Vous l’aurez compris, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement a délibérément choisi d'exclure une phase de recevabilité de la procédure d'action de groupe. C'est la raison pour laquelle il est défavorable à l'amendement n° 90 rectifié bis.
En effet, il a considéré qu’une telle phase n'était pas nécessaire compte tenu des critères précis d'ores et déjà retenus par le texte pour déterminer le champ d'application de cette procédure et la qualité pour agir.
Je comprends que des inquiétudes puissent exister quant au caractère plus ou moins farfelu d'un certain nombre de procédures, mais nous considérons que le juge disposera de la totalité des moyens pour distinguer les actions fondées de celles qui ne le seront pas.
Je le répète, lors de l'examen de l'affaire au fond, il statuera sur la recevabilité de l'action dans les conditions de droit commun. Dans son jugement déclaratoire de responsabilité, il définira le groupe et fixera les conditions d'indemnisation des consommateurs victimes du préjudice économique.
En outre, ayant le souci de mettre en œuvre une procédure permettant un traitement aussi rapide que possible des contentieux de consommation de masse, le Gouvernement considère que la diffusion d'informations sur l'existence et la recevabilité d'une action de groupe avant que toute décision soit rendue est susceptible de porter gravement atteinte à la réputation du professionnel alors même que sa responsabilité pourrait finalement ne pas être retenue. On ne maîtrise pas la publicité qui pourra, le cas échéant, être faite sur cette phase de recevabilité… Je pense, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous pouvez entendre cet argument.
C'est pourquoi dans le schéma prévu dans le projet de loi les consommateurs ne seront informés de l'existence de l'action de groupe qu’après la décision définitive rendue au fond et selon les modalités décidées par le juge.
Tel est le garde-fou que nous avons mis en place pour éviter toute tentation d’engager de multiples procédures, parfois même sur l’initiative d’un concurrent qui voudrait attaquer une autre entreprise par le biais d'une association de consommateurs.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Il est également défavorable à l'amendement n° 4, car la rédaction actuelle de l'alinéa 14 de l’article 1er vise justement à ne pas mettre en place de phase de recevabilité de l'action. Par cohérence avec l'avis défavorable donné à l'amendement n° 90 rectifié bis, nous ne voulons pas instaurer de phase supplémentaire qui, de surcroît, allongerait les délais.
Par ailleurs, l'amendement n° 4 tend à ce que la responsabilité du professionnel soit établie au vu de cas individuels présentés par l'association requérante. Or cette précision est, à nos yeux, inutile, car c'est au vu des éléments que cette dernière apporte que le juge doit définir le groupe de consommateurs lésés, à l'égard desquels la responsabilité du professionnel est retenue. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle j’avais, hier, émis un avis défavorable sur un amendement de Mme Lamure relatif au fait que l'association de consommateurs et le juge doivent être dûment saisis.
Il est clair que la procédure retenue oblige d’ores et déjà l'association à présenter un certain nombre de réclamations qui justifient une saisine du juge.
Enfin, comme M. le rapporteur, j’émets un avis défavorable sur l'amendement n° 542, puisque le principe non bis in idem est déjà consacré à l’alinéa 50 de l'article 1er du projet de loi.