Monsieur le président, je présenterai aussi, dès à présent, notre amendement n° 61 rectifié.
Ces deux amendements nous ont été inspirés par l’actualité. Comment, en effet, peut-on rester complètement indifférent au fait qu’un groupe comme Amazon, spécialiste du commerce électronique de produits culturels, parvienne à être aussi peu taxé en jouant des failles dans les systèmes fiscaux européens ?
Ce groupe s’est implanté de manière prioritaire au Luxembourg, alors même qu’il réalise son chiffre d’affaires en France, en Allemagne, au Royaume-Uni ou en Espagne.
De surcroît, bien qu’il soit redevable de sommes plus ou moins importantes aux services fiscaux de plusieurs pays, le groupe parvient de temps à autre à percevoir des collectivités territoriales un financement destiné à favoriser son implantation. À cet égard, un récent reportage télévisé a mis en lumière le processus dans lequel les élus locaux se trouvent instrumentalisés au profit de la stratégie fiscale d’un groupe très au fait des outils de contournement de l’impôt.
Dans l’esprit des dirigeants de ce type d’entreprises, l’impôt n’est plus qu’un coût : comme les autres, il doit être maîtrisé, réduit, voire annulé. D’ailleurs, il est notoire que certaines des entreprises dont nous parlons ont pu négocier le niveau de leur imposition, singulièrement auprès du gouvernement irlandais, confronté à la pire crise économique de l’histoire du pays depuis le milieu du XIXe siècle.
Le statut fiscal privilégié des sociétés transnationales constitue une rupture du principe d’égalité devant l’impôt, qui vaut autant pour les particuliers que pour les entreprises.
En outre, il fait partie de l’arsenal mis à leur disposition pour étouffer la concurrence et la réduire à sa plus simple expression, entraînant pour les autres entreprises pertes de parts de marché ou de clientèle et réductions d’activité, avec leur lot de conséquences, notamment sur l’emploi.
C’est aussi cela, la concurrence libre et non faussée, et l’optimisation fiscale y joue un rôle loin d’être négligeable !
Dans le cas de sociétés comme Amazon ou Google, on sait d’avance quelles sont les victimes de ces procédés : en premier lieu, le réseau, plus ou moins constitué, des librairies, ainsi que certains magasins spécialisés, singulièrement ceux qui distribuent ce qu’on appelle des biens culturels. Or le démantèlement de commerces de ce type conduit presque immanquablement à la crise de la production culturelle, car celle-ci ne peut vivre sans une multitude de points de diffusion, dont certains assurent de plus la promotion des éléments les plus remarquables de cette production.