Intervention de Jean-François Delfraissy

Mission d'information sur l'action extérieure de la France — Réunion du 22 mai 2013 : 1ère réunion
Audition de M. Jean-François delFraissy directeur de l'agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales anrs

Jean-François Delfraissy :

Il faudrait sans doute poser la question à nos partenaires du Sud. L'objectif de la recherche avec le Sud ne vise pas à financer tout à fait les mêmes actions que celles conduites par l'Institut Pasteur. Nous sommes davantage dans la recherche translationnelle, qui se situe entre la recherche fondamentale et la recherche clinique. Elle s'efforce par exemple d'aboutir à de meilleures stratégies de prise en charge et de traitement au bénéfice des populations. A titre d'exemple, avant 2005, lorsqu'est apparu un débat sur le coût des médicaments antirétroviraux au Sud, une série d'études parues dans Lancet et dans les meilleures revues anglo-saxonnes ont posé la question de l'opportunité de l'investissement dans ces nouvelles molécules, dès lors que les Africains étaient incapables, selon eux, de prendre un médicament. Ils prédisaient, de ce fait, un taux d'échec important. Nous avons lancé, à l'époque, un essai au Cameroun montrant que les médicaments génériques marchaient aussi bien que les médicaments de l'industrie pharmaceutique. Au Sénégal, d'autres préjugés ont été battus en brèche par une autre étude : celle-ci a mis en évidence 80 % de bons résultats à quatre ans parmi la cohorte suivie, ce qui est tout à fait comparable à ce que l'on observe au Nord.

Autrement dit, les Africains comprennent très bien les enjeux de santé, pour peu qu'on les leur explique. Encore fallait-il le montrer. La même démonstration a été faite au Cambodge.

Ce type d'approche nous laisse une grande liberté, dans la mesure où l'activité de recherche nous met relativement à l'abri de pressions politiques et permet d'aller à l'encontre d'un certain nombre de préjugés. Nous travaillons aujourd'hui sur une épidémie qui est parfois cachée, pour diverses raisons, en Afrique. L'homosexualité existe sur ce continent et la transmission du VIH à l'occasion de relations homosexuelles fait donc partie des modes de transmission de la maladie sur ce continent. Pour des raisons culturelles, politiques et stratégiques, ce mode de transmission est nié. La recherche en sciences humaines et sociales permet d'explorer ces aspects pour présenter aux autorités de santé des résultats susceptibles de déboucher sur des pistes d'action. Voilà ce que peuvent apporter des questions de recherche.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion