Avant l’examen des amendements portant sur cet article, je souhaite expliciter la position à laquelle la commission a abouti après de nombreux débats.
Je crois utile de souligner, pour donner une cohérence globale à notre discussion sur le volet crédit du projet de loi, qu’il est fondamental de prendre en compte simultanément les deux questions traitées, à savoir, à l’article 19, l’extinction des lignes inactives des crédits renouvelables et, à l’article 19 ter, le sort réservé aux cartes associant fidélité et crédit.
Lors de l’examen des amendements qui n’ont pas été intégrés au texte de la commission, nous avons émis un avis favorable sur les amendements tendant à rétablir, à l’article 19, une durée de deux ans d’extinction automatique des lignes dormantes, alors que le texte que nous examinons le réduit à un an. En revanche, nous nous en sommes remis à la sagesse de notre assemblée concernant les amendements déposés sur l’article 19 ter et tendant à interdire les cartes « confuses ».
Comme vous le savez, en utilisant lesdites cartes, certains consommateurs peuvent, en souhaitant adhérer à un programme de fidélité, se retrouver entraînés dans le crédit renouvelable. Je formulerai plusieurs observations sur ce sujet.
D’abord, ces cartes sont devenues de moins en moins ambiguës au fil des interventions législatives. En effet, le droit en vigueur donne la priorité par défaut au paiement comptant et oblige le vendeur à formuler, sur le lieu de vente, une proposition alternative au crédit renouvelable, à savoir une offre de crédit amortissable.
Ensuite, l’article 18 du projet de loi vise à garantir qu’un prêt amortissable est effectivement proposé en alternative au crédit renouvelable et l’article 19 ter tend à encadrer encore plus rigoureusement ces cartes « confuses », en étendant le droit en vigueur aux cartes ouvrant droit à des « avantages de toute nature ».
Par ailleurs, l’interdiction de ces cartes, qui revient à imposer la « déliaison » de leurs fonctions de fidélité et de crédit, pourrait avoir un impact considérable sur la santé économique de certaines enseignes et de certains secteurs de notre économie. Seraient en effet affectées les enseignes de taille moyenne qui assurent des flux économiques intéressants pour nos territoires, en particulier ruraux.
Enfin, à terme, la création du registre national des crédits aux particuliers permettra de sécuriser l’utilisation de ces cartes en déclenchant des signaux d’alerte.
L’interdiction pure et simple me paraît donc juridiquement et économiquement moins justifiée aujourd’hui qu’il y a quelques années. En revanche, je suggère de franchir un pas supplémentaire vers la déliaison et la suspension des lignes dormantes de crédit renouvelable, en adoptant simultanément deux mécanismes.
Le premier, présenté par Mme le rapporteur pour avis de la commission des finances au paragraphe I de l’amendement n° 430, vise à obliger les enseignes de distribution à proposer un programme d’avantages sans crédit.
Le second consiste à suspendre les lignes de crédit renouvelable, qu’elles soient associées ou non à une carte de fidélité, au terme d’un an d’inactivité : le dispositif le plus complet, sur ce point, me paraît être celui qu’a proposé Mme Létard par le biais de l’amendement n° 376 rectifié bis. Il constitue un bon compromis entre le maintien à un an du délai d’extinction automatique et le retour à deux ans.
L’adoption de ces deux amendements aboutirait en droit et en pratique à favoriser la déliaison sur la base du choix effectué par le consommateur et à suspendre systématiquement, au bout d’un an, les lignes de crédit renouvelable inactives.
Cette solution me semble une alternative réaliste à la prohibition totale et au retrait de toutes les cartes en circulation associant fidélité et crédit : dans la conjoncture actuelle, l’impact d’une telle mesure risquerait en effet d’être excessif.
Ma position se résume donc à donner une tonalité négative à l’avis de sagesse émis par la commission sur les amendements ayant pour objet la déliaison des fonctions de fidélité et de crédit des cartes « confuses ». Je serai personnellement opposé au maintien à deux ans du délai d’extinction des lignes de crédit dormantes et favorable au texte adopté par l’Assemblée nationale, qui prévoit une durée d’un an, sous réserve de l’adoption du dispositif de Mme Létard, lequel constitue, dans ce contexte général, un bon compromis.