La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est reprise.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière.
Dans la discussion des articles du texte de la commission, nous sommes parvenus à l’article 11.
(Non modifié)
I. – Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Après l’article 263, il est inséré un article L. 263–0 A ainsi rédigé :
« Art. L. 263 -0 A. – Peuvent faire l’objet d’un avis à tiers détenteur notifié par le comptable chargé du recouvrement, dans les conditions prévues aux articles L. 262 et L. 263, les sommes versées par un redevable souscripteur ou adhérent d’un contrat d’assurance rachetable, y compris si la possibilité de rachat fait l’objet de limitations, dans la limite de la valeur de rachat des droits à la date de la notification de l’avis à tiers détenteur. » ;
2° Après le quatrième alinéa du I de l’article L. 273 A, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La saisie à tiers détenteur peut s’exercer sur les sommes versées par un redevable souscripteur ou adhérent d’un contrat d’assurance rachetable, y compris si la possibilité de rachat fait l’objet de limitations, dans la limite de la valeur de rachat des droits à la date de la notification de la saisie. »
II. – Après le cinquième alinéa du 7° de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’opposition à tiers détenteur peut s’exercer sur les sommes versées par un redevable souscripteur ou adhérent d’un contrat d’assurance rachetable, y compris si la possibilité de rachat fait l’objet de limitations, dans la limite de la valeur de rachat des droits à la date de la notification de l’opposition. »
III. – Après le 2 du II de l’article 128 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004, il est inséré un 2 bis ainsi rédigé :
« 2 bis. L’opposition administrative peut s’exercer sur les sommes versées par un redevable souscripteur ou adhérent d’un contrat d’assurance rachetable, y compris si la possibilité de rachat fait l’objet de limitations, dans la limite de la valeur de rachat des droits à la date de la notification de l’opposition. »
IV. – Au début de la première phrase des articles L. 132-14 du code des assurances et L. 223-15 du code de la mutualité, sont ajoutés les mots : « Sous réserve des dispositions des articles L. 263-0 A et L. 273 A du livre des procédures fiscales, de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales et du II de l’article 128 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004, ».
V. – Le présent article s’applique aux avis à tiers détenteur, saisies à tiers détenteur, oppositions à tiers détenteur et oppositions administratives notifiés à compter de la date d’entrée en vigueur de la présente loi.
L'amendement n° 26, présenté par M. Hyest, Mme Procaccia, MM. Portelli, Husson, Pillet et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 263 -0 A. – Par dérogation à l’article L. 263, un avis à tiers détenteur notifié à l’entreprise d’assurance par le comptable chargé du recouvrement, a pour effet d’affecter, sous réserve qu’il ne fasse pas l’objet d’une garantie au profit d’un tiers, à la date de l’exercice de la faculté de rachat par le souscripteur ou l’adhérent ou au dénouement en cas de vie, la quote-part de la valeur de rachat d’un contrat d’assurance-vie, au paiement des impositions privilégiées, à concurrence de ces dernières. »
II. – Alinéas 10 et 11
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.
Selon la jurisprudence, l’assurance-vie ne constitue qu’une créance éventuelle du souscripteur puisqu’elle peut revenir au bénéficiaire en cas de décès. Or l’instruction codificatrice du 22 juillet 2002 prévoit que la créance saisie ne peut pas être une créance éventuelle, non plus qu’une créance future ou hypothétique. Aussi les avis à tiers détenteur, ou ATD, ne peuvent-ils pas porter sur un contrat d’assurance-vie.
Afin de rendre compatible l’application d’un ATD avec la nature spécifique de l’opération d’assurance, il convient de mettre en place un régime particulier reportant l’effet de l’ATD au moment du rachat. Jusqu’à cette date, effectivement, il n’y a pas de créance, raison pour laquelle l’ATD ne peut produire d’effet.
Avant de se prononcer sur cette question très précise, la commission des lois souhaite entendre l’avis du Gouvernement.
Monsieur Hyest, votre amendement vise à traiter la question des moins-values, dont nous avons déjà débattu ce matin.
Vous pouvez être rassuré : les dispositions de l’article 11 du projet de loi prévoient expressément que les saisies seront opérées dans la limite de la valeur de rachat, de sorte qu’il n’y aura pas de charge pour l’assureur.
Votre amendement aurait pour conséquence de reporter l’effet de la saisie à la date du rachat du contrat : en pratique, donc, la saisie dépendrait de la décision du souscripteur, ce qui viderait le dispositif de sa portée.
Monsieur le sénateur, j’espère que cette explication vous convaincra de l’opportunité de retirer votre amendement.
Je ne suis pas totalement convaincu par les explications de M. le ministre, car elles sont contraires aux instructions habituelles ; je retire néanmoins mon amendement.
L'article 11 est adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 22 est présenté par Mme N. Goulet.
L'amendement n° 74 est présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article L. 152-3 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Interdiction est faite aux établissements mentionnés au premier alinéa, ainsi qu’à leurs filiales, de transférer des sommes, titres et valeurs sur des comptes non-résidents sans procéder à la déclaration préalable de ces opérations auprès de l’administration fiscale et douanière. Ces dispositions s’appliquent lorsque ces opérations s’effectuent vers le territoire d’un État référencé comme non coopératif par l'organisation de coopération et de développement économiques ou que leur destination finale est l'un de ces pays. »
L’amendement n° 22 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 74.
Nous sommes, comme Mme Goulet, opposés au nomadisme bancaire intéressé. Notre amendement vise à combattre ce phénomène en soumettant à autorisation toute procédure de transfert d’un portefeuille de comptes bancaires de notre pays vers une filiale bancaire installée dans une contrée fiscalement plus clémente.
Il s’agit de prévenir l’effet d’éviction portant sur une assiette mobile – les comptes bancaires – afin d’éviter qu’elle n’échappe à l’impôt.
Bien qu’il n’y ait pas lieu de s’en féliciter, on observe que des transferts bancaires vers les paradis fiscaux ont lieu chaque jour par milliers, voire par millions, sans constituer par eux-mêmes une pratique frauduleuse.
Dans la mesure où l’administration dispose déjà d’un droit de communication auprès des établissements financiers pour tout type d’opérations, la mesure proposée ne nous paraît pas constituer un progrès évident.
De plus, il existe une obligation de déclaration à TRACFIN en cas de soupçon de fraude fiscale ou de blanchiment.
Enfin, je fais observer que les transferts vers les États non coopératifs ont rarement lieu de façon directe, surtout quand ils sont motivés par une volonté de fraude, de sorte que cette mesure pourrait aisément être contournée.
Aussi convient-il, selon nous, de privilégier une régulation de ces flux par d’autres moyens que la déclaration individuelle proposée par les auteurs de l’amendement n° 74, dont la commission des finances est, par voie de conséquence, plutôt encline à demander le rejet.
Je demande aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer, sans quoi le Gouvernement y sera défavorable pour les raisons que M. Marc vient d’exposer.
Il existe déjà un ensemble de dispositifs, qui seront d’ailleurs renforcés par la loi de séparation et de régulation des activités bancaires : en effet, les institutions financières auront désormais l’obligation de porter à la connaissance de TRACFIN les flux qui leur paraissent suspects.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 46, présenté par M. Bocquet, Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article 1649 AB du code général des impôts, il est inséré un article 1649 ... ainsi rédigé :
« Art. 1649 ... . – Toute personne élaborant, développant ou commercialisant un schéma d’optimisation fiscale est tenue de porter ce dernier à la connaissance de l’administration fiscale dès les pourparlers de vente ou d’achat du dispositif.
« Le manquement à cette obligation entraîne l’application de l’amende prévue à l’article 1734. »
II. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° 47.
L'amendement n° 47, présenté par M. Bocquet, Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 1° du II de l’article L. 13 AA du livre des procédures fiscales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« – la comptabilité analytique des implantations dans chaque État ou territoire. »
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
L’amendement n° 46 s’inspire des règles en vigueur au Royaume-Uni pour la gestion préventive du risque en matière de schémas fiscaux agressifs.
Il s’agit de créer, à la charge du promoteur du schéma d’optimisation fiscale – la plupart du temps, un cabinet de conseil –, une obligation de communiquer le contenu des montages à l’administration fiscale, sous peine de l’amende prévue en cas de refus de communiquer les documents soumis au droit de communication de l’administration fiscale.
S’agissant de l’amendement n° 47, je rappelle que le rapport, publié en juillet 2012, de la commission d’enquête du Sénat sur l’évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales avait mis l’accent sur la nécessité d’instituer une présomption d’anormalité des prix de transfert lorsqu’une entreprise française transfère ses bénéfices à une entité liée située hors de France, alors même que celle-ci représente une part substantielle de l’activité du groupe auquel elle appartient.
L’activité se mesurant en termes de chiffre d’affaires, de clientèle ou d’actifs physiques, la mise en place d’une comptabilité pays par pays constitue un préalable. L’amendement n° 47 vise à la rendre obligatoire.
Quel est l’avis de la commission des finances sur ces deux amendements ?
En ce qui concerne l’amendement n° 46, la commission des finances demande à ses auteurs de bien vouloir le retirer. En effet, il ne donne pas à l’administration le pouvoir d’interdire un schéma d’optimisation jugé abusif, ce que peut faire l’administration britannique.
Plus généralement, nous pensons qu’un travail approfondi est nécessaire en amont de l’introduction d’une mesure aussi importante ; en particulier, la notion de schéma d’optimisation fiscale doit être préalablement définie.
Par ailleurs, la relation de confiance récemment mise en place par la direction générale des finances publiques, qui permet aux entreprises de sécuriser leurs schémas, constitue déjà un premier pas.
En revanche, la commission des finances est favorable à l’amendement n° 47, qui répond à une attente que nous avons évoquée lorsque nous avons parlé de la comptabilité analytique.
Madame Assassi, je vous remercie d’avoir présenté ces deux amendements, qui répondent à deux préoccupations du Gouvernement.
Il reste que, comme je l’ai déjà signalé ce matin, il s’agit là de matières sur lesquelles de nombreuses réflexions sont en cours, en vue de la préparation du projet de loi de finances pour 2014. Je pense en particulier aux travaux de la commission d’enquête du Sénat sur le rôle des banques et des acteurs financiers dans l’évasion des capitaux, dont le rapporteur est M. Bocquet ; elle présentera, s’agissant de la lutte contre la fraude fiscale, des propositions dont nous avons l’intention de tenir compte.
Par ailleurs, un rapport nous a été remis au mois de juin dernier par l’inspection générale des finances sur les prix de transfert.
Toutes ces questions, connexes les unes aux autres, pourront être traitées dans le projet de loi de finances pour 2014, après que nous en aurons de nouveau débattu ensemble, après aussi que nous les aurons examinées en liaison avec les entreprises, de manière à nous assurer que le dispositif mis en place permettra d’exercer sur elles un véritable contrôle, sans les mettre en difficulté ni engendrer pour elles un quelconque préjudice.
Dans ces conditions, madame Assassi, je vous propose d’arrêter le principe que vos amendements seront pris en compte dans la réflexion pour la préparation du projet de loi de finances pour 2014, avec non pas une obligation de moyens, mais une obligation de résultat : il s’agit de mettre au point le meilleur texte possible. En contrepartie de cet engagement, je vous demande, pour l’heure, de retirer vos amendements.
Monsieur le ministre, j’entends bien vos remarques. Toutefois, je suis tentée de prendre aussi en compte la position de M. le rapporteur pour avis de la commission des finances. Dans ces conditions, je retire l’amendement n° 46, non sans rappeler qu’il correspond à la proposition n° 14 de la commission d’enquête du Sénat sur l’évasion des capitaux et des actifs hors de France, mais je maintiens l’amendement n° 47.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11.
(Non modifié)
Après la première phrase du premier alinéa de l’article L. 526-1 du code de commerce, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, cette déclaration n’est pas opposable à l’administration fiscale lorsque celle-ci relève, à l’encontre du déclarant, soit des manœuvres frauduleuses, soit l’inobservation grave et répétée de ses obligations fiscales, au sens de l’article 1729 du code général des impôts. » –
Adopté.
I. – Le code des douanes est ainsi modifié :
1° Après la section 9 du chapitre IV du titre II, il est inséré une section 10 intitulée : « Emploi de personnes qualifiées », comprenant un article 67 quinquies A ainsi rédigé :
« Art. 67 quinquies A. – Les agents des douanes peuvent recourir à toute personne qualifiée pour effectuer des expertises techniques nécessaires à l’accomplissement de leurs missions et leur soumettre les objets et documents utiles à ces expertises.
« Les personnes ainsi appelées rédigent un rapport qui contient la description des opérations d’expertise ainsi que leurs conclusions. Ce rapport est communiqué aux agents des douanes et est annexé à la procédure. En cas d’urgence, leurs conclusions peuvent être recueillies par les agents des douanes, qui les consignent dans un procès-verbal de douane ou dans le document prévu à l’article 247 des dispositions d’application du code des douanes communautaire. Les personnes qualifiées effectuent les opérations d’expertise technique sous le contrôle des agents des douanes et sont soumises au secret professionnel prévu à l’article 59 bis. » ;
2° Au deuxième alinéa du b du 2 de l’article 64, après le mot : « ci-dessus, », sont insérés les mots : « les personnes auxquelles ils ont éventuellement recours en application du 3 de l’article 53, ».
II. –
1° Après l’article L. 103 A du livre des procédures fiscales, il est inséré un article L. 103 B ainsi rédigé :
« Art. L. 103 B. – En matière de contributions indirectes et de réglementations assimilées, les agents de l’administration peuvent solliciter toute personne qualifiée dont l’expertise est susceptible de les éclairer pour l’accomplissement de leurs missions.
« Ces agents peuvent communiquer à cette personne, sans méconnaître les règles du secret professionnel, les renseignements, objets, produits, marchandises et documents destinés à lui permettre de remplir sa mission.
« Les personnes ainsi appelées rédigent un rapport qui contient la description des opérations d’expertise ainsi que leurs conclusions. Ce rapport est communiqué aux agents de l’administration et est annexé à la procédure. En cas d’urgence, les conclusions des personnes ayant fourni leur expertise peuvent être recueillies par les agents de l’administration qui les consignent dans un procès-verbal.
« Les personnes qualifiées effectuent les opérations d’expertise sous le contrôle des agents de l’administration et sont soumises au secret professionnel prévu à l’article L. 103. » ;
2° Au deuxième alinéa du 3 de l’article L. 38, après les mots : « au 1, », sont insérés les mots : « les personnes auxquelles ils ont éventuellement recours en application de l’article L. 103 B, ». –
I. – L’article 1734 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette amende est applicable, pour chaque document, sans que le total des amendes puisse être supérieur à 10 000 €, en cas d’opposition à la prise de copie mentionnée à l’article L. 13 F du livre des procédures fiscales. »
II. – §(Non modifié) Après le 2° bis de la section 1 du chapitre Ier du titre II de la première partie du livre des procédures fiscales, il est inséré un 2° ter ainsi rédigé :
« 2° ter : Dispositions communes
« Art. L. 13 F. – Les agents de l’administration peuvent, sans que le contribuable puisse s’y opposer, prendre copie des documents dont ils ont connaissance dans le cadre des procédures de contrôle prévues aux articles L. 12 et L. 13. Les modalités de sécurisation des copies de documents sous forme dématérialisée sont précisées par arrêté du ministre chargé du budget. » –
Adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 60 rectifié est présenté par M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 140 est présenté par M. Marini.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 11 bis C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 57 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le transfert de fonctions et de risques par une entreprise établie en France à une entreprise liée au sens du premier alinéa et située hors de France, fait présumer un transfert de bénéfice, lorsque l'entreprise établie en France ne démontre pas qu'elle a bénéficié d'une contrepartie financière équivalente à celle qui aurait été convenue entre des entreprises indépendantes. L'entreprise établie en France fournit les nouvelles modalités de détermination des résultats réalisés par les entreprises parties au transfert, y compris celles établies hors de France. » ;
2° Au dernier alinéa, les mots : « premier, deuxième et troisième » sont remplacés par les mots : « quatre premiers ».
II. - Les dispositions du I s'appliquent aux exercices clos à compter du 31 décembre 2013.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour présenter l’amendement n° 60 rectifié.
Monsieur le président, je présenterai aussi, dès à présent, notre amendement n° 61 rectifié.
Ces deux amendements nous ont été inspirés par l’actualité. Comment, en effet, peut-on rester complètement indifférent au fait qu’un groupe comme Amazon, spécialiste du commerce électronique de produits culturels, parvienne à être aussi peu taxé en jouant des failles dans les systèmes fiscaux européens ?
Ce groupe s’est implanté de manière prioritaire au Luxembourg, alors même qu’il réalise son chiffre d’affaires en France, en Allemagne, au Royaume-Uni ou en Espagne.
De surcroît, bien qu’il soit redevable de sommes plus ou moins importantes aux services fiscaux de plusieurs pays, le groupe parvient de temps à autre à percevoir des collectivités territoriales un financement destiné à favoriser son implantation. À cet égard, un récent reportage télévisé a mis en lumière le processus dans lequel les élus locaux se trouvent instrumentalisés au profit de la stratégie fiscale d’un groupe très au fait des outils de contournement de l’impôt.
Dans l’esprit des dirigeants de ce type d’entreprises, l’impôt n’est plus qu’un coût : comme les autres, il doit être maîtrisé, réduit, voire annulé. D’ailleurs, il est notoire que certaines des entreprises dont nous parlons ont pu négocier le niveau de leur imposition, singulièrement auprès du gouvernement irlandais, confronté à la pire crise économique de l’histoire du pays depuis le milieu du XIXe siècle.
Le statut fiscal privilégié des sociétés transnationales constitue une rupture du principe d’égalité devant l’impôt, qui vaut autant pour les particuliers que pour les entreprises.
