ce point, la divergence entre la France et l’Allemagne est particulièrement inquiétante : l’Allemagne a désormais une dette de huit points de PIB inférieure à celle de la France et elle sera vraisemblablement à l’équilibre budgétaire en 2014, peut-être même en excédent budgétaire.
En Allemagne, les objectifs à atteindre ne sont pas un sujet de débat partisan. Ils font l’objet d’un large consensus, si bien que le résultat des élections de septembre prochain, quel qu’il soit, n’aura pas d’influence sur ces objectifs partagés.
Si l’on veut être crédible, donc écouté, on ne peut pas plaider, comme vous le faites, pour un gouvernement économique européen et entendre certains ministres protester contre les recommandations des instances européennes. Il faut donc engager les réformes sans tarder et cesser de laisser croire aux Français que tous les outils seraient déjà dans la boîte et qu’il n’y aurait plus qu’à attendre les résultats.
Parmi les outils phare, votre crédit d’impôt compétitivité emploi, ou CICE, ne sera d’ailleurs certainement pas le nec plus ultra du retour à la compétitivité de nos entreprises, quand on sait les interrogations, souvent exprimées, que soulève ce dispositif, en termes de financement dans la durée, d’effet d’aubaine parfois, de complexité et de faible ciblage sur l’industrie enfin. Surtout, les 10 milliards d’euros qui y seront consacrés, si tant est qu’on atteigne ce montant cette année, correspondent tout juste aux prélèvements supplémentaires sur les entreprises. En somme, on donne d’une main ce que l’on avait déjà pris de l’autre !
De même, l’accord national interprofessionnel, l’ANI, signé au début de l’année et traduit dans la loi, ne constitue pas une véritable politique de flexisécurité, alors qu’il ne concerne que les périodes de retournement conjoncturel.
Ces deux exemples doivent être considérés non comme un aboutissement, mais seulement comme un premier pas, qu’il faut consolider par des réformes structurelles de long terme.
Monsieur le ministre, la situation du pays n’est pas bonne, et les Français, pas plus que nous, ne voient de raison d’espérer une amélioration. Pendant de trop long mois, au début de cette législature, le Gouvernement a nié la gravité de la crise. Le Président de la République en a même fait l’aveu publiquement, à la télévision, en déclarant qu’il en avait sous-estimé la portée.
Dans un second temps, c’est le poids de l’héritage que vous avez invoqué. Notre dette publique et notre déficit structurel viennent certes de loin, de très loin même, et nous en portons tous une part de responsabilité, mais c’est bien la crise de 2009 qui a précipité les choses.
Monsieur le ministre, vous avez, comme plusieurs orateurs de gauche, évoqué à plusieurs reprises la période 2002-2012, pendant laquelle les déficits publics et la dette s’étaient largement accrus.
Sur le constat, vous avez raison, mais l’honnêteté intellectuelle aurait tout de même voulu que vous rappeliez deux points.
Premièrement, vous auriez dû préciser que, en 2002, dernière année du gouvernement Jospin, le déficit budgétaire était de 50 milliards d’euros. À la fin de 2007, il avait été ramené à 37-38 milliards d’euros.
Deuxièmement, il y a un élément que vous avez oublié, ou dont vous n’avez jamais entendu parler : le monde a vécu la plus grave crise qu’il ait connue depuis 1929. En une année, les recettes de l’État se sont effondrées de 25 %. Nous avons encaissé ce choc, et n’importe quel gouvernement aurait été dans la même situation que nous.
Nous avons essayé de soutenir la relance et, cela a été rappelé, vous trouviez à l’époque que nous n’en faisions pas assez, que nous aurions dû dépenser davantage pour soutenir l’investissement et la consommation des ménages.
Que se serait-il alors produit ? Nous aurions encore plus creusé le déficit ! Aussi, de grâce, ayez au moins l'honnêteté intellectuelle de le reconnaître. Ne nous faites pas croire que les années 2002 à 2012 ont été un long fleuve tranquille, au cours duquel nous aurions laissé filer les dépenses. Il s'est passé quelque chose en 2008 et en 2009, qui a précipité la situation difficile à laquelle nous nous sommes efforcés de faire face. Et c'est maintenant à vous, qui êtes aujourd'hui au pouvoir, de prendre la relève. Nous vous jugerons sur les résultats que vous obtiendrez !
Cependant, je tiens aussi à rappeler à cette tribune que la Cour des comptes, elle-même, a reconnu que notre pays était entré dans une trajectoire de redressement des finances publiques à partir de 2011.
D’ailleurs, nous avions enregistré, entre 2010 et 2011, un léger sursaut de croissance : 1, 5 % en 2010 et 1, 7 % en 2011 selon l’INSEE. De même, nous avions enregistré une légère décrue du chômage – trop légère, certes –, dont le taux s'est établi à 9, 4 % en 2010, contre 9, 2 % en 2011, selon la même source.
Toutefois, vos critiques, de manière assez paradoxale, ne semblent pas vous empêcher de vous approprier certaines mesures engagées par la précédente majorité et que vous aviez alors combattues.
À ce sujet, j’aimerais rappeler quelques éléments intéressants. Vous vous félicitez des conditions de la mise en œuvre du mécanisme européen de stabilité, mais je vous rappelle que celui-ci a été lancé au début de 2012 et que, à l'époque, dans l'opposition, le groupe socialiste du Sénat ne l'avait pas voté. Les 10 milliards d'euros d’investissements supplémentaires que la Banque européenne d'investissement va engager étaient sur la table des négociations avant votre arrivée au pouvoir. De même, la taxe sur les transactions financières est une initiative de la précédente majorité, que vous avez, certes, menée à son terme.
Aussi, monsieur le ministre, au lieu d’accuser les autres ou de vous approprier certaines de leurs actions, nous attendons que vous assumiez pleinement vos responsabilités, aujourd’hui et maintenant. Nous attendons que vous nous donniez des éléments d’information concrets sur la manière dont vous allez utiliser les deux années de sursis obtenues de Bruxelles pour remettre nos finances publiques d’aplomb.
Quand allez-vous engager, au niveau nécessaire, la baisse des dépenses publiques, et sur quoi va concrètement déboucher la modernisation de l'action publique ? Comment aller vous réformer les retraites en évitant une augmentation du coût du travail, ce qui serait préjudiciable à nos entreprises et à la création d’emplois ? Allez-vous engager la réforme de l’assurance chômage, et comment ? Comment allez-vous contribuer à l’amélioration de la compétitivité et à la profitabilité de nos entreprises, préalable à la création de richesse et d’emplois ?
Monsieur le ministre, mes chers collègues, les instances européennes ont donné à la France un délai de deux ans pour rééquilibrer ses finances publiques. Deux ans, c’est d’autant plus court que l’on pourrait faire face, entre-temps, à un retournement de la confiance que les marchés financiers accordent encore à notre dette publique.
Philippe Marini, alors rapporteur général de la commission des finances, avait intitulé l’un de ses rapports L’insoutenable légèreté de la dette. Nous sommes encore dans ce paradoxe et, quelque part, c'est tant mieux. Néanmoins, nous savons aussi la conséquence immédiate, pour l’ensemble de notre économie, que représenterait le renchérissement du coût de nos emprunts.
Ce qui se passe en ce moment au Portugal ne peut nous laisser indifférents, d'abord parce que l’Europe devra peut-être intervenir, ensuite parce que c’est un signal d’alerte supplémentaire pour tous ceux qui hésitent encore à prendre les décisions difficiles qui s’imposent.
Il faut donc agir, et de façon déterminée. Notre pays a besoin de réformes, d’action et de visibilité, car le retour à la confiance des acteurs économiques est aussi un facteur déterminant de la reprise.
C’est sur ces différents sujets, monsieur le ministre, que nous souhaiterions vous entendre. §
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2013, le débat d’orientation des finances publiques s’inscrit, pour la troisième fois, dans le cadre du semestre européen, qui instaure une procédure de surveillance de la préparation des budgets nationaux par les autorités communautaires. Qu'on le déplore ou que l'on s'en réjouisse, c'est un fait sur lequel nous ne reviendrons pas.
En 2013, comme en 2011 et en 2012, ce débat s’inscrit également dans un contexte d’extrême fragilité des finances publiques de notre pays.
Il faut dire que les dix ans de gestion de l’économie française par les gouvernements précédents ont mis celle-ci dans une situation difficile. Les importants cadeaux fiscaux faits aux contribuables les plus aisés, répétés régulièrement pendant dix ans, …
… ont provoqué le creusement des déficits publics, une hausse de l'endettement et de la charge de la dette, ainsi qu’une casse de l’État-providence présentée comme inévitable au motif que celui-ci serait un concept dépassé.
Évidemment, même un bel outil ne fonctionne plus quand on le détruit. Et quand on veut noyer son chien, on l’accuse d’avoir la rage.
Pourtant, nous, socialistes, avons un cap pour notre nation : celui d’une République sociale, comme il est inscrit dans notre Constitution depuis 1946. C’est-à-dire un État protecteur, qu’il s’agit de défendre quand il est menacé, de réparer quand il est abîmé, enfin de toujours consolider et développer.
L’État-providence n’est passé de mode que dans les têtes des idéologues et des communicants de tout poil qui font en sorte que nous nous appropriions cette antienne. Néanmoins, je pense qu’ils auront du mal à y arriver.
Ils n’y parviendront pas, car les pauvres, les pauvres sans travail, les travailleurs pauvres – innovation sémantique qui nous vient d'ailleurs de la Grande-Bretagne de Margaret Thatcher –, les vieux pauvres, les jeunes pauvres, ceux qui, de plus en plus nombreux, habitent – si l’on peut dire – dans les rues de nos villes, tous ceux-là nous empêchent de trouver normal que d’aucuns demandent de rogner les prestations sociales de ceux que l’on stigmatise sons l’appellation d’assistés.
