Intervention de André Reichardt

Réunion du 2 octobre 2013 à 21h45
Modernisation de l'action publique territoriale et affirmation des métropoles — Article 4

Photo de André ReichardtAndré Reichardt :

À la réflexion, je suis, comme d’autres, très perplexe quant à l’opportunité de créer cette conférence territoriale de l’action publique.

Avant d’expliquer les raisons de ma perplexité, je tiens à rendre hommage au travail de la commission des lois, dont je fais partie – charité bien ordonnée commence par soi-même –, et surtout à celui de son rapporteur. Le texte actuel est l’aboutissement d’un travail et d’une réflexion auxquels il faut rendre hommage.

Cependant, je me demande s’il est utile de créer une conférence de ce type.

Premièrement, je ne suis pas certain que la création de la conférence territoriale serait bien comprise par les différentes collectivités locales que nous sommes amenés à représenter au sein de la Haute Assemblée. Je rappelle que toutes les strates de collectivités participeront à la conférence territoriale. Qu’on le veuille ou non, c’est un organe de gouvernance supplémentaire qui sera instauré dans le paysage institutionnel français, au moment même où nous sommes tous en recherche de simplification.

Je ne suis pas sûr qu’une telle démarche soit bien comprise. J’ai eu récemment l’occasion de présenter l’actualité législative relative aux collectivités territoriales devant l’association des maires du Bas-Rhin. Je ne suis pas certain qu’une majorité de maires ait compris l’opportunité de certains aspects du texte que nous sommes en train d’examiner. J’ai notamment entendu la formule « usine à gaz ». C’est le contraire que nous recherchons.

Deuxièmement, le Gouvernement a ressenti l’utilité de désigner des chefs de file pour compenser le rétablissement de la clause de compétence générale, dont on a beaucoup parlé. Or qu’est-ce qu’un chef de file, sinon quelqu'un qui est chargé de coordonner l’action des différentes collectivités dans un ou plusieurs domaines de compétence ? Dès lors, pourquoi créer en plus une conférence territoriale de l’action publique dont la fonction sera de coordonner les différents niveaux de collectivités et leurs groupements ? Cela me paraît redondant. Mais peut-être n’ai-je pas tout compris.

Troisièmement, j’aimerais vous faire part d’un exemple tiré de mon expérience alsacienne. Selon l’alinéa 4 de l’article 4, la conférence territoriale « débat de toute question relative à la coordination des relations transfrontalières avec les collectivités territoriales étrangères situées dans le voisinage de la région ». Or, à l’heure actuelle, en Alsace, pas moins de trois organismes s’occupent d’ores et déjà de la coordination de la coopération transfrontalière avec les collectivités territoriales de l’autre côté du Rhin : la Conférence du Rhin supérieur, dont on vient de fêter le trentième anniversaire ; le Conseil rhénan, qui existe depuis dix-huit ans ; la Région métropolitaine trinationale du Rhin supérieur, depuis quatre ans. De surcroît, cette dernière a quatre piliers : économique, social, société civile et science.

Toutes ces structures ont une fonction de coordination. Et, là, vous voudriez que je vote pour la création d’un quatrième organisme !

Mais la situation est déjà suffisamment compliquée. Lorsque nous sommes au Conseil rhénan ou à la Conférence du Rhin supérieur, il y a plusieurs personnalités chargées d’intervenir : le préfet, voire les deux préfets de département, le président du conseil régional, les présidents de conseil général, les représentants des intercommunalités. Dans ces conditions, je me demande ce que va apporter de plus cette conférence territoriale de l’action publique.

Vous l’aurez compris, j’essaie de me raccrocher aux branches, mais j’ai du mal à lui trouver une utilité et à voir ce qu’elle peut apporter de plus par rapport aux chefs de file, qui existent déjà, mais aussi tout simplement, comme Bruno Sido l’a dit, par rapport à toutes les négociations qui ont déjà lieu entre les collectivités locales, sans obligation quelconque. Les collectivités discutent déjà. Et cela marche, même si l’on peut toujours faire mieux.

Madame la ministre, dans un paysage institutionnel à ce point compliqué, laissez-nous un peu de liberté !

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