Intervention de Jean-François Delfraissy

Mission d'information sur l'action extérieure de la France — Réunion du 22 mai 2013 : 1ère réunion
Audition de M. Jean-François delFraissy directeur de l'agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales anrs

Jean-François Delfraissy :

Ce constat illustre bien les blocages français. Comme je l'ai souligné, la France ne peut plus être partout. Des choix s'imposent. Les choix scientifiques appartiennent aux agences. Les agences peuvent participer aux choix géopolitiques et géo-scientifiques mais ceux-ci leur échappent pour une part, ce qui est tout à fait normal. Je serais très content que le pouvoir régalien nous indique telle ou telle direction, charge ensuite aux agences de mettre en oeuvre ces orientations, pourvu qu'elles aient les moyens de le faire.

Il est clair que si vous nous demandez d'être présents dans 40 pays, nous vous répondrons que nous n'avons pas les moyens de le faire. Ce dialogue n'existe pas. Nous ne pouvons continuer ainsi. Nous disposons de forces scientifiques de haut niveau en France. Les réseaux de l'Institut Pasteur, de l'IRD, de l'ANRS et de l'Inserm ont une visibilité. Il faut que des choix politiques soient faits, comme va le faire le ministère de la recherche pour les grandes orientations stratégiques de recherche en général. Si tel n'est pas le cas, nous prenons le pouvoir. Je suis prêt à le faire mais je trouverais cela dommage, car ce choix doit être partagé. Il ne doit pas être à la merci de la visite d'un directeur d'institut qui se rend à tel endroit.

Enfin, je crois que l'enjeu scientifique majeur, sur lequel nous avons une réelle visibilité, et qui est à notre portée (compte tenu notamment de l'atout que nous confère la langue française), porte sur la recherche en « biologie santé » en Afrique. Si des choix sont à faire, cette priorité doit figurer tout en haut de notre liste. L'Afrique est le continent de demain et nous avons des élites que nous pouvons former. C'est un choix d'avenir. J'ai par exemple décidé de n'avoir aucune coopération sur le VIH/Sida avec la Chine. Cela me sera peut-être reproché un jour. J'ai essayé d'aller dans cette voie et je me suis rendu compte que les Américains mobilisaient des budgets mille fois supérieurs à ce que nous pouvons faire. Dès lors, à quoi cela sert-il ? Par contre, nous avons investi dans des activités qui se situent un peu « en marge », par exemple au Cambodge et au Vietnam, où nous avions des ressources déjà présentes. Compte tenu des enjeux budgétaires qui existent, définissons comme une priorité, pour les vingt ans qui viennent, la recherche en biologie-santé avec l'Afrique.

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