Intervention de Christian Favier

Réunion du 4 octobre 2013 à 14h30
Modernisation de l'action publique territoriale et affirmation des métropoles — Article 12 précédemment réservé suite

Photo de Christian FavierChristian Favier :

mesdames les ministres, mes chers collègues, je voudrais saluer la qualité et la richesse de ces débats. Nous y avons tous contribué, avec la volonté d’aboutir, à l’issue de cette discussion, à une proposition sénatoriale et non à une page blanche.

Je regrette que des propositions alternatives, qui ont été largement débattues, n’aient pas trouvé de majorité. Nous sommes donc aujourd’hui face à un texte résultant pour l’essentiel des travaux de la commission.

Vous connaissez nos désaccords à son sujet.

Premièrement, la métropole du Grand Paris est un EPCI à fiscalité propre, ce qui asséchera de fait les ressources communales, alors même que le présent projet de loi tend à renvoyer vers les communes toutes les compétences qu’elles avaient librement choisi de confier à leur intercommunalité, et, ainsi, à les plonger dans une situation financière inextricable.

Deuxièmement, l’extinction programmée des intercommunalités, que nous contestons, fera disparaître les dynamiques de territoire en cours de développement dans bien des secteurs de l’Île-de-France, empêchant ainsi le développement d’une métropolisation polycentrique, pourtant largement défendue par l’immense majorité des élus locaux de la région. J’en veux pour preuve le travail mené au sein de Paris Métropole.

Outre cette rupture dans le développement des dynamismes locaux, la disparition des EPCI existant actuellement conduit à se poser trois questions qui ne sont pas abordées dans ce texte.

La première interrogation concerne les personnels actuellement en fonction dans les EPCI. Quel est leur avenir ? En Île-de-France, environ 10 000 salariés sont concernés. Rien n’est indiqué sur les conditions de leur réintégration, ou de leur intégration, dans leur commune d’origine ou ailleurs. Que deviendront les personnels non titulaires ? Seront-ils la variable d’ajustement des mesures d’austérité que certains ne manqueront pas de prendre à la faveur de cette construction métropolitaine ?

La deuxième question porte sur les différents contrats en cours dans les EPCI appelés à disparaître. Quelles conséquences leur dénonciation emportera-t-elle ? Qui assumera les coûts éventuels de leur rupture ? De même, qui assumera les emprunts en cours ? On le sait, des projets très importants ont été engagés dans les intercommunalités. La métropole reprendra-t-elle tous ces emprunts ? J’aimerais en avoir la certitude, mais rien n'est dit à ce sujet.

La troisième question, très importante, a trait à la démocratie. En effet, au mois de mars prochain, les conseillers communautaires vont être élus au suffrage universel direct par fléchage pour six ans, ainsi que la loi le précise. Or, en petite couronne, ils ne pourront aller au terme de leur mandat. Comme on ne peut raccourcir le mandat d’un élu, nous nous trouvons confrontés à un véritable problème constitutionnel.

Ces différentes remarques montrent bien que ce projet se résume finalement à un bricolage institutionnel non abouti qui ne pourra être appliqué en l’état. Je suis très loin de croire que cette construction permettra l’efficacité que certains vantent. Bien au contraire, il apparaît clairement que nous allons au-devant de très grandes difficultés de fonctionnement.

Dès lors, nous étions particulièrement fondés à demander une mission de préfiguration afin de préparer une métropolisation coopérative, progressive s’appuyant sur les dynamiques locales.

Après des débats on ne peut plus riches, nous savons maintenant que le dispositif qui nous est proposé aujourd’hui ne représente qu’une étape vers une métropole totalement intégrée. D’ailleurs, certains ont exprimé très clairement ce point de vue cet après-midi.

Enfin, et c’est sans doute l’un des aspects les plus critiquables de ce projet, rien n’est prévu pour élargir les pouvoirs d’intervention des citoyens. Pis, le montage institutionnel proposé éloignera définitivement ceux-ci des centres de décision. Se mettra alors en place un monstre technocratique tentaculaire et déshumanisé.

À cet égard, j’ai entendu le Président de la République relancer le débat sur le référendum d’initiative citoyenne. Voilà une belle occasion ! Nous sommes en train de créer quelque chose de tout à fait nouveau, une métropole que certains qualifient d’« extraordinaire ». Eh bien vérifions si nos concitoyens partagent cette vision ! Quoi de plus démocratique que d’en appeler au peuple et d’organiser un référendum à ce sujet ? J’aimerais que notre assemblée se prononce dans ce sens.

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