Je comprends parfaitement le souhait de renforcer le pouvoir des agents des douanes en matière de blanchiment, et les auteurs de cet amendement expriment une préoccupation que nous partageons. Toutefois, la disposition proposée semble y apporter une réponse à nos yeux inadaptée.
La constatation de l’infraction de blanchiment sanctionnée à l’article 415 du code des douanes par une peine privative de liberté de deux à dix ans et une amende comprise entre un et cinq fois le montant des sommes repose sur le cumul de trois éléments : premièrement, un flux monétaire transfrontalier ; deuxièmement, l’existence d’une infraction douanière, qu’il s’agisse de trafic de stupéfiants, de contrefaçon ou de contrebande ; troisièmement, la connaissance par la personne de l’origine illicite des sommes transportées.
L’amendement que vous proposez, madame Pasquet, tend à étendre les sanctions très sévères prévues à cet article à la seule détention de sommes d’argent supérieures à 10 000 euros sans qu’aucune infraction ait été constatée par ailleurs. Cette mesure, si elle s’inscrit dans la réflexion, déjà engagée avec le présent projet de loi, sur le renversement de la charge de la preuve en matière de blanchiment, apparaît cependant excessive et très fragile au regard des principes constitutionnels et des engagements européens de la France.
Dès lors, il me semble nécessaire de poursuivre la réflexion, notamment avec vous, afin de renforcer de manière efficace et proportionnée l’action de la douane, en ciblant plus directement le critère de l’intentionnalité dans l’infraction de blanchiment douanier, et dans le strict respect de la Constitution.
Je vous propose donc, madame la sénatrice, de retirer cet amendement ; à défaut je serai contraint d’émettre un avis défavorable.