Cet amendement vise à corriger les vices rédactionnels d’une disposition votée par l’Assemblée nationale qui instaure une incompatibilité entre le mandat de parlementaire et ceux de président de l’Assemblée des Français de l’étranger, de membre du bureau de l’Assemblée des Français de l’étranger et de vice-président de conseil consulaire.
Étendre le principe du non-cumul des mandats aux Français de l’étranger, à condition bien sûr que ce projet de loi organique soit adopté, me semble essentielle, mais la rédaction adoptée à l’Assemblée nationale est à la fois trop restrictive dans ses effets et peu cohérente sur le plan juridique.
La distinction entre simple conseiller consulaire et vice-président de conseil consulaire n’a guère de sens. La loi n’alloue en effet aux vice-présidents des conseils consulaires aucun statut juridique spécifique, aucune prérogative propre. Ils ne peuvent même pas présider une réunion du conseil consulaire en l’absence de leur président, dont la loi exige qu’il s’agisse d’une personnalité non élue – en pratique, le chef du poste consulaire.
Les références à l’Assemblée des Français de l’étranger n’ont pas leur place dans un texte relatif aux fonctions exécutives locales. Ce sont les conseils consulaires, et non l’AFE, qui sera leur émanation parisienne, qui sont l’instance se rapprochant désormais le plus d’un conseil municipal.
Cette disposition est par ailleurs redondante. En effet, interdire le cumul d’un mandat de parlementaire avec celui de conseiller consulaire se traduirait de toute façon par un non-cumul à l’AFE, dans la mesure où l’ensemble des élus à l’AFE sont aussi par obligation légale des conseillers consulaires.
Surtout, c’est l’esprit même de la toute récente loi relative à la représentation des Français établis hors de France qui est menacé par la rédaction actuelle de cet alinéa. On prétend accroître la démocratie de proximité ? Autoriser un parlementaire à se présenter à l’élection consulaire, c’est tout l’inverse !
Les conseillers consulaires sont censés réaliser un travail quotidien de terrain dans leur circonscription consulaire. Le cumul entre une fonction locale et un mandat national ne se pose pas dans les mêmes termes à l’étranger et en métropole. La participation aux travaux parlementaires parisiens ne peut qu’empêcher une présence suffisante dans une circonscription consulaire dont la taille varie pour aller d’une unique ville à une petite dizaine de pays. Cet ancrage local des conseillers consulaires est la condition de leur complémentarité avec le travail plus global réalisé par les députés et les sénateurs.
Permettre aux parlementaires de se présenter aux élections consulaires contreviendrait aussi au principe constitutionnel d’égalité des candidats.
La loi n’octroie aucun moyen de campagne aux futurs candidats aux conseils consulaires, tandis que les parlementaires, eux, sauront mobiliser leur notoriété et les avantages matériels que leur confèrent leurs fonctions en termes de communication et de déplacement, d'autant qu’aucun compte de campagne n’est exigé pour les élections des conseils consulaires.
Le poids que pourraient avoir les parlementaires dans un conseil consulaire ou au sein de l'AFE serait d'autant plus disproportionné que le nombre d'élus de terrain dans ces instances est désormais réduit à la portion congrue : de un à neuf élus dans des conseils consulaires accueillant pléthore de personnalités non élues !
Dans la configuration juridique actuelle, le seul moyen pour un parlementaire de participer à l'AFE est de se faire élire comme conseiller consulaire. Si le cumul n’est pas interdit, des parlementaires, même ceux qui sont hostiles par principe au cumul, seront contraints de se présenter aux élections consulaires pour conserver une voix dans cette AFE.
Quel dévoiement du système, mes chers collègues ! D'autant que si les vingt-trois parlementaires représentant les Français de l'étranger deviennent membres de l'AFE, ils représenteront alors plus du quart des membres de cette instance.
J’attire enfin votre attention sur le risque de conflit d'intérêt. Les 444 conseillers consulaires constitueront désormais 85 % du corps électoral des sénateurs représentant les Français de l'étranger. Dès lors, permettre à des sénateurs d'intégrer ce collège me semblerait malsain, surtout au vu de son étroitesse. Le risque de manipulation serait alors patent.
Lors du vote de la réforme de l'AFE, le rapporteur comme le Gouvernement n’avaient pas exprimé de réserve sur le fond quant au principe du non-cumul, se contentant d'indiquer que la mesure relevait d'une loi organique.