En outre, il fait partie de l’arsenal mis à leur disposition pour étouffer la concurrence et la réduire à sa plus simple expression, entraînant pour les autres entreprises pertes de parts de marché ou de clientèle et réductions d’activité, avec leur lot de conséquences, notamment sur l’emploi.
C’est aussi cela, la concurrence libre et non faussée, et l’optimisation fiscale y joue un rôle loin d’être négligeable !
Dans le cas de sociétés comme Amazon ou Google, on sait d’avance quelles sont les victimes de ces procédés : en premier lieu, le réseau, plus ou moins constitué, des librairies, ainsi que certains magasins spécialisés, singulièrement ceux qui distribuent ce qu’on appelle des biens culturels. Or le démantèlement de commerces de ce type conduit presque immanquablement à la crise de la production culturelle, car celle-ci ne peut vivre sans une multitude de points de diffusion, dont certains assurent de plus la promotion des éléments les plus remarquables de cette production.
L’amendement n° 140 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission des finances sur l’amendement n° 60 rectifié ?
J’incline à solliciter l’avis du Gouvernement. En effet, le dispositif paraît tout à fait abouti ; il est d'ailleurs issu de la proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales des entreprises multinationales, rédigée par Philippe Marini. Je souhaite cependant m’assurer que le dispositif est compatible avec l’agenda du Gouvernement sur ce sujet ; je sais en effet que des propositions relatives aux prix de transfert doivent être formulées dans le cadre du prochain projet de loi de finances.
Il me semble que ce dispositif est en phase avec les préoccupations du Gouvernement et qu’il répond à un réel besoin. Mais peut-être allez-vous préciser les choses, monsieur le ministre.
J’indique dès à présent que, sur le principe, la commission des finances est favorable à l’amendement n° 61 rectifié, car il vise à apporter une solution à la principale faiblesse du dispositif d’abus de droit.
J’ai indiqué voilà quelques instants que nous partagions l’esprit de ces amendements relatifs aux pratiques de transfert qui mettent à profit les différences entre les législations des États en vue d’obtenir les meilleures conditions fiscales. Cependant, je vous propose, comme je l’ai fait à l’Assemblée nationale, de suivre la méthode dont je viens de rappeler l’esprit : il s'agit d’éviter d’avoir une approche parcellaire, afin de traiter le problème de manière globale et cohérente dans le cadre du prochain projet de loi de finances, au terme de l’expertise de la totalité des propositions qui nous ont été transmises par l’inspection générale des finances au mois de juin.
Madame la sénatrice, je prends à nouveau l’engagement devant le Sénat de traiter la totalité des sujets relatifs aux transferts – prix de transfert, transferts de bénéfices – avec vous lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2014. Votre proposition a un niveau de maturité qui permettrait presque de l’intégrer dès à présent dans la loi. Si, néanmoins, nous ne souhaitons pas le faire, c’est par souci de lisibilité et de cohérence : nous entendons intégrer au projet de loi de finances un ensemble de dispositions cohérentes, afin de donner de la lisibilité et de la force à la suite que le Gouvernement donnera au rapport de l’inspection générale des finances.
Quant à l’amendement n° 61 rectifié, sur lequel j’émettrai l’avis du Gouvernement par anticipation, il pose un problème juridique, qui tient à la nécessité de définir très finement la notion de « motif essentiel » pour déterminer ce qui, dans des actes, relève de la volonté d’éluder ou d’atténuer des charges fiscales et, en fin de compte, de l’abus de droit.
Je voudrais, là aussi, vous faire une proposition concrète, qui permettrait à votre dispositif d’aboutir législativement dans un délai relativement bref. Le Gouvernement a prévu de confier une mission au Conseil d'État, dans la lignée du rapport rédigé par M. Fouquet, afin d’aller dans le détail des choses et d’avoir une définition juridique extrêmement fine des notions en jeu. Je vous propose donc que nous nous donnions un tout petit délai pour accomplir ce travail de rigueur juridique, afin d’aboutir à un dispositif législatif parfaitement maîtrisé et parfaitement pertinent.
J’ai bien entendu les arguments de M. le ministre. On ne peut qu’y être attentif. Il est clair que nous essayons tous d’avancer dans le même sens. Cependant, je pense que cet amendement est susceptible – tout comme l’amendement n° 61 rectifié – de très bien s’intégrer dans le présent projet de loi, d’autant que la commission des finances a émis un avis plutôt favorable à leur sujet. Par conséquent, je maintiens cet amendement, de même que l’amendement n° 61 rectifié.
J’avais souhaité connaître l’avis du Gouvernement sur l'amendement n° 60 rectifié. J’ai tendance à m’aligner sur la position exprimée par M. le ministre, qui nous a dit qu’il serait bon de différer l’intégration du dispositif dans la loi et a donc demandé le retrait de l’amendement.
En revanche, s'agissant de l’amendement n° 61 rectifié, qui concerne l’abus de droit, je pense que la commission des finances peut maintenir son avis favorable. Même si des choses doivent être précisées, nous pouvons émettre un vote de principe sur ce point.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 61 rectifié, présenté par M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 11 bis C
Inséré un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au premier alinéa de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, les mots : « ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales » sont remplacés par les mots : « ils ont pour motif essentiel d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales ».
II. - Les dispositions du I s'appliquent aux propositions de rectifications notifiées à compter du 1er janvier 2014.
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 141, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
Après l’article 11 bis C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le premier alinéa de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Après les mots : « abus de droit, », sont insérés les mots : « lorsqu’elle démontre à partir de données de fait » ;
2° Les mots : « ils n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales », sont remplacés par les mots : « ils ont pour motif essentiel d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales ».
II. – Les dispositions du I s’appliquent aux propositions de rectifications notifiées à compter du 1er janvier 2014.
Cet amendement n'est pas soutenu.
La commission des finances et le Gouvernement ont déjà fait connaître leurs avis sur l'amendement n° 61 rectifié.
Je le mets aux voix.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 11 bis C.
(Non modifié)
L’article L. 13 AA du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Au début du dernier alinéa du I, les mots : « doivent tenir à disposition de » sont remplacés par les mots : « transmettent à » ;
2° Au premier alinéa du III, les mots : « tenue à la disposition de » sont remplacés par les mots : « transmise à » et les mots : « à la date d’engagement de la vérification de comptabilité » sont remplacés par les mots : « en même temps que la déclaration mentionnée à l’article 223 du code général des impôts » ;
3° À la première phrase du second alinéa du III, les mots : « mise à sa disposition » sont remplacés par le mot : « transmise ».
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 25 est présenté par M. Leconte.
L'amendement n° 88 est présenté par M. Pillet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
Ces amendements ne sont pas soutenus.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 33, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Après l’article 223 quinquies A du code général des impôts, il est inséré un article 223 quinquies B ainsi rédigé :
« Art. 223 quinquies B. – Les personnes morales établies en France et mentionnées à l’article L. 13 AA du livre des procédures fiscales sont tenues de fournir, dans le délai de six mois qui suit l’échéance prévue au 1 de l’article 223, les documents suivants :
« 1° des informations générales sur le groupe d’entreprises associées :
« - une description générale de l’activité déployée, incluant les changements intervenus au cours de l’exercice ;
« - une liste des principaux actifs incorporels détenus, notamment brevets, marques, noms commerciaux et savoir-faire, en relation avec l’entreprise ;
« - une description générale de la politique de prix de transfert du groupe et les changements intervenus au cours de l’exercice ;
« 2° des informations spécifiques concernant l’entreprise :
« - une description de l’activité déployée, incluant les changements intervenus au cours de l’exercice ;
« - un état récapitulatif des opérations réalisées avec d’autres entreprises associées, par nature et par montant, lorsque le montant agrégé par nature de transactions excède 100 000 euros ;
« - une présentation de la ou des méthodes de détermination des prix de transfert dans le respect du principe de pleine concurrence en indiquant la principale méthode utilisée et les changements intervenus au cours de l’exercice. »
II. - Le I s’applique aux documents devant être déposés dans les six mois qui suivent les déclarations mentionnées au 1 de l’article 223 du code général des impôts et dont l’obligation de dépôt arrive à échéance à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
Cet amendement concerne les prix de transfert. L’article 11 bis D adopté par l’Assemblée nationale vise à instituer, pour les grandes entreprises, une obligation de transmission à l’administration fiscale d’une documentation permettant de justifier leur politique de transfert. Toutefois, il existe une difficulté : ce dispositif figure dans le livre des procédures fiscales et sa rédaction ne nous paraît pas pleinement satisfaisante.
C'est pourquoi nous proposons une nouvelle rédaction de l’article, afin de créer une obligation déclarative à part entière, qui figurerait dans le code général des impôts.
En outre, pour que cette obligation ne constitue pas une contrainte excessive pour les entreprises – nous partageons tous ce souci –, la documentation ne devrait être transmise que dans un délai de six mois suivant la date de dépôt de la déclaration d’impôt sur les sociétés.
L'amendement n° 137, présenté par MM. P. Dominati et de Montgolfier, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
en même temps que
par les mots :
dans les six mois suivant la date de
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 40 rectifié, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - Après la première phrase du premier alinéa de l’article 57 du code général des impôts, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« L’entreprise doit obligatoirement communiquer, trois mois avant la clôture de ses comptes, aux services du ministère de l’économie et des finances, la méthode de détermination des prix de ces opérations d’achat ou de vente. »
... - Le premier alinéa de l’article 238 A du code général des impôts est complété par les mots : « notamment en indiquant la méthode de définition des prix concernant des actifs immatériels. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l'amendement n° 33 ?
L'amendement est adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 29 rectifié ter est présenté par MM. Chiron et D. Bailly et Mme Lienemann.
L'amendement n° 69 rectifié est présenté par M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 11 bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la première phrase du premier alinéa de l’article 57 du code général des impôts, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Lors d’un contrôle fiscal, l’entreprise doit obligatoirement communiquer aux services fiscaux l’ensemble des éléments constitutifs de ses prix de transferts, et elle est dans l’obligation de mettre à leur disposition une copie informatique de ses comptes analytiques. »
L'amendement n° 29 rectifié ter n'est pas soutenu.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour défendre l’amendement n° 69 rectifié
Cet amendement part d’une bonne intention. Toutefois, la commission s’est interrogée, car des propositions relatives aux prix de transfert devraient être formulées par le Gouvernement dans le cadre du prochain projet de loi de finances, sur la base du récent rapport de l’inspection générale des finances et des travaux parlementaires. Il nous paraît donc souhaitable que cet amendement soit retiré.
(Non modifié)
L’article L. 229 du livre des procédures fiscales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les plaintes présentant un lien de connexité peuvent être déposées par un seul des services mentionnés au premier alinéa, compétent pour le dépôt de l’une de ces plaintes. » –
Adopté.
(Non modifié)
L’article L. 274 du livre des procédures fiscales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le délai de prescription de l’action en recouvrement prévu au premier alinéa est augmenté de deux années pour les redevables établis dans un État non membre de l’Union européenne avec lequel la France ne dispose d’aucun instrument juridique relatif à l’assistance mutuelle en matière de recouvrement ayant une portée similaire à celle prévue par la directive 2010/24/UE du Conseil, du 16 mars 2010, concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures. » –
Adopté.
L'amendement n° 152, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 11 bis F
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le quatrième alinéa de l’article L. 190 du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° La première phrase est complétée par les mots : « et se prescrivent par deux ans, selon le cas, à compter de la mise en recouvrement du rôle ou de la notification de l'avis de mise en recouvrement ou, en l'absence de mise en recouvrement, du versement de l'impôt contesté ou de la naissance du droit à déduction. » ;
2° La seconde phrase est supprimée.
La parole est à M. le ministre délégué.
Cet amendement vise à préciser les dispositions réformant les actions en répétition de l’indu des créances fiscales adoptées par le Parlement dans le cadre du collectif budgétaire de la fin de l’année 2012. Comme vous le savez, cette réforme a permis d’unifier les délais contentieux des actions en restitution, indépendamment de la cause défendue.
Le présent amendement vise à apporter une précision technique afin d’éviter toute confusion entre les délais de réclamation, qui sont fixés par la voie réglementaire, et la période de prescription sur laquelle peut porter le remboursement. Il est donc proposé d’indiquer expressément dans la loi le délai de prescription de deux ans des actions en répétition de l’indu des créances d’origine fiscale, conformément à l’objectif de la réforme déjà validée par le Parlement. Cette précision ne modifie pas l’économie générale du dispositif adopté par le Parlement en 2012.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 11 bis F.
I. – Le code des douanes est ainsi modifié :
A. – L’article 64 est ainsi modifié :
1° La première phrase du premier alinéa du 1 est complétée par les mots : « ou d’être accessibles ou disponibles » ;
2° Le 2 est complété par un c ainsi rédigé :
« c) Lorsque l’occupant des lieux ou son représentant fait obstacle à l’accès aux pièces ou documents présents sur un support informatique, à leur lecture ou à leur saisie, mention en est portée au procès-verbal.
« Les agents des douanes peuvent alors procéder à la copie de ce support et saisir ce dernier, qui est placé sous scellés. Ils disposent de quinze jours à compter de la date de la visite pour accéder aux pièces ou documents présents sur le support informatique placé sous scellés, à leur lecture et à leur saisie, ainsi qu’à la restitution de ce dernier et de sa copie. Ce délai est prorogé sur autorisation délivrée par le juge des libertés et de la détention.
« À la seule fin de permettre la lecture des pièces ou documents présents sur le support informatique placé sous scellés, les agents des douanes procèdent aux opérations nécessaires à leur accès ou à leur mise au clair. Ces opérations sont réalisées sur la copie du support.
« L’occupant des lieux ou son représentant est avisé qu’il peut assister à l’ouverture des scellés, à la lecture et à la saisie des pièces et documents présents sur ce support informatique, qui ont lieu en présence de l’officier de police judiciaire.
« Un procès-verbal décrivant les opérations réalisées pour accéder à ces pièces et documents, à leur mise au clair et à leur lecture est dressé par les agents des douanes. Un inventaire des pièces et documents saisis lui est annexé, s’il y a lieu.
« Le procès-verbal et l’inventaire sont signés par les agents des douanes et par un officier de police judiciaire ainsi que par l’occupant des lieux ou son représentant ; en l’absence de celui-ci ou en cas de refus de signer, mention en est faite au procès-verbal.
« Il est procédé concomitamment à la restitution du support informatique et de sa copie. En l’absence de l’occupant des lieux ou de son représentant, l’administration accomplit alors sans délai toutes diligences pour les restituer. »
B. –
« Art. 413 ter – Est passible d’une amende égale à 1 500 € le fait de faire obstacle à l’accès aux pièces ou documents sur support informatique, à leur lecture ou à leur saisie, mentionné au c du 2 de l’article 64, dans les cas autres que ceux sanctionnés par l’article 416. »
C. – Après l’article 415, il est inséré un article 416 ainsi rédigé :
« Art. 416 – Est passible d’une amende égale à 10 000 €, ou de 5 % des droits et taxes éludés ou compromis ou de la valeur de l’objet de la fraude lorsque ce montant est plus élevé, le fait pour l’occupant des lieux de faire obstacle à l’accès aux pièces ou documents sur support informatique, à leur lecture ou à leur saisie, mentionné au c du 2 de l’article 64, lorsque cet obstacle est constaté dans les locaux occupés par la personne susceptible d’avoir commis les délits visés au 1. de ce même article.
« L’amende prévue à l’article 413 ter est portée à 10 000 € lorsque cet obstacle est constaté dans les locaux occupés par le représentant en droit ou en fait de la personne susceptible d’avoir commis les délits visés au 1. de l’article 64. »
II. –
Non modifié
1° Au premier alinéa du 1, après le mot : « détenus », sont insérés les mots : « ou d’être accessibles ou disponibles » ;
2° Après le 4, il est inséré un 4 bis ainsi rédigé :
« 4 bis. Lorsque l’occupant des lieux ou son représentant fait obstacle à l’accès aux pièces ou documents présents sur un support informatique, à leur lecture ou à leur saisie, mention en est portée au procès-verbal.
« Les agents habilités peuvent alors procéder à la copie de ce support et saisir ce dernier, qui est placé sous scellés. Ils disposent de quinze jours à compter de la date de la visite pour accéder aux pièces ou documents présents sur le support informatique placé sous scellés, à leur lecture et à leur saisie, ainsi qu’à la restitution de ce dernier et de sa copie. Ce délai est prorogé sur autorisation délivrée par le juge des libertés et de la détention.
« À la seule fin de permettre la lecture des pièces ou documents présents sur le support informatique placé sous scellés, les agents habilités procèdent aux opérations nécessaires à leur accès ou à leur mise au clair. Ces opérations sont réalisées sur la copie du support.
« L’occupant des lieux ou son représentant est avisé qu’il peut assister à l’ouverture des scellés, à la lecture et à la saisie des pièces et documents présents sur ce support informatique, qui ont lieu en présence de l’officier de police judiciaire.
« Un procès-verbal décrivant les opérations réalisées pour accéder à ces pièces et documents, à leur mise au clair et à leur lecture est dressé par les agents habilités. Un inventaire des pièces et documents saisis lui est annexé, s’il y a lieu.
« Le procès-verbal et l’inventaire sont signés par les agents habilités et par un officier de police judiciaire ainsi que par l’occupant des lieux ou son représentant ; en l’absence de celui-ci ou en cas de refus de signer, mention en est faite au procès-verbal.
« Il est procédé concomitamment à la restitution du support informatique et de sa copie. En l’absence de l’occupant des lieux ou de son représentant, l’administration accomplit alors sans délai toutes diligences pour les restituer. »
III. –
Non modifié
Au premier alinéa de l’article 1735 quater du code général des impôts, après la référence : « L. 16 B », est insérée la référence : « et au 4 bis de l’article L. 38 ». –
Adopté.
