Intervention de Roland Courteau

Réunion du 17 septembre 2013 à 14h30
Égalité entre les femmes et les hommes — Article 7

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

L’ordonnance de protection, mesure centrale de la loi du 9 juillet 2010 se substituant au « référé violence », vise à fournir un cadre d’ensemble aux personnes victimes de violences, leur permettant de stabiliser leur situation juridique.

J’insiste sur le fait que la gamme des mesures à la disposition du juge est bien plus large, dans le cadre de l’ordonnance de protection, que dans celui d’une procédure pénale et d’un contrôle judiciaire.

L’ordonnance de protection a fait ses preuves et elle est jugée positivement par les associations. La situation juridique de la victime est mieux assurée. Malheureusement, on enregistre de fortes disparités territoriales en matière de délivrance de l’ordonnance de protection.

Bien utilisé dans certains départements, ce dispositif ne l’est pas, ou si peu, dans d’autres. Pourquoi ? Est-ce dû à des difficultés pour établir des preuves ? Au désistement des requérantes ? À un défaut de connaissance du dispositif et des mesures qui peuvent figurer dans l’ordonnance de protection ? À un manque de formation des magistrats, des avocats ? Je ne sais pas !

Il est vrai que l’attribution de pouvoirs pénaux aux juges aux affaires familiales, les JAF, nécessite, comme le soulignent Danielle Bousquet et Guy Geoffroy dans leur rapport, une véritable révolution culturelle de leur part.

Or, comme cela a été dit, il suffit qu’un seul maillon de la chaîne fasse défaut pour que tout le dispositif soit enrayé. En effet, si les avocats connaissent mal la procédure ou si les magistrats la sous-estiment, alors les victimes seront, de fait, souvent privées du bénéfice de la mesure.

Cela étant dit, reste le problème des délais de délivrance. Ils sont extrêmement longs en moyenne. Or il s’agit, souvent, de situations de grand danger, qui imposent de réagir en urgence, et non pas vingt et un ou vingt-six jours plus tard.

L’objectif consiste, me semble-t-il, à mettre à l’abri la victime le plus rapidement possible, afin qu’elle ne soit pas exposée, notamment, à des représailles. Avec des délais trop longs, nous manquons cet objectif. Or il arrive parfois que les victimes soient en danger de mort.

Certes, je comprends que l’on ne puisse pas délivrer l’ordonnance en vingt-quatre heures, ou même en quarante-huit heures. Il faut évidemment tenir compte des droits de la partie défenderesse et d’un certain nombre de contraintes.

Se pose également le problème des délais de convocation. Pourquoi ne pas généraliser la convocation par voie d’huissier de justice, comme cela se pratique au tribunal de grande instance de Bobigny, plutôt que de persister à convoquer les parties par lettre recommandée avec accusé de réception, ce qui ouvre un délai de quinze jours et contribue à l’allongement du délai total de délivrance de l’ordonnance ?

En fait, réduire fortement ce délai est une impérieuse nécessité. Quant à la durée de quatre mois de l’ordonnance de protection, toutes les associations concernées vous diront qu’elle est insuffisante et ne permet pas, dans les faits, d’assurer la stabilisation de la situation juridique de la victime.

Trop souvent, les questions relatives à la séparation, au logement ou aux enfants n’ont pas été réglées dans le délai de quatre mois. Par ailleurs, si cette durée peut être prolongée pour les couples mariés, dans le cas d’une requête en séparation de corps ou d’un divorce, cela n’est pas possible, en revanche, dans le cas de couples pacsés ou en concubinage. Je me réjouis donc que les délais de délivrance de l’ordonnance puissent être ramenés aux alentours d’une semaine et que la durée de l’ordonnance soit portée à six mois.

Je présenterai un amendement visant à permettre au juge aux affaires familiales de démontrer plus rapidement la réalité des violences, en lui donnant la possibilité de demander au procureur de la République de diligenter une enquête rapide sur la personnalité de l’auteur des violences. L’objectif est d’éviter que le juge aux affaires familiales ne passe à côté d’une situation préoccupante.

Je défendrai un second amendement tendant à permettre la saisine du juge aux affaires familiales aux fins de délivrance d’une ordonnance de protection, non seulement pour des faits de violence sur le conjoint ou le partenaire, mais aussi pour des faits de violence sur les enfants.

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