Ainsi que je l’annonçais dans la discussion générale, le travail de la commission des lois concernant la métropole du Grand Paris s’est axé sur trois principes : la cohérence des périmètres, la subsidiarité pour la répartition des compétences, l'autonomie de gestion des territoires.
S'agissant tout d’abord des périmètres, si la métropole du Grand Paris a vocation à croître et s’agrandir à toute l'Île-de-France, voire, comme certains l’évoquent déjà, à tous les départements, j’estime, pour avoir une certaine pratique de l'intercommunalité, que nous n’y sommes pas de sitôt.
J’ai donc entendu la crainte de certains collègues préoccupés par l’avenir des territoires qui, situés en dehors de la future métropole, pourraient se voir dépossédés de leurs zones les plus dynamiques.
C’est pourquoi je vous propose de recentrer la future métropole du Grand Paris sur la petite couronne, tout en permettant que, en application du droit commun, les EPCI qui se seraient exprimés avant le 1er août 2014 puissent adhérer à la métropole.
La date est importante, comme est important le fait qu’une fois le périmètre de la métropole fixé, seule la loi pourra ultérieurement le modifier – cela est nouveau.
Cette stabilisation du périmètre permettra – on l'a bien senti dans le débat qui vient de s'achever – de poser les bases du futur établissement public de coopération intercommunale et, j’ajoute, lui donnera l’occasion de se roder avant de s’élargir.
Certains proposent de s’en tenir strictement à la petite couronne et d’exclure de la métropole les trois – bientôt quatre – communes de la grande couronne qui appartiennent à des EPCI situés à cheval sur la petite et sur la grande couronne.
J’y suis opposé, pour une raison très simple, qui me permet de faire la transition avec mon point suivant, sur le périmètre des territoires.
Je souhaite préserver autant que possible les démarches intercommunales qui sont à l’œuvre depuis une quinzaine d’années. On va donc essayer de ne pas démolir ce qui fonctionne et, en même temps, d'inciter ceux qui ne se sont pas encore engagés sur le chemin de l’intercommunalité de projets à avancer dans cette direction.
Il est ainsi proposé que le découpage des territoires tienne compte des dynamiques intercommunales existantes, sachant, mes chers collègues, que la petite couronne n’est pas intégralement couverte par des intercommunalités, qui ne représentent que 60 % de son territoire.
Là où existe une dynamique intercommunale, nous avons cherché à la prendre en compte. Il s'agissait en effet d'une demande très forte formulée à l’occasion des auditions auxquelles nous avons procédé.
À cet égard, nous avons veillé à entendre tout le monde : toutes les intercommunalités et tous les conseils généraux, ainsi que le président de la région d’Île-de-France, qui est venu en personne.
Pour ce découpage des territoires, de la même manière qu’il fallait tenir compte des périmètres des EPCI existants, il nous paraissait utile de chercher à faire converger ces périmètres avec ceux des contrats de développement territorial qui, incontestablement, ont soudé la pratique intercommunale. Ce point a été régulièrement plébiscité lors de nos auditions.
J’en arrive aux compétences. Le dispositif issu des travaux de l’Assemblée nationale, auxquels votre serviteur n’a pas été associé, je le signale, fait de renvois et d’exceptions au droit commun, m'a paru inutilement complexe.
Nous avons suivi, là comme ailleurs, une logique de simplification et de clarification. Pour aller à l’essentiel, nous avons voulu éviter le « yoyo » qui consistait, dans le système précédent, à faire d'abord remonter les compétences jusqu’à l'EPCI à fiscalité propre qui était créé, pour ensuite les faire redescendre au niveau des territoires.
Ainsi, le texte de la commission distingue, en premier lieu, les compétences stratégiques et structurantes, qui seraient transférées à la future métropole. Sur ce point, votre serviteur a pris la peine de vérifier, lors des auditions, que la Ville de Paris et la région d’Île-de-France avaient des vues convergentes sur la délimitation de ces compétences.
Ce point était extrêmement important car, lorsque nous avons entamé nos travaux, on pouvait se poser des questions sur les aéroports, sur la grande attractivité internationale, sur le devenir des grands hubs aéroportuaires… Il a été clair que, dans la petite couronne, les seules compétences économiques reconnues à l'intercommunalité étaient celles qui se rattachaient à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme. De vous à moi, mes chers collègues, cela n’est déjà pas mal et recouvre l'essentiel des stratégies d’implantation et de développement économique, commercial et artisanal.