(Non modifié)
I. – Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Le II de l’article L. 52 est complété par un 7° ainsi rédigé :
« 7° Si le contribuable s’est livré à une activité occulte, au sens du troisième alinéa de l’article L. 169. » ;
2° Le 3° de l’article L. 68 est ainsi rédigé :
« 3° Si le contribuable s’est livré à une activité occulte, au sens du troisième alinéa de l’article L. 169 ; ».
II. – A. – Le 1° du I s’applique aux contrôles dont la première intervention sur place a lieu à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi.
B. – Le 2° du I s’applique aux avis de vérification de comptabilité ou, en cas d’application de l’article L. 47 C du livre des procédures fiscales, aux avis d’examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ou, dans les cas pour lesquels l’envoi de ces avis n’est pas requis, aux propositions de rectification adressées à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi. –
Adopté.
(Non modifié)
I. – L’article L. 57 A du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° Le second alinéa est remplacé par un II ainsi rédigé :
« II. – Le délai de réponse mentionné au I ne s’applique pas :
« 1° Aux personnes morales ni aux sociétés mentionnées à l’article 238 bis M du code général des impôts à l’actif desquelles sont inscrits des titres de placement ou de participation pour un montant total égal ou supérieur à 7 600 000 € ;
« 2° En cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité. »
II. – Le I s’applique aux contrôles pour lesquels un avis de vérification a été adressé à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi. –
Adopté.
Après le 5° ter de la section I du chapitre II du titre II de la première partie du livre des procédures fiscales, sont insérés un 5° quater et un 5° quinquies ainsi rédigés :
« 5° quater : Autorité de contrôle prudentiel
« Art. L. 84 D. – L’Autorité de contrôle prudentiel est tenue de communiquer à l’administration fiscale tout document ou information qu’elle détient dans le cadre de ses missions et dont elle informe, en application de l’article L. 561-30 du code monétaire et financier, le service mentionné à l’article L. 561-23 du même code ou dont son président informe le procureur de la République territorialement compétent, en application de l’article L. 612-28 dudit code, s’agissant de sommes ou opérations susceptibles de provenir d’une fraude fiscale mentionnée au II de l’article L. 561-15 du même code, à l’exception des documents ou des informations qu’elle a reçus d’une autorité étrangère chargée d’une mission similaire à la sienne, sauf en cas d’accord préalable de cette autorité. »
« 5° quinquies : Autorité des marchés financiers
« Art. L. 84 E. – Sous réserve des dispositions du III de l’article L. 632-7 du code monétaire et financier, l’Autorité des marchés financiers communique à l’administration fiscale, sur sa demande, sans pouvoir opposer le secret professionnel, les informations qu’elle détient sur les personnes soumises à son contrôle. » –
Adopté.
(Supprimé)
L'amendement n° 126, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L'article L. 230 du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « sixième » ;
2° Au deuxième alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « six ».
La parole est à Mme Esther Benbassa.
L’article 11 sexies, supprimé par notre commission des lois, visait à allonger de trois à six ans le délai de prescription applicable aux délits de fraude fiscale.
Le groupe écologiste considère que, compte tenu de la complexité, souvent constatée, des méthodes de fraude et de la difficulté à les mettre en évidence, le délai actuel de prescription est manifestement trop court. Or l'enjeu politique et financier de la lutte contre la fraude fiscale nécessite que soient aujourd'hui donnés aux services administratifs et judiciaires les moyens de mener efficacement cette lutte, sans attendre une refonte générale des régimes de prescription.
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons rétablir l’allongement de trois à six ans du délai de prescription applicable aux délits de fraude fiscale. Cette disposition avait d'ailleurs fait l’objet d’un large consensus à l’Assemblée nationale.
M. André Gattolin applaudit.
La commission émet un avis défavorable. Depuis bien des années, la commission des lois réfléchit sur la question de la prescription. Sa réponse a toujours été la même : soyons méfiants quand il s'agit de toucher à la prescription.
Je comprends bien la position d’Esther Benbassa et son souci de donner davantage de temps à la justice. Mais n’oublions pas qu’il existe des actes interruptifs de prescription. Par conséquent, lorsque le délai de prescription est de trois ans, cela ne veut pas dire que l’affaire doit nécessairement être réglée dans un délai de trois ans.
Madame la sénatrice, je comprends parfaitement le sens de votre amendement, qui vise à allonger un certain nombre de délais de prescription afin de donner davantage de temps pour effectuer des opérations de contrôle. Du point de vue de la répression du délit de fraude fiscale, votre amendement va donc dans le bon sens.
Cependant, je comprends également les préoccupations exprimées par le rapporteur de la commission des lois, qui a attiré notre attention sur la nécessité de conserver une cohérence, un équilibre, dans l’architecture globale des délais de prescription. Par conséquent, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
Lors de nos débats en commission des finances, nous avons estimé que cet amendement présentait un intérêt. Pourquoi ?
Les infractions en matière fiscale susceptibles de faire l’objet de poursuites pénales sont les plus graves. Elles sont aussi, bien souvent, particulièrement sophistiquées. Elles exigent donc un travail d’investigation extrêmement poussé.
Par conséquent, l’allongement de la durée de prescription des infractions en matière fiscale apparaît comme un moyen de parvenir à une sanction effective en cas de fraude complexe.
De surcroît, l’allongement proposé présente un caractère particulièrement dissuasif dès lors qu’il limite les chances, pour le fraudeur, d’échapper aux sanctions.
Il nous semble qu’un délai permettant une action efficace n’est pas un délai disproportionné.
Dans ces conditions, il nous a semblé que cette disposition constituait une avancée pertinente. Pour ma part, je soutiens cet amendement.
La tendance générale est au raccourcissement des délais de prescription.
En outre, je rappelle que le délai de prescription est interrompu dès lors que la fraude est détectée. Le délai ne tombe ainsi pas invariablement au bout de trois ans.
Par ailleurs, allonger le délai de prescription peut créer de l’insécurité juridique. Cette préoccupation a justifié la réduction des délais de prescription dans tous les domaines, notamment en matière civile. Nous avons d’ailleurs suivi, en l’espèce, ce qui se faisait dans les autres pays européens. Car il faut savoir que la France avait des délais de prescription invraisemblablement longs !
Une réflexion sur ce sujet peut, certes, être intéressante. Toutefois, les délais actuels ont été définis en connaissance de cause, et les modifier brutalement ne me paraît pas judicieux. Et puis, si on le fait dans ce domaine-là, on le fera aussi dans d’autres ! On se retrouvera ainsi dans un maquis où plus personne ne s’y reconnaîtra ! Pourquoi établir, ici, un délai de six ans, là, de trois ans, ailleurs, de quatre ans ?
La meilleure option est de fixer, dans la mesure du possible, des délais homogènes permettant une lisibilité et une accessibilité de la règle de droit.
De plus, monsieur le ministre, imaginez que l’administration fiscale « débarque » dans une entreprise au bout de six ans, alors qu’elle n’a pas fait l’objet d’un contrôle dans le délai initial de trois ans ! Pensez-vous que cela soit raisonnable ?
Ah, bien sûr ! Mais savez-vous ce que c’est qu’un contrôle fiscal ? Êtes-vous chef d’entreprise ? Avez-vous une idée de la façon dont cela se passe ? Cela peut durer des jours et des jours, quelquefois des semaines !
Allons, il faut être raisonnable !
J’irai dans le même sens que M. Hyest. Les délais de prescription actuels ont leur logique ; ils n’ont pas été fixés au hasard.
Bien entendu, on peut modifier les délais de prescription. Pourquoi pas ? Toutefois, une telle réforme doit faire l’objet d’une réflexion d’ensemble. Cela suppose de prendre du temps. On ne peut pas procéder ainsi, au détour d’un texte, aussi important soit-il.
Il est vrai que, lorsqu’on est honnête, on n’a rien à craindre de l’administration fiscale. Mais la lutte contre la fraude fiscale soulève également des questions de liberté individuelle et de respect des droits, notamment la présomption d’innocence.
Lorsque des poursuites sont engagées, un temps long peut s’écouler avant que l’innocence présumée puisse, in fine, être confirmée. Les trois ans prévus pour le délai de prescription me paraissent donc suffisants.
De plus, comme l’a rappelé le rapporteur de la commission des lois, le délai de prescription peut être suspendu par des actes interruptifs.
Il n’y a pas lieu d’allonger à la hâte le délai de prescription sans procéder au préalable à une étude globale sur la question de la prescription en matière fiscale.
Je soutiens la même position.
Nous devons faire preuve de cohérence. Notre préoccupation majeure est de susciter les conditions de la confiance pour que les entrepreneurs investissent, créent de la croissance et des emplois.
Certes, nous examinons un texte dont l’objet est de faire en sorte que puissent être pourchassées toutes les formes de fraude. Mais notre législation est à ce point complexe que nombre de chefs d’entreprise se demandent en permanence s’ils ne sont pas en marge de la légalité.
Dans ces conditions, allonger les délais de prescription n’est pas de nature à contribuer à la confiance. C’est pourquoi je ne voterai pas cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
(Non modifié)
Au premier alinéa de l’article L. 152-1 du code monétaire et financier, après le mot : « valeurs », sont insérés les mots : «, y compris les valeurs mentionnées à l’article L. 561-13, les moyens de paiement décrits par la loi n° 2013-100 du 28 janvier 2013 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière, ou de l’or ». –
Adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 35, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 152-3 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 152-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 152-3-1. – I. – Les établissements bancaires et financiers, les établissements de monnaie électronique, les établissements de paiement étrangers ainsi que les organismes et services mentionnés à l’article L. 518-1 et les personnes exerçant des activités mentionnées à l’article L. 561-2 effectuant des opérations sur leurs propres fonds ou ceux de leurs clients avec des établissements bancaires et financiers français ou ayant une ou plusieurs filiales sur le territoire national sont soumis à l’obligation de transmission à l’administration fiscale française des informations concernant les ressortissants français, les résidents français ou les établissements détenus majoritairement par un ou plusieurs ressortissants français, propriétaires d’un compte dans l’établissement, comprenant :
« 1° identité ;
« 2° adresse ;
« 3° numéro de compte ;
« 4° montant des fonds reçus ;
« 5° montant des fonds transmis ;
« 6° solde du compte ;
« 7° intérêts.
« II. – Est considéré comme le compte d’un ressortissant français tout compte détenu :
« 1° par une ou plusieurs personnes de nationalité française ou résidant en France, par une entreprise opérant sur le marché national, par une fiducie ou tout autre association ou partenariat d’entreprises de statut juridique équivalent établi en France ;
« 2° par une entité française, définie comme une entité étrangère pour laquelle tout ressortissant français comme défini à l’alinéa précédent :
« – détient directement ou indirectement, dans le cas d’une entreprise, au moins 10 % des droits de vote, en nombre d’actions ou en valeur ;
« – ou, dans le cas d’un partenariat, bénéficie d’au moins 10 % des intérêts ou dividendes versés ;
« – ou, dans le cas d’une fiducie, reçoit au moins 10 % des intérêts bénéficiaires.
« Il appartient aux établissements financiers de déterminer les bénéficiaires ultimes et réels des entités ainsi considérées. Ces dispositions s’appliquent de la même façon selon que le compte ouvert par les établissements étrangers aux clients tels que définis par les deuxième et troisième alinéas bénéficie de revenus générés par des activités domestiques ou des activités exercées à l’étranger.
« III. – À partir du 1er janvier 2014, si les ressortissants français, tel que définis au II, souhaitent conserver leur anonymat, les établissements bancaires et financiers prélèvent une retenue à la source de 60 % sur l’ensemble des opérations effectuées pour leur compte et versent cette somme à l’administration fiscale française.
« IV. – En cas de manquement aux obligations d’information prévues aux I et III, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution procède au retrait de l’agrément de l’ensemble des filiales situées sur le territoire national de l’établissement bancaire et financier ayant refusé la transmission des informations dans les modalités prévues aux articles L. 532-6 à L. 532-8 du présent code. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 125 rectifié, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 152-3 du code monétaire et financier, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 152-3-… - I.- Les établissements bancaires et financiers, les établissements de monnaie électronique, les établissements de paiement étrangers ainsi que les organismes et services mentionnés à l’article L. 518-1 et les personnes exerçant des activités mentionnées à l’article L. 561-2 effectuant des opérations sur leurs propres fonds ou ceux de leurs clients avec des établissements bancaires et financiers français ou ayant une ou plusieurs filiales sur le territoire national sont soumis à l’obligation de transmission à l’administration fiscale française des informations concernant les ressortissants français, les résidents français ou les établissements détenus majoritairement par un ou plusieurs ressortissants français, propriétaires d’un compte dans l’établissement, comprenant :
« 1° Identité ;
« 2° Adresse ;
« 3° Numéro de compte ;
« 4° Montant des fonds reçus ;
« 5° Montant des fonds transmis ;
« 6° Solde du compte ;
« 7° Intérêts.
« II.- Est considéré comme le compte d'un ressortissant français tout compte détenu :
« 1° Par une ou plusieurs personnes de nationalité française ou résidant en France, par une entreprise opérant sur le marché national, par une fiducie ou tout autre association ou partenariat d'entreprises de statut juridique équivalent établi en France ;
« 2° Par une entité française, définie comme une entité étrangère pour laquelle tout ressortissant français comme défini à l'alinéa précédent :
« - détient directement ou indirectement, dans le cas d'une entreprise, au moins 10 % des droits de vote, en nombre d'actions ou en valeur ;
« - ou, dans le cas d'un partenariat, bénéficie d'au moins 10 % des intérêts ou dividendes versés ;
« - ou, dans le cas d'une fiducie, reçoit au moins 10 % des intérêts bénéficiaires.
« Il appartient aux établissements financiers de déterminer les bénéficiaires ultimes et réels des entités ainsi considérées. Ces dispositions s'appliquent de la même façon selon que le compte ouvert par les établissements étrangers aux clients tels que définis par les deuxième et troisième alinéas bénéficie de revenus générés par des activités domestiques ou des activités exercées à l'étranger.
« III.- En cas de manquement aux obligations d'information prévues aux I et II, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution procède au retrait de l’agrément de l'ensemble des filiales situées sur le territoire national de l’établissement bancaire et financier ayant refusé la transmission des informations dans les modalités prévues aux articles L. 532-6 à L. 532-8 du code monétaire et financier.
« IV.- Les I, II et III sont applicables à compter de l'entrée en vigueur de dispositions adoptées par l'Union européenne et poursuivant le même objectif. »
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Cet amendement a pour objet d’instaurer, pour les établissements bancaires étrangers qui ont des relations avec les banques françaises ou ont une filiale en France, une obligation de déclarer à l’administration fiscale l’identité des ressortissants français qui ont un compte dans leurs établissements à l’étranger.
L’amendement donne également une définition des ressortissants français soumis à cette obligation.
Le manquement à ces obligations entraînerait le retrait de l’agrément de l’établissement.
L’amendement précise que les intermédiaires sont également concernés par cette obligation d’information sur leurs clients.
Cette sorte de « FATCA français » entrerait en vigueur uniquement après la mise en place d’un système allant dans le même sens au niveau européen.
L’idée est excellente, tant et si bien qu’elle est d’ores et déjà reprise au niveau européen.
Aussi, en instaurant notre propre dispositif, nous courrions le risque d’entrer en contradiction avec le prochain dispositif européen. Je pense donc qu’il serait sage d’attendre la mise au point définitive de ce dispositif européen et sollicite le retrait de l’amendement.
Madame la sénatrice, je suis du même avis que le rapporteur.
Nous avons en effet engagé, au sein de l’Union européenne, un combat pour que, dans le cadre de la révision de la directive sur la fiscalité de l’épargne et de la quatrième directive anti-blanchiment, nous puissions mettre en place un dispositif européen de lutte contre la fraude fiscale. Ce dispositif repose sur trois idées.
La première consiste en la mise en place de conventions d’échange automatique d’informations entre l’ensemble des pays de l’Union européenne. Ces conventions ont vocation à être harmonisées et prises simultanément par les pays, les liant entre eux, à travers des textes identiques les engageant conjointement dans les mêmes termes.
La deuxième idée est celle de l’élaboration d’une liste européenne des États et territoires non coopératifs.
Dès lors que nous aurons instauré ces conventions entre les pays européens et que nous aurons ensemble arrêté cette liste, nous serons plus légitimes pour négocier – c’est la troisième idée – des conventions d’échange automatique d’informations avec les pays tiers : l’Union européenne, représentée par la Commission, sera en position de force pour développer un dispositif de type FATCA.
Nous sommes à l’avant-garde de ce combat au sein de l’Union européenne. Si nous venions à prendre seuls une telle initiative, nos partenaires européens ne le comprendraient pas et nous perdrions de notre force dans la négociation.
Une telle initiative n’est pertinente que dans la mesure où elle se déploie au sein de l’Union européenne. Nous nous battons pour qu’elle prenne une telle ampleur.
Lorsque j’invoque cet argument, on me répond souvent, au Sénat comme à l’Assemblée nationale, que nous devons, en vertu de notre position d’avant-garde sur ce sujet, prendre des dispositions avant que l’Europe ne les adopte. Certes ! Cependant, ce n’est pas ainsi que nos partenaires liront une telle décision.
Il ne s’agit pas de nous regarder ici avec satisfaction parce que nous défendons des positions d’avant-garde, mais de faire en sorte que ces positions aboutissent. Il vaut mieux rechercher l’efficacité d’une démarche plutôt que se laisser aller au plaisir d’une posture.
Je comprends le sens de votre amendement, madame la sénatrice, car il rejoint les préoccupations gouvernementales. Néanmoins, pour les raisons que je viens d’évoquer, j’invite le Sénat à ne pas le retenir.
L'amendement n'est pas adopté.
Le II de l’article L. 152-4 du code monétaire et financier est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les agents des douanes procèdent à la retenue, pour les besoins de l’enquête, des documents se rapportant aux sommes consignées, ou en prennent copie. » –
Adopté.
