Séance en hémicycle du 6 décembre 2005 à 15h00

Résumé de la séance

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  • SDIS
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La séance

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La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.

Photo de Christian Poncelet

La séance est reprise.

Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances pour 2006 concernant les crédits de la mission « Sécurité civile ».

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre système de protection civile obtient dans l'ensemble de bons résultats. Il le doit essentiellement à la compétence et au dévouement sans faille de ceux qui, du plus haut gradé au simple sapeur, qu'ils soient volontaires ou professionnels, sont chargés de sa mise en oeuvre opérationnelle. Leur rendre hommage est un exercice sincère mais obligé auquel je sacrifie bien volontiers.

Ce système pourrait être meilleur encore si, comme je le préconise depuis des années, il était nationalisé, c'est-à-dire si était enfin créé un grand service national de la protection civile qui assurerait une meilleure coordination et - c'est peut-être plus important encore - une plus grande sécurité juridique pour les présidents des services départementaux d'incendie et de secours, les SDIS, voire pour les présidents des conseils généraux. Un jour viendra forcément où, à la suite d'un accident grave, le président d'un SDIS se retrouvera devant un tribunal pour ne pas avoir équipé assez vite les services de son département d'une grande échelle, ou d'une plus grande échelle, ou de je ne sais quel autre engin, alors même que les documents approuvés par le préfet le préconisaient.

Cette proposition d'établir un service à l'échelon national a été étudiée par plusieurs ministres de l'intérieur ; elle a finalement toujours été repoussée, pour des raisons uniquement budgétaires. Je la rappellerai dès que l'occasion s'en présentera afin de maintenir la flamme - si je peux employer cette expression sur un tel sujet.

Avant le grand soir de la protection civile, monsieur le ministre, je me contenterai donc de vous interroger sur des sujets moins ambitieux, très concrets, et dont la solution permettrait aux services de mieux fonctionner.

La loi du 13 août 2004 a bien recadré les objectifs de la protection civile en clarifiant théoriquement le rôle de chaque acteur dans les différentes situations rencontrées sur le terrain. Il demeure que de nombreuses dérives, encore que le terme soit peut-être un peu fort, sont constatées dans nos départements.

J'évoquerai trois aspects.

Tout d'abord, premier aspect, les nouveaux risques liés au terrorisme ont fait glisser les missions NRBC - nucléaire, radiologique, biologique, chimique - vers les services d'incendie et de secours départementaux, dans le cadre d'une politique nationale de protection des populations contre ces risques, et des matériels spécifiques - tentes de décontamination, tenues appropriées, appareils de détection ou de décontamination - ont été attribués à certains SDIS par une convention avec l'État, ce dont je me félicite. C'est notamment le cas dans mon département.

Cependant, la formation correspondant à la mise en oeuvre de ces nouveaux outils, les recyclages à venir, les moyens de transport de ces unités mobiles de décontamination, sont intégralement à la charge des SDIS, ainsi que, surtout, les frais d'entretien et de stockage de ces matériels. L'étude du conditionnement de ceux-ci se fait par recherche de renseignements mutuels entre SDIS concernés. La péremption des produits nécessite leur renouvellement, qui doit être également assuré par les sapeurs-pompiers. Des moyens en personnels et en locaux ainsi que des moyens de transport sont sollicités au détriment des missions de base spécifiques. Il est donc nécessaire, pour cette action relevant de l'échelon national, que l'État participe plus fortement à rendre les nouveaux outils encore plus performants, notamment par leur capacité à se regrouper.

Comprenez bien, monsieur le ministre : je ne suis pas en train de pleurnicher sur les moyens des SDIS, je m'inquiète seulement de leur capacité à regrouper ces moyens, et à le faire vite. Il est évident que, si devait se produire en un lieu du territoire national un accident, chimique par exemple, il serait intéressant que l'on puisse y concentrer les moyens de cinq, de dix départements au moment voulu. Or, je constate dans mon département que les moyens, notamment les moyens de transport, ne sont pas à la hauteur d'une telle exigence.

Ensuite, deuxième aspect, le secours aux personnes occupe une place prépondérante dans les finances et dans l'activité de nombreux SDIS ; il représente plus de 60 % des interventions dans mon département et, je crois, dans la majeure partie des départements !

Même si la reconnaissance des carences des ambulanciers privés est appliquée - car c'est là le fond du problème -, elle reste limitée à un nombre forfaitaire d'interventions sanitaires. En effet, la régulation médicale du SAMU est seule garante du choix de la carence ou non. Elle considère que, si elle n'a pas procédé à une demande préalable de déplacement d'un ambulancier privé ayant entraîné un refus, la carence n'est pas avérée. Ainsi, bon nombre des carences effectives recensées par le SDIS ne sont pas reconnues comme telles et ne sont donc pas indemnisées par le centre hospitalier. Il en résulte pour les SDIS un coût net élevé, en augmentation constante, dans la mesure où la demande est elle-même croissante : dans mon département, une quarantaine d'interventions pour carence sont recensées chaque mois.

Qui plus est, la carence reconnue entraîne un remboursement de 90 euros par déplacement, bien inférieur au coût réel. En effet, les pompiers ne se déplaçant pas à moins de trois, celui-ci est de l'ordre de 300 à 400 euros. Cette situation est d'autant plus inadmissible que les ambulanciers privés perçoivent, en plus des 90 euros par intervention, une somme forfaitaire de 346 euros par permanence, qu'ils interviennent ou qu'ils n'interviennent pas. Encore heureux quand, incapables d'effecteur correctement leur mission, par exemple pour un malade lourd, en étage sans ascenseur, ils ne font pas appel aux pompiers dès leur arrivée sur place, ce qui augmente d'autant le coût supporté par les services !

Une solution consisterait dans un remboursement direct des SDIS par la sécurité sociale, sans passer par cette validation à sens unique, mais sur le même mode que le secteur privé. Cependant, les caisses d'assurance maladie, à la recherche d'économies, ont déjà refusé cette possibilité. C'est encore une sollicitation supplémentaire pour les SDIS, et les interventions pour secours à personne restent à la hausse. Il n'est cependant pas convenable de continuer à faire peser des dépenses manifestement hospitalières sur les collectivités locales. Je vous interroge, monsieur le ministre, afin que vous puissiez par la suite proposer des solutions à cette situation, qui devient d'autant plus inacceptable que les interventions mobilisent des moyens de secours pendant des durées parfois longues, au détriment de la couverture des risques pour laquelle les SDIS sont organisés.

Troisième et dernier aspect, le programme ANTARES, qui est relatif, comme chacun sait, à la mise en place d'un réseau numérique de transmissions spécifique à tous les services de sécurité, représentera un progrès technique incontestable ; toutefois, si nous tardons trop à le mettre en place, le risque est grand que nous ne soyons dépassés par l'évolution technologique.

L'un des objectifs du programme est l'interopérabilité des réseaux entre les SDIS et les services de sécurité - SAMU, police, gendarmerie - relevant de la compétence de l'État en matière opérationnelle et en matière de coordination des secours. Cependant, sa mise en oeuvre, si elle s'appuie sur le réseau ACROPOL de la police et sur la fourniture des infrastructures complémentaires par l'État, est une énorme charge supplémentaire pour les SDIS. Elle implique en effet le renouvellement complet des matériels informatiques et électroniques liés aux réseaux de transmission et de diffusion de l'alerte, ce qui, pour prendre l'exemple de mon département, devrait représenter une dépense de plus d'un million d'euros, hors frais d'installation.

