Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 4 juillet 2008 à 22h00
Modernisation de l'économie — Article additionnel après l'article 17 bis

Christine Lagarde, ministre :

Monsieur le rapporteur Laurent Béteille, votre amendement a le mérite de souligner que nous devons favoriser la reprise d’entreprises par les salariés. Tel était précisément notre objectif lorsque nous avons mis en place le mécanisme de réduction des droits de mutation à titre onéreux, en les faisant passer à 3 %, taux relevé à 3, 5 % après l’examen de l’article 15 par la Haute Assemblée.

Pour autant, la mesure que vous proposez me semble difficile à mettre en œuvre et ne peut recueillir l’assentiment du Gouvernement.

Je souhaiterais donc que cet amendement soit retiré, et, si vous le permettez, je vais essayer de vous en convaincre.

Premièrement, si une telle disposition était adoptée, le capital détenu par les salariés d’une SCOP serait garanti par l’AGS, qui est en quelque sorte un mécanisme d’assurance lorsque des salariés en difficulté ne peuvent pas recouvrer leurs créances. Aujourd'hui, ce sont seulement les sommes dues aux salariés en vertu de leur contrat de travail qui sont garanties au titre de l’AGS.

À mon sens, élargir le champ d’application de la garantie de l’AGS en couvrant le montant des actions acquises par les salariés à l’occasion de la reprise d’une entreprise nécessiterait pour le moins une concertation préalable avec les partenaires sociaux.

Deuxièmement et surtout, un tel dispositif pose une question de principe. On retrouve peut-être là l’opposition entre droit des sociétés et droit social.

Dès lors qu’un salarié décide d’acquérir les parts d’une société pour la reprendre, il prend un risque. Or prévoir que l’AGS, qui intervient pour garantir les sommes qui sont dues en vertu du contrat de travail, agirait aussi comme un organe d’assurance du risque inhérent à la prise de participation dans une société me semblerait un peu choquant.

En outre, le dispositif pourrait être considéré comme emportant une inégalité de traitement entre les salariés actionnaires de leur entreprise. En effet, le statut de SCOP de l’entreprise pourrait ne pas être suffisant pour justifier une telle différence de traitement entre les différents actionnaires.

Enfin, d’un point de vue technique, il existe quelques difficultés complémentaires, puisque l’amendement prévoit de financer une garantie en capital apportée par l’AGS par un fonds de développement coopératif qui serait géré par une fédération professionnelle mais alimenté par un prélèvement sur les réserves des sociétés quittant le statut coopératif.

Monsieur le rapporteur, je partage votre objectif. Tout comme vous, je souhaite encourager la reprise des entreprises par les salariés. Cela étant, compte tenu des éléments que je viens de présenter, j’estime que l’outil proposé n’est pas nécessairement le plus pertinent. C'est pourquoi je vous suggère de retirer cet amendement.

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