(Non modifié)
Au second alinéa de l’article L. 152-6 du code monétaire et financier, les mots : « de l’administration des impôts » sont remplacés par les mots : « des administrations fiscales et douanières ». –
Adopté.
L'amendement n° 49, présenté par M. Bocquet, Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article 54 octies du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. 54 ... – Chaque année, les entreprises sont tenues de produire à l’administration un document récapitulant pour chacun des États étrangers et chacun des territoires situés hors de France où elles sont domiciliées ou établies, le nom des implantations et la nature des activités exercées, et pour chaque implantation, le chiffre d’affaires, les effectifs employés exprimés en équivalent temps plein, les bénéfices ou pertes avant impôt, le montant de l’impôt payé ainsi que le montant et l’origine des subventions publiques reçues. »
II. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de publication par les entreprises concernées des informations mentionnées au I, lorsqu’elles ne relèvent pas de l’obligation prévue à l’article 4 bis de la loi n° … du … de séparation et de régulation des activités bancaires.
L'amendement n° 50, présenté par M. Bocquet, Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 54 octies du code général des impôts, il est inséré un articleainsi rédigé :
« Art. 54 ... – Les entreprises titulaires de marchés publics sont tenues de déclarer à l’administration fiscale leurs sous-traitants, dans un délai d’un mois suivant leur acceptation ou de trois jours suivant le début de l’exécution de la prestation correspondante. Cette déclaration mentionne la nature des prestations sous-traitées, le nom, la raison ou la dénomination sociale et l’adresse du sous-traitant, ainsi que les conditions de paiement prévues par le contrat de sous-traitance et, le cas échéant, les modalités de variation des prix.
« Lorsque l’entreprise titulaire ou l’entreprise sous-traitante ne sont tenues au dépôt d’aucune déclaration de résultat en France, ces éléments sont également communiqués à l’administration des douanes. »
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour défendre ces deux amendements.
Avec ces amendements, nous sommes dans le domaine de l’anticipation législative.
Je ne citerai pas ici tous les éléments contenus dans le rapport de la commission d’enquête de 2012. Il a fait largement place au débat sur les prix de transfert, les échanges intragroupes et le shadow banking qui participe des processus de fixation des résultats et des bénéfices - ou des pertes - des entreprises. Néanmoins, je souhaite attirer l’attention sur quelques points.
Nos amendements s’insèrent pleinement dans la perspective ouverte par l’adoption de l’article 7 dans la rédaction proposée par la commission mixte paritaire sur le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires, dont nous avons examiné les conclusions ce matin.
Nous savons pertinemment qu’il n’y a pas urgence. Dans la perspective de l’adoption de la loi bancaire, les dispositions visées ici ne trouveront d’application qu’après un large accord européen sur le sujet.
Plusieurs éléments justifient notre position.
D’abord, nous affirmons notre croyance en la prévention de la fraude fiscale plutôt qu’en sa répression – il en va dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres. Cela signifie pour nous que, lorsque la prévention est large, la répression peut être sévère sans être injuste.
La transparence sur les schémas d’optimisation fiscale, l’information des institutions représentatives du personnel sur la manière dont l’entreprise fait face à ses obligations fiscales, la clarté sur l’allocation et l’utilisation des aides publiques de toute nature sont autant de moyens de contribuer puissamment à la prévention de la fraude.
À la vérité, cette transparence – si difficile soit-elle à admettre pour certains, qui estiment que les affaires d’argent sont trop sérieuses pour ne pas être l’apanage des financiers – est le meilleur garde-fou contre les assertions les plus douteuses et les affirmations les plus fausses, les rumeurs, les racontars, les prétendues informations privilégiées, tout ce qui, nourri du conditionnel, du secret, n’est pas exposé tranquillement, sans fard ni volonté démonstrative excessive, quant à la situation réelle de l’entreprise.
Il nous semble que plus nous irons vers la transparence, moins nous aurons à combattre les appréciations hâtives et les affirmations mensongères.
C’est sous le bénéfice de ces observations que nous vous invitons, pour le moins, à être attentifs à ces amendements, pour le plus, à les adopter.
Ces deux amendements sont très intéressants.
L’amendement n° 49 étend à toutes les entreprises le reporting pays par pays prévu pour les établissements financiers par le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires. Il est donc déjà satisfait pour ce qui concerne les banques.
Pour ce qui concerne les grandes entreprises, le Conseil européen a donné son accord, le 23 mai dernier, quant à la mise en place d’un mécanisme de ce type au niveau européen. Il serait donc peut-être préférable d’attendre l’aboutissement des négociations en cours.
S’agissant de l’amendement n° 50, il traduit une préoccupation légitime : lutter contre la sous-traitance abusive et la corruption dans le cadre des marchés publics.
Cependant, nous pensons qu’un mécanisme de déclaration des sous-traitants aurait sans doute plus sa place dans le cadre de la procédure d’attribution des marchés publics. Il vaudrait donc mieux l’insérer dans le code des marchés publics, …
… plutôt que dans le code général des impôts.
Il paraît ainsi souhaitable de retirer les deux amendements à ce stade, les dispositifs pouvant être encore affinés. Bien entendu, nous rediscuterons du sujet lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2014.
Nous souscrivons évidemment à l’objectif des auteurs de l’amendement n° 49 ; nous nous battons d’ailleurs au sein de l’Union européenne pour l’atteindre.
Mais, et cela a été souligné lors de l’examen du projet de loi de régulation et de séparation des activités bancaires, mettre en place un tel dispositif seulement dans notre pays causerait un grand préjudice à nos entreprises au sein du marché intérieur sans pour autant faire progresser la lutte contre la fraude fiscale au niveau européen ; ceux de nos voisins qui seraient prêts à s’engager avec nous sur cette voie n’y auraient plus aucun intérêt si nous étions les seuls à l’emprunter…
Pour être vraiment persuasifs, nous devons maintenir la pression au sein de l’Union européenne, afin de parvenir à avancer de concert à vingt-sept, dans le sens d’un bon fonctionnement du marché intérieur et de la lutte contre la fraude fiscale au niveau communautaire. Mais, encore une fois, être les seuls à nous exposer aurait pour effet de dissuader les autres de nous suivre, quand bien même ils y auraient été disposés.
Je ne suis donc pas favorable à l’adoption d’un tel amendement à ce stade. En revanche, je souhaite évidemment que nous continuions à mener le combat en Europe. D’ailleurs, nous sommes convaincus qu’il a de fortes chances d’aboutir : ce qui s’est passé lors du Conseil européen du mois de mai – M. le rapporteur pour avis y a fait référence – en est la démonstration.
L’amendement n° 50, qui concerne la relation entre les sous-traitants et leurs donneurs d’ordres, me pose un problème d’une autre nature. La législation actuelle traite déjà partiellement du sujet, dont la dimension prioritairement fiscale ne m’apparaît au demeurant pas évidente. En fait, cet amendement, pour pertinent qu’il soit, n’a, je le crois, pas sa place dans un texte essentiellement consacré à la lutte contre la fraude fiscale. J’en suggère donc le retrait.
Non, je vais les retirer, monsieur le président.
J’ai bien entendu les arguments de la commission des finances et du Gouvernement. Mon collègue Éric Bocquet, qui est professeur d’anglais, dirait : Wait and see ! §Nous allons attendre, mais en restant vigilants quant aux suites qui seront apportées.
Si je retire mes deux amendements, j’en garde les objectifs en tête, notamment dans la perspective de l’examen du prochain projet de loi de finances.
Les amendements n° 49 et 50 sont retirés.
L'amendement n° 128, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 2323-55 du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 2323 -55-... – Au moins une fois par an, dans les entreprises d’au moins trois cents salariés, l’employeur remet au comité d’entreprise un rapport d’ensemble sur la politique fiscale de l’entreprise.
« À cette occasion, l’employeur soumet un état faisant ressortir l’évolution des bénéfices réalisés en France, les niveaux d’impôts auxquels est soumise l’entreprise, la valeur des actifs immatériels de l’entreprise et l’évolution de la politique d’intéressement et de participation des salariés. »
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Les schémas d’optimisation fiscale sont susceptibles d’avoir des incidences graves sur la situation des salariés. Ils peuvent en effet constituer les préalables à des restructurations et à des délocalisations. De ce fait, il paraît légitime que les institutions représentatives du personnel, en clair les comités d’entreprise, puissent avoir un droit de regard sur la politique fiscale de l’entreprise ou du groupe auxquels ils appartiennent.
Cet amendement tend donc à prévoir que les comités d’entreprise des groupes de plus de 300 salariés soient informés annuellement et consultés sur la politique fiscale de la société.
Après avoir beaucoup débattu de cet amendement, la commission a estimé que la demande d’un rapport, ou même d’une simple information – c’est l’objet de l’amendement suivant –, sur la « politique fiscale de l’entreprise » ne se justifiait pas. Outre que cette notion n’est pas clairement fixée, la question ne relève pas, selon la majorité de membres de la commission, du débat entre direction et salariés d’une société.
Je partage l’avis de la commission.
Je vois bien la philosophie qui inspire cet amendement, mais le texte législatif que nous sommes en train d’élaborer aura d’autant plus de portée qu’il sera fondé sur des concepts précis. Or les termes employés dans l’amendement ont un contenu plus politique que juridique. La « politique fiscale » est une notion dont la définition est extraordinairement difficile et dont l’appréhension est incertaine, aléatoire.
Nous risquons d’introduire dans le projet de loi des dispositions imprécises de nature à apporter beaucoup de confusion dans le fonctionnement des entreprises, alors qu’elles ont précisément besoin de plus de stabilité. Je ne suis donc pas favorable à l’adoption de cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 51, présenté par M. Bocquet, Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 2° de l’article L. 2323-56 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 3° La politique fiscale de l’entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient. »
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Cet amendement s’inscrit dans la même perspective que l’amendement n° 128, mais il va un peu plus loin.
Les schémas d’optimisation fiscale sont susceptibles d’avoir des conséquences sur la situation des salariés des groupes ou entreprises concernés. L’intéressement et la participation des salariés sont réduits en même temps que les bénéfices réalisés en France, alors même que les montages d’optimisation peuvent constituer des préalables à des délocalisations d’implantations françaises.
De ce fait, il paraît légitime que les institutions représentatives du personnel puissent avoir un droit de regard sur la politique fiscale des entreprises, ce qui implique d’attribuer des prérogatives en la matière aux comités d’entreprise.
Les représentants du personnel pourraient, me semble-t-il, constituer des garde-fous contre la fraude et l’évasion fiscales, leur proximité avec la gestion quotidienne de l’entreprise leur permettant, le cas échéant, de mettre en évidence les comportements frauduleux ou abusifs.
La démocratie sociale est l’un des éléments clés de la lutte contre la fraude fiscale, au moins dans le champ de la prévention. C’est le sens de cet amendement.
Comme vous l’avez deviné, la commission émet le même avis que sur l’amendement précédent, pour les mêmes raisons.
L'amendement n'est pas adopté.
(Non modifié)
I. – Le 2 de l’article 238-0 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au a, après le mot : « permettant », sont insérés les mots : «, tant sur demande que par voie automatique, » ;
2° Le b est ainsi modifié :
a) Les mots : « ou la mise en œuvre » sont remplacés par les mots : «, ou la mise en œuvre par la voie de l’échange, sur demande ou automatique, » ;
b) La seconde occurrence du mot : « conclu » est remplacée par les mots : « pris l’engagement de conclure » ;
c) Après le mot : « échange », sont insérés les mots : «, tant sur demande que par voie automatique, ».
II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2016.
L'amendement n° 113 rectifié, présenté par MM. Collombat, Mézard, Alfonsi, Collin, Fortassin, Baylet, Chevènement et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer l’année :
par l’année :
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 39, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Après l’article 238-0 A du code général des impôts, il est inséré un article 238-0 … ainsi rédigé :
« Art. 238-0 … -1. Sont considérés comme pleinement coopératifs, les États et territoires pratiquant l’échange automatique d’informations, dans des conditions déterminées par décret des ministres chargés de l'économie et du budget.
« 2. Il est créé à compter du 1er septembre 2013 une liste des États et territoires pleinement coopératifs, ainsi que des autres États et territoires. Cette liste est fixée par un arrêté des ministres chargés de l'économie et du budget.
« 3. À compter du 1er janvier 2014, la liste mentionnée au 2. est mise à jour au 1er janvier de chaque année. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je mets aux voix l'article 11 nonies.
L'article 11 nonies est adopté.
L'amendement n° 90 rectifié, présenté par MM. Arthuis et Zocchetto, Mmes Férat, Goy-Chavent et Jouanno, MM. Détraigne, Deneux, Dubois, Guerriau, Jarlier, Lasserre, Namy, Tandonnet et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l’article 11 nonies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 57 du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... – Lorsqu’une personne morale passible de l’impôt sur les sociétés, qui exploite des établissements de vente établis en France, détient directement ou indirectement des actions, parts, droits financiers ou droits de vote dans une personne morale, dans un organisme, dans une fiducie ou dans une institution comparable, établi ou constitué hors de France recevant des redevances payées par un fournisseur domicilié en France ou par une entreprise liée établie ou constituée hors de France, calculées sur la base de fournitures livrées sur le territoire français, les bénéfices issus de ces redevances sont imposables à l’impôt sur les sociétés.
« Les impôts payés à l’étranger à ce titre viennent en déduction de l’imposition due en France. »
La parole est à M. Jean Arthuis.
Cet amendement vise à mettre un terme à des pratiques contestables.
Au nom de la défense des consommateurs, les centrales d’achat de la grande distribution mettent à rude épreuve leurs fournisseurs, causant des difficultés aux producteurs et, dans certaines circonstances, poussant même à la délocalisation des activités et de l’emploi.
La mondialisation permet évidemment des montages juridiques et fiscaux pour échapper non seulement à l’impôt, mais également à certaines législations nationales.
Je voudrais dénoncer la pratique, qui a pris corps au début des années deux mille, selon laquelle les centrales d’achat de la grande distribution française ont mis en place des officines en Suisse, au Luxembourg ou en Belgique pour facturer des prestations diverses, qui sont en fait des ristournes ou des marges arrières. Les taux de prélèvement ne cessent de progresser et mettent en difficulté leurs fournisseurs, qui sont des entreprises françaises, en portant atteinte à leurs marges – depuis 1985, les marges des entreprises françaises n’ont jamais été aussi faibles, et elles n’ont de cesse de baisser –, et ce au nom de la défense des consommateurs.
Je voudrais attirer votre attention sur la nécessité de réconcilier producteurs et consommateurs. Par cet amendement, je souhaite que l’on puisse rapatrier, relocaliser, ici, en France, les ristournes qui partent vers des horizons sans doute plus accueillants, juridiquement et fiscalement...
J’exprime le vœu qu’un tel message soit entendu. J’observe que les groupes en cause ont des pratiques diverses ; les pressions qu’exercent certains sur leurs fournisseurs s’apparentent à des abus de position dominante.
C’est sans doute par la voie fiscale que nous pouvons enrayer un tel phénomène. Tel est l’objet de cet amendement.
La commission des finances voit d’un très bon œil cet amendement.
M. Arthuis propose un dispositif anti-abus pour que les redevances versées par des fournisseurs établis en France à des groupes exploitant des établissements de vente sur le territoire français soient imposables à l’impôt sur les sociétés. Le souhait qu’il a exprimé, rapprocher producteurs et consommateurs, appelle effectivement des modifications dans toute la chaîne de facturation, ainsi que dans les transferts opérés.
Nous avons le sentiment qu’un tel mécanisme permet d’appréhender de manière satisfaisante les éventuels flux passant par des filiales établies à l’étranger. Nous jugeons donc très positivement cette proposition. Le phénomène, qui concerne la grande distribution, est assez large. Il peut le cas échéant se traduire par de l’évasion fiscale ; nous sommes en plein dans notre sujet.
J’aimerais cependant que le Gouvernement nous indique si le dispositif envisagé est vraiment opérationnel, la commission des finances ayant émis un avis favorable sur cet amendement.
Tout d’abord, sur le plan fiscal, la question est d’une inextricable complexité.
Les structures que vous avez pointées comme favorisant les relations inégales au profit de la grande distribution et permettant à celle-ci d’accroître ses marges par des dispositifs d’optimisation fiscale sur des fournisseurs qu’elle maîtrise et maintient sous son joug sont localisées à l’étranger. Il est donc très difficile d’obtenir un retour fiscal en France. Nous ne pouvons pas fiscaliser les structures situées à l’étranger, même si des pistes en ce sens existent ici ou là.
En tout état de cause, un minimum d’expertise et d’analyse s’impose : assurons-nous que ce que nous inscrirons dans le droit français pourra s’appliquer concrètement.
Encore une fois, monsieur le sénateur, je suis totalement en accord avec votre analyse. D’ailleurs, sans votre concours, sans votre réflexion, le sujet n’aurait peut-être pas été soulevé aussi vite. Permettez-moi donc de vous en remercier. Simplement, je pense que, si votre intuition est juste, de telles mesures ne sont pas encore sur le point d’aboutir.
Par ailleurs, le sujet n’a pas seulement une dimension fiscale.
C’est vrai, mais cela ne concerne pas seulement le fisc.
Je prendrai un exemple très concret, dont vous vous souvenez certainement, puisqu’il s’agit d’un dispositif législatif que vous aviez voté tandis que je m’y étais opposé, pour des raisons que je vais expliquer.
Lors de l’adoption de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, un certain nombre de parlementaires se sont élevés pour souligner que le dispositif conduirait à donner à la grande distribution une position dominante dans sa relation avec ses fournisseurs, au risque, à terme, de placer ces derniers dans une situation de dépendance excessive. D’ailleurs, c’est ce qui s’est produit. Comme l’a montré la crise du lait, la relation entre fournisseurs, producteurs et distributeurs est d’une très grande complexité et crée des situations de domination de certains acteurs sur les autres, ce qui n’est pas le moindre aspect du sujet.