Certes, les frais d'entretien du réseau devraient être partagés entre les services. Nous attendons de voir ! De toute façon, s'agissant d'une dépense obligatoire pour les SDIS en raison du changement de la bande de fréquence et de la disparition prochaine de la technologie analogique actuelle, un effort supplémentaire et soutenu dans le temps de la part de l'État me semble indispensable. On peut se référer sur ce point aux craintes exprimées par le rapporteur spécial de la commission des finances. Et je n'évoquerai que pour mémoire les dépenses considérables et la débauche d'énergie qui nous sont imposées pour le risque, qui me semble très hypothétique - il est vrai que je ne suis pas médecin - de grippe aviaire.

En conclusion, si les SDIS, gestionnaires des sapeurs-pompiers, sont partie intégrante de la sécurité civile et bénéficient de l'effet de masse et de la meilleure répartition territoriale, on peut cependant s'interroger sur leurs capacités futures à répondre à toutes les sollicitations opérationnelles qui sont à la limite de leurs missions légales.

Les besoins financiers et les efforts de formation et d'adaptation permanents que nécessite cette multiplicité de missions supplémentaires viennent alourdir les budgets des SDIS et donc les contributions des collectivités, qui ne sont pas proportionnelles aux risques constatés.

C'est là, monsieur le ministre, que je me prends à rêver d'urgence d'un service national de la protection civile, retrouvant ainsi mon point de départ, avant peut-être, comme le proposait Mme Gourault ce matin, que nous n'établissions un service européen de protection civile. Si nous pouvions commencer par l'échelon national, ce serait déjà bien !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Girod

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d'entamer mon propos, je tiens évidemment à saluer le sacrifice de ceux qui, cet été, ont donné leur vie pour la sécurité de nos concitoyens.

S'agissant des crédits de la mission que nous examinons présentement, si j'avais besoin de chercher des raisons de les voter, il me suffirait de considérer le bilan actuel et de constater que, depuis la loi de modernisation de la sécurité civile, toute une série d'éléments positifs se sont mis en place et que la situation s'améliore.

Ainsi, je tiens à souligner la manière dont s'effectue l'équipement des SDIS, même si cet équipement est assez coûteux pour les départements, ainsi que la volonté d'éducation du public qui s'exprime à travers les programmes assurés dans les écoles ; de même, les réserves communales, au fur et à mesure qu'elles se mettent en place, suggèrent à nos concitoyens l'idée d'une sécurité civile partagée par tout le monde. Tous ces aspects sont positifs.

Mais, et ce n'est pas une objection au vote des crédits, vous me permettrez une fois de plus, monsieur le ministre, de faire écho aux propos qu'à tenus ce matin notre collègue Jacques Legendre lors de la discussion de la mission « Sécurité ».

Tant que je serai parlementaire, je ne me résignerai pas à ce que l'on ne pose pas devant nos concitoyens le problème de la sécurité globale. Je suis de ceux qui pensent que la défense n'appartient ni aux seuls militaires ni aux seules administrations.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Girod

Dans notre pays, nous avons malheureusement un peu trop tendance à sectoriser les choses. Pour ma part, j'aurais préféré que, dans la LOLF, il y ait une mission globale de défense, de défense civile et de défense militaire, à la place des segmentations qui existent actuellement et qui me semblent aller à rebours de l'idée que nous devons faire passer, à savoir que le monde dans lequel nous vivons est un monde dangereux, pour des raisons naturelles, technologiques et humaines, un monde dans lequel le terrorisme n'est pas la moindre des menaces.

Cela dit, j'observe que l'interministérialité a fait quelques menus progrès depuis trois ans. Elle était indispensable.

Je prendrai un exemple. La modernisation de la loi de 1980 sur la protection et le contrôle des matières nucléaires fait actuellement l'objet d'une réflexion menée au niveau du secrétariat général de la défense nationale, le SGDN, avec la participation des ministères de la défense, de l'intérieur, de l'industrie et de l'économie et des finances, dans le but d'instituer un système à peu près cohérent face aux menaces qui nous guettent.

De nombreux problèmes ont surgi avec les opérateurs. J'ai eu récemment l'occasion d'assister à une explication intéressante entre les opérateurs et les représentants du SGDN au cours de laquelle chacun apportait des éléments, mais où les uns et les autres n'avaient pas toujours la volonté de s'écouter mutuellement.

L'interministérialité peine à s'imposer au sein même du Gouvernement, et la collaboration entre les autorités nationales et les grands opérateurs d'infrastructures ou les entreprises privées, en vue de définir les menaces qui sont devant nous et de prévoir les systèmes dont nous avons besoin pour nous en protéger, a du mal à prendre corps.

Pour illustrer cette situation, je reprendrai un exemple qui a été évoqué ce matin : l'affaire de Cambrai.

Il y a trois ans, le ministre de l'intérieur de l'époque, M. Sarkozy, annonçait la création d'une école supérieure de formation aux problèmes de la défense civile. Nous pensions que chacun avait enfin compris la nécessité de faire travailler ensemble tous les intervenants. Finalement, la gendarmerie a dit qu'elle n'avait pas besoin d'une école supérieure, les pompiers ont dit qu'ils avaient l'école de Nainville-les-Roches et qu'ils allaient avoir le nouveau site d'Aix-en-Provence, la police a tenu un discours similaire.

Chacun a critiqué le choix de Cambrai en prétendant que ce n'est pas très bien situé, ce qui est faux dans la mesure où Cambrai est à cent kilomètres de Bruxelles et, par conséquent, au coeur des problématiques européennes.

Résultat : ce chantier n'avance pas. En outre, parmi les oppositions qui se manifestent contre Cambrai, il n'est question que des seules administrations alors que, si l'on veut créer un véritable pôle de défense civile dans la dimension globale que j'appelle de mes voeux, le seul moyen est d'y intégrer non seulement les administrations, les corps d'intervention, mais aussi tous les responsables de la sécurité dans les entreprises.

Or, quand on élargit un peu la réflexion, on s'aperçoit que l'Europe est demanderesse d'un premier geste dans ce sens. En effet, en cherchant à organiser une sécurité commune, elle s'est aperçue, ne serait-ce qu'à travers l'exercice Euratox, que le langage des entreprises et des services d'intervention était très différent d'un pays à l'autre.

Monsieur le ministre, pourquoi n'avançons-nous pas ? Comment se fait-il que l'on se réfugie derrière des formules de partenariat public-privé ? Les appels d'offres ne débouchent pas, on ne sent aucune volonté de rassembler les efforts de tous ceux qui ont à intervenir au titre de la défense globale de nos concitoyens. Finalement, on n'a pas plus avancé en ce domaine que dans celui de l'alerte aux populations.

À ce propos, je dis souvent que si, par hasard, des sirènes se mettaient à sonner en pleine nuit, nos concitoyens qui les entendraient - il manque à peu près les deux tiers du réseau - croiraient que l'on est mercredi à midi et les autres -- si elles sont modulées - penseraient qu'il y a une rave party dans le secteur.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Girod

Monsieur le ministre, au-delà de la satisfaction que nous pouvons avoir au vu des crédits de la mission que vous nous présentez, ayons le souci de faire sauter les cloisons qui freinent les progrès de notre pays ! Vous nous verrez alors vous suivre avec encore plus d'enthousiasme.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi d'abord, après les collègues qui m'ont précédée, de rendre hommage aux dix-neuf sauveteurs décédés en service au cours de l'année 2005, décès qui démontrent, si besoin en était encore, combien cette activité est difficile et dangereuse.

En ce sens, les femmes et les hommes qui assurent les missions de sécurité civile méritent toute l'attention des pouvoirs publics, notamment en termes de reconnaissance de leur statut.

L'examen du projet de loi de finances devrait être, à cet égard, un rendez-vous important.

