Intervention de Benoît Hamon

Commission des affaires économiques — Réunion du 2 octobre 2013 : 1ère réunion
Économie sociale et solidaire — Audition de M. Benoît Hamon ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation

Benoît Hamon, ministre délégué :

Le gouvernement souhaite amender le texte de Marylise Lebranchu pour intégrer un volet ESS aux schémas régionaux de développement économique et d'innovation. Le développement de l'ESS figurera également dans la prochaine génération de contrats de plan État-régions.

Notre réflexion est toujours active sur le lien entre ESS et territoires. Je demeure notamment réservé sur le chef-de-filat : si la région, qui le revendique, est compétente en matière économique, les départements financent l'insertion par l'activité économique à hauteur de 25 % - il est vrai que toutes les structures de ce domaine ne relèvent pas de l'ESS, même si elles peuvent être socialement responsables ; enfin, ce sont les communes et leurs communautés qui financent les associations. Nous souhaitons respecter tous les échelons, sans définir de chef-de-filat.

La définition de l'ESS n'est pas arrêtée. J'étais récemment au LH Forum sur l'économie positive, laquelle englobe l'ESS. J'ai fait remarquer que certaines grandes enseignes s'en réclamant délocalisent leurs sièges sociaux dans des zones à basse fiscalité : c'est une conception assez particulière de l'économie positive... Business social, responsabilité sociale et environnementale des entreprises, ESS, finance sociale, finance solidaire, finance à impact social, voilà un champ large. Nous préférons nous en tenir à une définition simple de l'ESS, fondée sur un critère de gouvernance démocratique, d'objectifs autres que la distribution de bénéfices. Ce modèle correspond environ à 10% du PIB français, volume que nous souhaitons accroître.

Ce texte rejoint les préoccupations d'autres législateurs nationaux, mais aussi des réflexions mondiales. A l'initiative du Royaume-Uni, le dernier G8 a, pour la première fois, évoqué la finance à impact social. La vision britannique, dictée par ce qui leur reste de corps intermédiaire et de puissance publique, et mue par la nécessité de faire rentrer des capitaux dans les politiques sociales, s'est alors opposée à la vision américano-française, guidée par la volonté de développer un secteur privé à but non lucratif déjà significatif.

Je suis ouvert à votre demande sur l'innovation sociale, Marc Daunis. Le Fonds d'innovation sociale sera abondé pour une moitié par les régions, pour l'autre par BPI France et doté de plusieurs dizaines de millions d'euros pour financer des projets sociaux d'avant-garde. Nous devons lui donner une définition écrite de l'innovation sociale, ne serait-ce qu'en raison de ses obligations de reddition de comptes.

Les organisations de salariés de l'ESS nous ont interpellés à plusieurs reprises sur la déclaration de principe, faisant valoir que les employeurs de l'économie sociale pouvaient s'abstenir de faire du social chez eux. Mon approche n'est pas morale ; je ne distingue pas une bonne économie sociale et solidaire d'une mauvaise économie privée ; on trouve de nombreuses entreprises classiques dans lesquelles les salariés sont heureux, et ce n'est pas parce que le statut des entreprises de l'ESS les oblige à rendre impartageables leurs excédents et les soumet à un régime fiscal particulier chargé de compenser leur déficit d'attractivité vis-à-vis des capitaux extérieurs que leurs patrons traitent correctement leurs salariés. Ces entreprises doivent redevenir des locomotives en matière d'égalité femmes-hommes ou de politiques autour du Conseil supérieur de l'ESS, formalisant leurs engagements à défendre des idées plus progressistes.

Je suis favorable à ce qu'on réserve des marchés publics. La difficulté est que la directive « Marchés publics », qui pourrait introduire dans notre droit le principe des marchés réservés pour les entreprises accueillant les publics vulnérables - travailleurs handicapés ou éloignés de l'emploi, n'est pas encore adoptée.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion