Intervention de Victorin Lurel

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 16 juillet 2013 : 3ème réunion
Actualisation de la loi n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la nouvelle-calédonie et diverses dispositions relatives aux outre-mer — Audition de M. Victorin Lurel ministre des outre-mer

Victorin Lurel, ministre :

Vous avez eu raison de rappeler l'historique, mais il faut également évoquer la difficulté à décoloniser la Nouvelle-Calédonie. C'est un processus qui se fait dans la concorde - une concorde qu'il faut préserver avant les échéances prochaines. C'est pourquoi l'État doit rester à équidistance des différents acteurs. On constate ainsi un dialogue permanent au niveau local.

Le coeur de la loi organique, vous l'avez dit, est la mise en oeuvre de la concurrence. L'objectif est de créer non une concurrence pure et parfaite, mais une concurrence plus libre. C'est ce à quoi tendra cette nouvelle autorité administrative indépendante.

Cette compétence ayant été irréversiblement transférée, la création de cette autorité se fera par une loi du pays. Cependant la garantie de l'exercice des libertés publiques relevant de l'État, c'est à lui que revient de mettre en oeuvre l'indépendance de cette autorité par le biais de la loi organique. C'est ainsi que doivent être assurés les moyens de fonctionnement de cette autorité administrative - d'où l'inscription des crédits de celle-ci comme dépense obligatoire au budget de la Nouvelle-Calédonie. Il nous faudra également, et je sais que le Sénat nous y aidera, encadrer les procédures qui seront suivies devant cette autorité pour imposer la règle du contradictoire, éviter les conflits d'intérêt... L'État va également apporter des aides concrètes à la Nouvelle-Calédonie, que ce soit par un apport d'expertise pour la rédaction de la loi du pays ou la signature d'une convention entre l'autorité de la concurrence nationale et l'autorité locale.

Au-delà de cet aspect, nous préparons activement la prochaine réunion du comité des signataires qui se tiendra le 11 octobre, autour de trois axes.

Concernant les transferts de compétence déjà effectués, il nous faut veiller à l'actualisation du droit. M. Cointat citait le droit des assurances et de fait, il nécessite une mise à jour, certains automobilistes ou entreprises préférant se faire assurer en Australie.

La question du transfert des compétences prévu à l'article 27 de la loi organique de 1999 se pose désormais : l'enseignement supérieur, la communication audiovisuelle... Faut-il ou non les opérer avant la fin de l'année 2014 ?

Enfin, nous accordons une attention particulière au suivi du transfert des ressources pour mettre en oeuvre les compétences transférées.

Par ailleurs, nous anticipons d'ores et déjà de nouveaux chantiers, comme par exemple, en matière de droit civil, le travail qu'il nous faudra accomplir pour régler le conflit de normes qui se profile concernant le droit des personnes. Nous n'avons pas encore abouti à un projet de loi. Les enjeux sont également de taille concernant la sécurité civile ou la circulation maritime et aérienne.

M. Thani Mohamed Soilihi dressait un parallèle avec Mayotte. Mutatis mutandis, il est vrai que le mécanisme à l'oeuvre depuis la départementalisation est un peu similaire : il nous faut prendre de nombreux textes pour rendre applicables à Mayotte des dispositions en vigueur dans l'hexagone, en essayant de ne pas trop abuser des ordonnances. C'est un peu le même exercice de clarification des compétences.

Après 2014-2018, que restera-t-il qui ne soit pas transféré ? La monnaie, la sauvegarde de l'ordre public - M. Collombat évoquait la gendarmerie -, les relations internationales et la défense. Ainsi, quel que soit le résultat de la consultation, la Nouvelle-Calédonie sera de fait quasi souveraine.

Chacun souligne la formule inédite appliquée en Nouvelle-Calédonie, qu'il nous faut effectivement saluer, mais il ne faut pas en sous-estimer la complexité. C'est pourquoi on prend le temps d'accompagner la décolonisation, ce qui nécessite la mise en place d'une ingénierie de l'accompagnement et la formation de nombreux cadres.

Je suis pour ma part impressionné par la modération de tous les partis calédoniens qui sollicitent tous l'aide de l'État sans y voir un relent de colonialisme. Le Haut-commissaire est bien accepté et ses arbitrages sont même recherchés.

Pour répondre à M. Collombat, l'autorité de la concurrence ne changera pas du jour au lendemain structurellement le système économique calédonien. Dans tous les outre-mer, des facteurs historiques expliquent la forte concentration économique. Mais, introduire la concurrence revient à instiller un ferment révolutionnaire, au sens positif du terme. C'est le rôle d'un État fort de montrer le chemin.

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