Pour la première fois cette année, le budget consacré à la sécurité civile fait l'objet d'une discussion spécifique avec une mission ad hoc. C'est une avancée.

Toutefois, on peut regretter que les crédits y afférent ne correspondent pas aux dépenses en matière de sécurité civile qui vont aller croissant. Le rapporteur spécial a lui-même exprimé, dans sa note de présentation, ses inquiétudes sur la présente mission, inquiétudes que nous partageons.

Il s'agit effectivement d'un budget qui, s'il peut apparaître de prime abord en augmentation, n'est en réalité que le résultat de jeux d'écriture et de transferts de charges et de personnels d'un programme à l'autre à l'intérieur de cette mission.

Selon les termes du rapporteur spécial, concernant la présente mission, « l'évolution est plus apparente que réelle », « les effectifs sont stables », « la situation n'est pas budgétairement satisfaisante », enfin, « l'effort financier qui sera demandé aux SDIS, et donc aux départements est accru ».

On le voit, le budget national de la sécurité civile reste bien modique.

L'État a pourtant le devoir d'assurer ses missions régaliennes de sécurité civile, afin que la population bénéficie sur tout le territoire d'une même qualité de secours. Pour ce faire, il est nécessaire de rééquilibrer ses dotations aux SDIS et de rechercher des financements complémentaires.

La demande de protection contre les risques naturels ou technologiques augmente, commandant des normes de sécurité de plus en plus exigeantes.

Face aux nouveaux risques qui émergent depuis quelque temps, les pouvoirs publics doivent donc réfléchir à l'organisation et à l'optimisation d'un service public performant en matière de protection civile.

Ces risques, qu'ils soient la conséquence d'un développement économique déréglementé, des modifications environnementales ou climatiques ou encore des mutations dans le domaine de l'agriculture, doivent faire l'objet d'une gestion cohérente de la part de l'État et recevoir les moyens d'intervention les plus performants.

Or il s'avère que les SDIS, dont les agents sont souvent parmi les premiers à intervenir dans les secours apportés à la population, doivent sans cesse revoir à la baisse le budget consacré aux recrutements, à la formation et au reclassement des personnels.

D'un côté, la loi de modernisation de la sécurité civile a créé de nouvelles charges sans aucune contrepartie financière. Tel est le cas notamment en ce qui concerne la réserve civile, les associations de sécurité civile, l'établissement public interdépartemental d'incendie et de secours, l'EPIDIS, ou encore le contrat à durée déterminée des sapeurs-pompiers volontaires.

De l'autre, depuis quelques années, l'État ne contribue plus de la même façon au budget des SDIS. La DGF a ainsi laissé la place au fonds d'aide à l'investissement, avec les lourdeurs administratives que l'on sait.

Pourtant, le retour à la DGF permettrait aux SDIS d'effectuer des dépenses d'investissement réellement axées sur leurs besoins spécifiques, c'est-à-dire selon leur implantation géographique.

Au-delà, nous craignons que les orientations contenues tant dans la présente mission que dans la loi de modernisation de la sécurité civile ne remettent en cause, à terme, le principe de la gratuité des secours, qui constitue pourtant la garantie de l'égalité de tous devant les secours et de leur efficacité au profit de l'ensemble de la collectivité.

En tout état de cause, sauf à asphyxier les SDIS, il faudra bien que l'État prenne un jour ses responsabilités en la matière.

Permettez-moi d'évoquer plus particulièrement la situation de mon département, la Seine-Saint-Denis, où le conseil général participe au financement de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, la BSPP, à hauteur de 29 millions d'euros par an.

Il est indispensable de revoir à la hausse la participation de l'État, qui ne représente que 25 % de l'ensemble, les 75 % restant étant divisés au prorata de la population entre Paris, les communes et les départements de la petite couronne.

Augmenter la participation de l'État permettrait de remédier au déficit de sapeurs pompiers en Seine-Saint-Denis, territoire où il y a le moins de pompiers en nombre par habitant : 1, 1 pompier pour 1000 habitants, quand la moyenne nationale se situe à 4, 5 pompiers pour 1000 habitants.

L'État doit également s'attaquer à l'environnement de travail des pompiers qui est trop souvent catastrophique, singulièrement dans les casernes de la Seine-Saint-Denis. Celle qui est située à Pierrefitte, par exemple, devrait être refaite en 2010 ! Ce n'est pas acceptable. Il faut accélérer la reconstruction de ces locaux. À Aulnay-sous-Bois, la situation n'est guère plus satisfaisante.

Par ailleurs, depuis seize ans, les activités opérationnelles de la BSPP connaissent une augmentation continuelle. Les 1136 interventions par jour s'expliquent, pour partie, par le développement de la précarité et de la détérioration de la vie sociale dans notre pays, ainsi que par la désaffection d'un certain nombre d'acteurs de la mission de secours aux victimes : médecins libéraux, ambulanciers privés.

Dans certains quartiers, les pompiers sont bien souvent les derniers acteurs extérieurs à intervenir. On fait appel à eux dans tous les domaines. Il est devenu humainement difficile de travailler dans de telles conditions.

Il apparaît donc indispensable de recentrer les missions des sapeurs pompiers sur l'essentiel.

Le manque d'effectifs, ajouté à l'augmentation du nombre des missions qui ne sont pas propres aux pompiers, engendre une situation difficile à laquelle il convient de remédier de façon urgente.

Bref, parce que le budget de la sécurité civile n'est pas à la hauteur des enjeux en matière de sécurité civile, nous ne le voterons pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Murat

Monsieur le ministre, vous ne m'en voudrez certainement pas de profiter de l'opportunité qui m'est offerte pour évoquer le problème de l'adaptation des réseaux d'eau à la défense incendie.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Murat

En effet, comme mes collègues, je suis sollicité très régulièrement sur le terrain par de nombreux maires des communes corréziennes confrontés à des difficultés en la matière. C'est un sujet particulièrement sensible qui mérite toute notre attention et qui, malheureusement, soulève des questions d'ordre technique, opérationnel, juridique et, bien sûr, financier.

Il ne faut pas perdre de vue que l'ensemble des petites communes rurales de notre territoire est touché et attend des réponses de notre part.

La réglementation des installations d'eau pour la lutte contre les incendies est toujours fixée par une circulaire ministérielle de 1951, qui n'a jamais été réactualisée. Elle précise les dispositions visant à assurer dans les meilleures conditions l'utilisation du réseau d'eau potable pour la lutte contre l'incendie et, à ce titre, la note de doctrine adressée aux maires et élaborée par les services de l'État en concertation avec les SDIS tend à définir les modalités d'instruction des actes d'urbanisme relatives à la prise en compte de ce risque.

Or ces textes révèlent de nombreuses difficultés d'application. Ainsi, les réseaux d'adduction d'eau potable ayant été réalisés et dimensionnés pour assurer la desserte des habitants ne semblent plus adaptés aux besoins réels.

De surcroît, la création de réserves artificielles en cas d'insuffisance de prise d'eau, l'équipement et l'aménagement des points d'eau pour permettre l'accessibilité des engins ont un coût souvent très élevé pour les petites communes rurales.

Enfin, dans les communes ne possédant ni POS ni PLU, une interprétation stricte des textes entraîne le refus d'octroi du permis de construire, ce qui entrave le développement de ces zones le plus souvent rurales.