Ils nous empêchent de trouver normal que l’on parle de charges sociales ou de coûts sociaux, sans jamais parler du coût du capital, de la charge que représente l’exigence indécente de rentabilité à deux chiffres par certains actionnaires.
Ceux-ci n’ont d’argent à placer que parce qu’ils ont, justement, du capital disponible : on a allégé les impôts qu’ils auraient dû payer au sein d’un État solidaire qui se respecte.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Alors il faut le prendre ! Prenez-leur tout !
Souriressur les travées de l'UMP.
La crise, cela a été prouvé, monsieur Dallier, n’intervient que pour une part minoritaire dans nos difficultés. Vous le savez tous, et Philippe Seguin, lui-même, l'avait fait remarquer. Il serait honnête que, de chaque côté de l’hémicycle, nous l'admettions.
La crise n’est donc pas la cause principale du creusement des déficits et du gonflement de la dette, puisqu’il a fallu emprunter pour compenser les allègements d’impôts dont ont bénéficié certains, qui gagnent ainsi, d'ailleurs, sur les deux tableaux : on diminue leurs impôts et, parallèlement, la grande masse des contribuables est obligée de les rémunérer pour les prêts que ces économies leur ont ainsi permis de consentir !
En 2012, quand la gauche est arrivée au gouvernement, c'était dans le contexte d’un ralentissement généralisé de l’activité mondiale, d’un ralentissement de la zone euro, de l’accentuation des hétérogénéités au sein de cette zone, même si aucun pays n’a vraiment été épargné par la dégradation de la conjoncture, et aussi d’un ralentissement de l’économie française.
Aussitôt constitué, le Gouvernement a pris courageusement la situation en main. Il a ainsi procédé à un ajustement structurel significatif de la situation de nos finances publiques.
Alors que, depuis 2002, le déficit structurel avait été systématiquement supérieur à 3 %, son niveau moyen s’élevant à 4, 5 %, et que jamais, depuis cinquante ans, la France n’avait connu une période aussi prolongée de déficit structurel si élevé, depuis juin 2012, le Gouvernement a entrepris de rétablir l’équilibre structurel des finances publiques.
Cet effort, qualifié de « très significatif » par la Cour des comptes elle-même, n’avait jamais été réalisé depuis le milieu des années 1990, lors de la qualification de la France pour l’euro. Il a permis au déficit structurel de repasser sous la barre des 4 % du PIB, un niveau qui n’avait pas été atteint depuis 2007. Et les dépenses de l’État ont connu une baisse historique de 300 millions d’euros en 2012 par rapport à 2011 ; nous l'avons évoqué dans le débat précédent.
En 2013, la gestion des finances publiques françaises, marquée par la volonté du Gouvernement de confirmer et de consolider la stratégie de rétablissement des finances publiques, s’inscrit dans le cadre de la poursuite de la réforme de la gouvernance budgétaire de la zone euro, avec l’entrée en vigueur du traité de stabilité et d’un nouveau paquet législatif.
Il est intéressant de noter que le programme de stabilité prévoit une reprise graduelle de l’activité en France tout au long de l’année 2013. Notre rapporteur général l'a fait remarquer, apportant ainsi dans un débat qui, ce soir, prend une tournure difficile, un élément d'optimisme bienvenu. Je pense, comme lui, que la confiance est un privilège…
… que nous serons au moins quelques-uns, ici présents, à partager. Je veux profiter de ce moment pour rendre hommage à la façon dont il nous communique, avec pédagogie, des éléments essentiels dont certains, même sur les travées de l'opposition, ont salué la qualité exceptionnelle.
Il est donc intéressant de noter que le programme de stabilité prévoit une reprise graduelle de l'activité en France tout au long de l'année 2013, bien que la récession semble devoir se prolonger dans la zone euro et bien que la politique monétaire de la Banque centrale européenne ne se transmette qu’imparfaitement, et lentement, à l’économie réelle en raison du processus d’assainissement des bilans bancaires dans certains pays fragiles.
Pourquoi le programme de stabilité prévoit-il une reprise en France ? Parce que les instances européennes et nombre d’observateurs saluent les mesures prises par le Gouvernement en faveur de la croissance, de l’emploi, de la compétitivité et du secteur de la construction, qu’il s'agisse des dispositifs de soutien au financement des entreprises à court terme, tels que le plan trésorerie, du préfinancement du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi ou de la simplification de l’environnement réglementaire.
Comme en 2012 et en 2013, le Gouvernement a choisi de poursuivre, en 2014, cet effort de rétablissement structurel de nos finances publiques. À ce titre, en avril 2013, il a présenté un programme de stabilité révisé, prévoyant un net ralentissement de la progression des dépenses sur la période 2013-2017, dont un effort budgétaire de 20 milliards d’euros en 2014, porté à 70 % par des économies et à 30 % par des recettes supplémentaires.
Cet effort doit se poursuivre sur la période 2015-2017, pour permettre à la France de revenir à l’équilibre structurel en fin de période, conformément à la loi de programmation.
Cet effort budgétaire sera notamment réalisé grâce à la baisse en valeur des dépenses de l’État, hors dette et pensions : l’objectif de dépense est diminué de 1, 5 milliard d’euros en 2014 par rapport à l’objectif inscrit en loi de programmation. Admettons-le : c’est la première fois qu’un budget aura été construit sur une baisse des dépenses d’un tel montant. On rencontre d'ailleurs bien des difficultés pour le mettre en œuvre, pour le dire et pour le vivre – nous le voyons bien dans les différents ministères. Cet effort est inédit, mais nous devons le faire, et nous le ferons.
Durant le précédent quinquennat, les dépenses, dans le même périmètre, avaient progressé en moyenne de 2 milliards d’euros par an. Nous n’avons donc que peu de leçons à recevoir en matière de gestion économe de la France !
Le déficit du budget de l’État s’élevait à 138 milliards d’euros en 2009, à 149 milliards d’euros en 2010 et encore à 90 milliards d’euros en 2011. Nos prévisions sont de 68, 3 milliards d’euros pour 2013. Ne nous dites surtout pas, chers collègues de l’opposition, que nous faisons exploser les déficits ! Ce dernier chiffre est égal à la moitié de ce que vous avez connu, en moyenne, en 2009, 2010 et 2011. Je dis bien : la moitié.
Même le nombre d’emplois supplémentaires créés a été minutieusement calculé afin que soient scrupuleusement respectées les priorités – nous les assumons – du Gouvernement : 8 800 enseignants et 1 000 emplois dans les domaines de la sécurité et de la justice, compensés par environ 13 000 suppressions de postes dans d’autres secteurs. Cela signifie que les effectifs de nos fonctionnaires vont devoir légèrement diminuer, ce dont il convient, d'ailleurs, de ne pas se réjouir gratuitement, car moins de personnel peut signifier une dégradation du service.
Si l’on inclut les opérateurs, 2 000 postes supplémentaires à Pôle emploi ne sont pas superflus, au moment où les demandeurs d'emploi, désespérés, cherchent quel avenir leur est réservé. Pour les universités, 1 000 emplois supplémentaires représentent un investissement d’avenir, tandis que d’autres opérateurs connaîtront une diminution de plus d’un millier d’emplois.
La Commission européenne a accordé un délai de deux ans supplémentaires à la France, soit jusqu’en 2015, pour ramener son déficit public sous la barre des 3 % du PIB, tout en l’appelant à identifier des coupes dans les dépenses. À cet égard, nous savons, monsieur le ministre, que nous pouvons vous faire confiance pour qu’il s'agisse non pas d'un relâchement, mais de la poursuite d'une trajectoire de désendettement, et cela même si, autour de vous, on entend certaines protestations.
Face à de moindres rentrées fiscales dues à une croissance défaillante, le Gouvernement s’est donc prêté à un exercice novateur, afin de parvenir à réduire de manière structurelle les dépenses de l’État par la mise en œuvre de réformes de long terme, sans trahir ses priorités en faveur de l’emploi, de la jeunesse, de la sécurité et de la justice, et par une réduction sans précédent des dépenses de l’État, avec pour objectif de crédibiliser une stratégie, parfois critiquée pour être trop vague, sur les économies.
Ces choix, cohérents tant avec les préconisations de la Cour des comptes qu’avec les recommandations de la Commission européenne, inclinent le groupe socialiste à soutenir fermement la politique du Gouvernement et, plus particulièrement aujourd'hui, les orientations qu’il nous a présentées en matière de finances publiques.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les perspectives budgétaires pour 2014 ne sont pas très souriantes.
Dans ce sombre contexte, la mission « Outre-mer » serait, semble-t-il, préservée. Il s’agit de tenir compte d’un contexte économique et social extrêmement dégradé et tendu dans l’ensemble des outre-mer, avec, en particulier, des taux de chômage record.
Les outre-mer versent un lourd tribut à la crise, et leur contribution à l’effort de rigueur doit être calibrée en proportion. N’oublions pas que nos concitoyens dans les outre-mer pâtiront, au même titre que ceux de l’Hexagone, des coupes opérées dans les budgets annoncés en baisse, comme ceux de la défense ou de l’agriculture.
Ce débat d’orientation m’offre l’occasion d’aborder un sujet crucial dont il a été beaucoup question ces derniers mois : la défiscalisation et le financement de l’investissement.
Il y a tout juste un mois, le 5 juin dernier, notre délégation à l’outre-mer et la commission des affaires économiques étaient réunies pour examiner un rapport conjoint sur l’impact des dispositifs de défiscalisation pour les économies ultramarines, document présenté par un groupe de travail présidé par notre collègue Marie-Noëlle Lienemann et dont Éric Doligé et moi-même étions rapporteurs.
