Intervention de Laurence Tubiana

Mission d'information sur l'action extérieure de la France — Réunion du 5 juin 2013 : 1ère réunion
Audition de Mme Laurence Tubiana directrice de l'institut du développement durable et des relations internationales iddri

Laurence Tubiana, directrice de l'Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) :

Nous avons créé cet institut ex nihilo, sans savoir exactement où nous allions. Onze ans plus tard, l'IDDRI s'est considérablement stabilisé et bénéficie d'un fort affectio societatis. Les règles fixées au départ se sont avérées résilientes et fructueuses. Depuis le début, nous revendiquons notre statut d'un institut de coopération scientifique, par opposition à un bureau de consultants. L'IDDRI n'engage aucune recherche pour une entreprise particulière. Nos travaux sont publics. Au-delà du financement, certes primordial, travailler avec des partenaires privés nous permet de réfléchir autour d'informations et de questions propres à chaque entreprise. Nous estimons qu'en réunissant des personnes aux compétences différentes et en confrontant un regard public et un regard privé, nous identifions des questions dépassant les conflits d'intérêts immédiats.

Je vous citerai deux exemples réussis. Nous souhaitions comprendre ce que la décarbonation de notre système énergétique signifiait pour les industries françaises et européennes. Nous avons donc mené un exercice avec les grands groupes industriels français membres de l'IDDRI autour de trois grandes équipes de recherches, dix entreprises et des membres de l'administration intéressés par le suivi des travaux. Nous avons élaboré des questions et créé un modèle afin de simuler l'impact sur chaque secteur, préciser les problèmes et identifier des solutions. En réunissant autour de la table des entreprises concurrentes, comme GDF SUEZ, EDF, Veolia, Lafarge ou Saint-Gobain, différentes visions se sont affrontées. Les entreprises ont apporté de nombreuses informations, l'analyse s'en est trouvée enrichie. Personne n'a revendiqué la propriété de ces résultats, rendus publics. Deuxième exemple : nous cherchions à déterminer la validité des partenariats entre les secteurs public et privé dans les services d'eau au Maroc, en Inde et en Indonésie, avec à l'esprit cette question globale, intéressant toutes les entreprises concurrentes que nous avons associées pour l'occasion : quel modèle et quelles solution technique pour faire accéder les plus démunis à l'eau potable ? Nous avons publié les résultats, avec l'appui de l'AFD et je crois que la collaboration des acteurs directs de ces problématiques enrichit considérablement l'information et l'analyse.

L'IDDRI est également un lieu de débat pour l'administration avec le secteur privé, en témoignent nos conseils d'administration dont les débats sont longs et fructueux. Cette réussite repose cependant avant tout sur des personnes et tient à l'implication personnelle des participants.

L'IDDRI est un institut de recherche, sans agenda politique ni campagne de communication : nous souhaitons faire progresser la cause de l'environnement car cela nous semble important pour le développement économique et social. Nous fournissons à nos administrateurs ainsi qu'aux équipes exerçant chez nos partenaires, les informations nécessaires afin qu'ils soutiennent ces idées au sein de leur entreprise. Des salariés du groupe Lafarge ont défendu des objectifs de réduction d'émission contraignants alors que spontanément, la politique de l'entreprise était autre. Ces contributeurs deviennent des agents de changement en faveur de l'environnement au sein de leur propre structure. Nous retrouvons là l'objet de notre fondation.

Nous définissons nos projets lors de nos conseils d'administration. Nous publions généralement nos travaux mais sur des sujets plus sensibles, comme le biocarburant, une partie de nos discussions se tient en privé. Notre travail s'avère long car beaucoup d'intervenants doivent s'exprimer. Enfin, le financement de l'IDDRI provient du secteur privé pour un tiers, de fonds internationaux pour un second tiers et du secteur public français pour le dernier tiers.

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