Malgré de nombreuses sollicitations, aucune réponse convaincante n'a été apportée aux petites communes rurales. On affirme souvent que la circulaire de 1951 offre de nombreuses solutions adaptées à leur faible densité de population et d'urbanisation. Pourtant, lorsque les moyens financiers de la commune sont trop faibles, la seule solution consiste à faire supporter au dépositaire du permis de construire tout ou partie des dépenses consacrées à de nouveaux aménagements de défense incendie rendus nécessaires par l'implantation de la future construction, ce qui, vous en conviendrez, monsieur le ministre, freine le développement des petites communes et, de fait, nuit à la préservation d'un monde rural vivant.

Lors de la discussion du projet de loi de modernisation de la sécurité civile, en juin 2004, j'avais déposé un amendement visant à créer, pour les plus petites communes, un système dérogatoire permettant l'obtention d'un permis de construire en dépit de l'inobservation des normes en matière d'incendie. Cet amendement avait pour objet principal d'attirer l'attention du Gouvernement et d'ouvrir le débat sur cette question. Je n'ai cessé par la suite de réitérer cette demande de réflexion lors de diverses interventions.

En effet, si chacun convient qu'il ne peut être question pour l'État de proposer une sécurité au rabais pour les habitants des zones rurales, inversement, il ne saurait non plus être question d'imposer des équipements surdimensionnés dans tous les centres de secours des zones rurales pour faire face à l'insuffisance de la ressource en eau à proximité des habitations isolées.

« Si nous ne pouvons pas transiger sur le niveau de sécurité, nous avons en revanche la possibilité de revoir les moyens pour y parvenir », affirmait dans ce même hémicycle, en avril dernier, la ministre déléguée à l'intérieur, prenant l'engagement, au nom du Gouvernement, de réviser, de « dépoussiérer », pour reprendre le terme qu'elle avait employé, le texte de la circulaire de 1951, et ce non pour réduire l'exigence en matière de sécurité, mais pour atteindre le même niveau avec des moyens plus diversifiés et plus adaptés aux contraintes du monde rural. Cette perspective avait alors été accueillie avec satisfaction et espoir par l'ensemble des maires ruraux.

Un groupe de travail technique, associant les professionnels du secours et les sapeurs-pompiers, avait donc commencé à travailler sous la conduite du directeur de la défense et de la sécurité civile, et un comité de pilotage, composé en partie d'élus, devait être mis en place afin d'être associé à cette réflexion. La réunion constitutive de ce comité devait avoir lieu le 1er juin. Elle a été annulée en raison du remaniement ministériel.

Monsieur le ministre, c'est parce qu'il me semble primordial de relancer ce dossier, si important pour le monde rural, que je me permets de vous demander aujourd'hui d'intervenir en ce sens.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire

Messieurs les rapporteurs, vous avez exprimé trois préoccupations majeures, auxquelles je vais répondre.

M. Haut s'est interrogé sur l'état de la flotte de la direction de la défense et de la sécurité civile et m'a demandé s'il était possible de réfléchir, avec la commission des finances, sur les perspectives de financement à long terme.

Je lui réponds sans réserve par l'affirmative. Les choix d'investissement que Nicolas Sarkozy vous avait proposés portent aujourd'hui leur fruit. Le Dash est un avion polyvalent, rapide, doté d'une capacité importante d'emport, de bombardement d'eau et de produit retardant. De la même façon, l'hélicoptère bombardier d'eau qu'il avait proposé de louer a fait ses preuves et sa location sera pérennisée.

Monsieur le rapporteur spécial, l'été 2005 a été coûteux en vies humaines. La grande famille de la sécurité civile a trop souvent pleuré ses équipages, et je souhaite, au nom du ministre d'État et en mon nom personnel, leur rendre à tous un hommage particulièrement solennel.

Leur implication n'aura pas été vaine. Les résultats sont là. J'ai moi-même pu mesurer, dans le sud de la France, la performance de notre dispositif.

Les conditions météorologiques ont été exceptionnelles : sécheresse sévère et vents forts. Pourtant, ce sont seulement 22 000 hectares de forêt qui ont brûlé, ce qui est inférieur à la moyenne des dix dernières années, qui est de 25 000 hectares. Ce n'est pas un hasard. C'est le reflet d'une organisation plus réactive qui permet d'éteindre près de 80 % des incendies naissants. C'est également le fruit d'un engagement précoce des moyens nationaux en renfort des moyens locaux.

À la suite des trois accidents qui sont survenus durant l'été 2005, nous avons engagé une réflexion de fond sur la sécurité aérienne. Elle conduira à revoir notre stratégie d'emploi, car il n'est pas nécessaire de faire prendre des risques aux équipages de la sécurité civile pour éteindre un feu de garrigue lorsqu'il n'y a ni habitation ni population en danger, ni vie humaine à protéger. Un Tracker s'est écrasé, provoquant la mort des deux pilotes, alors que son intervention n'était pas si indispensable.

Monsieur le rapporteur spécial, les avions qui ont été tragiquement accidentés en 2004 et 2005 seront remplacés en 2006.

Vous vous interrogez, monsieur le sénateur spécial, sur le fait que les financements de ces nouvelles acquisitions ne figurent pas dans le programme « Intervention des services opérationnels ». Il est vrai que les crédits de paiement du Canadair qui a remplacé l'appareil accidenté en 2005 seront dégagés en gestion, car l'accident s'est produit au mois d'août, après les arbitrages budgétaires. Mais une partie des autorisations d'engagement du remplacement des Tracker est, elle, inscrite dans le programme.

Pour le reste, vous avez raison, monsieur le rapporteur spécial, nous devons réfléchir en permanence au renouvellement de notre flotte aérienne, et le contrôle qu'opère chacune et chacun d'entre vous pourra nous y aider.

La direction de la défense et de la sécurité civile a établi un rapport sur la mise en oeuvre d'un amortissement annuel minimal de la flotte aérienne. L'idée de remplacer les deux Tracker perdus par le Dash est issue de ce rapport. Par ailleurs, nous étudions le financement du Canadair perdu cet été par un crédit-bail assorti d'une assurance. Nous commençons donc à réfléchir, avec le ministère des finances, à la distinction entre la propriété et l'exploitation opérationnelle de nos aéronefs.

M. Guené, M. Haut et Mme Gourault se sont interrogés sur la pertinence de l'architecture de la mission « Sécurité civile ». Je leur réponds qu'ils ont raison sur le fond et que nous allons réfléchir à sa modification en 2006.

La scission en deux programmes de la mission « Sécurité civile » risque de se révéler pénalisante en gestion. En outre, elle ne reflète pas la globalité de l'effort de l'État dans le registre de la prévention et de la gestion des risques.

Monsieur Paul Girod, je vous confirme que le ministre d'État souhaite aller vers une vision plus large de la prévention des risques et de la gestion des crises. Il demandera donc que l'on s'engage vers une mission interministérielle regroupant la prévention des risques et la gestion des crises.

Vos rapporteurs, mesdames et messieurs les sénateurs, ont décerné au Gouvernement un satisfecit « vigilant » sur l'application de la loi de modernisation de la sécurité civile. Je tiens bien évidemment à les en remercier.

Satisfecit il y a parce que le climat est en effet apaisé depuis l'adoption de la loi de modernisation de la sécurité civile, comme en témoignent le dernier congrès des sapeurs-pompiers et les travaux de la conférence nationale des SDIS. C'est le rôle crucial de la conférence nationale des SDIS, présidée par M. Doligé et dont le ministre d'État suit attentivement les travaux, que de combler le fossé d'incompréhension qui séparait les élus gestionnaires des services d'incendie et de secours et l'administration de l'État.

Mais ce satisfecit est vigilant. Messieurs les rapporteurs, vous vous préoccupez, comme Mme Gourault, de l'évolution des dépenses des SDIS, qui est restée soutenue.

