Intervention de Jean-Marc Pastor

Réunion du 6 décembre 2005 à 15h00
Loi de finances pour 2006 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Photo de Jean-Marc PastorJean-Marc Pastor, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention portera sur le volet « développement rural » de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ». En effet, sur sept actions, cinq concernent directement le développement rural.

J'évoquerai, pour commencer, le cadre communautaire dans lequel s'inscrit son financement, ainsi que les inquiétudes auxquelles sa négociation donne lieu. Nous savons qu'une part essentielle des crédits que nous affectons au développement rural provient de Bruxelles. Le dernier compromis de la présidence luxembourgeoise sur les perspectives financières 2007-2013, qui proposait une réduction de 22 milliards d'euros de ces crédits, par rapport aux propositions initiales de la Commission, dont 13 milliards d'euros portant sur le développement rural, a été rejeté à la suite du veto britannique, et il y a fort à parier que celui qui lui succédera sera encore plus restrictif.

Dans ces conditions, nous pouvons nous interroger sur les choix opérés par le Gouvernement dans le présent projet de budget. En effet, il diminue la part nationale du cofinancement sur plusieurs mesures agroenvironnementales d'importance, telles que les contrats d'agriculture durable ou la prime herbagère agroenvironnementale. N'aurait-il pas mieux valu prendre acte de l'augmentation, peut-être pour la dernière fois en 2006, de la part communautaire du cofinancement sur ces mesures, pour maintenir la dotation nationale et, ainsi, augmenter globalement l'enveloppe qui leur est affectée ?

En effet, nous pouvons faire des CAD l'instrument de la multifonctionnalité. Pour peu que nous y consacrions les moyens nécessaires, ces contrats devraient permettre de concilier la nécessaire flexibilité, qui vise à répondre à la diversité des enjeux environnementaux, sociaux ou économiques, avec un minimum de stabilité institutionnelle, qui est la seule capable, en fait, d'assurer la pérennité indispensable à la mise en oeuvre de l'action publique et au remplacement des CTE, les contrats territoriaux d'exploitation.

Or, pour 2006, je constate que l'ensemble de ces contrats recevront, au total, y compris la part communautaire, quelque 350 millions d'euros en crédits de paiement et 162 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit une diminution respective de 12 % et de 25 %. En inscrivant seulement 64, 8 millions d'euros d'engagements nouveaux pour 2006 au titre de la part nationale, contre 108 millions d'euros en 2005, le ministère de l'agriculture ne remplira pas l'objectif des 10 000 CAD annuels qu'il s'était fixé et se contentera d'en financer seulement 6 000 supplémentaires.

La pluriactivité est depuis longtemps le lot des éleveurs des zones de montagne. Elle doit être favorisée, car les campagnes françaises connaissent un changement important dans la mesure où le champ d'application des politiques rurales s'est étendu progressivement, notamment au tourisme, au commerce, à l'industrie et à l'éducation.

À ce titre, l'État a contractualisé des crédits en faveur de la diversification dans les territoires ruraux et de l'aménagement du territoire. Il est de mon rôle de noter que le jaune budgétaire « Aménagement du territoire » présente des crédits en baisse pour 2006, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement, notamment pour ce qui concerne le ministère de l'agriculture et de la pêche.

Toutes ces politiques contractuelles ont été réaffirmées par la loi relative au développement des territoires ruraux, qui a été adoptée cette année. Or, sur les quatre-vingt-huit décrets et arrêtés prévus, à ce jour, seuls dix-huit ont été publiés. Quid des suivants, monsieur le ministre ?

S'agissant de la politique de la montagne, les indemnités compensatoires de handicap naturel bénéficient, pour 2006, de 250 millions d'euros de crédits, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, contre 234 millions d'euros prévus dans la loi de finances pour 2005. Cette hausse, qu'il faut certes souligner, est cependant insuffisante pour permettre au ministère de l'agriculture et de la pêche de porter à 40 % le différentiel d'indemnisation des vingt-cinq premiers hectares par rapport aux hectares suivants, alors qu'il avait été augmenté, chaque année, par tranche de 10 %, afin que puisse être atteint l'objectif de 50 % en 2007 initialement fixé.

J'évoquerai, pour finir, un sujet d'importance, qui fait l'objet de développements dans le rapport pour avis : l'emploi en zone rurale.

Si l'évolution de l'emploi en zone rurale a connu une nouvelle dynamique depuis une quinzaine d'années, elle s'est faite au détriment du secteur agricole proprement dit, qui ne représente aujourd'hui plus que 20 % de cet emploi.

Après la loi d'orientation agricole de 1999, la loi relative au développement des territoires ruraux, promulguée en début d'année, a cherché à remédier à cette situation. Parmi les mesures prises dans ce but, son article 59 a reconnu les groupements d'employeurs composés d'adhérents de droit privé et de collectivités territoriales. À l'occasion de son adoption, le secrétaire d'État chargé de l'agriculture de l'époque, M. Forissier, avait convenu de la nécessité de travailler sur le statut de l'employé rural en tant que multisalarié dans le cadre des groupements d'employeurs. Or aucune réflexion ne semble avoir été menée sur le sujet. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous apporter quelques lumières à ce propos ?

Monsieur le ministre, un autre aspect important du développement rural concerne la place de l'homme dans ces territoires. Quel cadre de vie lui proposez-vous ? Pour ma part, je suis très attaché, dans les zones rurales, à la préservation et au développement de la notion de services, qu'il s'agisse de services publics ou de services privés d'utilité publique, à l'image des médecins.

Monsieur le ministre, tout en appliquant le schéma de la LOLF, ne pourriez-vous pas nous proposer une autre présentation de la politique de développement rural, qui soit à la fois plus transversale et plus globale, éventuellement dans un cadre interministériel ? Le Parlement serait alors en mesure de connaître véritablement tous les aspects d'une telle politique. Ne serait-il pas également envisageable, dans l'immédiat, de prévoir certains rééquilibrages financiers, par un transfert de crédits de l'action 3 vers l'action 4 ?

Voilà, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les quelques éléments que je souhaitais évoquer dans le cadre de ce projet de budget. Pour conclure, je rapporterai, comme je m'y suis engagé, l'avis favorable que la majorité de la commission a donné à l'adoption de ces crédits. Vous l'avez senti, à titre personnel, je serai plus mesuré par rapport à cette position.

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