Intervention de Yvon Collin

Réunion du 9 octobre 2013 à 22h00
Radio france europe — Adoption d'une proposition de résolution

Photo de Yvon CollinYvon Collin :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’initiative de notre collègue Pierre Bernard-Reymond tendant à la création d’une radio dédiée à l’information sur la réalité quotidienne des peuples qui composent, avec les Français, l’Union européenne est intéressante. À quelques mois des élections européennes, elle pose une véritable question : l’adhésion des citoyens à la construction communautaire qui débuta le 9 mai 1950 lorsque Robert Schuman proposa la mise en commun des industries du charbon et de l’acier de la France et de l’Allemagne, ainsi que des pays qui voudraient s’associer à eux.

« Il n’est plus question de vaines paroles, mais d’un acte, d’un acte hardi, d’un acte constructif. La France a agi et les conséquences de son action peuvent être immenses. Nous espérons qu’elles le seront. » C’est en ces termes que s’exprima, à l’époque, Robert Schuman.

Ce n’est pas faire injure à sa mémoire que de dire que, tout en les pressentant, il n’imaginait sans doute pas les développements que son initiative allait engendrer.

À ce jour, l’Union européenne compte vingt-huit membres ; elle a des institutions, une monnaie unique. Ce qui avait débuté comme une union purement économique s’est transformé en un partenariat portant sur de nombreux domaines, allant de l’aide au développement jusqu’à l’environnement.

Pendant longtemps, cette communauté s’est construite avec l’accord tacite des citoyens, bercés par un récit ayant mis en avant la réconciliation, la paix et la prospérité. Mais ce récit a vécu. Et, aujourd’hui, nombre de ces citoyens la jugent tatillonne, inefficace et insuffisamment protectrice. Certains y voient même une entreprise menaçante, « prédatrice », qui broie les nations dans une structure sans âme, lointaine, voire antidémocratique. Comment en est-on arrivé là ?

En cette période de crise économique et sociale, les peuples européens sont légitimement inquiets ; ils craignent sans doute de perdre leur destin et leurs priorités. Mais force est de l’admettre, le projet politique européen est loin de répondre à leurs attentes et à leurs préoccupations quotidiennes.

Au cours de ces dernières années, l’Europe s’est enlisée dans une gestion d’urgence de la crise, ne paraissant plus s’occuper que du redressement des banques, des indicateurs financiers et monétaires. Pendant ce temps, les délocalisations se sont multipliées, les inégalités se sont creusées et la concurrence entre les travailleurs européens s’est installée.

Nous avons tous, gouvernants comme élus, une responsabilité. Depuis trop longtemps, nous sommes dans l’incapacité de faire partager les finalités de l’Europe, de donner du sens à cette union difficile, compliquée. Au lieu de dire aux Français : « Voilà ce que nous pouvons faire ensemble de grand », on leur a répété inlassablement : « Nous n’y pouvons rien. » En plus, on a imputé à Bruxelles, avec ses oukases, la plupart des maux nationaux. Si un tel discours peut s’avérer électoralement payant, il est cependant injuste, dangereux et contraire à l’intérêt de nos concitoyens et de la Nation. Il a d’ailleurs fait le lit de tous les populismes ; l’extrême droite en a fait le terreau de ses pousses mortifères, en cristallisant les problèmes sans proposer de solutions.

Dans ces conditions, qu’y a-t-il d’étonnant à ce que l’Europe soit aujourd’hui perçue comme une simple maison de redressement budgétaire, une maison où vivent des colocataires qui se tolèrent, et non pas des amis qui se soutiennent et partagent un idéal commun ?

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