Cette démarche commune s’est révélée particulièrement fructueuse et percutante. Elle a fait la démonstration concrète du caractère incontournable des dispositifs fiscaux de soutien à l’investissement dans les outre-mer et a permis de dégager dix propositions de modération de la dépense fiscale et d’optimisation de son impact économique.
Il est vrai que, poursuivis par leur réputation sulfureuse due à des scandales vieux de vingt ans et régulièrement fustigés par l’Inspection générale des finances et la Cour des comptes pour leur coût budgétaire, les dispositifs fiscaux de soutien à l’investissement outre-mer n’avaient fait l’objet, jusqu’à présent, d’aucune évaluation approfondie, ni surtout d’aucune confrontation aux spécificités des économies ultramarines.
La Cour des comptes se borne à proposer de supprimer la défiscalisation, sans envisager le moins du monde le désastre que cette mesure provoquerait sur des économies particulièrement vulnérables. Voulant la noyer, elle l’accuse d’avoir la rage !
La connaissance lacunaire de l’impact réel des dispositifs est également imputable à l’incurie de l’administration fiscale : le dernier rapport du bureau des agréments date de 2010, alors même que la loi prescrit une communication annuelle au Parlement. L’administration fiscale ignore par ailleurs la défiscalisation dite « de plein droit », c’est-à-dire non soumise à agrément, et ce sont les organisations syndicales qui nous ont délivré l’information sur les quelque 16 000 dossiers émanant de PME et de TPE.
Le zèle des administrations fiscales est également contestable du strict point de vue budgétaire : en effet, le montant de la dépense fiscale pour l’investissement outre-mer, soit 1, 1 milliard d’euros pour 2013, est inférieur à celui d’au moins une quinzaine d’autres dépenses fiscales, bien plus coûteuses et bien moins stigmatisées !
En outre, au cours des dernières années, les outre-mer ont largement contribué à la politique de réduction des niches fiscales, avec les fameux « coups de rabot ».
Il est aujourd’hui impératif de stopper l’hémorragie : la commission des affaires économiques et la délégation à l’outre-mer appellent à l’adoption d’un dispositif rénové et durable, conservant une aide fiscale à l’investissement qui maintienne l’effort consenti et offre une véritable visibilité, une stabilité indispensable aux acteurs économiques, conformément aux engagements pris par le Président de la République.
Comme le martelait le Premier ministre lors de son récent déplacement aux Antilles, il y a, pour se lancer et investir, nécessité de clarté, de prévisibilité, de stabilité. Contre les vents fiscaux dominants, le chef du Gouvernement a fixé le cap en annonçant le maintien de la défiscalisation, notamment pour le logement social et les PME. Je m’en félicite, et nous devons nous en féliciter. Il a également indiqué la création, à titre expérimental, d’un nouveau crédit d’impôt, dont les contours n’ont pas encore été dévoilés.
Nous sommes bien sûr partisans de toute évolution de nature à améliorer l’efficacité de l’aide fiscale ; nous sommes également soucieux des deniers publics et partisans de la modération budgétaire, dès lors que les mesures d’économie ne risquent pas de créer une onde de choc dont le coût, y compris et surtout au plan social, serait bien supérieur au gain attendu.
L’affirmation du principe de maintien des dispositifs de défiscalisation appelle, dans les meilleurs délais, des précisions concrètes sans lesquelles la visibilité n’est pas assurée pour les acteurs économiques. N’oublions pas, en outre, que l’aide fiscale actuelle n’est autorisée par Bruxelles que jusqu’au 31 décembre 2013 : il y a donc urgence à décider.
À notre sens, et conformément aux propositions formulées par le rapport sénatorial, le maintien de l’effort consenti en faveur de l’investissement outre-mer passe par la restauration des conditions de collecte mises à mal par la décision du Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 2013 : on constate en effet une chute de 35 % du montant de la collecte en juin 2013 par rapport à juin 2012, une complexification et donc un renchérissement des plans de financement. Certains projets risquent même de ne pas réunir les financements nécessaires. Il faut lutter contre ce tarissement des flux défiscalisés en réservant le plafond de 18 000 euros aux seuls investissements outre-mer.
Monsieur le ministre, le développement économique et social des outre-mer serait-il moins important que la préservation du patrimoine architectural français, qui bénéficie d’un plafond spécifique dans le cadre du dispositif Malraux ?
Les critères d’éligibilité aux dispositifs de défiscalisation devront être fixés avec la plus grande prudence : le seul critère de la taille de l’entreprise n’est pas pertinent. Si les TPE et les PME doivent bien sûr être prioritaires, elles sont souvent tributaires des investissements réalisés par des entreprises plus importantes, qui constituent des locomotives et, parfois, le point de départ de toute une filière. Ils doivent se référer essentiellement à la capacité d’accéder au crédit bancaire, qui est la clef de l’investissement.
Le maintien effectif de la défiscalisation passe aussi par la conservation d’un régime de plein droit, moralisé par un renforcement des obligations déclaratives, des contrôles et des sanctions. Généraliser la procédure d’agrément ou même en abaisser les seuils reviendrait à consacrer l’asphyxie administrative de la défiscalisation et, du même coup, du processus d’investissement outre-mer.
En revanche, il serait pertinent de déconcentrer davantage la procédure d’agrément et d’en faire bénéficier les collectivités d’outre-mer et la Nouvelle-Calédonie, en vue d’une appréciation plus pertinente de l’intérêt économique, qui doit se mesurer en fonction des priorités territoriales et du contexte régional, ce qui n’est pas toujours le cas aujourd’hui, loin s’en faut !
Concernant le logement social, qui constitue une priorité pour nos outre-mer, les dispositifs de défiscalisation réorientés par la LODEOM, la loi pour le développement économique des outre-mer, ont permis un important rattrapage. Il ne faut pas casser ce mouvement vertueux, les procédures étant désormais bien maîtrisées par les acteurs du logement social.
Le rapport de notre groupe de travail sénatorial sur la défiscalisation, en concertation avec ces acteurs et moyennant des simulations probantes, a formulé des propositions pour réduire les frais de gestion liés aux montages en défiscalisation et a préconisé l’expérimentation d’un prêt bonifié servi par la Caisse des dépôts et consignations, qui pourrait progressivement se substituer aux aides fiscales et permettre des économies substantielles. Nous espérons vivement que le Gouvernement explorera ces pistes de réforme prometteuses.
Concernant, enfin, le projet expérimental de crédit d’impôt annoncé par le Premier ministre, je tiens à souligner qu’il devra répondre à de nombreuses conditions pour pouvoir atteindre une efficacité comparable à celle de l’aide fiscale actuelle. Il ne pourra constituer une aide à l’investissement que si la question de l’accès au crédit bancaire est résolue au préalable : cela suppose de mettre en place des mécanismes de préfinancement. Aucun acteur actuellement ne peut assumer ce rôle, qui reviendra à la Banque publique d’investissement, la BPI, dont l’ordonnance d’adaptation à l’outre-mer devrait prochainement être publiée.
Je tiens à préciser – ce point est très important – que le crédit d’impôt, s’il permet d’économiser l’avantage fiscal servi au contribuable investisseur dans les procédures de défiscalisation, n’évitera pas les frais d’intermédiation : le montage des dossiers d’investissement et l’ingénierie des plans de financement ne sont pas à la portée de la plupart des chefs d’entreprise désireux d’investir, et il leur faudra en assumer la charge financière, alors que, avec la défiscalisation, cette charge pèse sur le contribuable.
Enfin, je veux rappeler que le crédit d’impôt ne peut bénéficier aux collectivités, comme la Polynésie française ou la Nouvelle-Calédonie, qui disposent de l’autonomie fiscale et, au surplus, ont mis en place des dispositifs locaux de défiscalisation adossés aux mécanismes nationaux. Il faut donc prendre garde d’éviter toute déstabilisation de leurs économies.
Je conclurai en soulignant que la déclaration du Premier ministre a ravivé des espoirs, alors que les signaux délivrés par l’administration fiscale étaient ceux d’une mort annoncée de la défiscalisation. Puissent les dispositifs à venir honorer ces espoirs en aménageant un soutien adapté aux spécificités ultramarines. Progressivité, lisibilité et stabilité doivent gouverner le nouveau schéma de soutien à l’investissement outre-mer !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le domaine des finances publiques, les outre-mer continuent à être stigmatisés, voire diabolisés, parce qu’ils coûteraient cher au contribuable français.
Dans le tout dernier rapport de la Cour des comptes, celui de juin 2013, sur la situation et les perspectives des finances publiques, seule une demi-page de ce pavé de 253 pages…
… est consacrée aux outre-mer, dans un titre significatif : « Réduire les avantages fiscaux excessifs ». Il y est recommandé la suppression des dispositifs de défiscalisation, ce qui entraînerait « une économie nette de 300 millions d’euros ». De même, dans ses rapports publics annuels de 2010 et 2012, la Cour critique « l’inefficacité, le coût et la générosité fiscale exorbitants des dispositifs d’aide à l’investissement outre-mer ».
Je m’élève contre cette vision réductrice et négative, qui ne voit les outre-mer qu’à travers le prisme de la défiscalisation. Cessons de parler de « coût » et de « générosité » quand on les évoque ! Arrêtons les simplifications, la condescendance et regardons ces territoires d’un autre œil.
