Intervention de Benoît Hamon

Réunion du 10 septembre 2013 à 21h30
Consommation — Suite de la discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission

Benoît Hamon, ministre délégué :

Cette augmentation ne réglera pas tous les problèmes, car, au-delà de la révision générale des politiques publiques, ou RGPP, ce service a été également concerné par la réforme de l’administration territoriale de l’État, ou RÉATE, qui a réorganisé les missions des services déconcentrés. La DGCCRF a besoin de retrouver une chaîne de commandement beaucoup plus efficace et, à la demande du Premier ministre, nous avons engagé, depuis la réunion du comité interministériel pour la modernisation de l’action publique, le CIMAP, un travail spécifique sur l’organisation des services de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes dans les territoires, pour améliorer l’efficacité de ces services en fonction de la variété des missions de leurs agents : ceux-ci sont amenés à se rendre aussi bien dans un restaurant que dans un centre de loisirs sportifs, voire dans une entreprise, pour contrôler des activités très différentes, quand on ne leur demande pas de vérifier les pratiques du commerce en ligne…

Même si l’annonce n’est pas encore tout à fait officielle, je peux malgré tout vous dire que les effectifs de la DGCCRF devraient modestement augmenter en 2014. Je tenais à vous en informer en ouverture de notre débat.

Je souhaite revenir sur la question du registre national des crédits aux particuliers, le RNCP, et élargir le débat aux autres questions relatives au crédit, comme l’a fait Mme Dini, qui a rendu un rapport important que j’ai lu et dont le Gouvernement s’est inspiré pour construire sa politique à l’égard du crédit.

Nous avons voulu adopter une approche complète et cohérente de la politique du crédit. Il ne faut pas se contenter d’examiner mesure par mesure le dispositif proposé par le Gouvernement, mais avec un peu de recul, pour l’embrasser dans sa totalité comme s’il s’agissait d’un tableau impressionniste.

La mesure phare proposée par le projet de loi est effectivement la création du registre national des crédits aux particuliers. Je tiens à affirmer que jamais je n’ai dit ou pensé que la création de ce registre éliminerait le problème du surendettement en France. Il s’agit d’un instrument qui nous permettra de détecter de manière plus précoce les ménages qui pourraient basculer dans le surendettement. Reste que c’est un instrument d’encadrement de l’activité de crédit parmi d’autres, qui a pour principe d’être équilibré, car on peut vouloir encadrer l’activité de crédit sans pour autant remettre en cause le principe du crédit à la consommation. Ce dispositif, je le répète, interviendra parmi plusieurs autres et il ne faut pas lui attribuer davantage de vertus que ne l’ambitionne le Gouvernement lui-même : ce dispositif est important à nos yeux, mais il ne réglera pas la question du surendettement. Je le dis d’autant plus que j’ai parcouru un chemin inverse du vôtre, madame Dini : je n’étais pas très favorable à la création de ce registre lorsque je suis devenu ministre, mais c’est à l’écoute des principaux acteurs de la lutte contre le surendettement et des différentes expertises des administrations de Bercy que je me suis rangé à l’idée que la création de ce registre était nécessaire.

Pour répondre à M. Le Cam, le registre, tel que nous l’avons construit, ne recensera pas 25 millions de personnes, sinon nous ne vous le proposerions pas. Notre réflexion embrassait, au départ, les découverts, les crédits à la consommation, les crédits immobiliers, mais le Conseil d’État comme la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, et la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH, nous ont objecté que ce fichier serait disproportionné au regard de l’objectif visé, à savoir la lutte contre le surendettement et qu’il n’échapperait pas, par conséquent, à la censure du Conseil constitutionnel. Nous avons donc retravaillé notre copie pour définir un fichier proportionné à notre objectif initial.

J’indique donc à Mme Lamure que nous avons adopté une attitude exactement contraire à celle du précédent gouvernement lorsqu’il a voulu créer un fichier des cartes nationales d’identité biométriques ou électroniques : la censure du Conseil constitutionnel était tombée, parce que le gouvernement de l’époque n’avait pas écouté les remarques qui lui avaient été présentées. Le gouvernement actuel a revu sa copie, parce qu’il a voulu présenter un texte équilibré : je ne tiens pas à faire passer une mesure en force devant les deux assemblées, avec toute la détermination du Gouvernement, pour qu’elle soit ensuite censurée par le Conseil constitutionnel ! Je veux doter notre pays d’un instrument supplémentaire qui permette de vérifier la solvabilité des ménages avant de leur attribuer le crédit de trop.

J’en viens au désaccord qui nous oppose, monsieur Le Cam. Regardez qui est pour ou qui est contre ? Qui veut aujourd’hui du registre national des crédits aux particuliers ? Le Secours catholique, la fédération CRESUS et le Secours populaire. Qui n’en veut pas ? La BNP, la Société générale et le Crédit agricole !

Ceux qui sont aux côtés des ménages surendettés souhaitent la création du registre national des crédits, mais ils ne pensent pas que nous allons éliminer ainsi le surendettement. En revanche, ce registre leur évitera, demain, d’avoir à gérer les dossiers de quelques dizaines de milliers de familles supplémentaires ; je rappelle que 200 000 nouveaux dossiers de surendettement sont déposés chaque année ; en stock – bien que le mot ne soit pas joli –, 700 000 à 800 000 familles sont concernées, d’où la question des plans de désendettement et de la durée de ces plans.

Cette réalité va croître avec les conséquences de la crise, et je sais que vous allez déposer un amendement sur la question du salaire minimum, parce que vous menez un combat pour augmenter la rémunération du travail. En raison de la crise, parce que le chômage est élevé et parce que les pensions et les salaires sont modestes, nous savons que les plus défavorisés, en premier lieu les familles monoparentales – souvent des mamans seules –, vont souscrire un crédit à la consommation, sur internet ou dans une grande surface, non pas pour procéder à un achat, mais pour régler des factures.

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