L’un de nos collègues nous dit : « C’est compliqué. Il faut réfléchir, attendre. » Mais voilà des années que l’on nous tient ce discours, en prétendant que le sujet est si complexe qu’il ne vaut mieux pas y toucher !
M. Collombat, quant à lui, tel un « lanceur d’alerte », souligne l’existence d’un problème. Ce problème, c’est en tant que président de la mission commune d’information sur les inondations dans le Var et le sud-est de la France, dont M. Collombat était le rapporteur, que je l’ai découvert.
À l’échelon local, en juin 2010 et en novembre 2011, deux inondations catastrophiques ont frappé le département du Var. La première a causé vingt-trois morts et 1, 2 milliard d’euros de dégâts ; la seconde quatre morts et 500 millions d’euros de dégâts. Près de 200 familles ont perdu leur logement, on a dénombré 35 000 sinistrés, 2 000 entreprises, représentant 5 000 salariés, ont été touchées, dont 600 restaient à l’arrêt neuf mois après la dernière inondation. Des exploitations agricoles ont été saccagées et cinquante-neuf communes ont été classées en état de catastrophe naturelle.
Les inondations du Var figurent au quatrième rang des événements meurtriers qui ont touché la France au cours des dernières années, après Xynthia – une autre inondation, cinquante-trois morts –, le drame de Vaison-la-Romaine –encore une inondation, quarante et un morts – et celui de l’Aude – toujours une inondation, trente-six morts. Voilà ce que nous constatons sur le terrain : les morts succèdent aux morts…
À l’échelon national, 19 000 communes sur 36 000 sont exposées au risque d’inondation. Elles représentent 16 millions de personnes et 40 % des emplois de notre pays. Les inondations constituent le premier risque naturel en France.
Je le répète, ces catastrophes emportent des conséquences considérables sur les plans humain et économique. Chaque année, elles provoquent en moyenne plus de 1 milliard d’euros de dégâts. Depuis 1990, les versements du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles atteignent, en moyenne, 500 millions d’euros par an.
À ce jour, ce problème n’est pas suffisamment pris en compte dans notre pays. Ce constat incontestable fut le point de départ de notre réflexion. Les Pays-Bas, pour leur part, consacrent 1, 2 milliard d’euros chaque année à la prévention des inondations : c’est une autre politique, pour d’autres résultats !
Il existe donc, en Europe, des politiques plus efficaces que la nôtre, même si la France compte de bons élèves, comme le syndicat intercommunal d’aménagement et de gestion du Loing de notre collègue Jean-Jacques Hyest, en Seine-et-Marne, ou le syndicat mixte d’aménagement et de gestion équilibrée des Gardons. Cependant, nous avons malheureusement constaté que, sur de nombreux territoires, les textes actuels ne permettent pas d’agir efficacement.
Dans notre République une et indivisible, la situation est très différente selon les territoires, au point qu’un préfet de région n’a pas hésité à affirmer : « Je maintiens que notre pays n’a pas conscience de certaines choses. […] On est sur un système bloqué. » Je n’oublierai pas non plus de citer notre collègue Éric Doligé, qui a découvert que deux tiers des éco-quartiers ayant bénéficié du label du ministère du logement étaient situés en zone inondable, tout simplement parce que les services compétents n’avaient pas intégré ce critère dans leur réflexion : voilà où nous en sommes !
Devant cette situation anormale qui conduit, chaque année, à des catastrophes, voire à des drames, Pierre-Yves Collombat et moi-même avons estimé, en conscience, qu’il était de notre devoir de ne pas rester inertes et, en tant qu’élus responsables, de proposer des actions concrètes. Les travaux de la mission d’information nous ont permis de définir clairement la problématique et de déterminer vingt-deux propositions d’action ; aujourd’hui, nous vous proposons d’introduire dans la loi, mes chers collègues, quatre outils opérationnels puissants destinés à faire évoluer très favorablement la situation actuelle, qui est très loin d’être satisfaisante.