La « générosité » n’en est pas une. Les outre-mer contribuent également, à l’instar des autres collectivités de France, à l’effort budgétaire et sont pleinement solidaires. Le document de politique transversale pour 2013, qui rassemble l’effort budgétaire de l’État pour l’outre-mer, fait apparaître une diminution des autorisations d’engagement globalement consacrées par l’État aux territoires ultramarins, puisque celles-ci reculent de 1 %, soit une baisse de 138 millions d’euros, pour atteindre un total de 13, 8 milliards d’euros.
Je souligne aussi que les outre-mer, ce sont 2, 6 millions d’habitants, ce qui représente 4, 5 % de la population française, soit l’équivalent de leur poids dans les dépenses publiques, les outre-mer pesant 4, 52 % des dépenses du budget général. Les outre-mer sont donc concernés par la politique de réduction des dépenses publiques, alors qu’ils sont, à bien des égards, plus fragiles.
Il convient, en effet, de rappeler que le niveau moyen de développement des départements et collectivités d’outre-mer en 2010 était proche de celui de la France métropolitaine du début des années quatre-vingt-dix, accusant ainsi une vingtaine d’années de retard par rapport à la métropole, selon un rapport de l’Agence française de développement. Dans le détail, la Guadeloupe aurait douze ans de retard par rapport à la France de 2010, la Martinique treize ans et, au sommet, la Guyane et la Polynésie, respectivement vingt-sept ans et vingt-huit ans de retard.
Les outre-mer, ce sont des écarts de revenu par habitant avec la métropole, toujours en 2010, de l’ordre de 55 % avec la Guyane et de 18 % avec la Nouvelle-Calédonie. Ce sont aussi des taux de chômage avoisinant 30 %, et plus de 50 % chez les jeunes. C’est alarmant quand on sait que 41 % de la population ultramarine ont moins de vingt-cinq ans – 50 % en Guyane, 60 % à Mayotte.
Vous comprendrez que, avec de tels indicateurs, et la liste n’est pas exhaustive, les outre-mer bénéficient d’une attention particulière. Ce sont des territoires où il existe une réelle urgence sociale. Le feu de 2009 n’est pas éteint ; j’en veux pour preuve les dernières manifestations en Guyane et aux Antilles autour du prix des carburants, en Nouvelle-Calédonie, à la Réunion, à Mayotte.
Aussi, je salue le fait que, dans ce contexte de réduction sans précédent des dépenses de l’État, les crédits de la mission « Outre-mer » aient été préservés et même augmentés de 1 %. Ce n’est pas de la « générosité », mais la prise en compte d’une réalité socio-économique fragile.
La semaine dernière, lors de son déplacement aux Antilles, le Premier ministre a rappelé, dans un discours prononcé en Martinique devant des acteurs socio-professionnels, les engagements du Président de la République envers les outre-mer en matière économique et financière.
Je pense, tout particulièrement, à deux outils importants pour le développement de nos faibles économies : la défiscalisation et la banque publique d’investissement. Je ne reviendrai pas sur la défiscalisation, mon collègue Serge Larcher ayant très bien évoqué la situation.
Je me contenterai simplement, comme lui, de saluer le maintien de la défiscalisation et de faire part de quelques questions qui subsistent : la définition à retenir pour les entreprises qui resteront éligibles à la défiscalisation, le régime de l’expérimentation du crédit d’impôt mis en place pour le logement social, le délai de cohabitation des deux procédures et la détermination des plafonds attractifs en valeur absolue découplés du plafond global, à l’instar du dispositif Malraux.
S’agissant de l’implantation de la banque publique d’investissement, les inquiétudes des élus et acteurs socio-professionnels ont été levées par le Premier ministre, qui nous a rassurés en précisant qu’il veillerait à ce que « l’ensemble de ces produits soit disponible de manière effective dans les outre-mer » et que sera développée « une stratégie d’intervention spécifique pour prendre en compte les besoins de ces territoires ». Nous devons néanmoins rester vigilants quant à la pleine application de ces dispositions.
Ces décisions, tout comme les mesures prises en faveur des outre-mer depuis le changement politique - je pense à la lutte contre la vie chère, à l’augmentation des postes d’enseignants, aux emplois d’avenir, aux contrats de génération - témoignent désormais d’une véritable prise en considération des réalités ultramarines.
Reste à souligner qu’il est difficile d’apprécier de manière globale l’effort budgétaire envers les outre-mer pour 2014, car la mission « Outre-mer » ne regroupe pas l’ensemble des programmes concourant à la politique publique de l’État en direction de ces territoires.
J’espère simplement que, à l’instar de la mission « Outre-mer », les crédits des autres ministères en direction des outre-mer connaîtront la même évolution. Je pense notamment aux ministères dont les enveloppes ont été augmentées, c’est-à-dire ceux de l’emploi, de l’insertion, de l’enseignement scolaire, du logement, de la sécurité, de la justice. Autant de domaines dans lesquels les besoins sont criants dans les outre-mer, comme dans tous les autres domaines.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs généraux, mes chers collègues, le débat que nous tenons aujourd’hui sur les orientations des finances publiques pour 2014 s’inscrit dans un double contexte.
Il s’agit, tout d’abord, d’un contexte européen nouveau : nous avons adopté, en 2012, de nouvelles règles européennes, afin de répondre à la crise des finances publiques qui a déstabilisé la zone euro, après une crise financière et une crise économique sans précédent depuis 1929 – nous ne l’ignorons nullement, monsieur Dallier.
Sourires sur les travées de l'UMP.
Ces mesures ont fait débat, car elles impliquent une discipline budgétaire renforcée de la part des pays européens.
Si la création d’un Haut Conseil des finances publiques constitue une contrainte supplémentaire dans l’élaboration et l’exécution du budget de l’État, cette instance doit nous permettre de renforcer notre crédibilité dans un environnement marqué par l’extrême fragilité des finances publiques.
Cette fragilité constitue une faiblesse dans une période de ralentissement de la croissance à l’échelle européenne et mondiale.
Le redressement des finances publiques de la zone euro est la condition de l’indépendance de celle-ci face aux marchés. Depuis un an, il s’agit d’un objectif capital partagé par la France et nos partenaires européens.
Ce débat prend également place dans un contexte national lui aussi nouveau, marqué non par l’austérité, mais par le sérieux budgétaire. Le rétablissement de l’équilibre structurel des finances publiques, depuis juin 2012, est enfin résolument engagé en France. Il donnera lieu à un effort que l’on peut qualifier d’historique pour 2014. N’en déplaise à l’opposition, il s’agit là d’un marqueur fort de la nouvelle majorité.
Il n’était plus possible, en effet, de laisser le déficit structurel du pays à 5, 1 % du PIB, comme c’était le cas en 2011. Grâce aux choix courageux arrêtés dès juillet 2012 par le Gouvernement et la majorité, nous avons ramené le déficit public à son niveau de 2007, soit une réduction de 1, 2 point.
On nous reproche souvent d’évoquer l’héritage de la précédente majorité.
Toutefois, quand l’héritage consiste en une augmentation de 600 milliards d’euros de la dette publique et de 170 milliards d’euros de la dépense publique en cinq ans, il faut souligner que de telles dérives ne peuvent s’effacer en une seule année. On doit mesurer à l’aune de ces chiffres l’ampleur de l’effort qu’il convient de réaliser aujourd’hui, puisqu’il n’a pas été entrepris hier.
Faut-il rappeler que le poids de la dépense publique dans la richesse nationale baissera de trois points à l’horizon de 2017, alors qu’il a augmenté de quatre points entre 2007 et 2012 ?
L’exercice budgétaire ne se limite pas à cet effort impérieux de redressement des comptes. Il est aussi le moyen de mobiliser efficacement la dépense publique, pour que notre pays retrouve compétitivité et croissance : 2014 sera l’année de la confirmation de la pertinence des outils mis en place depuis la fin de 2012 dans les secteurs prioritaires pour atteindre cet objectif. Les priorités du Gouvernement, que le groupe socialiste approuve, sont claires : emploi, éducation, logement, justice et sécurité.
En ce qui concerne l’emploi, nous avons créé, dès l’automne dernier, un outil inédit : le crédit d’impôt compétitivité emploi, préconisé par le rapport Gallois. Ce dispositif sera généralisé et portera pleinement ses fruits en 2014. Cette mesure, complémentaire de la création de la Banque publique d’investissement, est un signal fort en direction des entreprises et en faveur de l’emploi.
En ce qui concerne l’école, le projet de refondation a été adopté. Il est soutenu par la création de 10 000 postes supplémentaires en 2014.
En ce qui concerne le logement, là encore, si l’incidence budgétaire est moins importante, les choix qui sont faits vont dans le sens d’une réponse aux besoins des Français.
Pour conclure, je voudrais, monsieur le ministre, formuler une proposition, qui concerne la recherche, un domaine clef pour la compétitivité et la croissance de notre pays.
Un récent rapport de la Cour des comptes sur le financement public de la recherche souligne qu’il s’agit de l’« un des rares domaines de l’action publique où l’augmentation de la dépense publique peut être regardée comme un objectif en soi, au plan européen comme au plan national ».
Venue de la rue Cambon, la remarque est suffisamment rare pour être notée. La recherche, chacun le sait, est le moteur de l’innovation, elle-même carburant de la création d’emplois : 80 % des emplois créés aujourd’hui le sont dans les secteurs d’innovation technologique.
En France, l’aide publique en faveur de la recherche et de l’innovation repose sur le crédit d’impôt recherche. Il s’agit de l’une des premières dépenses fiscales de l’État. Son montant s’élevait, monsieur le ministre, à 1, 8 milliard d’euros en 2007 ; à la suite de la réforme de 2008, il devrait se stabiliser autour de 6 milliards d’euros en 2014, soit un triplement en sept ans. Cette croissance considérable interpelle. S’il n’est pas question de remettre en cause cet outil considéré comme un bon levier de croissance à moyen terme, il faut s’interroger sur le niveau élevé atteint par cette dépense fiscale.