En ce qui concerne, en second lieu, les compétences de proximité, actuellement exercées par les intercommunalités; qui risquaient de revenir au niveau central avec le système proposé, il nous a paru indispensable de trouver une réponse pour qu’elles puissent continuer à être exercées dans la continuité.
Cette réponse, je l'ai trouvée dans un texte du Sénat, la loi Pélissard-Sueur – excusez du peu ! –, qui permet, pour la gestion de services communs à l'intérieur d'un périmètre d'intercommunalité, de recourir, à la demande - ce n’est pas une obligation -, à des structures du type de celle d’un syndicat intercommunal à vocations multiples. Destinées à des services de proximité, ces structures sans fiscalité propre ont des recettes provenant exclusivement des dotations des communes ou de taxes perçues en contrepartie de ces services, pour en permettre l'organisation.
Concernant les compétences propres de la métropole, Mme la ministre l'a très bien dit, compte tenu du fait qu’il se pose dans la région d’Île-de-France un immense problème de logement, donc d’urbanisme et d’aménagement – 6 millions d’habitants…–, nous avons placé le logement et l'hébergement dans le projet métropolitain.
Le SCOT fait aussi partie du projet métropolitain – chacun sait que le socle d'un SCOT est constitué du projet d'aménagement et de développement durable.
Les compétences de la métropole comprendraient aussi les questions environnementales. Grâce à l'intervention du rapporteur pour avis Claude Dilain, un sort particulier est également réservé à la politique de la ville : nous avons veillé à inscrire dans la loi que cette compétence, pourtant obligatoire, serait mise en œuvre au niveau des conseils de territoire.
Pour ce qui concerne la gestion des services de proximité – crèches, médiathèques, que n’avons-nous entendu pendant les auditions… – notre réponse permet une gestion toujours aussi décentralisée que possible.
J’en arrive aux territoires. Beaucoup s’interrogent sur leur consistance exacte, leur personnalité juridique, leurs moyens administratifs et financiers. Dans la proposition de la commission, ils ont un double visage – c'est un débat que l'on avait déjà pour Marseille, rappelez-vous.
Ils sont le lieu naturel, déconcentré, où se mettent en œuvre les compétences obligatoires de la métropole du Grand Paris et peuvent donc, à ce titre, recevoir de vraies délégations de compétence et de moyens. Nous avons veillé, dans le texte, à ce que la dotation de territoire, dépense obligatoire pour le budget de la métropole, leur permette d'assurer l'exercice de ces compétences.
Le texte précise d'ailleurs que cette dotation couvre l’ensemble de leurs dépenses. Car si la métropole dispose de la fiscalité – puisqu'il n’y a qu’un EPCI à fiscalité propre –, l'autonomie de gestion des territoires doit être garantie. Nous y avons également veillé.
Afin d’assurer une parfaite coordination entre conseil de la métropole et conseils de territoire, la commission des lois a proposé – comme nous l'avons fait à Marseille, rappelez-vous le président Gaudin disant qu’il voulait élargir l'accès des maires à tous les niveaux, conseils de territoire comme conseil de métropole – que les communes et leurs représentants puissent siéger dans les deux organes.
Mais ces territoires sont également des périmètres à l’intérieur desquels les communes peuvent, si elles le souhaitent, s’associer pour exercer en commun certaines de leurs compétences de proximité. Ils peuvent prendre la forme de syndicats – j’insiste sur qui constitue une des innovations essentielles – sans revenir sur le principe d'un unique EPCI à fiscalité propre.
Tous nos interlocuteurs nous ont dit leur désir d’obtenir des garanties sur la gestion des services de proximité. Nous les avons entendus.
Nous avons entendu le souhait, exprimé par tous nos interlocuteurs, d’une démarche ascendante prenant d’abord en compte, là où elles existent, les dynamiques intercommunales, pour ensuite les accompagner dans la mise en place de modes de gestion ne postulant pas nécessairement la centralisation à l’échelon de l’EPCI.
La commission des lois vous propose donc une architecture qui respecte le choix d’instituer un EPCI unique à fiscalité propre tout en reconnaissant les particularismes du territoire, sans rien céder sur l’essentiel, c’est-à-dire la création, enfin, d’une métropole à Paris. Cette métropole ne devra cependant pas faire office de région bis. À cet égard, monsieur Karoutchi, je reconnais volontiers que si quelqu’un défend les régions ici depuis trois jours de votre côté de l’hémicycle, c’est bien vous ; mais vous êtes bien seul !