Vos explications et votre plaidoyer ont été particulièrement complets. Vous défendez légitimement votre institution et vous répondez aux critiques qu'on lui adresse. Mais notre débat porte sur l'indépendance. Vos arguments en faveur de l'indépendance rejoignent ainsi ce que nous voulons pour le CSA. Ses membres seront en effet choisis en fonction de leur compétence et sans aucune considération politique, puisque le vote interviendra aux trois cinquièmes des suffrages des membres des commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat. Au-delà du présent projet de loi, je considère d'ailleurs que les désignations d'autorités ou de personnalités indépendantes devraient toujours s'opérer de cette façon.
Que toutes les missions que vous décrivez et défendez nécessitent l'indépendance n'invalide pas leur transfert éventuel au CSA. Il ne s'agit pas de transposer les missions actuelles du CSA dans le champ d'internet ; il ne faut pas essayer d'effrayer le chaland en disant que les contenus d'internet seront surveillés ! Ce qui est envisagé, c'est le transfert des compétences actuelles de l'Hadopi, qui ne sont pas attentatoires aux libertés publiques, comme vous l'avez montré. Dans ce domaine, le décret a supprimé le seul élément, la coupure de l'accès à internet, qui semblait disproportionné au vu de ce qu'il est devenu aujourd'hui, aussi essentiel que l'air qu'on respire.
Au Sénat, nous nous sommes extirpés du débat manichéen qui a pu avoir lieu dans d'autres instances : je ne vois donc pas qui vise votre véhémence ; les seules réactions très dures que j'ai entendues à ce sujet s'opposaient à l'existence de votre mission et de votre institution. Je ne sais pas si vous nous avez communiqué une délibération de l'Hadopi ou si votre déclaration traduit une opinion personnelle. Si on est d'accord avec les conclusions du rapport Lescure, il faut certes se donner le temps d'arriver à un acte législatif global et à des solutions non législatives complémentaires.
En revanche, lorsque vous prétendez que tout va bien et que l'incertitude ne pèse pas sur le travail ni sur le moral, vous me surprenez. Tout ce que j'entends sur le sujet, sans le solliciter, démontrerait plutôt le contraire. Les autorités ont décidé de l'extinction de l'Hadopi et du transfert de ses missions. Comme cela ne se fait pas vite, cela pèse sur les personnels mais aussi sur l'autorité même de l'institution. Or tout est une question d'autorité dans ce domaine. Comme l'a dit la ministre, le plus vite sera le mieux. C'est la meilleure façon de ne pas laisser mourir ce que vous avez entrepris. Nous aurons plus tard d'autres débats sur l'acte II de l'exception culturelle et sur la globalité des équilibres nouveaux à rechercher dont parle M. Lescure. C'est en se fondant sur la réalité de votre mission, qui n'a pas été le flicage et la répression que d'aucuns ont décrits, qu'on se convainc qu'il faut procéder au transfert le plus vite possible, à partir du moment où cela a été arbitré.