Intervention de Jean-Claude Carle

Réunion du 6 décembre 2005 à 9h45
Loi de finances pour 2006 — Sécurité

Photo de Jean-Claude CarleJean-Claude Carle :

En premier lieu, à l'instar de notre rapporteur spécial, Aymeri de Montesquiou, et de notre rapporteur pour avis, Jean-Patrick Courtois, je souhaite vous féliciter, madame, monsieur les ministres, et à travers vous M. le ministre d'État, de la réalisation, pour la quatrième année consécutive, de l'ambitieux programme de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, la LOPSI.

Il est rare qu'un plan quinquennal atteigne son objectif. Or, cette année encore, les objectifs sont réalisés.

La LOPSI a préfiguré, dès l'été 2002, la volonté du ministre de l'intérieur de regrouper et de faire travailler de concert les deux entités concourant à la sécurité intérieure, la police et la gendarmerie. Je profite d'ailleurs de cette tribune pour rendre hommage aux gendarmes, aux policiers mais aussi aux pompiers pour leur action, leur courage, leur sang-froid et leur sens des responsabilités.

Le recul constant des chiffres de la délinquance depuis 2002 - celle-ci a reculé de plus de 8 % en trois ans, comme l'a dit Jean-René Lecerf - démontre que la volonté politique et cette logique de mission à laquelle elle est associée permettent de renoncer au fatalisme selon lequel la délinquance serait un phénomène sociétal.

Puisque la loi organique relative aux lois de finances nous invite à revoir nos grilles de lecture pour nous extirper des carcans traditionnels et confortables, et pour raisonner en termes de missions, de programmes et d'actions, je souhaite axer mon intervention sur deux points très précis. Certes, ces deux sujets ne recouvrent pas exactement le cadre de la mission « Sécurité », mais ils correspondent, me semble-t-il, à des actions qui doivent être menées de manière transversale entre ministères et missions. Il s'agit, d'une part, de la délinquance des mineurs et, d'autre part, de l'accueil et de l'aide aux victimes.

En 2002, j'ai eu l'honneur d'être rapporteur d'une commission d'enquête sénatoriale sur la délinquance des mineurs. Nous avions alors dressé le constat que cette délinquance était non pas un fantasme, comme certains voulaient le faire croire, mais bien une réalité.

Cette délinquance se caractérise par ce que j'appelle les « trois plus » : une délinquance plus importante, car les actes de délinquance ont augmenté de 80 % depuis 1994 ; une délinquance plus violente, les actes de violence ayant été multipliés par dix entre 1998 et 2002 ; une délinquance de plus en plus jeune, car la moitié des mineurs délinquants sont âgés de moins de seize ans.

Qui sont ces jeunes délinquants ? Les actes commis émanent, à 92 %, de jeunes garçons cumulant les quatre caractéristiques suivantes : leur famille rencontre des difficultés pour assumer sa mission, notamment du fait de l'absence du rôle du père ; pour la plupart, ces jeunes sont en situation d'échec scolaire ; nombre de ces jeunes présentent un état de santé médiocre, très souvent en rapport avec la consommation de drogue, particulièrement de cannabis, et d'alcool ; enfin, nous avions constaté, avec toutes les précautions oratoires nécessaires, qu'il y avait une surdélinquance des jeunes issus de l'immigration.

Je ne souhaite lancer aucune polémique sur ce dernier sujet. Je me borne simplement à faire un constat : comprendre un phénomène est la première étape d'un chemin vers sa solution. Pour ce faire, il ne faut nier aucun fait mais, en contrepartie, il ne faut pas non plus tirer de conclusion hâtive.

Permettez-moi, à cet égard, de citer le père Christian Delorme, curé des Minguettes, qui, dès 2001, écrivait dans un grand quotidien du soir : « En France, nous ne parvenons pas à dire certaines choses, parfois pour des raisons louables. Il en est ainsi de la surdélinquance des jeunes issus de l'immigration, qui a longtemps été niée, sous prétexte de ne pas stigmatiser. On a attendu que la réalité des quartiers, des commissariats, des tribunaux, des prisons impose l'évidence de cette surreprésentation pour la reconnaître publiquement. Et encore, les politiques ne savent pas comment en parler. » C'était en 2001 !

Cessons donc cette politique de l'autruche, trop souvent pratiquée, et ayons le courage de regarder la réalité telle qu'elle est, et non pas telle que nous aurions souhaité qu'elle fût, chère madame Assassi !

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