J'attire malgré tout votre attention sur un point important. Aujourd'hui, tout le monde dénonce le fait que le transfert de la responsabilité du financement et de la gestion des SDIS vers les conseils généraux n'a pas été accompagné du transfert des moyens correspondants. Permettez-moi de vous rappeler que ces transferts sont intervenus par touches successives. Avec 7 % en 2004, nous sommes très loin des 35 % d'augmentation de l'année 2000 !

Les causes de l'évolution des budgets des SDIS - elles ont été relevées par la Cour des comptes - sont multiples. Je n'en citerai que quelques-unes : les 35 heures ;...

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

...les réformes statutaires et indemnitaires ; la modernisation des matériels.

Toutefois, aucune évolution incontrôlée des dépenses des SDIS ne doit être acceptée, fût-ce sous le couvert de la sécurité. La grande question est de savoir comment nous allons parvenir, collectivement, à maîtriser ces dépenses.

Un point me semble essentiel à cet égard. En 2004, la loi de modernisation de la sécurité civile a enfin achevé la départementalisation, que la loi relative à la démocratie de proximité avait laissée au milieu du gué en 2002.

La procédure d'élaboration des budgets des SDIS a enfin été modifiée. Mesdames, messieurs les sénateurs - j'allais dire mes chers collègues, car nombre d'entre vous sont conseillers généraux - les conseils généraux ont désormais leur mot à dire sur ces dépenses. C'est la grande avancée qu'a apportée la loi de modernisation de la sécurité civile.

Dans la loi relative à la démocratie de proximité, la décision des conseils d'administration des SDIS s'imposait, sans concertation, au budget des conseils généraux. Avec la modification que nous avons apportée dans la loi de modernisation de la sécurité civile, les conseils généraux ont leur mot à dire. Désormais, ce sont les conseils généraux qui fixent le montant des crédits qu'ils allouent aux SDIS.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Je suis très clair sur ce point. Il appartient dorénavant aux exécutifs départementaux d'assumer leurs responsabilités. La loi de modernisation de la sécurité civile leur donne les moyens de refuser l'augmentation des dépenses des SDIS.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Ce matin, Mme Gourault a évoqué le rôle des conseils généraux et, à l'instant même, Mme Assassi a fait référence à la DGF. Je vais répondre à leur préoccupation.

D'abord, les conseils généraux ne sont pas les seuls à être impliqués. Jusqu'en 2008, le financement des SDIS sera assuré par les municipalités et par les conseils généraux.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Je suis un fervent adepte de la décentralisation. Mais je suis conscient que nous ne pouvons pas en permanence réclamer un transfert accru de responsabilités et nous plaindre chaque fois que nous obtenons ce transfert.

Chacun doit assumer ses propres choix. Certains conseils généraux ont fait le choix de lisser la situation. Ils ont décidé que toute augmentation supplémentaire des budgets des SDIS serait totalement assumée par le département et que les communes ne subiraient pas un centime d'euro d'augmentation jusqu'en 2008. Que ces départements ne viennent pas aujourd'hui se plaindre !

D'autres conseils généraux ont proposé aux maires de répartir les augmentations de manière proportionnelle entre les communes et le département. C'est un autre choix !

Il y a eu enfin des conseils généraux qui ont proposé aux communes de n'augmenter la part communale que sur la base de l'inflation annuelle.

A ce propos, je souhaite faire une observation.

Cette année, par exemple, le taux d'indexation de la DGF aux communes est de 2, 8 % alors que le taux d'inflation est de 1, 7 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Monsieur le ministre, puis-je de vous interrompre ?

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Je souhaite auparavant terminer mon explication.

Ainsi, en 2008, lors du transfert de la globalité du budget des SDIS aux départements, ceux d'entre eux qui auront proposé aux communes de ne pas augmenter leur participation au financement du budget des SDIS ou qui auront limité l'évolution de cette participation au simple taux de l'inflation seront désavantagés.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, avec l'autorisation de M. le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Il m'arrive rarement de reprendre un ministre, mais je tiens à rappeler que la loi de modernisation de la sécurité civile tend à ce que le département prenne l'intégralité de la responsabilité des SDIS, tout en associant les maires, notamment au sein du conseil d'administration. En fait, nous avons gelé les participations des communes jusqu'en 2008. La seule augmentation qui est aujourd'hui possible, depuis le vote de la loi, est strictement limitée au taux d'inflation.

Il est possible que, dans votre département, un accord ait été passé entre les communes et le conseil général. Pourquoi pas ? Mais la loi dispose bien que ce sont les départements qui aujourd'hui assument la charge de financement supplémentaire. On ne peut donc augmenter la cotisation des communes qu'à concurrence du taux de l'inflation. Je le rappelle parce que c'est la lettre de la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

C'est vrai !

Veuillez poursuivre, monsieur le ministre délégué.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Monsieur Hyest, je vous remercie de votre précision.

Mais vous admettrez que tous les départements ne procèdent pas de la même manière. Certains ne prennent même pas en compte l'inflation ; d'autres demandent aux communes de participer à hauteur de l'inflation. Ces communes ne sont pas forcément désavantagées, puisqu'elles se voient appliquer une augmentation inférieure au taux d'indexation de 2, 8 %. En 2008, lorsque le transfert intégral de la DGF aura lieu en direction des départements, lesquels prendront alors en charge la totalité les dépenses du SDIS, ceux qui n'auront pas imposé aux communes une augmentation du niveau de l'inflation seront défavorisés. Je voulais simplement vous sensibiliser à cette analyse.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Je vous en prie, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. le président de la commission des finances, avec l'autorisation de M. le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Si j'ai bien compris, monsieur le ministre, certains départements ont limité l'augmentation de la contribution des communes à l'inflation, conformément à la loi à laquelle a fait référence M. Hyest. Ces communes voient donc leur DGF plafonnée en quelques sortes.

D'autres communes auront participé plus largement parce que, par une sorte de convention locale, elles ont accepté de participer dans les mêmes proportions que les départements ; elles verront en conséquence leur DGF progresser. On imagine qu'en 2008, lorsque le transfert s'accomplira, la DGF que ne percevront plus ces communes sera versée au conseil général.

Ce point devrait faire l'objet d'une étude particulière pour éviter une distorsion et faire respecter les principes d'équité. Est-ce bien cela que je dois comprendre ?

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Non, monsieur le président. Je dis simplement qu'une grande souplesse a été prévue par le législateur, ce qui explique qu'il y ait ici ou là des accords amiables. C'est d'ailleurs le ministre de l'intérieur lui-même qui a souhaité permettre aux communes de rester dans les conseils d'administration des SDIS pour avoir leur mot à dire, quoiqu'en 2008 les départements auront seuls la charge du financement global. Tout cela témoigne bien de l'esprit de concertation et de dialogue permanent avec les communes qui a animé la réforme.

Ces accords amiables qui existent aujourd'hui, quelles qu'en soient les conséquences en 2008, démontrent que le choix a été fait du dialogue le plus large possible entre les communes et le département, sachant, bien évidemment, comme l'a dit M. Hyest, que l'objectif de la loi de modernisation de la sécurité civile est de confier aux départements la maîtrise des dépenses des SDIS, que ce soit à l'avantage des communes ou des départements

Mme Assassi s'est demandée pourquoi la DGF ne serait pas versée directement aux SDIS.

Cette question appelle une réponse en deux temps.

Tout d'abord, la DGF est exclusivement réservée aux collectivités locales et aux groupements de communes à fiscalité propre. La globalisation des dotations de fonctionnement a été l'un des moyens de donner toute sa portée au principe de libre administration des collectivités locales. La DGF n'a donc pas vocation à assurer le financement des établissements publics locaux, qu'il s'agisse des SDIS ou d'autres établissements.

