Je suis sensible aux arguments de Dominique Rousseau, que je remercie par ailleurs de ne pas avoir cité les paroles du président Chirac in extenso... Comme cela a été le cas pour le quinquennat, les conséquences de la réforme qu'il nous est demandé de voter n'ont pas été évaluées... Qu'en est-il, en particulier, du nécessaire rééquilibrage des pouvoirs entre le Gouvernement et le Parlement ? Aujourd'hui, le cumul des mandats ne permet pas au Parlement de résister face au Gouvernement, mais l'interdiction du cumul ne le permettra pas plus si on ne donne pas aux parlementaires les moyens matériels, humains et juridiques d'exercer les pouvoirs de contrôle que leur reconnaît la Constitution. La semaine de contrôle au Parlement y est d'ailleurs la plus pauvre. Comme sénateur, quel pouvoir réel ai-je, aidé d'un seul collaborateur et de mes codes, face à l'armada de fonctionnaires de Bercy ou du ministère de l'Intérieur ? Comme rapporteur, je suis totalement dépendant des données et informations qu'accepte de me transmettre le Gouvernement. Pour ma part, je pense que les pouvoirs dont disposent les parlementaires sont encore trop restreints. Il faudrait notamment que tous les rapporteurs puissent disposer des pouvoirs des rapporteurs budgétaires.
Par ailleurs, je suis intimement convaincu que cette réforme ne favorisera en rien le renouvellement de la classe politique. De ce point de vue, je suis d'accord avec le Professeur Beaud, il faut placer les partis politiques, dont les assises se sont lentement érodées, devant leurs responsabilités.
Enfin, faut-il cultiver la spécificité du Sénat ? Je ne le crois pas. Je rappelle que notre assemblée a été créée afin de porter une certaine « sagesse » - dans une optique assez conservatrice, il faut le reconnaître. À mon sens, le Sénat a vocation à rester une assemblée généraliste. C'est le mode d'élection des sénateurs qu'il faut modifier.
Sur l'ensemble de ces points, il me semble que la réforme qui nous est proposée n'apportera pas de solution satisfaisante. Je la voterai néanmoins, tout en étant conscient du fait que le pouvoir des appareils des partis politiques risque de s'accroître encore sur le Parlement.