Intervention de Victorin Lurel

Réunion du 23 juillet 2013 à 15h00
Actualisation de la loi n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la nouvelle-calédonie diverses dispositions relatives aux outre-mer — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi organique et d'un projet de loi dans les textes de la commission

Victorin Lurel :

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de la qualité de vos interventions, témoignant d’une hauteur de vues qui sied à un tel débat.

Je salue particulièrement la vigilance dont Mme Tasca et la commission des lois ont su faire preuve afin que l’évolution de la loi organique statutaire de la Nouvelle-Calédonie s’inscrive parfaitement dans le cadre de nos règles de droit. Le travail que nous avons mené en amont a été, je le crois, très bénéfique à la qualité du texte.

Madame Archimbaud, je vous remercie du soutien de votre groupe aux deux textes que nous soumettons aujourd’hui au Sénat. Je ne peux que me réjouir de votre adhésion à l’esprit et à la lettre de l’accord de Nouméa. Il est évident, pour le Gouvernement, que nous devons faire preuve de vigilance quant à l’utilisation des terres rares, en Nouvelle-Calédonie comme dans d’autres territoires présentant des potentialités sur ce plan.

Monsieur Frogier, j’ai écouté vos propos avec d’autant plus d’attention que vous êtes l’un des signataires de l’accord de Nouméa.

Nous souhaitions que le texte soit adopté par le Parlement avant le Comité des signataires du 11 octobre prochain. Le calendrier est donc contraint, d’autant que les élus de la Nouvelle-Calédonie nous ont demandé de le décaler légèrement, une très belle exposition sur l’art calédonien, en particulier kanak, devant se tenir à Paris.

Monsieur le sénateur, nous ne devons en effet toucher aux équilibres nés de l’accord de Nouméa que d’une main tremblante. Je tiens à vous rassurer à cet égard : le Gouvernement se sent dépositaire de l’esprit et de la lettre des accords de Matignon et de l’accord de Nouméa. S’agissant en particulier de la Nouvelle-Calédonie, il a un ADN commun avec les gouvernements Jospin et Rocard. Nous veillerons donc à ce que l’esprit de ces accords ne soit pas dénaturé.

Le Gouvernement a pris bonne note de la situation délicate dans laquelle la jurisprudence du Conseil d’État place les provinces, dont je suis spécialement attentif à préserver le rôle particulier. Nous aurons l’occasion d’en débattre plus amplement lors de l’examen de l’un de vos amendements.

Vous avez évoqué la nécessité de créer les conditions d’une solution consensuelle sur la question du drapeau. Telle est bien la démarche, s’inscrivant dans la perspective des grands gestes historiques accomplis par nos aînés, que le Gouvernement entend privilégier.

Par ailleurs, je crois qu’il est trop tôt pour envisager un référendum « couperet ». Il appartiendra au Congrès élu en mai 2014 d’aborder cette question. Le soutien de l’État ne lui fera pas défaut.

Madame Assassi, je vous remercie pour le soutien de votre groupe aux textes présentés aujourd’hui au Sénat. J’ai apprécié votre éloge des atouts et des perspectives de développement de l’économie calédonienne et, plus généralement, de l’ensemble des économies ultramarines. Nous devrons en effet rester vigilants et encadrer autant que possible leur développement.

Oui, les outre-mer sont une chance pour la République, et le gouvernement de Jean-Marc Ayrault est pleinement engagé, depuis treize mois, dans la valorisation de leurs atouts et la concrétisation des formidables perspectives qu’ils représentent pour ces territoires, et au-delà pour la France.

Oui, il faut mettre en place une stratégie en Nouvelle-Calédonie, comme ailleurs dans les outre-mer, pour ouvrir une nouvelle ère de croissance et de développement. Il devra s’agir d’une croissance durable, soucieuse de préserver les équilibres sociaux et environnementaux, car les écosystèmes des outre-mer sont fragiles, particulièrement en Nouvelle-Calédonie, territoire riche d’une belle biodiversité, avec plus de 2 200 espèces endémiques qu’il convient absolument de préserver.

Concernant le chômage des jeunes, le Gouvernement rappelle toujours à ses partenaires que la question politique et institutionnelle ne doit pas masquer les problématiques économiques et sociales – donner à chacun un savoir, un logement, un travail, un accès égal aux soins, à la santé, aux loisirs –, qui préoccupent d’ailleurs de plus en plus les élus de tous les territoires ultramarins. À cet égard, je note avec satisfaction que le Congrès de Nouvelle-Calédonie s’est saisi de la question de la concurrence et de la vie chère.

Monsieur Mohamed Soilihi, je vous remercie du soutien du groupe socialiste et de votre implication personnelle dans ce débat.

Le mouvement très dur qui se déroule à la prison de Nouméa rappelle malheureusement celui de l’an dernier. Depuis lors, la situation a pourtant évolué. Devant la surpopulation et la vétusté du site, la ministre de la justice a envoyé une mission indépendante sur place et, sur la base du rapport qui lui a été remis, plusieurs mesures ont été mises en œuvre.

Une circulaire de politique pénale spécifique à la Nouvelle-Calédonie a été diffusée le 18 mars dernier. Elle confirme et précise les grandes orientations fixées par la circulaire de politique générale du 19 septembre 2012. Elle rappelle également la nécessité d’agir tant sur les plans « présentenciel » et « sentenciel », en diversifiant les réponses pénales et en limitant l’incarcération aux cas pour lesquels celle-ci est absolument nécessaire, que sur le plan « postsentenciel », en favorisant une exécution individualisée des peines prononcées.