Dans un contexte budgétaire très contraint, un plafonnement de ce dispositif à 5 milliards d’euros, grâce à une disposition fiscale appropriée, permettrait, me semble-t-il, de dégager un milliard d’euros d’économies. Cette somme pourrait non seulement réduire utilement le déficit budgétaire, mais aussi, pour partie, être redéployée au profit des grands organismes de recherche et des universités. Les dotations de l’État envers ces institutions seront en effet stabilisées en 2014 par rapport à 2013.
M. Michel Berson. Un tel ajustement, monsieur le ministre, aurait un effet neutre sur les finances publiques, mais des conséquences très positives sur l’enseignement supérieur et la recherche, un secteur d’avenir, un secteur prioritaire.
M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales applaudit.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, faut-il vraiment que je revienne sur les raisons pour lesquelles on devrait faire une loi de finances rectificative, que j’explique pourquoi l’effort affiché en matière de maîtrise de la dépense publique me semble relever, sinon de la mise en scène, du moins d’un discours assez convenu et derrière lequel on peine à trouver des éléments permettant de se forger de vraies convictions ? Faut-il vraiment que je me livre, chiffres à l’appui, monsieur le ministre, à ce type de démonstration ?
Je consulte du regard mes collègues rapporteurs généraux et j’ai l’impression qu’il n’est peut-être pas indispensable, à cette heure, que je revienne sur ces sujets
Sourires.
En conclusion de nos échanges, et en attendant le propos de Mme David, je voudrais concentrer mon intervention sur une perspective un peu plus large. Il me semble que la gestion des finances publiques, telle qu’elle est conçue aujourd’hui, se caractérise par des signaux contradictoires et révèle une réelle absence de stratégie économique. Ce dernier point est, à mes yeux, le plus grave.
Nous avons certes encore un avantage : le coût du crédit, qui repose sur le bas niveau des taux d’intérêt, dont bénéficient tant nos entreprises que l’État. Nous savons, toutefois, que les marchés sont volatils et que, en dépit de la politique efficace et le sens de l’innovation de la Banque centrale européenne, nous ne sommes à l’abri de rien. Que survienne un retournement de la politique monétaire européenne, ou que se produisent de nouvelles tensions liées à des difficultés aggravées de plusieurs États membres de la zone euro, et des centaines de points de base seront peut-être en jeu.
La France, nous l’espérons, est également susceptible de s’engager dans la voie de réformes structurelles. Elle le fait cependant, pardonnez-moi, monsieur le ministre, timidement et de manière somme toute contradictoire. Et le Gouvernement donne l’impression de subir les réformes.
Certes, nous avons engagé, avec l’accord national interprofessionnel et la loi sur la sécurisation de l’emploi, une action pour flexibiliser un peu le marché du travail. Toutefois, la contrepartie n’a-t-elle pas été, en matière de mutuelles de santé, la création de cotisations supplémentaires constituant autant de handicaps pour notre compétitivité ?
Pour diminuer le coût du travail, nous avons adopté le crédit d’impôt compétitivité emploi, mais, monsieur le ministre, là où il existait des solutions simples, visant à transférer un volume important de cotisations vers l’impôt de consommation, on a eu recours à des mécanismes compliqués, à tel point qu’une proportion importante de petites et moyennes entreprises semble hésiter à entrer dans ce dispositif, notamment lorsque les coûts administratifs viennent contrebalancer les profits attendus.
Le Gouvernement, se rendant compte qu’il a privilégié, par le crédit d’impôt pour la compétitivité et pour l’emploi, des entreprises non délocalisables – sociétés de l’audiovisuel public, groupe La Poste, entre autres -, revient d’ailleurs sur les avantages que ces entreprises seraient susceptibles d’en retirer. Il fait de même pour les cliniques privées, en révisant leurs tarifs. Je ne dis pas qu’il ne fallait pas y revenir. Simplement, ce dispositif, que l’on nous a présenté comme la panacée, peine à se mettre en place. Il est extrêmement compliqué et il n’a très certainement pas les effets d’entraînement qu’on lui a prêtés. Au demeurant, on s’en rendra compte dans quelques mois.
Lorsque la Commission européenne lui demande de s’engager plus franchement sur la voie des réformes structurelles, le Gouvernement, qui, pourtant, monsieur l’ancien ministre chargé des affaires européennes, est favorable à un gouvernement économique européen, proteste. Il conteste l’ingérence de Bruxelles dans nos affaires intérieures. Encore ce jeu de rôles, ces contradictions, ces propos qui diffèrent d’un interlocuteur à l’autre !
Pendant que la France tergiverse et continue de perdre des parts de marché à l’exportation, il est clair que sa situation relative en Europe se dégrade. Les marges des entreprises souffrent et les augmentations de leur fiscalité décidées par la majorité ne sont pas de nature à leur permettre d’investir et d’innover pour redresser leur compétitivité hors coût.
Pendant ce temps, l’Espagne, au prix d’efforts très douloureux, retrouve une part de sa compétitivité. La France, quant à elle, semble parfois, du moins dans le verbe gouvernemental, se raccrocher à des mesures sans impact macroéconomique véritable. On parle désormais de project bonds, après avoir beaucoup parlé l’an dernier du pacte européen pour la croissance et l’emploi, qui n’a pourtant guère de contenu. Sans modèle économique affirmé, la France n’est-elle pas menacée d’être coincée entre l’Allemagne et les pays du Sud ?
Face à de telles contradictions, le Gouvernement se trouve dans une situation qui se révélera de plus en plus difficile.
En matière budgétaire, par exemple, il invoque les effets bénéfiques de la modernisation de l’action publique, que rien de précis ne caractérise à ce jour. Il affirme qu’elle n’a strictement rien à voir avec la RGPP. D’ailleurs, elle ne comporte pas d’objectifs chiffrés. Or, comment pourrait-on, sans cela, exercer un effet significatif sur les budgets à venir ? Surtout, comment éviter de dérouter les agents publics, qui entendent tellement de choses contradictoires qu’ils ne savent sans doute plus très bien à quoi s’en tenir ?
J’achèverai mon propos en évoquant la fiscalité. Comment et combien de temps pourra-t-on assumer autant de contradictions ? Pour ne pas lasser l’attention de nos quelques collègues en cette heure tardive, je ne prendrai que trois exemples.
Tout d’abord, avec l’augmentation des impôts sur le patrimoine, on fait payer les riches. Du moins, c’est ce que l’on prétend. Ce faisant, bien entendu, on alimente les délocalisations de patrimoine, on encourage les comportements de certains contribuables, désireux de s’enrichir ailleurs. Or qu’on le veuille ou non, que le constat soit politiquement correct ou pas, les agents économiques qui peuvent investir dans les entreprises sont, pour une large part, ceux qui sont fiscalisés à des niveaux élevés.
Il y a probablement de nombreux investisseurs dans les entreprises françaises au sein des 8 000 foyers qui, en 2012, ont payé un impôt de solidarité sur la fortune supérieur à leur revenu fiscal de référence de 2011. Un large tronc commun existe sans doute entre la population des investisseurs et celle de ces foyers victimes de mesures fiscales tout à fait hors normes.
J’en viens à la deuxième contradiction. Il a été décidé de renforcer la taxation des actions, par la taxe sur les dividendes ou par la si convenable taxe sur les transactions financières, alors que, dans le même temps, on souhaite inciter à la détention longue d’actions et que l’évolution des règles comptables internationales va inciter les entreprises à se financer davantage par fonds propres que par le crédit bancaire, dont l’expansion ne pourra plus être importante.
Monsieur le ministre, où seront les investisseurs dont on aura besoin ? Pourquoi écarter volontairement les personnes physiques de la capacité d’investir en actions et à long terme ? On peut d’autant plus légitimement se poser la question que nombre de ces investisseurs se retrouvent ou se retrouveront à l’étranger.
Enfin, je voudrais évoquer l’absurdité économique de la mise au barème des revenus du patrimoine, qu’illustre le feuilleton invraisemblable des « pigeons ». Une première annonce sur ce point a été corrigée en loi de finances, avec un rendement attendu divisé par quatre. Une autre annonce a été faite le 29 avril dernier aux Assises de l’entrepreneuriat : la loi de finances pour 2014 prévoirait un régime encore différent, et applicable rétroactivement au 1er janvier 2013 !
Je n’irai pas plus loin ; bien d’autres exemples pourraient être cités pour illustrer l’absence de stratégie, l’illisibilité de la politique conduite, son incohérence et ses contradictions multiples, qui ont pour conséquence l’insécurité fiscale.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dernière intervenante à cette heure un peu tardive, j’aimerais, à mon tour, m’associer aux propos de M. Foucaud. Si le débat parlementaire doit avoir lieu, il ne doit pas se faire au détriment des conditions de travail du personnel, dont le travail est essentiel à la bonne tenue de nos débats.
Comme d’autres intervenants l’ont déjà souligné, le débat d’orientation des finances publiques se déroule dans un contexte particulièrement difficile, les résultats de l’exercice en cours et les perspectives pour 2014 n’étant pas à la hauteur des hypothèses votées par le Parlement en fin d’année dernière.
La France est entrée en récession au cours du premier trimestre, le chômage atteint un niveau inégalé et le pouvoir d’achat a régressé lors de l’année passée.
Bien entendu, cette situation pèse sur les comptes sociaux, auxquels je limiterai mon intervention. Je rappelle qu’ils représentent environ la moitié de l’ensemble des finances publiques, ce qui n’est pas négligeable, et qu’ils sont alimentés, en grande partie, par l’argent des assurés sociaux.
