Intervention de Manuel Valls

Réunion du 23 juillet 2013 à 9h30
Questions orales — Stationnement illégal des gens du voyage

Manuel Valls, ministre de l'intérieur :

Monsieur le sénateur, vous avez parfaitement décrit la situation, en évoquant les difficultés d’application de la loi Besson du 5 juillet 2000.

Répondre à votre question, c’est réaffirmer l’équilibre nécessaire entre droits et devoirs des gens du voyage, ainsi qu’entre droits et devoirs des élus de la République.

Nous connaissons tous – c’est aussi l’ancien maire qui parle ici – les difficultés que rencontrent les élus ; ils sont fréquemment en première ligne pour résoudre des situations souvent très tendues, parce que les populations, elles-mêmes confrontées à des difficultés, sont en colère, parfois fort légitimement ; monsieur le sénateur, lorsque je me suis rendu dans votre département, voilà quelques jours, plusieurs interlocuteurs m’ont entretenu de ces problèmes.

Nous savons que les élus ayant rempli toutes les obligations mises à leur charge par la loi Besson sont parfois, lors d’occupations illicites, les plus exposés à la colère des habitants de la commune, qui ont participé, en tant que contribuables locaux, à la construction des aires d’accueil ; en pareils cas, c’est la parole publique qui est disqualifiée.

Comme vous l’avez rappelé, monsieur Filleul, la loi Besson a justement cherché à établir un équilibre entre les droits et les devoirs réciproques dont je viens de parler. Cependant, treize ans après son adoption, elle demeure en grande partie inappliquée sur une portion du territoire. De fait, selon la Cour des comptes, seules 52 % des places prévues en aires d’accueil et 29, 4 % des aires de grand passage prévues avaient été réalisées au 31 décembre 2010.

Nous ne pouvons plus accepter cette situation, qui rompt avec le principe d’équité territoriale auquel nous sommes tous attachés – et vous, mesdames, messieurs les sénateurs, d’une façon toute spéciale.

D’une part, en effet, elle fragilise par avance toute entreprise visant à soutenir les maires en cas d’occupation illicite. Les voyageurs renvoient d’ailleurs l’État à ses responsabilités en imputant les situations difficiles au non-respect des dispositions légales par les maires.

D’autre part, elle ne manque pas de susciter des débats tout à fait insupportables ; ces dernières semaines, toute une série de prises de position – sans même parler de la plus récente, que je ne confonds du reste pas avec les autres – a créé un climat de très grande confusion.

Ma position est claire : nous devons sortir de cette ambiguïté, qui dure depuis trop longtemps.

C’est dans cet esprit que le Gouvernement soutient la proposition de loi actuellement portée par le député Dominique Raimbourg. Ce texte est construit à la fois sur le principe d’équilibre que je viens de réaffirmer et sur le travail que beaucoup d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, menez depuis des années. J’ai d’ailleurs assisté à un colloque auquel participaient non seulement M. Raimbourg, mais aussi le député Didier Quentin et le sénateur Pierre Hérisson, membres de l’actuelle opposition, qui travaillent sur cette question. Je ne doute pas, monsieur Filleul, que vous apportiez vous aussi votre contribution.

Sur la base d’une évaluation de la loi Besson, nous devons bâtir un nouveau dispositif législatif afin de faire vivre ces droits et ces devoirs.

L’État se place aux côtés des gens du voyage pour que leurs droits soient très concrètement respectés, en obligeant les élus, y compris avec un certain nombre de moyens financiers, à construire des aires d’accueil.

Ce premier principe a pour corollaire qu’il est légitime et juste que nous soyons aussi aux côtés des élus locaux. Il est nécessaire de leur garantir, au besoin avec le concours de la force publique, l’évacuation des campements illicites, non seulement si un trouble est causé à l’ordre public, mais encore s’il existe, en plus de l’aire communale éventuellement occupée, une aire d’accueil proche pour recevoir les gens du voyage, dans un périmètre que nous devrons fixer dans la loi.

Concernant les aires de grand passage, nous approuvons l’idée de rendre obligatoires, dans le schéma départemental d’accueil et d’habitat des gens du voyage, la mention tant des communes où ces aires doivent être installées que de la capacité d’accueil de chaque aire. Je demanderai sans doute à des parlementaires d’aider le Gouvernement à mieux traiter cette question, dont on voit bien, au cœur de l’été, qu’elle est l’une des principales difficultés.

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