Intervention de Élisabeth Lamure

Réunion du 13 septembre 2013 à 21h30
Consommation — Vote sur l'ensemble

Photo de Élisabeth LamureÉlisabeth Lamure :

Avant que nous nous prononcions sur l’ensemble de ce projet de loi relatif à la consommation, je souhaite revenir sur quelques points marquants ayant jalonné son examen.

Le groupe UMP et moi-même avons commencé à examiner ce texte en émettant de nombreuses réserves, mais avec la volonté de participer pleinement à ce débat. Nous avions même l’ambition d’aboutir à un texte équilibré.

Nous pensions et nous pensons toujours que le législateur peut apporter des solutions rapides et efficaces à nos compatriotes en ce qui concerne les pratiques commerciales qui freinent la consommation. Assurances, banques, clauses abusives, action de groupe, fichier positif : votre projet de loi, monsieur le ministre, nous a semblé relever beaucoup de défis, peut-être un peu trop d’un coup.

Malgré cela, nous avons examiné ces dispositions avec le plus grand intérêt, d’autant que celles-ci étaient parfois inspirées de travaux menés par la précédente majorité.

Concernant l’action de groupe, depuis l’examen en commission jusqu’à la discussion générale en séance publique, nous avons continuellement rappelé que notre groupe politique était favorable à son introduction dans le droit français. Nous n’avons pas changé d’avis : nous considérons toujours que l’action de groupe est un outil supplémentaire au service de la justice et des consommateurs.

Malheureusement, votre procédure d’action de groupe a été polluée par cette curieuse création de l’action de groupe simplifiée. Là aussi, nous sommes restés cohérents et nous vous avons prévenus, comme l’a fait la commission des lois, que cette action de groupe simplifiée posait des problèmes élémentaires quant aux droits de la défense.

Insérer trois alinéas pour introduire dans le code de la consommation une nouvelle procédure devant les juridictions civiles, cela ne me semble pas très sérieux. Il n’est pas besoin d’être juriste pour le comprendre !

Les droits de la défense et le droit à un procès équitable attendront...

Puisque aucun amendement de notre groupe politique visant à répondre à nos préoccupations n’a trouvé d’écho favorable lors de l’examen de l’article 1er, vous nous avez en quelque sorte contraints à un vote défavorable sur cet article, ce que nous regrettons. Nous ne pouvions pas nous abstenir alors même que la procédure civile soumise à notre examen ne répondait à aucune des exigences que nos amendements traduisaient.

J’en viens au fichier positif.

Là encore, à l’instar de la commission des lois, nous restons perplexes face à l’efficacité de cette mesure. Si nous ne sommes pas a priori hostiles à l’introduction d’un fichier positif, afin de prévenir et de traiter les cas de surendettement, nous nous interrogeons sur le ciblage de votre dispositif. Le fait que plus de 10 millions de personnes soient concernées montre bien que vous avez sans doute utilisé des critères d’appartenance trop larges, ce qui est paradoxal si l’on considère que vous n’intégrez pas dans votre fichier les prêts immobiliers. Cependant, malgré d’autres réserves par rapport aux mesures d’identification ou au risque de détournement de ce fichier, nous avons choisis de nous abstenir.

Nous sommes également plus que partagés en ce qui concerne le renforcement des pouvoirs de la DGCCRF ; nous restons ainsi fidèle à notre ligne de départ. Certaines de ces mesures relèvent du bon sens, d’autres nous semblent ignorer, une fois encore, les droits de la défense.

J’en arrive maintenant à nos trop rares motifs de satisfaction.

Tout d’abord, contrairement à ce que certains ont pu dire, nous sommes très heureux que le « fait maison » bénéficie désormais d’une définition précise. Nous avons simplement souhaité donner un peu plus de souplesse à nos restaurateurs, sans rien enlever aux garanties qu’apporte le label.

Je pense également aux plans conventionnels de redressement, dont l’abaissement a été limité à sept ans, aux délais de résiliation des crédits renouvelables inactifs, à la facturation à la minute dans les parkings publics payants ou encore à l’amendement de notre collègue Bruno Sido visant à donner un cadre juridique à l’abonnement souscrit en faveur d’un tiers bénéficiaire.

Je tiens à préciser, mes chers collègues, que certaines de ces « petites victoires » ont d’ailleurs été obtenues avec le soutien de la majorité, contre l’avis du Gouvernement.

Je terminerai en évoquant les dispositions relatives aux négociations commerciales ainsi qu’à l’alourdissement de bon nombre de sanctions pénales afférentes à des pratiques commerciales prohibées.

Même si certaines sanctions nouvelles nous semblent justifiées, notamment au regard de récents scandales sanitaires, je crois que ces mesures témoignent d’une défiance profonde vis-à-vis du monde de l’entreprise.

Malheureusement, vous semblez ne connaître les entreprises que de manière abstraite, comme s’il s’agissait de corps étrangers à notre propre économie, dont le seul but serait de capter la valeur ajoutée.

Votre projet de loi ignore trop souvent que, derrière une entreprise, se cachent des femmes et des hommes qui prennent des risques, s’exposent à la faillite, à de lourdes sanctions pénales, à un environnement réglementaire instable.

Que vous vouliez mettre fin aux clauses abusives, faciliter la résiliation de contrats reconduits automatiquement nous convient parfaitement. Ces problèmes nous touchent tout autant que vous, comme nous l’avons montré à l’occasion de l’examen de ce projet de loi.

Cependant, à travers ce texte, vous allez bousculer le modèle économique de milliers d’entreprises en France, mais pas celui de leurs concurrents internationaux.

Ce projet de loi vient clôturer les dix-huit premiers mois d’exercice de ce gouvernement, dix-huit mois où vous n’avez eu de cesse de légiférer, de réglementer, d’encadrer, de rationaliser, de contrôler la vie de nos entreprises.

Je ne suis pas partisane du laisser-faire et je ne crois pas aveuglément aux vertus de la fameuse « main invisible », mais je pense que nos compatriotes qui ont à cœur de s’émanciper du salariat pour créer ces richesses indispensables à la redistribution sont accablés par cette œuvre législative.

Même si ce projet de loi comporte certaines avancées pour les consommateurs, les trop nombreuses dispositions qui visent à alourdir les contraintes administratives et à renforcer l’insécurité juridique qui pèsent sur les entreprises nous obligent à nous prononcer contre, ce qui n’était pas forcément, au départ, notre intention.

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