Intervention de Laurence Rossignol

Réunion du 13 septembre 2013 à 21h30
Consommation — Article 68

Photo de Laurence RossignolLaurence Rossignol :

On peut donc penser qu’il s’agit d’un « marronnier », ou de l’un de ces sujets sur lesquels on renonce toujours à avancer.

Il reste que, au cours de ces cinquante et quelques années, un certain nombre d’enjeux sont venus s’ajouter, en particulier l’enjeu écologique.

On ne pourra pas, dans les grandes villes, réduire le nombre de véhicules particuliers circulant si nous ne sommes pas capables de déployer une offre de transport avec chauffeur suffisante pour constituer une alternative crédible à la voiture individuelle.

La question de l’offre des véhicules avec chauffeur est donc essentielle pour la maîtrise du nombre de voitures circulant dans une ville. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, plus il y a de taxis en circulation, moins il y a de voitures individuelles. Les taxis sont en effet l’indispensable complément des transports en commun.

Aujourd’hui, il devient très difficile de héler un taxi dans Paris. Les taxis en maraude se font rarissimes et les compagnies travaillent essentiellement avec de grandes sociétés, sur compte, réservation et abonnement.

Ce problème nous concerne tous, et l’essentiel ne réside pas dans l’article que nous votons, mais dans le décret que le Gouvernement est en train de préparer.

Le numerus clausus qui pèse sur les taxis est un obstacle à l’évolution écologique, touristique et économique de Paris. Je comprends bien la situation des chauffeurs de taxi, qui achètent très cher leur plaque et veulent être sûrs de pouvoir revendre ce patrimoine. Mais de deux choses l’une : soit nous augmentons le numerus clausus, soit nous ouvrons ce marché à la concurrence par d’autres sortes de véhicules avec chauffeur.

Le décret en préparation, qui prévoit d’instituer un délai entre la réservation et la course, vise à maintenir le monopole des taxis sur le transport particulier dans Paris. Or ce monopole n’est pas sain, car il bloque toute évolution.

Il m’arrive, en tant que parlementaire, d’avoir à voter – ce que je ne peux faire sans quelques hésitations, je ne le cache pas – l’ouverture à la concurrence de services publics où existe un monopole, celui-ci étant alors dénoncé comme un obstacle au développement économique… Ainsi, il faudrait voter l’ouverture à la concurrence des services publics, mais maintenir le monopole et renoncer à la concurrence lorsqu’il s’agit d’activités privées !

Bien sûr, on ne pourra pas régler cette question ce soir, mais on ne saurait faire preuve de conservatisme et d’immobilisme dans un dossier comme celui-là. Alors que nous discutons ici, le Gouvernement travaille à de futures dispositions réglementaires, des négociations ont lieu. Celles-ci doivent prendre en compte à la fois le patrimoine des chauffeurs de taxi, la nécessité d’ouvrir le marché à d’autres types de véhicules et de services, et l’impératif d’éteindre, à terme, ce système monopolistique organisé autour du numerus clausus et de la vente et de l’achat de plaques.

Sur ce dernier point, je voudrais rappeler que les chauffeurs de taxi artisans sont devenus minoritaires dans la profession. Aujourd’hui, les plaques sont achetées par de grandes sociétés, qui embauchent des chauffeurs de taxi. Ceux-ci ne sont plus les artisans que l’on évoquait en 1958, lors du premier rapport auquel j’ai fait allusion.

Voilà ce que je souhaitais dire ce soir, de façon que le Parlement puisse également émettre un message en direction du Gouvernement, qui dispose du pouvoir réglementaire, afin de faire valoir que l’ouverture à la concurrence est parfois nécessaire, surtout quand elle concerne le secteur privé ! §

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