Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord d’excuser l’absence de Pierre Moscovici, qui est retenu à Bruxelles par un conseil Écofin.
Vous souhaitez savoir si le Gouvernement envisage de reverser au mouvement sportif tout ou partie du produit de la taxe exceptionnelle à 75 % sur les salaires de plus d’un million d’euros versés par les clubs sportifs professionnels, et en premier lieu par les clubs de football.
Comme vous le soulignez très justement, la solidarité entre le sport professionnel et le sport amateur doit être renforcée ; c’est d’ailleurs l’un des axes majeurs de la politique menée par ma collègue Valérie Fourneyron. Toutefois, le Gouvernement n’estime pas que le renforcement de cette solidarité doive passer par le reversement direct au mouvement sportif du produit de la taxe exceptionnelle sur les salaires de plus d’un million d’euros.
Cette taxe exceptionnelle vise à contribuer à l’effort de redressement de nos comptes publics, mais elle procède aussi et surtout d’un souci de justice sociale et de renforcement de la solidarité nationale. Le versement de son produit au budget général témoigne de sa vocation universelle : il ne s’agit pas de renforcer la solidarité entre les acteurs d’un secteur économique particulier, tel que le sport, mais de renforcer la solidarité au sein de la Nation tout entière.
Par ailleurs, ainsi vous l’avez vous-même rappelé, le principe d’universalité budgétaire fait obstacle à l’utilisation d’une recette déterminée pour le financement d’une dépense déterminée. Il existe, certes, des possibilités de déroger à cette règle dans des cas très particuliers, mais, en l’occurrence, cela ne me semble pas opportun. Une telle dérogation serait même contraire à l’esprit de la circulaire du Premier ministre en date du 14 janvier 2013 relative aux règles pour une gestion responsable des dépenses publiques. Le Gouvernement a d'ailleurs demandé au Conseil des prélèvements obligatoires d’examiner systématiquement les taxes affectées existantes, dans le but de remettre en cause certaines de ces affectations.
Pour autant, le renforcement de la solidarité entre le sport professionnel et le sport amateur constitue l’un des axes majeurs de la politique nationale des sports menée par le Gouvernement. Beaucoup a déjà été fait en la matière. Beaucoup reste également à faire, mais ce renforcement passe par d’autres moyens que celui que vous proposez.
Nous avons stabilisé les ressources du Centre national pour le développement du sport, le CNDS. Celui-ci est, comme vous le savez, notre principal outil de développement du sport pour tous et notre principal instrument de redistribution entre le sport professionnel et le sport amateur, puisque ses recettes sont notamment constituées par la taxe dite « Buffet », qui est une contribution sur les droits de diffusion audiovisuelle des compétitions sportives, que perçoivent au premier chef les clubs professionnels.
Nous avons constaté, au début de cette législature, que le CNDS se trouvait dans une situation financière profondément dégradée. Nous avons donc mis en place un plan de redressement financier de l’établissement, qui garantit à ce dernier la stabilité de ses ressources, alors que, au même moment, il était demandé d’importants efforts à tous les opérateurs de l’État bénéficiant de ressources fiscales affectées : les plafonds des taxes qui leur sont attribuées ont diminué de 10 %.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, votre souci d’une plus grande solidarité entre le sport professionnel et le sport amateur est entièrement partagé par le Gouvernement. Cependant, cette solidarité doit passer par d’autres voies que l’affectation au mouvement sportif d’une recette fiscale dont l’essence même est de participer au financement de la solidarité nationale.