Intervention de Bariza Khiari

Réunion du 4 juillet 2008 à 22h00
Modernisation de l'économie — Article 18

Photo de Bariza KhiariBariza Khiari :

Au travers de cet amendement, nous proposons de supprimer l’habilitation à réformer par voie d’ordonnance le régime des incapacités commerciales et industrielles. Une fois encore, nous déplorons cette manière de procéder du Gouvernement qui consiste à solliciter une habilitation dans un domaine aussi important.

Nous avions déjà eu l’occasion de dénoncer la dégradation permanente des conditions de travail du Parlement lors de l’examen du projet de loi constitutionnelle relatif à la modernisation des institutions de la Ve République.

En effet, de plus en plus, le travail parlementaire se caractérise par le dessaisissement et par l’urgence. L’examen du projet de loi de modernisation de l’économie est symptomatique de cette dégradation : d’une part, le Parlement est dessaisi de son pouvoir de voter la loi, sept habilitations à légiférer par voie d’ordonnances étant demandées sur des sujets majeurs ; d’autre part, l’urgence est devenue le rythme normal de travail du Parlement, quatre des textes présentés durant la présente session extraordinaire étant soumis à cette procédure accélérée.

En outre, la commission spéciale s’apprête à présenter plusieurs amendements qui visent, aux termes de son rapport, à apporter les modifications nécessaires à la mise en œuvre de la réforme proposée, ce qui peut donner à penser que les intentions du Gouvernement en la matière lui étaient connues. Si tel est le cas, nous aurions préféré que le Gouvernement expose lui-même ses propositions devant le Parlement, dans le cadre d’un projet de loi spécifique. C’est la preuve, une nouvelle fois, que majorité et opposition ne sont pas placées sur un pied d’égalité. Nous regrettons vivement que le Parlement n’ait pu débattre des dispositions majeures que le Gouvernement entend prendre par voie d’ordonnances.

Sous couvert de l’inconstitutionnalité des peines automatiques, contraires au principe de nécessité des peines énoncé par l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, vous proposez de les remplacer par des peines complémentaires et alternatives.

En ce qui nous concerne, nous ne sommes pas favorables au mouvement de dépénalisation du droit des affaires que cette ordonnance vise à amorcer, notamment en permettant qu’une personne reconnue coupable d’abus de biens sociaux ou d’escroquerie puisse être condamnée, en lieu et place d’une peine de prison, à une simple interdiction d’exercer une activité commerciale.

Comment pourrions-nous accepter cette justice à double vitesse qui, d’une part, instaure pour les jeunes délinquants des peines planchers, par ailleurs tout aussi critiquables que les peines automatiques du point de vue de l’individualisation des peines, et qui, d’autre part, allège toujours davantage les peines applicables en matière de droit des affaires ?

Cette démarche prouve, s’il le fallait, qu’il existe bien deux catégories de délinquance, dont l’une, celle des affaires, des « cols blancs », est à vos yeux justifiable. Ce ballon d’essai augure mal de votre futur projet de loi sur la dépénalisation des affaires.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion