Or, incroyable paradoxe, le texte de l'Assemblée nationale n'empêche ni n'aurait pu empêcher que Marie Humbert se retrouve inculpée d'administration de substances toxiques, délit passible de cinq années d'emprisonnement, et le docteur Frédéric Chaussoy d'assassinat, crime passible de la réclusion à perpétuité.
L'Assemblée nationale a travaillé neuf mois. Le Sénat se doit de corriger et d'améliorer le texte. Si la navette a un sens, c'est évidemment celui-là.
Le travail à accomplir est important, il doit être minutieux. Nos suggestions permettent de le faire sans plus tarder.
Il faut faire en sorte que des « affaires Humbert » ne puissent plus relever du droit pénal. Mais cela ne suffit pas. Il faut aussi que, même inconscients, même sans y avoir pensé lorsqu'ils étaient en bonne santé, et donc sans avoir donné de directives anticipées ou désigné de personne de confiance, ceux qui souffrent atrocement et sont condamnés sans pouvoir être soulagés, ceux qui ne peuvent plus vouloir vivre, soient aidés à mourir, sans devoir mourir de faim et de soif, comme l'américaine Terry Schiavo.
Mais parce que cette aide doit évidemment demeurer « l'exception », pour reprendre le terme utilisé par l'avis du Comité consultatif national d'éthique du 27 janvier 2000, cette exception doit être scrupuleusement encadrée.
Respect de la liberté de conscience des médecins, décision collégiale de trois médecins, dont l'un au moins sera médecin hospitalier, comme c'était le cas avant la loi Veil en matière d'avortement thérapeutique, temps de réflexion obligatoire pour tous, patients ou proches inclus, avant confirmation ou renonciation, compte-rendu soumis à une commission régionale de contrôle, saisine possible par la commission régionale d'une autorité nationale de contrôle ayant tout pouvoir d'évocation, existence d'un registre national automatisé des directives anticipées tenu par la même autorité nationale, registre que tout médecin pourra consulter aisément : tous ces éléments permettront un encadrement approprié.
De telles précautions pour encadrer une éventuelle et exceptionnelle assistance médicalisée pour mourir existent à l'étranger, et les premiers rapports démontrent déjà qu'elles évitent tout dérapage.
Le groupe socialiste vous propose donc, mes chers collègues, de compléter par amendements le texte dont le Sénat est saisi.
Reste une question de sémantique. L'assistance médicalisée pour mourir est, dans le langage courant, appelée « euthanasie », terme qui en soi signifie tout bonnement, étymologiquement, « mort douce », du grec eu-thanatos.
Or, ainsi qu'il est écrit dans l'étude du service des affaires européennes du Sénat de janvier 1999, intitulée « l'euthanasie », « dans les faits, l'euthanasie peut recouvrir plusieurs formes - c'est le Sénat qui parle - :...