Cela étant, la complexité du problème, qui a également, nous le voyons, des dimensions économiques et fiscales, ne doit pas nous conduire à l’éluder.
Par conséquent, monsieur le sénateur, je vous propose de nous revoir avec M. le rapporteur général de la commission des finances pour envisager la mise en place, puisque la question mérite une analyse plus approfondie, d’une mission parlementaire au terme de laquelle nous pourrions légiférer avec une garantie d’efficacité.
Je remercie M. le rapporteur général de son avis et M. le ministre de la compréhension dont il vient de faire preuve à l’endroit de cet amendement.
À mon sens, il faut envoyer un signal à la grande distribution, qui s’autoproclame un peu trop facilement défenseur des consommateurs et met en difficulté l’ensemble des producteurs, usant de procédés qui relèvent de l’abus de position dominante. Ces pratiques sont couvertes par une sorte d’omerta ; je les dénonce depuis cinq ans au Sénat. Je salue donc l’attention que vous portez aux problèmes que nous vous soumettons, monsieur le ministre.
Il faut envoyer ce signal, et le Sénat ne compromettrait pas son image de sagesse en adoptant cet amendement.
Une commission mixte paritaire se réunira demain : peut-être pourrons-nous en parfaire le dispositif au plan juridique d’ici là. Mais, en votant cet amendement, le Sénat enverrait un premier signal solennel aux groupes concernés, pour les inviter à relocaliser ces activités et ces officines, qui font offense à ce qui nous semble être des relations loyales entre la distribution, les producteurs et les industriels.
Monsieur le sénateur, je suis entièrement d’accord avec vous sur la nécessité d’envoyer un signal, mais ce signal doit sonner le glas des mauvaises pratiques, et non se révéler une machine à effaroucher les moineaux !
Compte tenu de la puissance de la grande distribution, qui est ce qu’elle est, les dispositions que nous prendrons doivent nous permettre d’atteindre la cible à coup sûr. Ces groupes étant très puissants, si nous restons imprécis sur le plan juridique, et si nous nous limitons à une analyse insuffisante, nous aurons sonné l’alerte, mais ceux qui étaient visés se seront éparpillés gaiement ! Ce n’est pas ce que nous voulons.
Parce que je partage votre préoccupation, parce que j’ai conscience de la puissance de ces groupes, je vous propose, si vous en êtes d’accord, d’approfondir la réflexion, en fixant comme limite calendaire le projet de loi de finances pour 2014. Nous pourrons alors y introduire des dispositifs avec la garantie d’atteindre notre objectif !
Oui, monsieur le président.
Je suis conscient que nous n’allons pas tout régler ce soir, mais je pense qu’il faut émettre un signal solennel. Si j’en crois certaines informations, l’un des groupes en cause serait en train de relocaliser une partie de ses activités ; cela signifie que les choses bougent !
Nous ne réglerons pas tout par la loi, soyons-en conscients, car des considérations déontologiques et éthiques interviennent aussi. Si nous votions cet amendement ce soir, nous enverrions un message solennel à ceux qui ont pu se laisser aller à de telles pratiques.
Naturellement, monsieur le ministre, nous aviserons d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire, et nous veillerons à parfaire le dispositif d’ici à l’examen du projet de loi de finances pour 2014. Mais il s’agit de délivrer un message solennel pour faire bouger les lignes, changer les comportements et réconcilier les consommateurs avec les producteurs !
L’amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11 nonies.
I. – Le premier alinéa de l’article L. 10-0 A du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Les mots : « demander communication auprès de tiers des relevés de compte du contribuable, afin d’examiner l’ensemble de ses relevés de compte » sont remplacés par les mots : « examiner l’ensemble des relevés de compte du contribuable », et les mots : « à l’article 1649 AA » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa de l’article 1649 AA » ;
2° Il est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces relevés de compte sont transmis à l’administration par des tiers, spontanément ou à sa demande. »
II. – Les dispositions du I s’appliquent aux demandes adressées par l’administration à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi. –
Adopté.
I. – L’article L. 188 A du livre des procédures fiscales est ainsi rédigé :
« Art. L. 188 A. – Lorsque l’administration a, dans le délai initial de reprise, demandé à l’autorité compétente d’un autre État ou territoire des renseignements concernant un contribuable, elle peut réparer les omissions ou insuffisances d’imposition afférentes à cette demande, même si le délai initial de reprise est écoulé, jusqu’à la fin de l’année qui suit celle de la réception de la réponse et au plus tard jusqu’au 31 décembre de la deuxième année suivant celle au titre de laquelle le délai initial de reprise est écoulé.
« Le présent article s’applique dans la mesure où le contribuable a été informé de l’existence de la demande de renseignements dans le délai de 60 jours suivant son envoi, ainsi que de l’intervention de la réponse de l’autorité compétente de l’autre État ou territoire dans le délai de 60 jours suivant sa réception par l’administration. »
II. – Le I s’applique aux demandes formulées dans les délais de reprise venant à expiration à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi. –
Adopté.
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 1728 est complété par un 5. ainsi rédigé :
« 5. Pour les obligations déclaratives prévues à l’article 885 W, la majoration de 10 % prévue au a du 1. est portée à 40 % lorsque le dépôt fait suite à la révélation d’avoirs à l’étranger qui n’ont pas fait l’objet des obligations déclaratives prévues aux articles 1649 A, 1649 AA et 1649 AB. » ;
2° Au 2 de l’article 1731 bis, après les mots : « aux b et c du 1 », sont insérés les mots : « et au 5 » ;
3° Au troisième alinéa de l’article 1840 C, après les mots : « aux a et b du 1 », sont insérés les mots : « et au 5 ».
II. – Le 1° du I s’applique à compter de l’impôt de solidarité sur la fortune dû au titre de l’année 2014. –
Adopté.
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 1763 est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – Entraîne l’application d’une amende de 1 500 €, ou 10 % des droits rappelés si ce dernier montant est plus élevé, pour chaque manquement constaté par personne ou groupements de personnes au titre d’un exercice, le défaut de réponse ou la réponse partielle à une mise en demeure de produire les listes des personnes ou groupements de personnes de droit ou de fait prévues en application des dispositions des articles 53 A, 172, 172 bis et 223. La majoration de 10 % est calculée sur le montant des droits rappelés, à raison des éléments retenus pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt relatifs à ces personnes ou groupements de personnes. » ;
2° Après l’article 1763, il est inséré un article 1763 A ainsi rédigé :
« Art. 1763 A. – Entraîne l’application d’une amende de 1 500 €, pour chaque manquement constaté par entité au titre d’un exercice, ou de la majoration prévue au b du 1 de l’article 1728 ou à l’article 1729, si l’application de cette majoration aboutit à un montant supérieur, le défaut de réponse ou la réponse partielle à une mise en demeure de produire la déclaration prévue au IV de l’article 209 B. »
II. – Le I s’applique aux déclarations dont l’obligation de dépôt arrive à échéance à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi. –
Adopté.
Mes chers collègues, je vous rappelle que le titre III a été examiné par priorité. Nous passons donc à l’examen des articles du titre IV.
TITRE IV
DISPOSITIONS FINALES
(Non modifié)
Le titre Ier est applicable sur l’ensemble du territoire de la République, à l’exception de l’article 5, qui ne s’applique pas en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.
L’amendement n° 155, présenté par M. Anziani, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Le titre Ier est applicable en Polynésie française, à Saint-Barthélemy, à Saint-Pierre-et-Miquelon, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie, à l’exception des articles 3, 3 bis A, 3 bis B, 3 bis C, 3 bis D, 3 bis E, 3 bis F, 3 bis, 3 ter, 3 quinquies et de l’article 5 qui ne s’appliquent pas en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.
II. - Les articles 10 ter, 10 quater, 11 bis B, ainsi que le I de l’article 11 bis du titre II sont applicables en Polynésie française, à Saint-Barthélemy, à Saint-Pierre-et-Miquelon, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie.
Pour l’application de l’article 11 bis B en Polynésie française, à Saint-Barthélemy, à Saint-Pierre-et-Miquelon, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie, au quatrième alinéa, les mots : « ou le document prévu à l’article 247 des dispositions d’application du code des douanes communautaire » sont supprimés.
Pour l’application de l’article 11 bis B à Mayotte, et jusqu’au 31 décembre 2013, au quatrième alinéa, les mots : « ou le document prévu à l’article 247 des dispositions d’application du code des douanes communautaire » sont supprimés.
La parole est à M. le rapporteur.
Tous les articles du code général des impôts ou du code des douanes ne sont pas applicables sur l’ensemble du territoire de la République française. Il convient donc d’apporter quelques précisions juridiques ; c’est l’objet de cet amendement. Je vais moi-même essayer d’être le plus pédagogique possible.
L’amendement tend à rendre applicables les dispositions du projet de loi qui modifient les termes du code des douanes relevant de la compétence de l’État dans les collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie. Ces dispositions sont également adaptées pour leur applicabilité dans ces collectivités et à Mayotte, afin de tenir compte de leur statut à l’égard de l’Union européenne et de l’applicabilité sur leur territoire du droit européen dérivé.
L’amendement vise également à indiquer que les modifications apportées à l’article 1741 du code général des impôts par le I de l’article 3 du présent projet de loi ne concernent pas les collectivités d’outre-mer dans lesquelles ce code ne trouve pas à s’appliquer.
Le Gouvernement émet un avis très favorable sur cet amendement de M. le rapporteur.
J’en profite pour remercier très sincèrement et très chaleureusement M. Alain Anziani et Mme la sénatrice Virginie Klès du travail de très grande qualité qu’ils ont réalisé.
Lors de la discussion des amendements, j’ai pu constater l’investissement de M. le rapporteur sur le texte et l’importance de sa contribution à l’amélioration des dispositions adoptées. Même si nous n’avons pas nécessairement été en accord sur tous les sujets, les questions qu’il a soulevées devant votre Haute Assemblée ont permis d’élever notre débat et ont suscité chez moi des réflexions qui se poursuivront utilement. Qu’il en soit grandement remercié !
L’amendement est adopté.
Les dispositions du titre III de la présente loi entreront en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er février 2014 –
Adopté.
Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.
Au terme de notre débat, ceux qui faisaient de la création du procureur de la République financier l’élément essentiel du projet de loi considéreront peut-être le texte issu de nos travaux comme une coquille vide.
Pour ma part, j’estime au contraire que la moisson a été fructueuse. Le Sénat a affiné le travail effectué par l’Assemblée nationale, adoptant de nombreuses mesures de nature à permettre d’améliorer la lutte contre la grande délinquance économique et financière et la fraude fiscale.
Au demeurant, nous avons engagé une modernisation considérable des dispositions relatives aux procédures fiscales et douanières.
Un débat a opposé la commission des lois à un certain nombre de nos collègues pour savoir quel était le système de lutte contre la grande délinquance financière et la fraude fiscale le plus efficace. Le Sénat a, dans sa grande majorité, estimé que la Commission des infractions fiscales modernisée était l’un des instruments les plus adéquats, sous réserve de renforcer ses liens avec l’autorité judiciaire.
Nous ne souhaitions pas que les associations puissent se livrer à n’importe quelle mise en cause, de n’importe qui, à n’importe quel moment… Nous avons obtenu satisfaction à cet égard.
Et nous avons substitué au procureur de la République financier un renforcement des JIRS et un dispositif, inspiré de ce qui existe en matière de terrorisme, attribuant au parquet de Paris la compétence pour traiter quelques affaires très complexes.
Ainsi, compte tenu des votes émis par notre Haute Assemblée, le texte nous paraît équilibré. Le groupe UMP votera en sa faveur.
Les membres du groupe de l’UDI-UC se réjouissent de la qualité du travail accompli. Je voudrais d’ailleurs saluer les présidents et les rapporteurs de la commission des lois et de la commission des finances.
Nous avons pu développer un véritable dialogue. Le Gouvernement s’est montré attentif et compréhensif. Je pense que nous avons fait progresser les moyens dont nous disposons pour lutter contre toutes les formes de fraude tendant à se soustraire au poids des charges publiques.
Je me permets cependant d’insister sur un point. Nous n’atteindrons la pleine efficacité que lorsque les partenaires européens auront pu faire converger leurs législations et mener en commun des actions à l’égard du monde entier. En effet, les flux en question sont véhiculés par la numérisation, par Internet, ce qui facilite l’accès aux paradis fiscaux.
En outre, le poids des prélèvements obligatoires pousse également à la fraude. Nous devons être conscients de l’impératif de réduction de la charge publique pour diminuer le poids des prélèvements obligatoires, qu’il s’agisse des charges sociales, des impôts ou des taxes.
Au demeurant, toutes les optimisations que nous dénonçons sont la conséquence des législations spécifiques que nous votons. Nous-mêmes, parlementaires, participons à la complexification et à l’instabilité de la loi fiscale. Cette situation peut faire le bonheur, peut-être même la rente, des avocats conseils en fiscalité, car tout contribuable peut considérer intelligemment qu’il n’a pas vocation à payer plus d’impôt que ne le prévoit la loi. Toutes ces exonérations, déductions, abattements, réductions, crédits d’impôt et niches fiscales ouvrent donc autant de boulevards à l’optimisation.
En tant que législateurs, nous devons, à notre manière, lors de l’examen des lois de finances comme des lois de financement de la sécurité sociale, veiller à donner plus de stabilité, plus de lisibilité et plus de clarté à nos textes.
Le groupe UDI-UC votera ce projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière.
M. Vincent Capo-Canellas applaudit.
Nous nous sommes abstenus de voter la suppression de ce qu’il est convenu d’appeler le « verrou de Bercy », estimant que le moyen le plus efficace de lutter contre la fraude fiscale réside dans le développement d’une réelle coordination entre autorité judiciaire et administration fiscale. Pour la même raison, nous n’avons pas voté la création du procureur de la République financier. Les deux vont de pair ; il n’y avait pas de raison de renforcer l’autorité judiciaire au détriment de l’administration fiscale.
En dépit de notre non-alignement sur ces deux sujets, nous, les écologistes, sommes profondément convaincus qu’il faut lutter contre la fraude fiscale et rétablir l’égalité devant l’impôt.
Toutefois, trois éléments nous interpellent.
D’abord, nous craignons qu’il ne s’agisse d’une loi d’affichage, d’un texte ébauché sous le coup de l’émotion pour dire à nos concitoyens : « L’affaire Cahuzac ? Plus jamais ! La fraude fiscale ? Plus jamais ! Faites-nous confiance. Vous verrez que nous lutterons avec acharnement contre ce fléau ! » Cet aspect du problème nous fait réfléchir. De notre point de vue, face à la fraude, il faudrait adopter de véritables mesures sur le modèle du FATCA, avec la collaboration des États membres de l’Union européenne.
Ensuite, nous avons ressenti tout au long du débat, et c’est de nature à conforter l’idée d’une loi d’affichage, l’excès de répression présent tant dans le texte que dans les amendements proposés. Si nous sommes très attachés à la traque de la grande fraude fiscale, nous restons tout aussi vigilants quant à la sauvegarde des libertés individuelles, dont la violation ne serait d’aucune utilité face aux pratiques que nous voulons endiguer. La clé du succès contre la fraude, c’est la persuasion, et non la répression à tous vents !
Enfin, autre source d’inquiétude, la loi risque de plus frapper les petits fraudeurs que les gros. Tandis que les premiers sont aisément repérables, les seconds ne sont parfois qu’un code dans une banque ; bien souvent, ce ne sont pas des personnes physiques. En ciblant les petits fraudeurs, nous renforcerons l’idée, probablement fausse – du moins je l’espère ! –, d’une loi d’affichage.
En tout cas, nous faisons confiance au Gouvernement, et nous voterons ce projet de loi.
Nous vous proposons cependant de présenter un rapport dans trois ans pour examiner si toutes les mesures adoptées dans ce projet de loi teinté d’une nuance fortement répressive ont bien abouti aux résultats escomptés. Nous saluons d’ores et déjà les avancées positives du texte.
Je commencerai par un constat : le présent projet de loi, qui fixe un certain nombre d’axes et d’orientations, a été largement amendé au cours d’une discussion riche, argumentée et, parfois, un peu tendue sur quelques points essentiels. Mais, après tout, c’est ce qui fait le charme du débat…
Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, les échanges sur l’opportunité de créer un parquet financier ont montré que nous étions encore bien loin de changements profonds de comportements et de méthodes en matière de lutte contre la fraude fiscale.
Nous avons largement fait référence à la commission d’enquête présidée par François Pillet et rapportée par Éric Bocquet. Il faut être très attentifs à ses travaux ; nous regrettons – cela a été souligné à plusieurs reprises – que l’on n’ait pas attendu ses conclusions pour examiner le présent projet de loi. Il aurait fallu pouvoir en débattre sereinement dans l’hémicycle. Mais c’est ainsi…
En tout cas, je pense que nous avons ouvert des chantiers. Il reste encore beaucoup de travail à mener ; M. le ministre du budget l’a rappelé. Nous ne pourrons pas, me semble-t-il, faire l’économie d’une large discussion sur la lutte contre la fraude fiscale lors de l’examen de la loi de finances pour 2014. Certes, cela s’inscrira dans le cadre du débat sur la politique dite de « maîtrise des dépenses publiques ».
Pour ma part, je considère que les avancées, certes encore un peu timides, n’en sont pas moins réelles. Avec les membres de mon groupe, nous sommes convaincus qu’elles vont dans le sens d’évolutions nécessaires de notre appareil juridique. Nous voterons donc en faveur du texte.
À l’issue de ce débat, je ressens un goût d’inachevé : encore un texte tronqué par rapport à ce qui était présenté initialement !
Certes, les échanges que nous avons eus et les enrichissements que nous avons apportés grâce aux amendements ont permis des avancées importantes. Et nous avons d’énormes motifs de satisfaction par rapport à la place que la France veut occuper en Europe en matière de lutte contre la fraude fiscale.