Une restructuration complète du centre pénitentiaire de Camp-Est a par ailleurs été engagée. Sa capacité d’accueil sera, à terme, de 447 places, contre 238 aujourd’hui. À l’issue de ce chantier, 90 % des places du site auront été reconstruites.

Le service d’application des peines a été en outre renforcé, avec la prise de fonctions, au début de cette année, d’un deuxième juge de l’application des peines.

Enfin, les études en vue de l’ouverture d’un établissement pénitentiaire et d’une chambre détachée dans le nord de l’île sont en voie de finalisation.

Je vous confirme, monsieur le sénateur, que les 32 millions d’euros que vous avez évoqués figurent bien dans les crédits des missions. Une mission doit se rendre à Koné pour préciser les conditions d’implantation d’une antenne dans cette commune.

Ces actions déterminées du Gouvernement doivent permettre de répondre aux problèmes de surpopulation et de vétusté constatés à la prison de Nouméa.

Monsieur Laufoaulu, l’ordonnance du 25 janvier 2013 relative aux dispositions applicables à certains agents relevant de l’État ou des circonscriptions territoriales exerçant leurs fonctions sur le territoire des îles Wallis et Futuna, dont la ratification est proposée dans le cadre du projet de loi ordinaire, crée un véritable statut d’agent de droit public pour les agents concernés, en lieu et place de règles anciennes, à savoir un arrêté de l’administrateur supérieur datant de 1976.

Je tiens à vous rassurer sur la volonté du Gouvernement de mener à bien cette réforme d’ici à la fin de l’année : les deux décrets d’application prévus par cette ordonnance seront soumis à l’examen du Conseil d’État à la rentrée prochaine.

Le processus d’élaboration de ces textes comporte bien entendu une phase de concertation avec les représentants locaux. Il en a été ainsi pour le premier décret, relatif à l’application de la loi statutaire du 13 juillet 1983 ; ce sera aussi le cas pour le décret relatif aux conditions générales applicables aux agents concernés par l’ordonnance. Nous ne nous sommes d’ailleurs pas contentés de consulter les élus ; nous avons aussi travaillé avec les syndicats.

Monsieur Antoinette, la fusion des collectivités a été décidée par les populations de la Martinique et de la Guyane, mais, pour certains, ce n’est pas une fin en soi. C’est la raison pour laquelle le débat public en Guadeloupe n’a pas permis pour le moment d’aboutir à cette solution.

Là encore, nous ne touchons que d’une main tremblante aux institutions. Il convient que les subjectivités évoluent et que la volonté politique soit bien présente pour faire avancer ce travail de rationalisation organisationnelle et administrative.

Quant à la fusion des personnels, vous souhaitez la prise d’une ordonnance. Nous serons encore plus prudents dans cette affaire, car nous connaissons les réticences des parlementaires – j’en ai été un – à l’égard du recours aux ordonnances, surtout lorsqu’ils ne sont pas suffisamment associés, en amont, à la préparation des textes. En l’occurrence, nous consulterons, s’il le faut, les élus, mais il me semble que la fusion des personnels va de soi et ne devrait pas poser de problème.

S’agissant du régime juridique du patrimoine et de l’affectation des biens, je partage une bonne partie de vos observations, monsieur le sénateur, et je me tiens à la disposition des élus pour lever toutes les difficultés techniques.

Par ailleurs, je vous remercie de votre appréciation positive sur l’ordonnance relative à la pêche. Cela étant, la lutte contre la pêche illégale dans les eaux guyanaises ne relèvera jamais d’une ordonnance…

L’État a décidé de partir à la reconquête, si j’ose dire, des espaces maritimes relevant de la souveraineté nationale. Nous envisageons notamment la mise en place de moyens de détection satellitaires pour lutter contre les intrusions dans les eaux territoriales guyanaises. Pour l’heure, les résultats ne sont peut-être pas encore tout à fait au rendez-vous, mais la volonté est affirmée et les moyens engagés. Cet effort doit maintenant s’inscrire dans la durée.

Enfin, le ministre que je suis entend vos propos sur les inquiétudes qu’éprouveraient les personnels. La fusion s’opère dans le respect de tous les droits des fonctionnaires, dans le cadre d’un dialogue permanent. L’expérience m’a appris que, très souvent, après des scrutins, notamment municipaux, on n’a pas le temps de procéder dans de bonnes conditions à l’élection des commissions administratives paritaires, les CAP, et des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, les CHSCT, en instaurant un dialogue riche et approfondi avec toutes les parties. Mais, dans le cas où des CAP ne seraient pas immédiatement installées, les syndicats sont bien présents et à même de jouer leur rôle.

Madame Claireaux, votre amendement relatif au centre de gestion et de formation de Saint-Pierre-et-Miquelon que nous examinerons tout à l’heure me semble aller dans le bon sens.

Par ailleurs, je tiens à vous dire très clairement que le Gouvernement est favorable à votre autre amendement, qui s’est vu opposer l’article 40 de la Constitution. Nous devrons trouver un autre véhicule pour le faire aboutir.

Mesdames, messieurs les sénateurs, telles sont les premières réponses que je voulais vous apporter. Je les préciserai en donnant l’avis du Gouvernement sur les différents amendements. §

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