Le financement des SDIS relève d'une autre logique que celui des collectivités. Il passe comme tous les établissements publics locaux par des contributions budgétaires des collectivités locales.

Ainsi, les départements et les communes perçoivent la DGF et ont pour mission d'utiliser une partie de cette somme pour financer les SDIS dans le cadre de leur libre administration. Bien évidemment, le Gouvernement n'a pas la possibilité d'attribuer la moindre dotation globale de fonctionnement aux SDIS.

J'en viens au fonds d'aide à l'investissement des SDIS évoqué par MM. les rapporteurs et Mme Gourault.

Il est vrai que la procédure d'attribution des subventions du fonds est lourde. Nous en étudions actuellement l'assouplissement. La mutualisation des réseaux des services de secours - sapeurs-pompiers, SAMU, police, gendarmerie - doit leur permettre de communiquer plus efficacement entre eux, tout en rationalisant les dépenses publiques. Pour réaliser le projet ANTARES, l'Etat financera les 300 relais qui doivent s'ajouter aux 1 100 relais d'ACROPOL pour le fonctionnement en zone rurale.

Monsieur Peyronnet, les élus de la conférence nationale des SDIS ont accepté que leur financement soit une action prioritaire du fonds d'aide à l'investissement des SDIS. Ils ont souhaité en contrepartie que le montant de ce fonds soit soutenu. C'est le cas. Il faut rappeler que ce fonds était, à sa création, doté de 45 millions d'euros et que le projet de loi de finances qui vous est soumis le porte à 67 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 65 millions d'euros en crédits de paiement.

Monsieur Guené, vous m'avez demandé quel était le calendrier prévu pour la mise en place d'ANTARÈS. Le déploiement national pourrait être réalisé en moins d'une décennie. Cet horizon permet de concilier une charge annuelle raisonnable, de 10 millions à 15 millions d'euros, et un rythme de renouvellement compatible avec le souhait des collectivités locales.

Madame Gourault et monsieur Peyronnet, vous avez souligné les difficultés que rencontrent encore les différents acteurs du secours d'urgence sur le terrain. Je partage votre préoccupation et je suis heureux que le Conseil national de sécurité civile, que préside Nicolas Sarkozy et qu'il a installé vendredi dernier place Beauvau, ait décidé d'inscrire, parmi ses premiers thèmes de réflexion, le secours aux personnes.

Madame, monsieur le sénateur, vous avez également souhaité une information sur la formation scolaire prévue par la loi de modernisation de la sécurité civile. Je suis en état de vous confirmer que les premières mesures d'application pourront entrer en vigueur dès la rentrée scolaire 2006-2007.

Je dirai aussi quelques mots sur les 207 000 sapeurs pompiers volontaires et sur le développement du volontariat.

Je ne reviendrai pas sur la prestation de fidélisation et de reconnaissance, vous l'avez fait, mais je soulignerai l'extension du régime du mécénat, obtenue par le ministre d'État, qui accorde un avantage fiscal aux entreprises mettant à disposition leurs salariés sapeurs pompiers volontaires tout en maintenant leur rémunération. C'est une circulaire interministérielle du 14 novembre 2005 qui a permis d'engager définitivement ce processus.

Comme cela a été annoncé le jour de la Sainte-Barbe dans la plupart des SDIS de France, le ministre de l'intérieur a engagé une grande réflexion sur ce sujet.

Partant du fait que, sur les 207 000 pompiers volontaires, 21 000 seulement relèvent de la fonction publique d'État ou de la fonction publique territoriale, nous avons pris des mesures incitatives en direction des chefs d'entreprise qui acceptent de mettre leurs salariés à disposition des SDIS. Toutefois, nous ne pouvons pas passer notre temps à donner des leçons aux chefs d'entreprise sans veiller par ailleurs à ce que les fonctions publiques territoriales et les administrations déconcentrées de l'État respectent aussi quelques règles. Nous cherchons donc à proposer des mesures incitatives de nature à relancer le volontariat afin d'obtenir un meilleur équilibre entre la contribution des services publics et celle des entreprises privées.

En ce qui concerne les réserves communales de sécurité civile prévues par la loi du 13 août 2004, monsieur Guené, madame Gourault et monsieur Girod, l'effort d'information que vous appelez de vos voeux est en cours. Le ministre d'État a récemment envoyé une circulaire à tous les préfets de France pour qu'ils sensibilisent les maires à la possibilité de constituer une réserve communale qui leur est désormais offerte. C'est maintenant à eux de jouer, notamment en milieu rural.

Monsieur Murat, vous avez évoqué les règles d'implantation des points d'eau servant à la défense contre l'incendie dans les communes rurales qui suscitent quelques difficultés de mise en oeuvre. Un groupe national de travail technique a été constitué et les axes d'un projet de réforme ont été présentés au congrès de l'Association des maires de France, l'AMF, le 23 novembre 2005. Sur proposition de l'AMF, une concertation va être menée, l'objectif étant de faire aboutir le projet de réforme dès juin 2006.

Monsieur Girod, vous avez évoqué, avec des mots forts, la question du réseau national d'alerte. Il est en effet obsolète et ne répond plus à la mission essentielle de protection générale des populations. Le ministre d'État a donc souhaité le rénover à partir d'une expérimentation dans trois départements, le Haut-Rhin, le Vaucluse et Paris. À terme, le système pourrait vraisemblablement évoluer pour reposer sur la veille des risques par le réseau de terrain.

Madame Gourault, vous vous êtes interrogée à juste titre sur les perspectives de création d'une capacité d'action rapide de protection civile à l'échelon communautaire. Je puis vous indiquer que le ministre d'État vient de saisir les instances européennes pour renforcer la coordination obligatoire des interventions et surtout la mutualisation des équipements lourds. Je l'ai moi-même représenté lors d'un sommet du G8 à Newcastle et, à cette occasion, nous avons proposé d'instaurer la mutualisation d'un certain nombre de moyens à l'échelle de quelques pays de l'Union européenne, qu'il s'agisse d'aéronefs ou d'hôpitaux de campagne, par exemple.

La France est allée au secours du Portugal, qui a connu de dramatiques incendies cet été, et a mis à la disposition de ce pays deux Canadair et un certain nombre de Tracker. A cette occasion, nous avons constaté que le Portugal ne disposait pas des infrastructures appropriées pour accueillir nos appareils dans les meilleures conditions. Cela démontre bien la nécessité d'aller dans cette direction et, madame Gourault, nous ne pouvons qu'adhérer à votre proposition. Le ministre de l'intérieur a déjà pris un certain nombre d'initiatives en ce sens en direction de nos partenaires européens.

Enfin, je souhaite revenir un instant sur la question qui a été posée ce matin par M. Jacques Legendre, puis tout à l'heure par M. Paul Girod, et qui porte sur le Pôle de défense civile de Cambrai.

Monsieur Girod, la ville de Cambrai est beaucoup mieux placée que vous ne le laissez entendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Girod

Je n'ai pas dit qu'elle était mal placée !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Disons qu'elle est mieux placée que certains ne le laissent entendre ! Nous considérons au contraire, le ministre d'État et moi-même, que cette ville est bien placée.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Ce projet reste donc d'actualité.

L'année 2005 a été consacrée à une étude par un cabinet d'avocats. Cette étude a conclu que le partenariat public-privé serait la formule la plus adaptée pour associer tous les partenaires que vous avez cités, monsieur Girod. Un tel partenariat est aussi la démonstration que nous avons la volonté d'associer le spectre le plus large possible des partenaires auxquels vous avez fait référence tout à l'heure.