Mais il y a ce goût d’inachevé... Le projet de loi avait une architecture. Il était doté d’un outil fort : le procureur de la République financier. Au groupe socialiste, nous déplorons la suppression de cette pièce maîtresse du dispositif. C’était l’un des signes du volontarisme dont le Gouvernement fait preuve dans cet ambitieux projet de loi de lutte contre la fraude fiscale. Nos collègues députés rétabliront, n’en doutons pas, l’instrument que le Sénat a malheureusement supprimé.
En attendant, malgré ce goût d’inachevé, malgré ce sentiment mitigé, satisfaction d’un côté, mais déception de l’autre, le groupe socialiste votera en faveur du texte.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.
Le projet de loi est adopté.
Je constate que le projet de loi a été adopté à l’unanimité des présents.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au procureur de la République financier (projet n° 691, texte de la commission n° 741, rapport n° 738).
Je rappelle que la discussion générale commune a été close.
Nous passons à l’examen des articles.
L'amendement n° 3, présenté par M. J.P. Michel, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 38 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. … - Le procureur de la République financier est nommé par décret du Président de la République après avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature, le Garde des Sceaux présentant trois noms. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
(Non modifié)
L’article 38-2 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article est applicable au procureur de la République financier près le tribunal de grande instance de Paris dans les mêmes conditions qu’au procureur de la République près le même tribunal. »
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 1 rectifié est présenté par MM. Hyest, Pillet et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 4 rectifié bis est présenté par MM. Mercier, Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
L'amendement n° 5 rectifié est présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Collombat, Collin, Fortassin, Baylet et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié.
Le débat est un peu surréaliste : l’article que nous examinons étend certaines dispositions du statut de la magistrature au procureur de la République financier, que nous avons supprimé !
De surcroît, le Gouvernement lui-même voulait supprimer l’article 2, pour des raisons qu’il a clairement expliquées.
Honnêtement, je ne comprendrais pas très bien que le Sénat adopte un projet de loi organique n’ayant plus d’objet. Je suis évidemment désolé pour Mme Klès, qui risque d’être quelque peu frustrée… C’est en effet très ennuyeux.
Mais, mes chers collègues, je vous invite, au nom de la logique, à rejeter l’article 1er, qui ne servirait de toute manière à rien si d’aventure il était adopté.
La parole est à M. Jean Arthuis, pour présenter l'amendement n° 4 rectifié bis.
Comme vient de le rappeler Jean-Jacques Hyest, le débat a eu lieu cet après-midi. Cet amendement est défendu.
L’amendement n° 5 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Ces amendements tendent à supprimer un article qui prévoyait de limiter à sept ans la durée d’exercice des fonctions de feu le procureur financier. Ils sont satisfaits dans l’esprit, feu le procureur financier n’ayant pas survécu à son passage au Sénat ; il leur manque d’être satisfaits dans la lettre !
La logique féminine est parfois cohérente avec la logique des textes. §J’émets donc, au nom de la commission, un avis favorable sur ces amendements identiques de suppression de l’article 1er.
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. Vous connaissez la position du Gouvernement sur le parquet financier. Ce n’est pas parce que le Sénat ne nous a pas suivis que nous avons changé d’avis sur l’opportunité de cette structure.
M. Jean-Jacques Hyest s’exclame.
Monsieur Hyest, je comprends votre logique ; je vous demande de comprendre la mienne. C’est une bonne manière de se respecter et d’être dans la tolérance dans cette Haute Assemblée, qui a fait si souvent montre de sagesse !
Nous souhaitons le parquet financier. Dès lors, les amendements que vous proposez pour supprimer un article dont vous nous dites qu’il n’a plus lieu d’être puisque le parquet a été supprimé n’auraient pas été recevables par nous si le parquet avait été maintenu. Voilà ma réponse.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 1 rectifié et 4 rectifié bis.
Les amendements sont adoptés.
(Non modifié)
Le premier alinéa de l’article 28-3 de la même ordonnance est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il en va de même des fonctions de juge d’instruction exercées dans les juridictions mentionnées aux articles 704 et 705 du code de procédure pénale. »
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 2 rectifié est présenté par MM. Hyest, Pillet et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 6 rectifié est présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Collombat, Collin, Fortassin, Baylet et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 7 est présenté par le Gouvernement.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour présenter l'amendement n° 2 rectifié.
Il s’agit d’un amendement de conséquence. Cette fois, je suis d’accord avec le Gouvernement.
L’amendement n° 6 rectifié n’est pas soutenu.
L'amendement n° 7, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le ministre délégué.
Le Gouvernement avait déposé un amendement visant à supprimer l’article 2. Les motifs qui avaient justifié cette demande de suppression différaient de ceux qui sont exposés dans l’amendement présenté par M. Hyest.
La situation a évolué, puisque le parquet financier a été supprimé. Mais, s’il ne l’avait pas été, j’aurais sollicité le retrait de l’amendement n° 2 rectifié.
Bien que les amendements n° 2 rectifié et 7 aient le même objet, supprimer l’article 2 du projet de loi organique, la commission avait à l’origine émis un avis défavorable sur le premier et un avis favorable sur le second. Vous vous demandez sans doute par quel tour de passe-passe c’était possible…
La commission étant pour la création du parquet financier, elle ne pouvait pas soutenir un amendement dont les motivations étaient clairement fondées sur l’opposition à cette nouvelle structure. Malheureusement, vous savez ce qu’il est advenu de « feu » le procureur financier…
J’insiste toutefois sur l’amendement n° 7. Dans l’hypothèse où – sait-on jamais ? – feu le procureur financier, tel le phénix, renaîtrait de ses cendres au détour d’une commission mixte paritaire ou d’une nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, il faudrait alors se souvenir que l’article 15 du projet de loi ordinaire, certes supprimé au cours de la discussion, prévoyait des conditions de nomination, de désignation et d’habilitation des magistrats du siège du tribunal de grande instance de Paris différentes de celles qui figurent à l’article 2 du projet de loi organique.
La commission était donc, en tout état de cause, favorable à la suppression de cet article. Je vous invite à voter en ce sens, que ce soit au travers de l’amendement n° 2 rectifié ou de l’amendement n° 7.
Mes chers collègues, si les amendements identiques n° 2 rectifié et 7 visant à la suppression de l’article 2 étaient adoptés, il n’y aurait plus lieu de voter sur l’ensemble du projet de loi organique relatif au procureur de la République financier, dans la mesure où les deux articles qui le composent auraient été supprimés.
Or, en application de l’article 59 du règlement, le scrutin public est de droit sur l’ensemble du projet de loi organique relatif au procureur de la République financier. En conséquence, ces amendements de suppression vont être mis aux voix par scrutin public.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n° 2 rectifié et 7.
Il va être procédé au scrutin public dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 320 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l’article 2 est supprimé.
Les deux articles du projet de loi organique relatif au procureur de la République financier ayant été successivement supprimés par le Sénat, un vote sur l’ensemble n’est pas nécessaire puisqu’il n’y a plus de texte.
Le projet de loi organique n’est pas adopté.
L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État (projet n° 744, texte de la commission n° 761, rapport n° 760).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée.
Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi que je vous présente au nom du Gouvernement a pour objet de mettre l’article L. 224-8 du code de l’action sociale et des familles en conformité avec la Constitution.
Cet article prévoit les modalités de recours contre l’admission d’un enfant en qualité de pupille de l’État. Les dispositions visées ont été inscrites dans la loi en 1984.
Pourquoi un tel projet de loi ? Suite à un litige dans lequel étaient impliqués des grands-parents qui n’avaient pas pu exercer leur droit de recours, le Conseil constitutionnel a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité. Le 27 juillet 2012, il rendait sa décision et déclarait les dispositions de l’article L. 224-8 inconstitutionnelles.
Le Conseil constitutionnel indiquait alors : « Si le législateur a pu choisir de donner qualité pour agir à des personnes dont la liste n’est pas limitativement établie et qui ne sauraient, par conséquent, recevoir toutes individuellement la notification de l’arrêté en cause, il ne pouvait, sans priver de garanties légales le droit d’exercer un recours juridictionnel effectif, s’abstenir de définir les cas et conditions dans lesquels celles des personnes qui présentent un lien plus étroit avec l’enfant sont effectivement mises à même d’exercer ce recours. »
Pour le Conseil constitutionnel, les personnes les plus proches de l’enfant doivent être effectivement mises à même de s’opposer à l’arrêté, conformément à l’exigence du droit à un recours effectif consacré par l’article XVI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Mais, faute de notification de l’arrêté, l’exercice de ce droit est rendu impossible dans le délai de trente jours qui est imparti.
Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a fixé au 1er janvier 2014 l’effet de sa décision, à savoir l’abrogation de l’alinéa 1er de l’article L. 224-8. Nous devons donc adopter une nouvelle rédaction avant cette date, d’où le calendrier retenu pour présenter ce texte au deux chambres du Parlement.
Si nous ne légiférions pas pour trouver de nouvelles dispositions avant le 1er janvier 2014, les conséquences seraient graves. L’alinéa 1er est la base légale de l’arrêté d’admission et du recours contre lui. En son absence, le risque est que toute admission de pupille de l’État ne se voie empêchée. Ces enfants seraient privés d’un statut destiné à assurer leur protection et tout projet d’adoption serait par conséquent impossible à mettre en œuvre pour eux.
L’examen auquel nous procédons ce soir est donc particulièrement important pour le millier d’enfants qui, comme chaque année, pourraient être admis en qualité de pupille en 2014. Le projet s’efforce de concilier le droit au recours effectif des proches de l’enfant et l’intérêt de celui-ci à ce que sa situation soit stabilisée le rapidement possible et dans le sens le plus conforme à sa protection.
Que prévoit le projet de loi ?
Tout d’abord, il précise le champ des personnes qui ont le droit de contester l’admission de l’enfant en qualité de pupille. Il s’agit des parents de l’enfant, en l’absence d’une déclaration judiciaire d’abandon ou d’un retrait total de l’autorité parentale, des membres de la famille de l’enfant, du père de naissance ou des membres de la famille de la mère ou du père de naissance lorsque l’enfant est né sous X et, enfin, de toute personne ayant assuré la garde de droit ou de fait de l’enfant.
Les députés se sont interrogés sur la possibilité pour le père de naissance ou les membres de la famille de la mère ou du père de naissance de contester l’admission en qualité de pupille de l’enfant quand celui-ci est né sous X et d’en demander la charge. Je tiens à redire devant vous que cette question a fait l’objet d’une réflexion lors de la préparation du projet de loi.
Il s’agit en effet de situations particulièrement sensibles, sur le plan tant juridique qu’humain, dans lesquelles pourraient s’opposer le droit de la mère au secret de son identité et le droit du père de naissance et des membres de la famille de la mère et du père de naissance à élever l’enfant, sur le fondement du droit à la vie familiale.
Je tiens d’abord à relever que ces personnes ne peuvent être informées de la naissance que par la mère de naissance elle-même, puisque le secret professionnel auquel sont tenus les professionnels ayant accompagné la mère de naissance s’oppose à ce que ceux-ci informent des tiers.
Je souligne également que, par cette disposition, nous nous contentons d’inscrire explicitement dans la loi ce qui était déjà rendu possible par les interprétations des juges. Aujourd’hui, l’accouchement sous X ne fait plus obstacle à l’établissement de la paternité. Des juges ont également annulé des arrêtés d’admission en qualité de pupille à la demande de grands-mères qui avaient justifié d’un lien affectif avec l’enfant.
Il faut aussi préciser que le juge décide souverainement s’il est dans l’intérêt de l’enfant d’être recueilli par la personne qui fait recours contre l’arrêté, par exemple sa grand-mère. Il examine les circonstances de fait et les éléments de preuve rapportés. C’est ensuite à lui de déterminer si la situation familiale permet que l’enfant soit pris en charge dans de bonnes conditions.
Le projet de loi précise le champ des personnes pouvant contester l’arrêté. Il prévoit, et c’est nouveau, sa notification aux personnes les plus proches de l’enfant.
Nous avons défini comme telles les personnes qui ont le droit de contester l’admission en qualité de pupille et qui ont manifesté un intérêt pour l’enfant.
Ces personnes devront recevoir une notification de l’arrêté. Elles disposent ensuite d’un délai de trente jours à partir de la réception de l’arrêté pour le contester.
Les personnes qui ont le droit de contester, mais qui n’ont pas reçu de notification, ne peuvent pas se voir opposer ce délai. Il y a en revanche une limite absolue pour l’exercice du recours, à savoir le placement de l’enfant en vue de l’adoption.
L’article 352 du code civil dispose en effet que le placement en vue de l’adoption met obstacle à toute restitution de l’enfant à sa famille d’origine et qu’il fait échec à toute déclaration de filiation et à toute reconnaissance. Cette limite vaut a fortiori pour toute restitution à une autre personne que la famille d’origine.
Enfin, dernier apport de ce projet de loi introduit par un amendement adopté par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, en accord avec votre rapporteur, Isabelle Pasquet, l’article 1er bis prévoit que, lors du recueil de l’enfant par les services de l’aide sociale à l’enfance, l’ASE, les personnes qui remettent l’enfant soient informées des modalités de l’admission définitive comme pupille de l’État qui interviendra deux ou six mois plus tard. Cet article est en plein accord avec l’esprit du projet initial.
J’en viens au champ d’application géographique du projet de loi.
L’article 2 prévoit que la loi s’appliquera sur tout le territoire de la République, sauf en Nouvelle-Calédonie, la compétence pour légiférer en matière de droit civil ayant été transférée le 1er juillet 2013.
L’article 3 fixe la date d’entée en vigueur de la loi. Afin de permettre aux conseils généraux d’anticiper la reforme et d’être en mesure de l’appliquer pleinement, l’entrée en vigueur a été différée au 1er janvier 2014, date à laquelle la déclaration d’inconstitutionnalité prendra effet.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le texte que nous vous présentons est guidé par la volonté de respecter nos principes constitutionnels, comme nous y a invités le Conseil constitutionnel dans sa décision faisant suite à une question prioritaire de constitutionnalité. La procédure accélérée selon laquelle nous l’examinons est dictée par l’intérêt des enfants, qui doivent pouvoir continuer à obtenir ce statut protecteur qu’est celui de pupille de l’État. Notre tâche est importante et nécessaire, mais elle est circonscrite. C’est, vous le savez, dans le cadre d’autres débats que nous pourrons discuter ensemble de sujets, comme l’adoption, qui est une question connexe.
Les députés ont adopté ce projet de loi à l’unanimité. Lors de l’examen du texte en commission, les commissaires aux affaires sociales l’ont également adopté à l’unanimité. Je vous invite aujourd’hui à adopter ce texte. §
Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui, en réponse à une décision du Conseil constitutionnel du 27 juillet 2012, sécurise les modalités d’exercice des recours juridictionnels contre les arrêtés d’admission en qualité de pupille de l’État.
Chaque année, un peu plus de 1 000 enfants deviennent pupilles de l’État en raison de la situation d’abandon dans laquelle les place l’incapacité de leur famille à assumer leur prise en charge. Il s’agit pour beaucoup d’enfants nés sous X ou qui ont fait l’objet d’une déclaration judiciaire d’abandon. Au total, 2 345 enfants, âgés en moyenne d’un peu plus de sept ans et demi, avaient le statut de pupille de l’État en 2011.
Trois acteurs interviennent auprès des pupilles, avec notamment pour mission d’élaborer pour chacun un projet d’adoption dans les meilleurs délais : le préfet, désigné comme tuteur ; le conseil de famille, composé de représentants du conseil général, d’associations et de personnalités qualifiées, qui assiste le préfet dans l’exercice de sa tâche ; le service de l’ASE, qui assure la prise en charge de l’enfant.
Une conséquence essentielle de l’acquisition du statut de pupille de l’État est d’ouvrir la voie au placement en vue de l’adoption. Celui-ci n’intervient pas systématiquement, mais en constitue le prolongement logique et, dans de nombreux cas, souhaitable.
Dès lors, la possibilité pour les parents ou les proches de l’enfant de contester l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État revêt une importance particulière. Elle est en quelque sorte une dernière chance offerte à ces personnes de renouer avec l’enfant des liens que le placement en vue de l’adoption rompra définitivement.
Depuis la loi du 6 juin 1984, qui a largement modifié le régime juridique applicable aux pupilles de l’État, l’arrêté d’admission est pris par le président du conseil général et peut être contesté devant le tribunal de grande instance.
Soucieux d’éviter une multiplication des recours susceptibles d’empêcher la situation de ces enfants de se stabiliser dans des délais raisonnables, le législateur a fixé une limite de trente jours pour contester l’arrêté et imposé que le requérant demande à assurer la prise en charge de l’enfant. Il a également défini trois catégories de personnes ayant qualité pour agir : les parents, en l’absence de décision judiciaire consacrant l’abandon ou le retrait total de l’autorité parentale ; les alliés de l’enfant ; toute personne justifiant d’un lien avec lui, notamment pour avoir assuré sa garde, de droit ou de fait. Les conditions de publication de l’arrêté d’admission ont été laissées volontairement floues, la loi ne prévoyant ni mesure de publicité générale ni notification individuelle aux personnes ayant qualité pour agir.
Or c’est ce flou qui a été censuré par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 27 juillet 2012, considérant que le législateur « ne pouvait, sans priver de garanties légales le droit d’exercer un recours juridictionnel effectif, s’abstenir de définir les cas et conditions dans lesquels celles des personnes qui présentent un lien plus étroit avec l’enfant sont effectivement mises à même d’exercer ce recours ».
Le texte qu’examine aujourd’hui la Haute assemblée a pour objet de répondre à cette inconstitutionnalité.
L'article 1er de ce projet de loi, qui refond entièrement l’article L. 224-8 du code de l’action sociale et des familles, présente, à mon sens, par rapport au droit existant, quatre améliorations substantielles qui garantissent l’exercice du droit à un recours juridictionnel effectif tout en tenant compte de l’intérêt de l’enfant à voir sa situation stabilisée rapidement.