Au nom de notre commission des affaires sociales, le rapporteur général Yves Daudigny a retracé de manière précise l’évolution et les perspectives des finances sociales. Il en ressort que, pour la première fois depuis 2008, le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse est repassé sous la barre des 20 milliards d’euros. Il devrait en être de même en 2013, puisqu’une stabilisation est prévue.
Je veux le souligner, ce résultat tient essentiellement à l’apport de recettes nouvelles, adoptées en loi de finances rectificative. Ces dernières ont permis de réduire le sous-financement chronique qui fragilisait dangereusement la sécurité sociale.
Ce résultat tient aussi à une progression contenue des dépenses, du fait des limites imposées à l’ONDAM et de la faible revalorisation des prestations familiales en 2012. Ceci s’est fait au prix d’une détérioration des prestations fournies aux assurés sociaux, notamment en matière de remboursement de soins.
J’observe néanmoins que le redressement a été contrarié par la très faible évolution de la masse salariale, conséquence directe de la situation de l’emploi et de la multiplication des plans sociaux, comme de l’extrême modestie des revalorisations salariales. Pourtant, une augmentation des salaires nets de 1 %, c’est 2, 5 milliards d’euros de plus dans les caisses de la sécurité sociale.
Mes préoccupations sont donc grandes face aux perspectives annoncées par le Gouvernement à l’occasion de ce débat d’orientation des finances publiques.
Certes, les autorités européennes ont reporté à 2015 les exigences de retour sous la barre des 3 % du PIB de déficit. Alors même que les hypothèses de croissance ont été sensiblement revues à la baisse pour 2014 – si l’on se réfère à celles des organismes de prévision, cette révision pourrait même se révéler insuffisante –, l’effort structurel de réduction du déficit devrait être, l’an prochain, deux fois supérieur à celui qui avait été prévu dans la loi de programmation des finances publiques. En effet, il devrait atteindre un point de PIB, autrement dit 20 milliards d’euros, ce qui représente le montant du CICE.
Dès lors que le Gouvernement souhaite faire porter cet effort à 70 % sur les dépenses publiques, je m’interroge sur l’impact qui en résultera sur l’activité et la consommation. Je m’interroge également sur les effets de cette décision sur la protection sociale de nos concitoyens.
Plus que jamais, nous mesurons le lien étroit entre la situation de l’emploi et les comptes sociaux. Veillons à ne pas confondre les causes et les conséquences. Réduire les dépenses publiques est essentiel, M. Moscovici l’a dit tout à l’heure, mais trouver des recettes nouvelles l’est tout autant !
L’effort qui devra être fait en 2014 serait, pour les dépenses sociales, de l’ordre de 5 milliards d’euros. En revanche, aucun chiffre n’a été donné pour les recettes affectées aux administrations de sécurité sociale. Nous souhaiterions, monsieur le ministre, avoir des précisions sur ces différents points, afin de mesurer la part des mesures déjà annoncées et de celles qui restent à prendre dans les textes financiers de l’automne. Bien que ce débat ait nécessairement une dimension européenne, qui, des parlementaires nationaux, de la Cour des comptes ou de la Commission européenne décidera finalement du vote de notre budget ?
J’en viens aux mesures relatives à la politique familiale, annoncées le 3 juin dernier par le Premier ministre. Elles participeront à l’effort de réduction des dépenses, pour un montant de l’ordre d’un milliard d’euros.
Je tiens à le rappeler, il est abusif de parler de déficit « structurel » de la branche famille. En effet, le déficit constaté ces cinq dernières années résulte exclusivement des décisions du précédent gouvernement, qui avait retiré à la CNAF une partie de ses recettes les plus solides, tout en lui imposant de financer la part des retraites liée à la situation familiale.
Dans ces conditions, et bien que le Gouvernement maintienne l’universalité des allocations familiales, je regrette le choix consistant à réduire plusieurs avantages destinés à compenser les charges supportées par les familles.
De surcroît, la nature fiscale de la plupart de ces mesures requerra la mise en place de nouveaux circuits financiers du budget de l’État vers la CNAF, une nouvelle « tuyauterie », donc, dont la Cour des comptes dénonce pourtant l’opacité.
De fait, le dispositif réduira un peu plus la part des cotisations sociales dans le financement de la branche famille, ce qui constitue pourtant un des piliers de notre système de protection sociale. Au passage, je vous rappelle, mes chers collègues, que les cotisations sociales dans leur ensemble sont le fruit du travail et représentent, en réalité, une forme de salaire socialisé.
La contribution à la réduction des déficits passera également par une réforme des retraites. Je ne veux pas anticiper le débat annoncé pour cet automne. Je regrette simplement que la phase de concertation soit particulièrement courte, si j’en crois, du moins, le calendrier imposé aux partenaires sociaux, ainsi que celui qui est envisagé pour la discussion parlementaire.
Je tiens également à déplorer la sous-indexation des retraites complémentaires jusqu’en 2015, avalisée par l’accord intervenu entre le patronat et certaines organisations syndicales. Je ne crois pas que la réduction du pouvoir d’achat des retraités soit le meilleur gage du retour à la croissance et du rétablissement des comptes publics.
Si elle était étendue aux retraites de base, cette mesure accentuerait, à mon sens, les difficultés de notre économie. Bien évidemment, elle aggraverait aussi les difficultés d’un nombre grandissant de retraités, dont certains vivent déjà avec le minimum contributif, soit 678 euros par mois, ou avec l’allocation de solidarité aux personnes âgées, soit 777 euros par mois.
Enfin, le Gouvernement évoque une nouvelle réduction du taux d’évolution de l’ONDAM. La contrainte pèsera directement sur les assurés et sur les organismes complémentaires. En effet, si les prises en charge par la sécurité sociale peuvent être contenues, les besoins et les dépenses de santé continuent, pour leur part, à progresser. Cette décision provoquera une augmentation indéniable du nombre de nos concitoyens contraints de repousser leur recours aux soins, voire de s’en passer. Je pense, notamment, aux étudiants.
De même, peut-on maintenir encore longtemps une telle pression financière sur les hôpitaux publics, dont une part des dotations est régulièrement annulée en cours d’année, après avoir été mise en réserve ? Au début de cette après-midi, j’ai rencontré une délégation de salariés de l’Hôtel-Dieu. Ils s’insurgent contre les décisions financières qui risquent d’aboutir à la fermeture de l’établissement et qui contribuent à accentuer le risque de privatisation d’une grande part de notre système de santé publique.
En ce qui concerne le chapitre recettes, je souhaiterais que le Gouvernement précise également ses intentions, notamment à l’égard d’une éventuelle majoration de la CSG pour les retraités, évoquée tant par la commission Moreau que par la Cour des comptes depuis plusieurs années.
Pour ma part, je préférerais une action plus résolue en matière de réduction des niches sociales, notamment de celles qui ne font l’objet d’aucune compensation pour la sécurité sociale, ainsi que la remise en cause des exemptions d’assiette qui font échapper à cotisation certains compléments ou substituts au salaire.
Aussi, j’éprouve une certaine déception à l’égard du récent rapport du Haut Conseil du financement de la protection sociale, qui n’a pas véritablement tranché cette question, alors que ces niches sont coûteuses pour les finances publiques et peu probantes en termes de bénéfice économique et social.
Cette instance est aussi restée bien timide quant à la contribution des revenus du patrimoine au financement de la protection sociale. Je rappelle que ceux-ci ne représentent que 4 % des ressources de la sécurité sociale. De surcroît, malgré son relèvement récent, le taux de prélèvement n’est que de 15, 5 %, alors que les prélèvements sociaux sur les salaires approchent les 50 % et sont bien supérieurs si l’on ajoute les cotisations aux régimes de retraite complémentaires et à l’assurance chômage.
Selon moi, il serait nécessaire qu’à l’objectif d’équilibre des comptes soit associé un financement garantissant des ressources suffisantes à notre système de protection sociale, compte tenu des besoins de la population, notamment ceux qui sont liés à la santé et au vieillissement.
Pour conclure, je donne acte au Gouvernement de sa volonté de résorber les déficits sociaux. Je partage d’ailleurs cet objectif, dans la mesure où nous ne devons pas mettre en péril, en fragilisant son financement, la pérennité de notre système de protection sociale, basé, je vous le rappelle, mes chers collègues, sur la solidarité entre les générations, entre les bien portants et les malades, entre ceux qui sont chargés de famille et ceux qui ne le sont pas.
Notre système de protection sociale permet de réduire les inégalités, de rendre de la dignité humaine et de faire avancer d’un même pas notre société, d’un point de vue tant économique que social. De plus, et vous le savez bien, les dépenses de protection sociale génèrent un tiers des richesses du pays.
Monsieur le ministre, bien que vous nous assuriez ne pas vouloir « ajouter l’austérité à la récession », je tenais néanmoins à vous faire part de mes interrogations sur les orientations choisies par le Gouvernement quant à l’évolution des finances publiques pour les années à venir.
M. le rapporteur général de la commission des finances applaudit.
Je tiens en cet instant à remercier les différents orateurs de leur contribution à ce débat et à revenir sur quelques-uns des sujets évoqués par les orateurs de la majorité et de l’opposition avec, souvent, des approches différentes, témoignant de la pluralité des opinions qui sont régulièrement exprimées dans cet hémicycle.
J’aborderai tout d’abord la compétitivité. Selon certains, le Gouvernement ne serait pas soucieux de la compétitivité de notre pays, raison pour laquelle celui-ci aurait quelques difficultés à retrouver le chemin de la croissance. Certains orateurs, comme M. Dallier ou M. Marini, ont aussi indiqué que notre choix de revenir sur la TVA sociale et de lui substituer le CICE expliquerait une grande partie des retards de compétitivité pris.