Toutefois, pour que ce projet fonctionne, vous en conviendrez, l'activité prévisionnelle doit être suffisamment importante. C'est pourquoi nous en établissons actuellement le recensement et les propositions que vous avez faites seront prises en compte.

Monsieur Peyronnet, s'agissant des risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques, l'effort est forcément partagé entre l'État et les SDIS. Le budget 2006 prévoit, en la matière, deux mesures financées par l'État.

La première concerne l'acquisition d'un module d'intervention NRBC supplémentaire pour le service du déminage, pour 0, 6 million d'euros.

La seconde concerne la mise en place d'une première chaîne de décontamination à la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, pour 0, 6 million d'euros également.

En outre, sur les subventions du fonds d'aide à l'investissement, 3 millions d'euros sont consacrés aux risques NRBC.

Tels sont les principaux éléments de réponse que je souhaitais apporter à chacune et à chacun d'entre vous.

Permettez-moi, avant de terminer, de rendre à nouveau hommage à l'ensemble de nos sapeurs-pompiers.

A l'occasion de l'examen de la mission « Sécurité », le rôle considérable qui a été le leur, aux côtés de nos gendarmes et de nos policiers lors des événements, a été évoqué par vous tous ici, et cela quelle que soit la travée sur laquelle vous siégiez. Le choix de vie qu'ont fait ces hommes et ces femmes est tout à fait exceptionnel.

En tant que ministre délégué à l'aménagement du territoire, j'ai cosigné avec Nicolas Sarkozy, le 2 août dernier, une circulaire qui a été adressée à tous les préfets de France pour leur demander de geler désormais toute fermeture de services publics en zone rurale n'ayant pas fait l'objet de la moindre concertation avec l'ensemble des élus locaux et de nos partenaires économiques et sociaux.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Ce débat est engagé et une charte est en cours d'élaboration avec l'Association des maires de France.

Cela a été, pour moi, l'occasion de demander à la DATAR de lancer une grande enquête auprès de l'ensemble de nos concitoyens pour savoir quels étaient les services publics de notre pays dont ils avaient la meilleure perception. A égalité avec la gendarmerie, les sapeurs-pompiers arrivent en tête du service public le plus apprécié, avec une note de 8, 12 sur 10. Voilà la réalité !

Notre devoir, à chacune et à chacun d'entre nous, est bien évidemment de leur apporter notre soutien le plus loyal, le plus fidèle, et de leur être reconnaissants. En effet, alors qu'ils ne sont pas là pour se faire tirer dessus, ni pour recevoir des pierres, des parpaings ou des canettes, ni pour être la cible d'un certain nombre de voyous, dans la gestion de la crise, pendant trois semaines, aux côtés de nos gendarmes et de nos policiers, ils ont agi avec beaucoup de courage pour que la chaîne de la sécurité continue de fonctionner de manière équilibrée au service des personnes et des biens.

C'est un choix de vie qu'ils ont fait, mais c'est aussi le choix d'un dévouement au service des femmes et des hommes qui font la richesse de ce pays. Je ne pouvais pas terminer mon intervention sans rendre hommage à ceux que nos concitoyens considèrent comme des hommes et des femmes d'exception.

Très bien ! et applaudissements

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Notre devoir est de les encourager, que nous exercions des responsabilités gouvernementales, nationales ou locales.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

En cet instant, je voudrais exprimer des remerciements, formuler un souhait et prendre un engagement.

Tout d'abord, je vous remercie, monsieur le ministre délégué, pour la clarté des propos que vous venez de tenir à la tribune et auxquels nous avons été attentifs. Je vous remercie également d'avoir reconnu l'opportunité d'une mission interministérielle. C'est une recommandation que la commission des finances s'était permis de formuler lors des premiers travaux sur la nomenclature de la loi organique relative aux lois de finances.

J'en viens au souhait que je veux émettre. Vous méritez des compliments, car votre budget est bien tenu et, d'une année à l'autre, la progression est modeste. Toutefois, un certain nombre des textes réglementaires que vous êtes amené à viser se traduisent par une augmentation très sensible des crédits que doivent mobiliser les services départementaux d'incendie et de secours.

Je souhaite par conséquent que vous puissiez mettre un terme à cette prolifération de textes qui, tous, aboutissent à des augmentations de dépenses auxquelles les départements doivent faire face !

Applaudissements

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Je vous remercie, mes chers collègues. C'était un peu facile de ma part d'obtenir vos encouragements !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Je souhaite que le Gouvernement soit particulièrement attentif à cet aspect des choses. C'est bien de tenir le budget de l'État, mais il y a des limites à l'accroissement des charges pour les budgets départementaux ! Par effet de contagion, c'est en effet l'ensemble des collectivités territoriales qui pourraient s'en trouver pénalisées.

Enfin, je prends l'engagement que la commission des finances conduira une mission de réflexion sur les mécanismes de la DGF entre les communes et les départements, avec le rendez-vous de 2008, puisque vous nous avez éclairés sur cet aspect particulier et sur l'interprétation de la loi. Sur ce point, il faudra veiller à ce qu'il n'y ait pas de discrimination.

Je pensais que l'optimisation n'existait qu'en matière fiscale, mais je m'aperçois qu'elle existe peut-être aussi en matière de spéculation sur la DGF !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Non, monsieur le président, je tiens à répondre à M. le président de la commission !

J'apprécie bien évidemment ses recommandations et ses propositions. Elles nous sont particulièrement précieuses et montrent qu'il est important d'exercer des responsabilités à la fois à l'échelon local et à l'échelon national. Elles nous incitent à nous appliquer dans la définition, à l'échelon national, des règles de fonctionnement, afin que n'ayons pas à en subir les conséquences à l'échelon local !

Il me semblait avoir été clair tout à l'heure, lorsque j'ai rappelé le calendrier de dévolution de la responsabilité des SDIS. Ça y est ! Les règles du jeu ont été fixées.

D'abord, le président du SDIS sera le président du conseil général, sauf si ce dernier choisit de donner délégation.

Ensuite, ce sera le conseil général qui imposera aux SDIS la contribution qu'il veut bien leur apporter.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Il devra imposer aux SDIS de faire preuve de la plus grande rigueur.

Enfin, puisque vous nous faites observer l'inflation des dépenses des SDIS au cours des années écoulées, permettez-moi de vous dire qu'elle est essentiellement due à la loi relative à la démocratie de proximité, promulguée en 2002 ! Il fallait mettre un terme à l'envolée des dépenses et il était temps de donner enfin à celui qui aura totalement en charge le fonctionnement des SDIS en 2008 les moyens de contrôler les dépenses !

Monsieur le président Arthuis, je suis ouvert à d'autres propositions émanant de la commission des finances du Sénat, mais, maintenant que les règles du jeu ont été fixées, sachons nous y tenir une fois pour toutes et n'accroissons plus les charges des SDIS au travers de nouveaux textes !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Sécurité civile » figurant à l'état B.

Autorisations d'engagement : 468 281 764 euros ;

Crédits de paiement : 462 062 764 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de la mission « Sécurité civile ».

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Sécurité civile ».

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Le Sénat va examiner les crédits relatifs à la mission : « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » (et article 74) et les crédits du compte d'affectation spéciale : « Développement agricole et rural ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission ministérielle « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » regroupe, pour 2006, 4, 3 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 2, 95 milliards d'euros en crédits de paiement, répartis en quatre programmes d'inégale importance détaillés dans mon rapport.

Cette présentation doit toutefois être relativisée pour deux raisons principales.

