Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi du Gouvernement contient un certain nombre d’avancées.
Améliorer le renforcement de la lutte contre la fraude fiscale, rationaliser les juridictions spécialisées en supprimant les juridictions spécialisées par cour d’appel ou encore créer un Office central de lutte contre la corruption et la fraude fiscale, même s’il faudra vérifier que les moyens annoncés lui seront effectivement alloués, sont des éléments positifs.
Mais la création d’un procureur de la République financier ne peut pas recueillir notre assentiment. Force est d’ailleurs de constater qu’elle ne semble pas convaincre grand monde, toutes tendances politiques confondues, sans parler des magistrats ou des enquêteurs, des juristes, voire des services de la Chancellerie eux-mêmes si l’on s’en tient à l’insuffisance de l’étude d’impact…
Pourquoi si peu d’enthousiasme ? L’idée de « sanctuariser » un procureur spécialement dédié à la lutte contre la délinquance financière peut paraître intéressante. Mais la question à se poser est plutôt celle de l’efficacité. Selon nous, la réponse est sans appel : la création d’un procureur financier sera, au mieux, inefficace, au pire, contre-productive.
On aurait pu envisager la création d’une juridiction spécialisée, sur le modèle de l’Audiencia nacional espagnole. Mais outre le fait que celle-ci est également compétente en matière de criminalité organisée, une telle évolution aurait impliqué une réforme complète de notre architecture judiciaire, ce qui dépasse largement le projet du Gouvernement.
On aurait pu envisager de confier, à l’instar de ce qui existe en matière de corruption d’agent public étranger ou de terrorisme, une compétence concurrente au tribunal de grande instance de Paris pour connaître certains délits financiers, ou encore de prévoir une compétence de la juridiction interrégionale spécialisée, ou JIRS, de Paris pour des affaires dont l’étendue nationale conduit à rendre compétentes plusieurs de ces juridictions.
Mais, assez curieusement, alors même qu’un pôle financier existe déjà à Paris et connaît une activité particulièrement riche, telle n’est pas l’option choisie par le Gouvernement, qui propose une sorte de mouton à cinq pattes en termes d’organisation judiciaire. Il instaure un parquet spécifique à compétence nationale rattaché au parquet général de Paris, comme s’il s’agissait d’une nouvelle juridiction, mais sans créer la structure qui devrait l’accompagner.
Voilà donc un parquet « hors-sol » !