Premièrement, l’article 1er précise que les arrêtés d’admission, lorsqu’ils n’interviennent pas à la suite d’une décision judiciaire, ne sont pris qu’à l’issue des délais de deux ou six mois prévus par la loi. Cette clarification permettra d’harmoniser les pratiques des conseils généraux qui, souvent dans l’objectif de sécuriser au plus vite la situation de l’enfant, font parfois le choix de prendre l’arrêté dès le recueil par le service de l’ASE, ou deux arrêtés, le premier provisoire et le second définitif à l’issue du délai légal.
Deuxièmement, l’article 1er précise le champ des personnes ayant qualité pour agir. Celui-ci recouvre désormais quatre catégories : les parents de l’enfant, en l’absence de décision judiciaire ; les membres de la famille de l’enfant ; le père de naissance ou les membres de la famille de naissance pour les enfants dont la filiation est inconnue ; toute personne ayant assuré la garde de droit ou de fait de l’enfant.
J’y insiste, l’ouverture du recours à la famille de naissance ne remet pas en cause le droit pour une femme d’accoucher sous X. Elle vient en réalité consacrer une évolution déjà actée par la jurisprudence. En outre, la loi reconnaît déjà au père de naissance le droit d’engager une procédure en reconnaissance de paternité.
Troisièmement, l’article 1er définit, parmi les personnes ayant qualité pour agir, celles qui, en raison du lien plus étroit qu’elles entretiennent avec l’enfant, se verront notifier individuellement l’arrêté d’admission. Il s’agira tout d’abord des parents de l’enfant. Les trois autres catégories de requérants devront avoir manifesté leur intérêt pour l’enfant auprès du service de l’ASE avant la date de l’arrêté d’admission, pour qu’il leur soit notifié.
Quatrièmement, le point de départ du délai de recours, dont la durée demeure fixée à trente jours, est désormais clairement défini à la date de réception de la notification. Celle-ci devra être effectuée par tout moyen permettant d’établir une date certaine de réception et indiquer la règle déjà applicable selon laquelle l’action contre le recours n’est recevable que si le requérant demande à assumer la charge de l’enfant.
La compétence du juge judiciaire est par ailleurs confirmée. Comme cela est déjà prévu, il prendra sa décision au regard de l’intérêt de l’enfant et pourra, s’il rejette le recours, accorder malgré tout un droit de visite au requérant.
En l’état, cette rédaction répond parfaitement à la décision du Conseil constitutionnel. Les solutions visant à donner une publicité générale aux arrêtés d’admission ou consistant à notifier individuellement l’arrêté à chaque requérant ont toutes les deux été écartées en raison des inconvénients qu’elles présentaient.
La voie médiane qu’emprunte le projet de loi conduit par conséquent à définir deux catégories de requérants : ceux qui, outre les parents, auront fait la preuve de leur « lien plus étroit » avec l’enfant en se signalant auprès de l’ASE, à qui s’appliquera le délai de trente jours ; ceux qui, parce qu’ils n’auront pas eu connaissance à temps de la situation de l’enfant, pourront malgré tout effectuer un recours jusqu’au placement de celui-ci en vue de l’adoption.
En vertu de l’article 352 du code civil, le placement en vue de l’adoption continue de constituer une limite absolue à toute possibilité de récupération de l’enfant par sa famille d’origine. Cela signifie que, dans des cas très exceptionnels, il se peut que des personnes ayant qualité pour agir forment leur recours trop tardivement. Faut-il envisager pour autant de faire évoluer l’article 352 ? La question a été soulevée en audition. Y répondre me semble cependant nécessiter une réflexion bien plus approfondie, qui dépasse l’objet du présent projet de loi.
En complément des dispositions contenues dans l’article 1er, l’Assemblée nationale a adopté un article additionnel, devenu l’article 1er bis, qui renforce les informations contenues dans le procès-verbal déclarant l’enfant pupille à titre provisoire.
Enfin, l’article 3 fixe au 1er janvier 2014 l’entrée en vigueur du projet de loi, c’est-à-dire à la date où la censure du Conseil constitutionnel deviendra effective. Ce délai est justifié pour permettre aux conseils généraux de faire évoluer leurs pratiques. L’étude d’impact annexée au texte annonce que des mesures d’accompagnement seront mises en place, en concertation avec l’Assemblée des départements de France, l’ADF, pour informer les conseils généraux des règles qu’ils auront à appliquer, en particulier en matière de notification des arrêtés d’admission. De telles mesures me paraissent utiles et je suis certaine que le Sénat sera particulièrement attentif à leur mise en œuvre.
Ce projet de loi a un objet limité. Il ne prétend pas revoir dans son ensemble le statut des pupilles de l’État, encore moins les règles de l’adoption. Il ne fait qu’apporter une solution claire et sécurisante pour remédier à l’inconstitutionnalité des modalités de recours contre l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État. C’est déjà beaucoup !
Je profite cependant de l’occasion qui nous est offerte pour souligner la complexité des règles qui entourent leur statut. Dispersées entre le code civil et le code de l’action sociale et des familles, elles sont d’une application malaisée, que ce soit pour les services de l’ASE ou pour les conseils de famille, en particulier dans les départements qui accueillent peu de pupilles.
Dans son rapport du mois d’octobre 2009 sur la protection de l’enfance, la Cour des comptes a d’ailleurs souligné la faible connaissance qu’ont parfois les départements de leurs prérogatives, ainsi que le manque de pilotage au niveau national. Les débats, riches, qui ont eu lieu au cours des auditions ou lors de l’examen du texte en commission ont eux aussi montré combien une remise à plat du statut des pupilles de l’État était aujourd’hui nécessaire.
Madame la ministre, un projet de loi sur la famille devrait voir le jour à la fin de cette année. Je souhaite vivement que ce texte puisse être l’occasion de réfléchir au statut des pupilles de l’État. Une telle réforme serait ambitieuse, certes, mais elle apparaît également urgente, car les premières victimes de l’insécurité qui entoure le statut juridique des pupilles sont les enfants eux-mêmes.
La commission des affaires sociales a adopté le projet de loi à l’unanimité, dans sa rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale. J’espère, mes chers collègues, qu’un large consensus pourra également être trouvé aujourd’hui en séance plénière. Je suis convaincue que l’examen de ce texte sera l’occasion de débats riches et prometteurs pour les réformes à venir.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste.
M. André Gattolin . Monsieur le président, madame la ministre, mes chers – et trop rares !
Sourires.
Il s’agit en effet d’un texte bref, de nature plutôt technique, et heureusement assez peu clivant au sein de notre assemblée. Il constitue d’abord une réponse à une exigence précise du Conseil constitutionnel dans sa décision du 27 juillet 2012.
C’est aussi un texte qui ne concerne directement qu’une part extrêmement réduite de nos concitoyens. En effet, à la fin du mois de décembre 2011, seuls 2 345 jeunes Français disposaient du statut de pupille de l’État et, depuis une dizaine d’années, nous n’observons pas d’évolution significative du volume de cette population, sinon une légère baisse.
En même temps, il s’agit d’un texte qui fait sens, précisément parce que le nombre très réduit de personnes auquel il s’attache concerne essentiellement des enfants, de très jeunes enfants, qui comptent parmi les plus vulnérables de nos compatriotes. Il est de notre devoir, du devoir de l’État de protéger aussi efficacement que possible.
La qualité de pupille de l’État réaffirme en effet le caractère solidaire et protecteur de la République, non seulement pour les enfants nés sous X, mais, plus largement, pour tous les enfants à qui il n’a pas été donné de bénéficier d’une cellule familiale sereine et épanouissante, pour peu qu’il y ait eu une cellule...
En l’état actuel du droit, les présidents des conseils généraux assument la responsabilité d’octroyer le statut de pupille par arrêté, dans les conditions prévues à l’article L. 224-8 du code de l’action sociale et des familles.
Dans un délai de trente jours après la date d’émission, cet arrêté peut être contesté par un proche via un recours qui peut l’amener à assumer la charge de l’enfant et soustraire ce dernier à un placement en vue d’adoption.
Encore faut-il pour cela que les tiers et les proches motivés puissent être dûment informés. Or, on le sait, ce n’est malheureusement pas toujours le cas aujourd’hui. Et c’est pourquoi le Conseil constitutionnel a enjoint au législateur d’apporter une modification au droit, au plus tard au 1er janvier 2014.
Le Conseil d’État a, quant à lui, proposé de remplacer l’article L. 224-8 par des dispositions nouvelles et clarifiées, soumises ce jour à notre assemblée.
L’objet de ce projet de loi est donc de mettre fin à une incertitude juridique, dommageable d’abord aux enfants eux-mêmes, mais aussi aux proches et aux tiers motivés par la prise en charge de l’enfant et son accompagnement.
Les nouvelles dispositions éteindront définitivement le droit d’agir après trente jours pour les personnes ayant reçu la notification de possibilité de recours. Il faudra toutefois veiller à ce que le plus grand nombre de personnes ayant qualité pour agir et qui n’auraient pas été en mesure de manifester un intérêt pour l’enfant avant la date de l’arrêté faute d’en avoir eu connaissance puissent être informées le plus rapidement possible.
Cette nouvelle législation, si elle est adoptée, ce dont nous ne doutons pas, va désormais permettre à ces personnes de voir leur action de recours recevable tant que l’enfant n’aura pas été placé en vue d’une adoption.
Dans une société caractérisée par une mobilité géographique toujours plus élevée de ses membres, où ceux-ci sont de plus en plus souvent appelés pour des raisons économiques, sociales ou plus personnelles à vivre dans une autre région, voire dans un autre pays que celui où ils ont leurs attaches familiales, les délais permettant d’être informés et d’engager des démarches pour revendiquer la prise en charge d’un enfant devenu pupille de l’État n’étaient en effet plus en adéquation avec les réalités de notre temps.
Il s’agit donc d’une évolution salutaire de notre droit, qui tend à l’extraire quelque peu d’un mécanicisme souvent trop déshumanisé, notamment en ce qui concerne les questions d’enfance et de petite enfance.
D’autres points du texte proposé nous paraissent, eux aussi, particulièrement opportuns dans une logique de plus grande humanisation du droit et des démarches juridiques et administratives que les écologistes réclament avec permanence et insistance depuis longtemps.
Ainsi, le tribunal pourra désormais autoriser le demandeur dont le recours n’aurait pas abouti à exercer un droit de visite dans l’intérêt de l’enfant.
Car, même si le souhait d’adoption d’un enfant par un tiers est légitime – en la matière, la demande ne cesse de progresser dans notre pays et peine à être satisfaite –, il faut aussi être conscient que l’adoption n’est pas une situation anodine et qu’elle est loin de toujours satisfaire le besoin de filiation que développe un enfant jusqu’à très tard dans sa vie d’adulte.
Préserver autant que possible pour un enfant des liens avec des personnes proches et qui ont bien connu ses parents nous paraît en général être plutôt un atout pour son développement personnel à venir.
Autre disposition importante, le texte proposé conditionne la volonté d’assumer la charge de l’enfant à une exigence de recevabilité de la demande, ce qui devrait permettre d’éviter, autant que faire se peut, des recours qui seraient de nature abusive.
Toutes ces dispositions sécuriseront l’intérêt et la situation de l’enfant, et garantiront les droits tant de la famille d’adoption que de la famille biologique.
Cet équilibre est fondamental si nous voulons aussi faciliter le retour à une certaine stabilité dans la vie de ces jeunes et de leurs familles, alors qu’ils traversent des moments souvent très difficiles.
En conclusion, vous l’aurez évidemment compris à travers mon propos, le groupe écologiste votera résolument en faveur de ce texte, qui comble un vide juridique important et permet de sécuriser le statut de pupille de l’État dans l’intérêt de toutes les parties prenantes. §
Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteur, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons à cette heure quelque peu tardive vient modifier les modalités d’admission en qualité de pupille de l’État.
Oui, il est essentiel de sécuriser le statut de pupille et de prévenir tout risque de recours ultérieur à l’admission d’un enfant dans cette situation.
La qualité de pupille de l’État réaffirme le caractère solidaire et protecteur que doit jouer la République, tout particulièrement auprès des enfants nés sous X ou, plus largement, auprès de tous ceux qui n’ont pas la chance de bénéficier d’une cellule familiale sereine et épanouissante.
Les pupilles de l’État sont des enfants recueillis par le service de l’aide sociale à l’enfance lorsque leur filiation n’est pas établie ou est inconnue.
Ce sont des enfants remis par leurs parents, qui consentent valablement à l’adoption, remis par l’un de leurs parents, et dont l’autre ne s’est pas manifesté durant six mois, ou bien encore des enfants dont les parents ont fait l’objet d’un retrait de l’autorité parentale ou qui ont été déclarés abandonnés par le tribunal de grande instance.
Les enfants pupilles de l’État bénéficient en effet d’une tutelle spécifique.
L’article L. 224-1 du code de l’action sociale et des familles prévoit que la tutelle des pupilles de l’État est assurée par le représentant de l’État dans le département. Ce dernier est désigné comme tuteur, ainsi que par le conseil de famille des pupilles de l’État.
Les services de l’aide sociale à l’enfance assurent la prise en charge de ces enfants.
Les présidents des conseils généraux assument la responsabilité d’octroyer le statut de pupille par arrêté, dans les conditions prévues par l’article L. 224-8 du code de l’action sociale et des familles.
Dans un délai de trente jours après la date de l’arrêté, celui-ci peut être contesté par un proche via un recours qui l’amène à assumer la charge de l’enfant et soustrait ce dernier à un placement en vue d’une adoption.
Mais encore faut-il, mes chers collègues, que les tiers et les proches motivés soient dument informés, ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas.
À ce jour, le Conseil constitutionnel a censuré l’article L. 224-8 du code de l’action sociale et des familles, qui n’assurait pas aux personnes habilitées les moyens de contester la reconnaissance d’un enfant comme pupille de l’État.
Ainsi, ce projet de loi tire les conclusions de la décision du 27 juillet 2012 du Conseil constitutionnel, qui avait jugé les dispositions contraires à la Constitution.
Mme la ministre ayant cité tout à l’heure l’extrait de cette décision que je voulais porter à votre connaissance, mes chers collègues, je m’abstiendrais de le faire, ce qui nous fera gagner un peu de temps. §
Le Conseil constitutionnel a reporté au 1er janvier 2014 l’abrogation du premier alinéa de l’article L. 224-8 du code de l’action sociale et des familles.
Aussi, afin d’éviter tout vide juridique au 1er janvier 2014, il nous faut préciser les dispositions actuellement en vigueur.
Pour éviter les écueils de l’inconstitutionnalité, il nous faut rétablir la possibilité d’un recours effectif contre un arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État.
Dans le même temps, nous devons apporter des éclaircissements quant aux modalités de la procédure d’admission concernant les personnes jugées capables de s’opposer à l’admission d’un enfant en tant que pupille de l’État.
Ce projet de loi permettra une clarification des procédures qui s’imposent aux conseils généraux, ainsi qu’une harmonisation des pratiques.
La reconnaissance d’un tel statut étant définitive, il est essentiel qu’il soit entouré de toutes les garanties nécessaires, en particulier la possibilité de recours des personnes de l’entourage de l’enfant, qui doit pouvoir aller jusqu’à la possibilité d’en obtenir la garde.
Si nous ne légiférions pas pour trouver de nouvelles dispositions avant le 1er janvier 2014, les conséquences seraient graves. Car l’alinéa premier est la base légale de l’arrêté d’admission, et donc aussi du recours contre lui. En son absence, toute admission de pupille de l’État pourrait être empêchée ! Ces enfants seraient alors privés d’un statut destiné à assurer leur protection, et tout projet d’adoption serait impossible à mettre en œuvre.
L’adoption est un sujet sensible. Elle permet à l’enfant de retrouver un cadre stable et une famille lui assurant l’amour et la protection dont il aura besoin tout au long de sa vie.
Il est donc de notre devoir de définir clairement l’accès au statut de pupille et de faire en sorte que toutes les parties concernées soient tenues informées des tenants et aboutissants dans les délais impartis.
Selon l’enquête annuelle de l’Observatoire de l’enfance en danger, au 31 décembre 2011, 2 345 enfants ont le statut de pupilles de l’État, c’est-à-dire qu’ils sont potentiellement adoptables, soit parce qu’ils sont sans filiation, soit parce qu’ils ont fait l’objet d’une déclaration judiciaire d’abandon.
La répartition des pupilles de l’État est très inégale sur le territoire : la moitié des départements en comptent moins de quinze, tandis que le Nord, le Pas-de-Calais et la Seine-Saint-Denis en dénombrent plus de cent chacun.
En 2011, 1 007 nouveaux enfants ont obtenu le statut de pupille, dont 628 nés sous X, quand 1 065 enfants sont sortis du statut, 70 % ayant été adoptés, 17 % ayant atteint la majorité et 10 % ayant été repris par leur famille.
Parallèlement, 5 887 agréments d’adoption ont été délivrés en 2011, plus de 7 000 demandes ayant été traitées par les conseils généraux.
Au total, 22 747 agréments sont en cours de validité, soit un chiffre dix fois supérieur à celui des enfants susceptibles d’être adoptés.
L’âge moyen de l’ensemble des pupilles s’élève à moins de huit ans. Il diffère selon les conditions d’admission : les enfants « sans filiation » sont généralement admis dès leur naissance et perdent la qualité de pupilles au terme de quelques mois, par la voie de l’adoption, tandis que les orphelins ainsi que les enfants admis sur décision judiciaire sont les plus âgés et demeurent souvent pupilles jusqu’à leur majorité.
Pour ces derniers, l’admission est presque toujours précédée par une prise en charge, parfois longue, par l’aide sociale à l’enfance.