Je le rappelle, les décisions adoptées pour renforcer la compétitivité des entreprises l’ont été après la remise du rapport de Louis Gallois, un document dont on nous avait expliqué pendant des semaines qu’il ne ferait l’objet d’aucune application par le Gouvernement. Après s’être rendus compte que nous allions reprendre une grande partie, pour ne pas dire la totalité de ses préconisations, d’aucuns ont critiqué la principale mesure du paquet gouvernemental, c’est-à-dire le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, avant même que ce dispositif ne produise le moindre effet.
Monsieur Dallier, vous avez fait référence aux chiffres du commerce extérieur des années 2000. À cet égard, je rappellerai que, pendant dix ans, la compétitivité de nos entreprises s’est profondément dégradée. Lorsque nous avons cédé la responsabilité du pouvoir en 2002, le commerce extérieur était équilibré en France, alors que l’Allemagne connaissait à cet égard une situation plus difficile. Dix ans après, il enregistre un excédent de 150 milliards d’euros en Allemagne, tandis qu’il accuse un déficit de 75 milliards d’euros dans notre pays. Je veux bien que cette dégradation soit le résultat de la politique que nous menons depuis un an, mais vous conviendrez que j’ai quelque mal à accéder à ce raisonnement.
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
Par ailleurs, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, qu’avez-vous fait pendant dix ans en faveur de la compétitivité ? Pendant la campagne présidentielle, vous avez décrété qu’il était urgent d’agir et avez demandé au Parlement de délibérer, dans l’urgence, sur une TVA dite « sociale », expliquant qu’il fallait, toutes affaires cessantes, faire en quelques jours ce qui n’avait pas été fait en dix ans. Cette mesure était tellement urgente que vous avez proposé d’en différer la mise en œuvre au mois d’octobre de l’année 2012.
Convenez que, là encore, j’éprouve quelque mal à accéder à la pertinence de ce raisonnement !
Pour notre part, nous sommes soucieux de mettre en place un allégement de charges net pour les entreprises. Nous constatons alors que la TVA sociale a pour principale caractéristique de baisser les cotisations et d’en transférer la charge sur la consommation. À nos yeux, elle présente deux inconvénients majeurs.
Premièrement, du fait de la diminution des cotisations accordée aux entreprises, le niveau des bénéfices de ces dernières augmente ; dès lors, l’assiette de l’impôt sur les sociétés est élargie ; par conséquent, nous récupérons par le biais de cet impôt une partie des baisses de cotisations que nous avons consenties à travers la TVA sociale.
À ce sujet, un calcul extrêmement précis destiné à connaître le niveau de TVA sociale qu’il aurait fallu mobiliser pour atteindre 20 milliards d’euros d’allégements de charges nets montre qu’il aurait fallu consentir 33 milliards d’euros d’allégement social, compte tenu de la démonstration que je viens de vous faire. C’est la raison pour laquelle nous n’avons pas fait ce choix.
Deuxièmement, la mise en œuvre de la TVA sociale avait pour effet de faire payer aux consommateurs une partie de l’allégement de charges consenti aux entreprises à travers la diminution des cotisations. On allégeait, certes, les contraintes qui pesaient sur l’offre, mais on alourdissait celles qui pesaient sur le consommateur. Or les entreprises, même avec des charges réduites, ont besoin des consommateurs pour acheter leurs produits. C'est la raison pour laquelle nous avons créé le CICE, qui est une mesure d’allégement de charges net, à hauteur de 20 milliards d'euros.
J’adresse cette remarque à M. Dallier, comme à M. Marini, qui n’a pas pu assister à la fin de ce débat, ce que je regrette, car nous aurions pu alors poursuivre nos échanges. Si nous avons substitué le CICE à la TVA sociale, ce n’est pas pour des raisons idéologiques ou pour le plaisir de défaire une mesure que nos prédécesseurs avaient mise en œuvre. En réalité, nous voulions instaurer un allégement de charges net, qui ne pèse pas sur la consommation et ne prive pas les entreprises de débouchés par le biais de la demande. Voilà la cohérence de cette mesure.
Cela ne suffit pas, me dites-vous. Évidemment ! Nous avons mis en place l’accord national interprofessionnel parce que nous considérons qu’il faut des accords gagnants-gagnants, qu’il faut de bons compromis, de manière à sécuriser les parcours professionnels et à donner au marché du travail la souplesse dont les entreprises ont besoin en période de crise pour pouvoir s’adapter.
Avons-nous eu tort de le faire ? Vous seriez bien les seuls à le considérer. La Commission européenne reconnaît qu’il s’agit là d’un progrès significatif ; la Cour des comptes et le Haut Conseil des finances publiques voient dans le CICE et l’ANI des réformes structurelles non négligeables, qui témoignent de la volonté de notre pays de se moderniser et participent aussi fortement à la confiance qui lui est accordée.
Selon certains propos tenus dans cet hémicycle, il n’y aurait pas de cohérence dans la politique fiscale du Gouvernement.
Ma réponse s’adresse à vous, monsieur Foucaud – je ne partage pas l’intégralité de votre intervention, malgré son caractère cohérent et permanent –, à Mme la présidente de la commission des affaires sociales, ainsi qu’à M. Marini, qui a adopté un tout autre point de vue en affirmant l’absence de cohérence dans la politique fiscale que nous mettons en place.
Madame David, le Gouvernement veut inscrire la réforme fiscale dans la durée, et cette réforme, je l’indique à M. Marini, a sa cohérence.
Oui, nous voulons inscrire la réforme fiscale dans la durée. Et le grand soir fiscal, la grande réforme fiscale, a commencé l’an dernier. Je vous ai déjà apporté cette réponse lors des questions au Gouvernement. J’ai cependant le sentiment de ne pas vous avoir convaincu. Cela étant, lorsque nous engageons l’alignement de la fiscalité du capital sur celle du travail en soumettant au barème les conditions dans lesquelles on procède au prélèvement sur les revenus du capital, c’est un début de réforme fiscale.
Lorsque nous décidons de mettre en place des dispositions en matière de fiscalité des entreprises permettant progressivement d’aligner l’impôt sur les sociétés payé par les PME, PMI, ETI qui innovent, investissent, prennent des risques et que nous faisons en sorte que les grandes entreprises qui, jusque-là, ne payaient pas l’impôt sur les sociétés l’acquittent enfin, c’est un début de réforme fiscale.
Lorsque nous mettons en place la taxe à 75 %...
Créée l’an dernier, cette taxe n’a pas été considérée comme conforme à la Constitution. Nous avons décidé de proposer une autre mesure dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014. Il est donc normal que nous en débattions ce soir.
Lorsque nous décidons de réformer l’impôt de solidarité sur la fortune, afin qu’il retrouve sa progressivité, lorsque nous décidons de modifier les droits de succession, même si ces mesures ne sont ni l’alpha et l’oméga de la réforme fiscale ni l’objectif ultime que nous devons atteindre, elles engagent une dynamique. Celle-ci doit être approfondie, poursuivie. Elle doit trouver sa cohérence.
C’est cela la réforme fiscale. Nous ne décidons pas un matin de tout raser et de tout reconstruire le soir même. Nous ne décrétons pas subitement une espèce de grand soir fiscal.
Certes, ce n’est pas ce que vous avez demandé, mais ce que nous faisons donne quelque écho à ce que vous avez réclamé. Je veux donc vous rassurer : nous avons engagé des mesures. Nous désirons les poursuivre avec un souci de cohérence.
M. Marini se demande où est la cohérence. En son absence, je me tourne vers vous, monsieur Dallier. C’est à travers vous que j’adresse ma réponse à l’opposition. Où était la cohérence d’une politique fiscale consistant à mettre en place un bouclier fiscal, à le défendre bec et ongles pendant des années, pour le défaire à la fin de la législature ?
J’attends la réponse !
Cette question mérite effectivement d’être posée dès lors que l’on s’interroge sur la cohérence de la politique fiscale mise en place.
Où est la cohérence de cette politique qui revenait à jouer au yo-yo avec l’impôt de solidarité sur la fortune, à tel point que, comme vient de le constater le président de la commission des finances, certains contribuables, qui, comme les poissons volants, ne sont pas les plus nombreux du genre, se plaignent de payer plus de 100 % de leur revenu en impôt ?
S’ils sont redevables d’une telle somme, c’est pour une raison très simple. Vous le savez, il existe deux catégories de Français : ceux qui ne décident pas du niveau de revenu qu’ils perçoivent, les salariés, les Français modestes qui, chaque mois, reçoivent une fiche de paie ; ceux qui arrêtent le montant du revenu qu’ils percevront parce qu’ils procèdent à de l’optimisation fiscale. Pour éviter d’avoir à payer l’impôt de solidarité sur la fortune alors qu’ils sont déjà richement dotés, ceux-là renoncent à percevoir les dividendes et revenus d’un certain nombre de placements financiers.
Cet élément n’avait d’ailleurs pas échappé à la sagacité de votre majorité à une certaine époque, puisque, en 1995, me semble-t-il, M. Juppé avait mis en place le « plafonnement du plafonnement » pour éviter que cette situation ne dure trop longtemps, tellement il la trouvait injuste.
Finalement, ce que les plus sages de vos amis avaient estimé inique, vous finissez par le trouver normal. C’est dire à quel point vous êtes plus à droite que ne l’étaient vos prédécesseurs…
M. Philippe Dallier s’exclame.
Madame David, vous avez posé une question très importante, lancinante d'ailleurs, qui est finalement le point sous-jacent de tous nos débats et qui, parfois, conduit à des poussées de fièvre. Y a-t-il une cohérence entre ce que nous faisons en termes de sérieux budgétaire et notre volonté de relancer la croissance ?
