Intervention de Philippe Madrelle

Réunion du 9 juillet 2013 à 9h30
Questions orales — Opération de désamiantage

Photo de Philippe MadrellePhilippe Madrelle :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il y a des chiffres qui s’imposent et que l’on ne peut oublier : dix personnes meurent chaque jour, en France, d’avoir respiré cette poussière blanche qu’est l’amiante. Ce fléau est responsable de 3 000 décès par an.

Depuis les années 2000, plus de 1 500 personnes sont décédées en Aquitaine des conséquences de l’amiante. Interdite depuis 1997, alors que l’effet cancérigène de la fibre était connu depuis les années trente, l’amiante, avec ses fibres mortelles, continue de représenter un danger pour tous ceux qui y sont exposés.

Les associations de défense des victimes de l’amiante, qui agissent pour stopper la progression de ce fléau, font état de plus de 200 000 tonnes d’amiante et de 24 millions de tonnes de fibrociment répartis sur notre territoire.

Vous le savez, madame la ministre, plus de 70 % des chantiers de désamiantage sont réalisés dans de très mauvaises conditions et deviennent de nouvelles sources de contamination. Le constat est alarmant : aucun risque d’exposition n’est maîtrisé !

Une étude de 2009 de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, démontre que les fibres fines ont un effet cancérigène avéré, et que l’on ne peut pas écarter l’effet cancérigène des fibres courtes.

Cette étude préconise la prise en compte de cette nouvelle donne dans les directives préventives, et plus particulièrement l’abaissement par dix des valeurs limites d’empoussièrement en milieu professionnel. On peut regretter que cette décision ne devienne effective qu’à l’horizon 2015.

De plus, les équipements de protection individuelle qui sont actuellement utilisés ne sont pas adaptés aux dangers auxquels sont exposés les intervenants professionnels.

En outre, les inspecteurs du travail, en nombre insuffisant, ne peuvent contrôler l’application de la réglementation en vigueur, car ils sont trop rarement informés de l’ouverture des chantiers de désamiantage.

Bien qu’incomplète, la législation existe, mais elle n’est pas respectée par les entreprises agréées qualifiées pour le retrait et le confinement de l’amiante : ces entreprises enlèvent les marchés puis, par le jeu de la sous-traitance, transmettent ces chantiers à des entreprises qui, elles, ne sont généralement pas qualifiées et agissent au mépris tant de la santé de leurs employés que de la protection de l’environnement.

L’aspect professionnel des chantiers de désamiantage ne doit pas occulter le désamiantage effectué par des particuliers. Les décrets du 3 juin 2011 et l’arrêté du 21 décembre 2012 stipulent que les particuliers ont l’obligation de faire appel à des professionnels pour mener des opérations de désamiantage. Comme vous pouvez l’imaginer, cet appel se trouve limité en raison du coût prohibitif des interventions.

De nombreuses communes sont confrontées au grave problème de désamiantage des établissements scolaires. De tels chantiers réalisés dans de très mauvaises conditions génèrent des tonnes de déchets qu’il faut stocker, transporter et éliminer.

Madame la ministre, je suis certain que vous êtes consciente de la nécessité d’éviter les dépôts sauvages. L’absence ou la méconnaissance d’un réseau de déchetteries de proximité habilitées à recevoir les produits dangereux, mis à disposition avec des moyens adaptés, est un élément essentiel de cette problématique.

Même réalisé dans les conditions optimales, l’enfouissement ne peut représenter une solution durable pour l’environnement. D’après les associations, le seul moyen de neutralisation définitive sur notre territoire serait le procédé d’inertage au moyen de la torche à plasma, proposé par la société INERTAM de Morcenx, dans les Landes. En raison de ses coûts de revient, cette solution ne serait utilisée qu’à 12 % de sa capacité.

Il conviendrait d’encourager le développement en volume de l’utilisation de l’inertage, ainsi que la recherche d’autres procédés d’élimination définitive.

Nous vous faisons confiance, madame la ministre, pour que des directives soient enfin prises pour éviter la propagation de ce véritable fléau sanitaire. Seule une législation européenne claire et commune pourrait débarrasser l’Europe de ce poison.

N’oublions pas que l’on continue d’utiliser l’amiante dans de trop nombreux pays ! Seule une réglementation sévère, compréhensible permettra de la bannir et d’enrayer ce fléau.

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