Intervention de David Assouline

Réunion du 1er octobre 2013 à 14h30
Indépendance de l'audiovisuel public — Article 1er

Photo de David AssoulineDavid Assouline, rapporteur :

Mme Morin-Desailly a raison de dire que l’on peut changer. J’emploierai plutôt le verbe « évoluer » ; après tout, on peut aussi changer en mal. En l’occurrence, nous souhaitons tous aller vers l’indépendance.

Voici les arguments que je vous opposerais si j’étais absolument convaincu de la sincérité de votre posture.

Il y a, me semble-t-il, deux raisons pour lesquelles le souhait de voir le président du CSA élu par le collège ne tient pas.

D’une part, vous faites comme si, à l’instar de ce qui se pratique dans certains partis ou associations, le président du CSA avait tous les pouvoirs une fois en fonction. Ce n’est pas le cas. Le principe est celui des délibérations collectives, et les décisions sont prises par le collège, dans lequel siègent six membres désignés par les commissions parlementaires à la majorité des trois cinquièmes.

Vous avez l’air de trouver cela banal ! Selon vous, le summum de l’indépendance serait que le président soit élu par le collège. Mais, je vous le signale, si le président était simplement élu par des membres n’ayant pas – c’est le cas aujourd’hui – l’aval des commissions parlementaires, il n’y aurait aucune indépendance. Inversons donc la perspective : les six membres sont choisis selon une procédure pluraliste et le président est tenu par les délibérations du collège.

D’autre part, vous n’abordez pas une question importante ; c’est là le privilège d’une opposition qui n’est pas responsable de ce qui va se faire concrètement dans le fonctionnement pratique de l’institution… Le président du CSA a un pouvoir réglementaire. Lorsque l’on exerce un tel pouvoir, il est à bien des égards préférable d’être nommé par l’exécutif. Vous le savez très bien, puisque que vous avez déjà gouverné.

Vous le voyez, je vous expose mes arguments en postulant que vous êtes de bonne foi et que votre conversion à une indépendance absolue est réelle.

Monsieur Maurey, je vous sais gré de votre intervention très intéressante, vous qui ne participez d’ordinaire pas à de tels débats. Il me paraît extrêmement positif que beaucoup de sénateurs s’investissent sur ce dossier. J’espère que vous continuerez à nous faire profiter de vos points de vue innovants jusqu’à la fin de la discussion, sans doute vers une heure du matin…

Néanmoins, comme vous détestez que l’on soit hypocrite, je ne le serai pas moi-même : il y avait, je trouve, du petit jeu politicien dans votre intervention.

Vous avez soutenu la réforme de Nicolas Sarkozy, qui prévoyait la nomination directe de tous les présidents de chaînes de l’audiovisuel public par le Président de la République dans un pays où les médias sont censés être indépendants, l’indépendance étant la condition de leur crédibilité. Vous en avez même approuvé le volet relatif au financement de l’audiovisuel public, qui, tout le monde en convient, s’est révélé catastrophique, la suppression de la publicité ayant placé France Télévisions dans une grande difficulté.

Au moment où nous discutons de l’article clé du présent projet de loi, vous pourriez reconnaître qu’il s’agit d’une avancée ; d’ailleurs, chacun devrait la saluer. Le dispositif envisagé nous offre, à nous parlementaires, que nous siégions dans l’opposition ou dans la majorité, le pouvoir de décider de la nomination des présidents de l’audiovisuel public à la majorité des trois cinquièmes.

Il ne me semble pas constructif d’essayer de minimiser la réforme en prétendant qu’elle n’irait pas assez loin. Les postures politiciennes ont malheureusement parfois pour conséquence d’asservir l’intelligence.

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