Intervention de Jean-Claude Requier

Réunion du 23 juillet 2013 à 15h00
Actualisation de la loi n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la nouvelle-calédonie diverses dispositions relatives aux outre-mer — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi organique et d'un projet de loi dans les textes de la commission

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteur, mes chers collègues, en 1981, la proposition n° 58 du candidat François Mitterrand était ainsi rédigée : « Pour les peuples de l’outre-mer français qui réclament un véritable changement, ouverture d’une ère de concertation et de dialogue à partir de la reconnaissance de leur identité et de leurs droits à réaliser leurs aspirations. »

À l’issue de bouleversements institutionnels nombreux et confus, ainsi que de violents conflits, qui devaient atteindre leur apogée lors de l’embuscade de Hienghène et la prise d’otages d’Ouvéa, la Nouvelle-Calédonie est parvenue à un équilibre grâce à un statut particulier et unique au sein de notre République. Après bien des divergences sur l’avenir de la « Grande terre », les Calédoniens sont parvenus à un compromis fondé sur le dialogue et l’écoute.

L’accord de Nouméa de 1998, point culminant des relations pacifiées, a réussi à réunir des points de vue a priori inconciliables. L’identité kanake était enfin reconnue et les indépendantistes acceptaient un maintien de la Nouvelle-Calédonie au sein de la République. Ce territoire s’est alors doté d’institutions et de règles juridiques originales, et son statut sui generis lui est reconnu par un titre à part au sein de la Constitution.

Un processus de décolonisation peut-il aboutir à assurer une paix immuable ? Les fractures et les blessures qui divisent la société calédonienne sont malheureusement encore trop profondes. La crise institutionnelle de 2011, provoquée en raison des conflits politiques autour du double drapeau, avec la démission successive de plusieurs gouvernements, nous prouve que la situation demeure fragile. Toutefois, la loi organique du 25 juillet 2011 y a apporté une réponse.

De même, les grèves générales contre la « vie chère » qui se sont déroulées au mois de mai dernier nous rappellent que la paix doit se construire en permanence.

Avec un produit intérieur brut par habitant le plus élevé de l’outre-mer et le deuxième plus élevé de la région – entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande –, des ressources en nickel riches, un gouvernement collégial fondé sur une entente entre indépendantistes et non-indépendantistes et une autonomie renforcée, la Nouvelle-Calédonie pourrait nous sembler à l’abri des problèmes économiques et sociaux. Or il n’en est rien.

Tout d’abord, la situation économique du territoire est instable. Elle repose encore sur l’exploitation du nickel, qui représente entre 8 % et 18 % de son PIB, et sur les transferts de la métropole. Dans un rapport de 2012, le professeur Étienne Wasmer explique cette vulnérabilité face aux variations des cours du nickel. En effet, en 2012, les exportations se sont contractées de 13, 8 %, en raison des difficultés du secteur.

Ensuite, le taux de chômage demeure élevé, et les disparités sociales sont deux fois plus fortes qu’en métropole. Ainsi, selon l’Institut d’émission d’outre-mer, l’écart entre les revenus des plus riches et ceux des plus modestes est de près de 8, contre 3, 6 en métropole, et le taux de pauvreté atteint 17 %... Ces disparités sont d’autant plus graves qu’elles jouent en défaveur des Kanaks.

De surcroît, les prix sont, en moyenne, 34 % plus élevés qu’en métropole, un record en outre-mer. Ils sont supérieurs de 65 % pour l’alimentation et de 39 % pour le logement, l’eau et l’énergie, pénalisant ainsi les ménages les plus fragiles.

L’insularité, l’éloignement, les frais des transports ou encore les habitudes de consommation influent sur les prix. De même, l’absence de concurrence et la fiscalité sur les importations participent à la « vie chère ».

Le protocole d’accord du 27 mai 2013 signé entre les syndicats et le patronat a permis d’apaiser les tensions en réduisant de 10 % les prix de 300 produits alimentaires et d’hygiène, ainsi que de 200 produits supplémentaires, et en appliquant un gel des prix jusqu’à la fin de l’année 2014.

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