Ce n’est le cas que pour deux enfants sur cinq parmi ceux qui on été remis par un ou deux parents.
Le statut de pupille est très important, car il permet de prendre en charge ces enfants, qui n’ont pas ou plus de famille susceptible d’en assumer la charge et de garantir notamment leur droit à une vraie vie familiale !
Il reste que près d’un tiers des pupilles de l’État ne sont pas adoptés. Entre 2005 et 2011, un jugement d’adoption a constitué le motif de sortie du statut de pupille pour 67 % d’entre eux. Ce taux atteint 80 % pour les enfants sans filiation, qui sont au demeurant adoptés le plus rapidement. Mais il ne s’établit qu’à 18 % pour les orphelins. De surcroît, les enfants les plus âgés sont rarement adoptés. Les enfants présentant des besoins spécifiques liés à leur état de santé ou faisant partie d’une fratrie bénéficient également moins souvent d’un placement en vue de l’adoption.
Une réforme de la législation dans ce domaine était plus que nécessaire pour combler le vide juridique.
Le présent projet de loi précise l’intérêt à agir et les modalités de recours devant le tribunal de grande instance contre un arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État. Est ainsi indiqué le champ des personnes qui ont le droit de contester l’arrêté faisant de l’enfant un pupille de l’État, selon le ministère chargé de la famille : sont visés le père de naissance, ainsi que les membres de la famille de la mère et du père de naissance lorsque l’enfant est né sous X.
Comme le montrent les statistiques transmises par la Chancellerie en 2012, depuis 2000, le nombre de déclarations judiciaires d’abandon oscille entre 150 et 200 par an, ce qui semble bien peu élevé au regard du nombre d’enfants placés.
Le dernier rapport de l’Observatoire national de l’enfance en danger, l’ONED, sur la situation des pupilles met en exergue de fortes disparités départementales. Il recommande d’ailleurs d’approfondir la question, en particulier en examinant les incidences d’une culture ou d’une pratique des services départementaux en matière de protection de l’enfance.
En France, nous devons améliorer la situation de ces enfants. D’ailleurs, l’’UNICEF, en rappelant que, dans notre pays, un enfant sur cinq est pauvre, nous y engage. Il s’agit d’aider les parents, de mettre fin à la multiplication des contentieux, qui fragilise l’harmonie familiale, notamment celle des familles monoparentales, de plus en plus nombreuses et particulièrement touchées par le risque de pauvreté. Parmi ces dernières, quatre familles sur cinq sont dirigées par des femmes seules, dont un tiers vivent sous le seuil de pauvreté.
D’autres points du présent projet de loi nous paraissent importants. Je citerai notamment le fait que texte conditionne la volonté d’assumer la charge de l’enfant à la recevabilité, ce qui permet d’éviter les recours abusifs.
En outre, les nouvelles dispositions qui nous sont soumises établissent les conditions permettant d’éteindre définitivement le droit d’agir. Elles garantissent le placement de l’enfant dans une famille en vue de son adoption et font obstacle à toute restitution ultérieure de l’enfant par la nouvelle famille adoptive.
Telles sont les raisons pour lesquelles les membres du groupe socialiste sont favorables à l’adoption de ce texte, qui apporte des précisions majeures relatives au statut de pupille de l’État. La protection de l’enfant sera alors renforcée et son adoption pourra avoir lieu plus rapidement. Le code de l’action sociale et de la famille prévoit en effet que les pupilles « doivent faire l’objet d’un projet d’adoption dans les meilleurs délais. »
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi qu’au banc des commissions.
Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, madame la rapporteur, mes chers collègues, le présent projet de loi relatif à l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État n’appelle pas de réserve de la part des membres du groupe UDI-UC, qui le voteront volontiers dans la rédaction qui nous est soumise.
J’aborderai, tout d’abord, les dispositions du texte, puis je développerai quelques considérations émises par mon groupe, plus particulièrement par ma collègue Muguette Dini, qui ne peut malheureusement pas assister ce soir à ce débat.
Nous comprenons la nécessité de réviser certains articles du code de l’action sociale et des familles, afin de clarifier des textes très anciens, rédigés à des époques où le nombre de pupilles de l’État et les conditions d’abandon étaient très différents.
Les précisions concernant tant les délais relatifs à l’arrêté d’admission qui permettront d’harmoniser les pratiques des conseils généraux que les personnes ayant qualité à agir sont indispensables. La liste de ces personnes, auxquelles l’arrêté devra être notifié, est également importante, de même que le point de départ du délai de recours.
Le texte que nous examinons constitue indéniablement une avancée par rapport au droit existant. Je ne m’étendrai pas davantage sur ce point.
En revanche, madame la ministre, de nouveaux progrès pourraient être réalisés ; je souhaite vous en faire part.
Tous les sénateurs, en particulier ceux qui ont siégé ou qui siègent dans les conseils de famille, s’interrogent sur la qualité de pupille de l’État. On peut légitimement se demander pour quelles raisons un enfant dont le désintérêt des parents est manifeste doit attendre trois ou quatre ans, voire beaucoup plus, avant que le juge prononce son abandon au titre de l’article 350 du code civil. Pendant ce laps de temps, il est confié à une pouponnière, à une ou plusieurs familles d’accueil, ou encore à un établissement. Un tel placement sera inévitablement source d’instabilité et de troubles définitifs chez l’enfant.
Au Québec, la durée maximale d’hébergement d’un enfant se trouvant dans les conditions évoquées ci-dessus, laissée à l’appréciation du juge, ne peut être supérieure à douze mois s’il est âgé de moins de deux ans, à dix-huit mois s’il est âgé de deux à cinq ans et à vingt-quatre mois au-delà. Les services doivent rechercher une stabilité accrue pour les enfants et une participation active des parents, le maintien dans la famille étant toujours privilégié, mais non pas impératif au regard de l’intérêt supérieur de l’enfant.
La mission conduite sur ce sujet par ma collègue Muguette Dini, au mois de septembre 2010, proposait d’envisager l’introduction, dans la législation française, de délais maximaux de placement des enfants en danger établis en fonction de leur âge, au-delà desquels une solution de vie stable devrait avoir été trouvée.
Comme au Québec, l’application de cette règle serait conditionnée à l’accompagnement effectif des parents et, dans tous les cas, laissée à l’appréciation du juge, qui pourrait toujours y déroger en raison de circonstances particulières.
Hormis la question de l’abandon volontaire ou imposé par la loi et de la stabilité de vie de l’enfant concerné, se pose celle des pupilles de l’État handicapés placés dans des familles d’accueil.
Ces familles, qui se voient confier des enfants adoptables très jeunes, quelquefois lourdement handicapés, et auxquels elles peuvent être très attachées, hésitent à les adopter avant qu’ils atteignent l’âge de dix-huit ans. En effet, d’une part, elles perdraient le salaire qui leur est versé et, d’autre part, elles auraient à leur charge ces enfants, qui demandent des soins et traitements souvent onéreux. Ne faudrait-il pas réfléchir à l’adoption de ces enfants avant leur majorité et maintenir le versement à la famille d’une aide substantielle ?
Enfin, le couperet de l’âge de la majorité, qui donne théoriquement l’autonomie totale aux pupilles de l’État, se révèle souvent une catastrophe, ces jeunes adultes pouvant se retrouver à la rue, sans ressources et sans référent. Même si la plupart des conseils généraux continuent à s’en occuper, le risque est grand pour certains de plonger dans des difficultés sociales dont ils auront bien du mal à sortir.
Avant de terminer mon propos, je ne peux m’empêcher de faire une comparaison – Muguette Dini s’est exprimée en ce sens en commission – entre deux décisions du Conseil constitutionnel : celle qu’il a rendue sur le sujet dont nous traitons ce soir et celle sur le harcèlement sexuel. Pourquoi la première d’entre elles, qui ne concerne en fait que quelques dizaines d’enfants, peut-elle disposer d’un délai de six mois avant d’être appliquée, alors que la seconde a dû être appliquée immédiatement, interdisant ainsi l’examen de plus de 500 procédures en cours et laissant dans un grand désarroi, pour ne pas dire plus, les victimes qui n’auront eu aucun recours ? Elles auraient, elles aussi, bien aimé disposer d’un délai suffisant pour réagir. Pourquoi une telle différence ?
Afin de ne pas achever mon intervention sur cette note pessimiste, je veux remercier Mme la rapporteur de la clarté de son exposé, utile à nos débats. §
Monsieur le président, madame le ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, je me réjouis à mon tour de la tenue de ce débat.
Avec l’examen de ce projet de loi, nous abordons une question éminemment sensible, puisqu’il s’agit de répondre à deux impératifs éventuellement contradictoires dès lors que sont en cause des enfants confiés au service de l’aide sociale à l’enfance, à savoir le respect du droit au recours effectif des parents, de la famille et des proches de l’enfant et la préservation des intérêts légitimes des enfants eux-mêmes.
Les membres du groupe CRC estiment que le projet de loi, tel que l’a transmis l’Assemblée nationale au Sénat, a réussi à trouver un point d’équilibre. De plus, le texte répond aux exigences du Conseil constitutionnel, qui, dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, a décidé d’abroger l’actuel article L.224-8 du code de l’action sociale et des familles dès le 1er janvier 2014. Tout comme M Capo-Canellas et Mme Dini, je m’interroge sur le sort différent réservé par le Conseil aux pupilles de l’État et aux personnes victimes de harcèlement sexuel.
Cela étant, l’article précité, qui fait l’objet d’une réécriture totale dans le présent projet de loi, rendait impossible, dans certains cas, la contestation d’un arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État d’un enfant, alors même que la loi reconnaissait à un tiers la capacité à agir. Cette impossibilité reposait sur le fait que l’arrêté en cause n’était pas pris contradictoirement et ne faisait l’objet d’aucune publicité, ce qui est regrettable. Par voie de conséquence, les personnes susceptibles de le contester pouvaient soit ne pas être informées de l’édiction de cet arrêté, soit découvrir la situation après expiration du délai d’un mois prévu dans la loi.
À juste titre, le Conseil constitutionnel a considéré qu’il n’était pas possible de rendre opposable un délai d’action quand les personnes susceptibles d’agir n’étaient pas informées du point de départ de ce délai.
À cette censure logique, le projet de loi que nous examinons apporte une réponse tout aussi logique, pertinente et consensuelle. Il permettra ainsi de résoudre de nombreux cas complexes. N’oublions pas ces enfants, déjà meurtris par une vie chaotique et difficile, qui doivent pouvoir se construire dans une atmosphère apaisée et dans un contexte juridique sécurisé. Tel est en tout cas le sens que moi et les membres de mon groupe donnons à ce texte.
Aux termes de l’article 1er, les parents de l’enfant, les membres de la famille et les personnes qui ont eu la garde de l’enfant, de fait comme de droit, obtiendront dorénavant notification par les services départementaux de l’édiction de l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État.
Quant au délai d’extinction de l’action en contestation contre cet arrêté, il s’éteindra à compter d’un mois après la réception de la notification.
Par ailleurs, les personnes qui ont un lien avec l’enfant mais qui ne sont pas connues des services de l’ASE et ne peuvent pas recevoir la notification de l’arrêté précité, elles conserveront la possibilité de contester cet arrêté au-delà du délai d’un mois opposable à celles qui auront accusé réception de la notification.
Toutefois, une précision s’impose en la matière. L’article L. 224-8 du code de l’action sociale et des familles, tel qu’il est rédigé et tel qu’il résultera de nos travaux si le projet de loi est adopté, n’indique pas le délai de forclusion de l’action opposable aux personnes qui n’auraient pas reçu notification de l’arrêté en question. Les juristes ou les personnes les plus avisées comprendront sans doute que cette action reste possible jusqu’à ce que l’enfant ait fait l’objet d’une mesure de placement en vue de son adoption, telle que proposée à l’article 352 du code civil.
Aussi, par souci de respecter le principe d’intangibilité de la loi – comme chacun le sait, c’est une obligation constitutionnelle –, nous estimons souhaitable que le présent projet de loi éclaire réellement les personnes concernées. Cela est d’autant plus important que l’article 352 du code civil s’applique essentiellement aux familles. Or les personnes qui peuvent contester l’arrêté d’admission en qualité de pupille de l’État ne sont pas nécessairement des membres de la famille. Sont également visées au 4° du II de l’article 1er les personnes « ayant assuré la garde de droit ou de fait de l’enfant. » Dans ce cas, l’action en contestation de l’arrêté n’aura pas pour effet nécessairement de restituer l’enfant à la famille d’origine ou d’établir une filiation à l’égard de celui-ci. C’est, en quelque sorte, par extension que cette disposition leur sera appliquée.
Selon les membres du groupe CRC, il est de notre devoir de législateur, conformément d’ailleurs au choc de simplification prôné par le Président de la République, de rendre la loi compréhensible par toutes et tous. C’est pourquoi nous aurions préféré qu’une telle précision soit apportée explicitement dans le projet de loi.
Néanmoins, nous saluons l’apport de l’article 1er bis. Il prévoit que, lorsque des personnes confient un enfant aux services de l’aide sociale à l’enfance, elles soient immédiatement informées des conséquences de l’admission définitive comme pupille de l’État, admission qui, théoriquement, devrait intervenir dans les deux ou six mois qui suivent. De la sorte, les droits des parents de l’enfant ou des personnes qui le confient aux services de l’ASE seront renforcés. Cette information, délivrée très amont, y compris en dehors de tout recours, est particulièrement sécurisante.
Le présent projet de loi est attendu, indépendamment de l’impératif posé par le Conseil constitutionnel. Il nous semble être de nature à apaiser des parcours de vie que les processus juridique et administratif ont pu rendre hier chaotiques, pour ne pas dire douloureux.
Pour toutes ces raisons, les sénatrices et sénateurs du groupe CRC voteront en faveur de ce projet de loi. §
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles du texte de la commission.
(Non modifié)
L’article L. 224-8 du code de l’action sociale et des familles est ainsi rédigé :
« Art. L. 224 -8. – I. – L’enfant est admis en qualité de pupille de l’État par arrêté du président du conseil général pris soit après la date d’expiration des délais prévus aux 1° à 4° de l’article L. 224-4 en cas d’admission en application de ces mêmes 1° à 4°, soit une fois le jugement passé en force de chose jugée lorsque l’enfant est admis dans les conditions prévues aux 5° ou 6° du même article.
« II. – L’arrêté mentionné au I peut être contesté par :
« 1° Les parents de l’enfant, en l’absence d’une déclaration judiciaire d’abandon ou d’un retrait total de l’autorité parentale ;
« 2° Les membres de la famille de l’enfant ;
« 3° Le père de naissance ou les membres de la famille de la mère ou du père de naissance, lorsque l’enfant a été admis en application du 1° de l’article L. 224-4 ;
« 4° Toute personne ayant assuré la garde de droit ou de fait de l’enfant.
« L’action n’est recevable que si le requérant demande à assumer la charge de l’enfant.
« III. – L’arrêté mentionné au I est notifié aux personnes mentionnées au 1° du II, ainsi qu’à celles mentionnées aux 2° à 4° du même II qui, avant la date de cet arrêté, ont manifesté un intérêt pour l’enfant auprès du service de l’aide sociale à l’enfance. Cette notification, qui est faite par tout moyen permettant d’établir une date certaine de réception, mentionne les voies et délais de recours ainsi que la juridiction compétente. Elle précise que l’action n’est recevable que si le requérant demande à assumer la charge de l’enfant.
« IV. – Le recours contre l’arrêté mentionné au I est formé, à peine de forclusion, devant le tribunal de grande instance dans un délai de trente jours à compter de la date de la réception de sa notification.
« V. – S’il juge la demande conforme à l’intérêt de l’enfant, le tribunal prononce l’annulation de l’arrêté mentionné au I et confie l’enfant au demandeur, à charge, le cas échéant, pour ce dernier de requérir l’organisation de la tutelle, ou lui délègue les droits de l’autorité parentale. Dans le cas où il rejette le recours, le tribunal peut autoriser le demandeur, dans l’intérêt de l’enfant, à exercer un droit de visite dans les conditions qu’il détermine. »
L'article 1 er est adopté.
(Non modifié)
Le 3° de l’article L. 224-5 du code de l’action sociale et des familles est complété par les mots : « ainsi que des modalités d’admission en qualité de pupille de l’État mentionnées à l’article L. 224-8 ». –
Adopté.
(Non modifié)
I. – L’article 1er est applicable sur tout le territoire de la République, sauf en Nouvelle-Calédonie.
II. – L’article L. 552-2 du code de l’action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« – “service de l’aide sociale à l’enfance” par : “service chargé de l’aide sociale à l’enfance”. »
III. – À l’article L. 552-2-1 du même code, après le mot : « service », il est inséré le mot : « chargé ». –
Adopté.
(Non modifié)
La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 2014 –
Adopté.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans le texte de la commission.
Le projet de loi est définitivement adopté.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 23 juillet 2013 :
À neuf heures trente :
1. Questions orales.
Le texte des questions figure en annexe.
À quinze heures :
2. -Projet de loi organique portant actualisation de la loi n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie
Procédure accélérée
Rapport de Mme Catherine TASCA, fait au nom de la commission des lois (n° 777, 2012-2013) ;
Texte de la commission (n° 778, 2012-2013) ;
-Projet de loi portant diverses dispositions relatives aux outre-mer §(n° 718, 2012-2013).
Rapport de Mme Catherine TASCA, fait au nom de la commission des lois (n° 777, 2012-2013).
Texte de la commission (n° 779, 2012-2013).
À vingt et une heures trente :
3. Suite éventuelle de l’ordre du jour de l’après-midi
4. Proposition de loi fixant le nombre et la répartition des sièges de conseiller de Paris
Procédure accélérée
Rapport de M. Roger MADEC, fait au nom de la commission des lois (n° 780, 2012-2013).
Texte de la commission (n° 781, 2012-2013).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le vendredi 19 juillet 2013, à zéro heure quinze.