Intervention de Vincent Peillon

Réunion du 23 juillet 2013 à 9h30
Questions orales — Langue des signes pour les enfants sourds

Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale :

Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir transmettre à Mme Bruguière tous mes vœux de prompt rétablissement.

Je profite de la question que vous soulevez aujourd'hui pour rappeler ma conviction et mon engagement au sujet de l’école inclusive.

Je l’entendais encore récemment, il y a les « diseux » et les « faiseux ». En l’espace d’un an, vous le savez, la priorité accordée à l’école inclusive a été fortement affirmée, ou plutôt réaffirmée. En effet, si le principe de l’école inclusive a été pour la première fois posé dans la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, à laquelle vous avez participé activement au cours des débats, il n’en est pas moins vrai que l’idée en a été lancée par François Fillon en 2005.

Cependant, à partir de 2010, je le redis, notre pays n’a pas consacré à ce projet d’une grande ampleur les moyens nécessaires et, après quelques années d’efforts, la situation s’est même fortement détériorée.

Aussi, dès notre arrivée au Gouvernement, dans ce qui a été appelé « le plan d’urgence de la rentrée 2012 », j’ai souhaité – le Président de la République et le Premier ministre me l’ont accordée – la création en urgence de 1 500 postes d’auxiliaires de vie scolaire pour l’aide individuelle et de 2 300 postes d’auxiliaires de vie scolaire pour l’aide mutualisée.

Ensuite, le 16 octobre dernier, sous l’impulsion forte du Parlement, en particulier du Sénat, Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée chargée de la réussite éducative et Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion, ont installé un groupe de travail sur les questions de pérennisation et de formation des emplois d’auxiliaires de vie scolaire, dans la suite du rapport de Mme Komitès.

Vous le savez, nous cheminons vers la CDIsation de ces personnels tant attendue depuis de nombreuses années.

Par ailleurs, pour la rentrée, j’ai obtenu 10 000 contrats aidés. Pour la première fois, il s’agira de contrats sur plusieurs années. Ils donneront lieu, ce qui a toujours été un problème majeur pour les uns et pour les autres, à une véritable formation pour accompagner des enfants en situation de handicap.

Vous savez également que, sur ma demande, dans le cadre des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, qui seront créées à la rentrée, un module de formation sur la prise en charge dans les classes des enfants en situation de handicap sera proposé à tous les enseignants et à tous les personnels de l’éducation nationale qui intégreront ces écoles. Ça n’a d’ailleurs pas été simple à mettre en œuvre.

La détermination du Gouvernement est donc entière sur ce sujet, car il s’agit d’une question où l’on voit vraiment la différence entre les paroles et les actes. Un pays comme le nôtre peut s’honorer de progresser, je l’espère dans un consensus national, dans la prise en charge de ceux qui ont besoin d’être intégrés et d’avoir accès dans notre République à l’école.

Dans le rapport annexé du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, à la suite des propositions du Sénat, en particulier de la sénatrice Dominique Gillot, nous avons modifié les éléments juridiques et précisé que « Les élèves sourds auront accès à un parcours scolaire en communication bilingue (enseignement en langue des signes et langue française) ou en communication en langue française (enseignement en français oral avec langage parlé complété et français écrit). Pour cela, des dispositifs adaptés à cette scolarisation seront développés par le regroupement des élèves dans une même classe – ce qui répond à une partie de votre question – ou la mutualisation des moyens nécessaires dans un même établissement à l’échelle académique. » La logique n’est donc pas d’isoler ces élèves, elle est, au contraire, de les regrouper et de leur donner des moyens.

Aujourd’hui, 6 000 à 7 000 élèves présentent des troubles de l’audition. Des pôles pour l’accompagnement à la scolarisation des jeunes sourds, les PASS, ont été créés en 2010 pour permettre à tous les élèves sourds, quel que soit le mode de communication choisi par leur famille, de suivre un enseignement au plus près possible – là est souvent la question – d’une scolarisation ordinaire sans se focaliser sur la seule langue des signes française, la LSF.

Les PASS ont pour vocation de donner à chaque élève la possibilité de choisir son mode de communication, sans qu’aucune hiérarchie ne soit établie entre la LSF et le langage parlé complété, le LPC.

Les pôles, actuellement au nombre de trente-deux, sont articulés autour d’un réseau de personnes ressources constitué de médiateurs pédagogiques choisis parmi les professeurs du premier ou du second degré.

Dans un rapport remis en juillet 2012, que j’ai rendu public comme tous les rapports de cette institution, l’Inspection générale de l’éducation nationale a mis l’accent sur les difficultés réelles liées à la mise en place du dispositif et en particulier sur la question de la ressource enseignante capable de proposer ces modes de communication. C’est une question que vous avez évoquée et c’est la première limite à laquelle nous nous heurtons aujourd'hui.

J’ai donc souhaité que nous puissions contourner cette difficulté structurelle en mobilisant – j’ai demandé aux services académiques d’agir dans cette direction – les professionnels et les associations de parents d’enfants sourds, seuls capables de déterminer quelles sont les meilleures conditions de scolarisation. Toutes les compétences, comme vous l’avez souhaité, doivent être reconnues. J’encourage nettement l’ensemble des académies à mutualiser aussi les moyens à leur disposition afin de prendre en charge le plus efficacement possible ces élèves.

Nous avons devant nous un travail de longue haleine. Nous aurons à franchir encore de nombreuses étapes, d’ordre culturel et matériel, mais aussi en termes de formation. Croyez que notre détermination est entière. Le Sénat nous a déjà accompagnés dans les premiers progrès. Nous sommes heureux de poursuivre avec vous cette lutte, qui est importante.

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