La difficulté tient essentiellement au fait que l’article 10 quinquies provient d’un amendement parlementaire, surgi en séance publique, qui n’a pas fait l’objet des concertations nécessaires et souhaitables avec la profession d’avocat. Cet amendement a d’ailleurs été sous-amendé, afin d’introduire le filtre du bâtonnier dans les déclarations de soupçon. Cette précision est de nature à lever la défiance que l’on pouvait éventuellement avoir à l’égard de la profession.
La commission des lois est allée plus loin, excluant du champ des sommes pouvant faire l’objet d’une déclaration de soupçon celles qui émanent d’une procédure juridictionnelle ou d’une consultation juridique. À ma connaissance, c’est là l’essentiel des fonds confiés aux CARPA.
Pour l’honneur même de la profession d’avocat, il est souhaitable que celle-ci apparaisse bien comme contribuant à la lutte contre le blanchiment.
Pour le reste, je relève que la profession elle-même s’interroge et s’organise. Vous le savez, le « parlement » de la profession se trouve dans une période intérimaire à la suite de la démission du président du Conseil national des barreaux. L’intérim de la présidence est assuré ; les élections auront lieu le 6 septembre prochain et la profession elle-même est en train de travailler à la réforme de sa propre gouvernance. Elle a formulé des propositions de réforme du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession, notamment celle prévoyant que serait accordé à la commission de contrôle un pouvoir de coercition, de façon à agir au sein de la profession.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale préservait au moins le passage par le bâtonnier. La commission des lois du Sénat a restreint considérablement le champ des sommes concernées. Quant à la profession, elle-même souhaite échapper aux soupçons. Or le fait qu’il n’y ait qu’un seul signalement – M. le rapporteur vient de le rappeler – autorise toutes les suspicions. Au demeurant, peut-être n’y a-t-il pas matière à ce qu’il y ait plus de signalements ! Mais si, en plus, on sort 90 % des sommes du dispositif, selon moi, on ne fera qu’alimenter la suspicion. Ce ne serait pas rendre service à la profession.
Peut-être M. Mohamed Soilihi acceptera-t-il, dans ces conditions, de retirer ses amendements.