Je pose la question autrement. Peut-on concilier sérieux budgétaire et justice sociale ? Peut-on être budgétairement sérieux sans être totalement « austéritaire » ? Je vais essayer de vous apporter une réponse, qui est d’ailleurs justifiée, en espérant vous convaincre tout en étant persuadé que je n’y parviendrai pas ce soir.
C’est grâce au sérieux budgétaire que nous obtiendrons la garantie de faire monter en gamme nos services publics et d’assurer la réinvention de notre système de protection sociale. Vous avez cité des exemples très concrets, que vous avez chiffrés. Pour ma part, j’en prendrai seulement deux, parce qu’il est tard et que je ne veux pas vous épuiser en vous donnant une réponse trop longue.
Vous avez tout à fait raison, le déficit actuel de la politique familiale, qui s’établit à 2, 5 milliards d’euros, n’est pas totalement dû au hasard. Il a été organisé, creusé par les décisions que vous avez évoquées. Et voilà que l’on nous propose, notamment sur les travées de l’opposition, de faire des économies sur tout sous prétexte que nous n’en ferions pas suffisamment !
Nous nous proposons de corriger le déficit d’une branche qui est déficitaire parce que l’on a organisé son déficit. Nous réformons le quotient familial, en garantissant l’universalité de la prestation et en faisant en sorte que les plus riches bénéficient de moins d’allocations familiales que les plus pauvres.
Par ailleurs, si nous décidons de réaliser 760 millions d'euros d’économies dans la branche famille, ce n’est pas seulement – je veux vous en convaincre, madame David – parce qu’il faut contribuer au redressement de cette branche, mais aussi parce que les familles françaises d’aujourd'hui ne sont pas les mêmes que celles d’hier.
Il y a des mères élevant seules leurs enfants qui partent au travail très tôt et qui rentrent très tard le soir. Certaines d’entre elles ont été victimes de violences familiales. D’autres femmes ont un conjoint, mais qui part tôt et rentre tard lui aussi. Toutes ces femmes ont besoin de nouveaux dispositifs de garde. Il est important que, y compris dans les quartiers les plus difficiles, là où le besoin social est le plus grand, les enfants puissent avoir accès aux services de la petite enfance. Il faut donc financer ces services.
Nous voulons créer 270 000 places d’accueil dans les crèches, alors que la précédente majorité avait supprimé 55 000 places d’accueil dans les écoles de la République parce qu’elle avait décidé de ne plus scolariser les enfants dès l’âge de deux ans. Tout cela doit être financé. Ce sont des services nouveaux qui émergent. Nous les finançons en abandonnant, en modulant ou en mettant en perspective certaines prestations, en fonction de l’évolution des besoins.
C'est pourquoi nous proposons une modification du complément de libre choix d’activité, le CLCA, et des conditions d’attribution de la prestation d’accueil du jeune enfant, la PAJE. Ce n’est pas moins, c’est plus et autrement.
Nous agissons dans le cadre du sérieux budgétaire, mais, vous le voyez, ce sérieux budgétaire est mis au service d’une politique et d’une ambition sociales.
J’en viens aux retraites. Nous avons une impasse budgétaire de près de 20 milliards d'euros à l’horizon de 2020. Nous n’avons pas la garantie de pouvoir combler ce déficit sans prendre de mesures et nous voyons bien qu’il n’existe pas 36 000 chemins pour le faire, dès lors que nous avons décidé de ne pas remettre en cause l’âge légal de départ à la retraite. Il faut donc trouver une solution, dans la discussion et la concertation, en accord avec l’idéal de justice qui nous guide.
J’aimerais tant que nous parvenions à apporter la démonstration qu’il n’y a pas forcément d’antinomie entre l’idéal de justice et la nécessité de rétablir les comptes.
Si nous voulons réinventer le modèle social français, nous ne pourrons pas échapper à la nécessité de surmonter ce cruel dilemme, qui pourrait cesser d’en être un si nous avions le courage de l’aborder ensemble, avec les partenaires sociaux, en faisant de bons compromis.
Je conclurai en évoquant la modernisation de l’action publique. Il y aurait quelque chose de parfaitement rigoureux qui s’appellerait la révision générale des politiques publiques, la RGPP, et un exercice absolument gazeux qui s’appellerait la modernisation de l’action publique.
Je dirai quelques mots sur les chiffres et sur la méthode. La RGPP, monsieur Dallier, c’est, comme je l’ai rappelé tout à l'heure, 12 milliards d'économies nettes, alors que l’on a supprimé des emplois en nombre dans de nombreux ministères : 80 000 à l’éducation nationale et 54 000 à la défense, par exemple. Le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite a été systématiquement appliqué à tous les ministères, dans une logique de rabot. Peut-être aurait-il fallu utiliser un autre outil, qui s’appelle le niveau.
En cinq ans, la RGPP a produit 12 milliards d'euros d’économies nettes, dont une partie – 1, 9 milliard d'euros – a été restituée sous forme d’avantages catégoriels. En effet, la tension était tellement forte qu’il fallait essayer de calmer le mécontentement suscité par la déflation tragique des effectifs, toutes administrations confondues.
Monsieur Dallier, douze moins deux, cela fait dix, et dix divisé par cinq, cela fait deux. Par conséquent, la RGPP a produit deux milliards d’économies nettes par an. Cette réforme qui produit deux milliards d’économies par an serait l’alpha et l’oméga de la bonne gestion de la fonction publique, et, lorsque nous proposons de réaliser, par un dispositif d’évaluation et de concertation – la modernisation de l’action publique –, des économies qui concernent 49 politiques publiques et 20 % de la dépense, et qui, après avoir atteint 10 milliards d'euros en 2013, devraient s’élever en 2014 à 14 milliards d'euros, c'est-à-dire à sept fois plus que les économies annuelles de la RGPP, ce serait la gabegie, la grande déglingue budgétaire !
J’ai, là encore, quelque mal à accéder au raisonnement. Monsieur Dallier, vous avez pu constater au cours de ce débat que je n’étais pas dans la caricature, dans la recherche de la dichotomie, dans l’idée que, de votre côté, on pense systématiquement mal, tandis que, de notre côté, on pense systématiquement bien.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Encore que…
Sourires.
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Il est certes possible que les choses se passent de cette manière, mais, pour l’efficacité de ma démonstration, je préfère ne pas le dire à cet instant…
Nouveaux sourires.
Essayons de faire en sorte que, sur ces sujets, tout en maintenant nos convictions et en nous affrontant, nous ayons des approches convenables et honnêtes. La RGPP comportait des éléments qui n’étaient pas inintéressants, à côté d’autres éléments moins intéressants. Il y a sans doute, dans la modernisation de l’action publique, des choses qui méritent d’être approfondies. Peut-être faut-il y mettre davantage de dimension budgétaire.
Essayons, compte tenu de la situation du pays – je pense, notamment, à la gravité des déficits publics –, de tomber au moins d’accord sur les chiffres lorsqu’ils nous sont fournis par la Cour des comptes et sur les évaluations dès lors qu’elles ont été réalisées, afin de hisser la réflexion collective à un niveau qui nous permette de trouver un chemin pour le redressement.
Tel est le vœu que je forme. Il est certes un peu tôt pour le faire ce soir : nous n’en sommes qu’au débat d’orientation budgétaire. Viendra bientôt le moment du débat sur le budget. Nous aurons alors tous les chiffres et nous pourrons documenter précisément les économies. De l’eau aura coulé sous les ponts, et nous disposerons de prévisions plus précises. Toutes les passions pourront s’exprimer, tous les points de vue pourront se faire entendre.
Je suis convaincu que, à l’automne prochain, lorsque nous aborderons toutes les questions relatives aux finances publiques, nous aurons mille choses à nous dire. Il est cependant trop tôt pour les exprimer, et j’achève donc ici mon propos.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Nous en avons terminé avec le débat sur les orientations des finances publiques.
Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande que l’ordre du jour des séances des mardi 16 juillet 2013 et jeudi 18 juillet 2013 soit modifié comme suit :
Mardi 16 juillet
À 14 heures 30 et le soir :
-Sous réserve de sa transmission, deuxième lecture du projet de loi relatif aux attributions du garde des sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique
-Projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens
Jeudi 18 juillet
À 9 heures 30 :
-Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires
-Suite éventuelle du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière et du projet de loi organique relatif au procureur de la République financier
À 15 heures :
-Questions d’actualité au Gouvernement
À 16 heures 15 et le soir :
-Suite éventuelle de l’ordre du jour du matin
-Sous réserve de sa transmission, projet de loi relatif à l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État
Le délai limite pour le dépôt des amendements en séance pourrait être fixé ce même jour à onze heures.
Il n’y a pas d’observation ?...
Il en est ainsi décidé.
En conséquence, sont retirés de l’ordre du jour des séances :
-du mardi 16 juillet 2013, la deuxième lecture du projet de loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature ;
-du jeudi 18 juillet 2013, le projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens ;
-du mercredi 24 juillet 2013, le projet de loi relatif à l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État.
Acte est donné de cette communication.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 9 juillet 2013 :
À neuf heures trente :
1. Questions orales.
Le texte des questions figure en annexe.
À quatorze heures trente et le soir :
2. Projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la transparence de la vie publique (n° 688, 2012-2013) et projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la transparence de la vie publique (n° 689, 2012-2013) ;
Rapport de M. Jean-Pierre Sueur, fait au nom de la commission des lois (n° 722, 2012-2013) ;
Textes de la commission (nos 723, 2012-2013 et 724, 2012-2013).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée à vingt-deux heures dix.