Tout d'abord, cette mission ne regroupe pas l'ensemble des concours publics en faveur de l'agriculture, puisque les crédits communautaires sont très largement contributifs. En effet, les dépenses agricoles de l'Union européenne devraient s'établir à 10, 5 milliards d'euros en 2006, soit plus de trois fois le montant de la présente mission. A cet égard, je tiens à souligner qu'une amélioration devrait être recherchée dans la présentation des crédits concourant à la mise en oeuvre de la politique agricole, afin de mieux cerner les enjeux liés au cofinancement communautaire.

Ensuite, les dépenses fiscales, qui s'élèveront à près de 2, 5 milliards d'euros en 2006, représentent un montant équivalent aux crédits budgétaires de la mission. Je souhaite que la présentation des mesures fiscales concourant à la mise en oeuvre de chaque programme soit améliorée, afin de permettre une évaluation chiffrée de chaque mesure. En outre, les mesures fiscales du projet de loi d'orientation agricole n'ont pas été incluses dans la présentation de la mission pour 2006.

Cette mission est essentiellement centrée sur les dépenses d'intervention.

Les dépenses d'intervention représentent 55 % du total des crédits de la mission et témoignent du poids des dispositifs d'aide en faveur des agriculteurs ou des marchés.

Je m'attarderai, en outre, sur la présentation des dépenses de personnels de la mission. Celles-ci sont concentrées sur deux programmes et représentent un quart des crédits. Je tiens à souligner que ce découpage n'est pas conforme à l'esprit de la LOLF, pas davantage que l'existence d'un programme support au sein de la mission. À l'avenir, une réflexion doit être engagée par le ministère de l'agriculture et de la pêche, afin d'intégrer dans chacun des programmes de la mission les crédits de personnel nécessaires à sa mise en oeuvre, sinon la LOLF n'aurait plus aucun sens.

Avant de présenter, très succinctement, les quatre programmes de la mission, en formulant des observations et des questions, je ferai deux remarques générales.

Tout d'abord, s'agissant de la définition des objectifs et indicateurs, le ministère de l'agriculture et de la pêche s'est engagé dans une démarche de performance, et bien des remarques formulées par la commission des finances sur la définition des critères de performances de la mission ont été suivies d'effet. Ainsi, de nombreux objectifs et indicateurs portent désormais, spécifiquement, sur l'évaluation de l'impact des dispositifs de soutien à l'agriculture et des politiques d'intervention mises en oeuvre par le ministère.

Ensuite, les différents opérateurs de programme constituent une faille dans l'application de la LOLF dans le budget qui nous est présenté. En effet, l'année 2006 est une transition pour les budgets des opérateurs, puisqu'ils ne seront pas encore élaborés « en mode LOLF ».

La principale difficulté réside dans la gestion des personnels des opérateurs, les administrations de tutelle n'ayant pas encore réglé la question des modalités de suivi des personnels en équivalents temps plein travaillés. De manière générale, je tiens à souligner que les informations relatives aux principaux opérateurs de cette mission, contenues dans le bleu, paraissent insuffisantes pour juger de la performance de ces établissements. Monsieur le ministre, les opérateurs associés à cette mission seront-ils prochainement soumis aux règles de la LOLF ?

J'en viens maintenant au détail de mes observations pour chaque programme.

Dans le programme « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural », le montant des autorisations d'engagement, pour 2006, correspond à plus de 160 % des crédits de paiement demandés pour cette même année. Le niveau très important des autorisations d'engagement est de nature à limiter les marges de manoeuvre, pour l'avenir, du responsable de programme. D'aucuns pourraient y voir le signe d'une « agriculture de guichet », caractérisée par le versement d'aides et de subventions, sans réel souci de mesure de l'efficacité ou de la performance de ses dispositifs, ce qui est contraire à l'esprit de la LOLF.

La justification au premier euro des crédits de ce programme est très documentée et permet d'identifier les dispositifs prioritaires pour 2006, notamment l'appui au renouvellement des exploitations agricoles, avec la poursuite des actions en faveur des agriculteurs en difficulté et de l'installation des jeunes agriculteurs, ainsi que la modernisation des exploitations et la maîtrise des pollutions d'origine agricole.

Monsieur le ministre, à ce sujet, je formulerai deux questions. Tout d'abord, les crédits en faveur des aides à la mise aux normes des exploitations agricoles, notamment au travers du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole, le PMPOA, permettront-ils de répondre à l'ensemble des demandes pour 2006 ? Ensuite, une évaluation des crédits destinés aux contrats d'agriculture durable, les CAD, sera-t-elle menée ? Leur nombre, en effet, est décroissant, alors que leur enveloppe budgétaire reste prédominante ?

Le deuxième programme de la mission s'intitule « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés ». Il est marqué par le poids des subventions versées aux principaux opérateurs que sont les offices d'intervention agricole. La présentation de ces subventions, issue de la justification au premier euro, donne le sentiment d'un versement de crédits incompressibles aux opérateurs.

En outre, je note que les données résultant de la consolidation des emplois des opérateurs, qui figurent dans le bleu, ne sont présentées qu'à titre indicatif. Je souhaite donc obtenir, auprès de vous, monsieur le ministre, des informations supplémentaires relatives à la comptabilisation exacte des ETPT rémunérés par les opérateurs.

Par ailleurs, s'agissant toujours des offices, quelles économies sont attendues de la rationalisation de leur fonctionnement, issue de la réforme mise en oeuvre par le projet de loi d'orientation agricole ?

Enfin, la justification au premier euro des crédits demandés pour ce programme est satisfaisante. Je remarque que le financement des dispositifs de gestion des aléas de production est prioritaire. Toutefois, je me permets d'émettre un doute sur la capacité des crédits en faveur du développement de l'assurance récolte prévus pour 2006, soit 20 millions d'euros, à atteindre les objectifs fixés par le projet de loi d'orientation agricole.

S'agissant du programme « Forêt », le troisième de la mission, il ne dispose d'aucun crédit de personnel propre et se voit transférer, pour financer ses agents, des fonds en provenance de deux autres programmes. Monsieur le ministre, une réflexion sera-t-elle menée afin de respecter les principes de la LOLF, en allant dans le sens d'une intégration dans le programme « Forêt » des crédits de personnel qui participent à la mise en oeuvre de la politique forestière ?

La justification au premier euro témoigne du poids des subventions versées aux opérateurs que sont l'office national des forêts et les centres de propriété forestière, qui recevront, au total, près de 190 millions d'euros en 2006, soit plus de la moitié des crédits inscrits dans ce programme.

Enfin, je ne m'attarderai pas sur le quatrième programme de la mission, un programme support intitulé « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture ». À l'avenir, il est nécessaire de tendre vers l'intégration des crédits de soutien au sein de chaque programme, sinon la lisibilité du budget de la mission dans son ensemble serait remise en cause.

Je ferai toutefois une remarque ponctuelle à propos de la justification au premier euro de ce programme. Les crédits de paiement demandés, en 2006, pour l'action n° 4 « Moyens communs » semblent sous-dotés au regard de ceux qui font l'objet d'une justification au premier euro, le différentiel s'élevant à près de 20 millions d'euros. Monsieur le ministre, comment expliquez-vous cette différence ?

Sous réserve de ces remarques, mes chers collègues, je vous propose d'adopter les crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » et du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » - dont nous avons accepté la mise en place lors de la discussion de la première partie du présent projet de loi de finances -, enfin, d'émettre un avis favorable sur l'article 74 rattaché à la mission.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Gérard César, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'axerai mon intervention sur trois points : la nouvelle présentation du budget, ses grandes orientations et l'assurance récolte.

La présentation du budget de l'agriculture est entièrement conforme aux prescriptions de la LOLF, chères au président de la commission des finances, Jean Arthuis.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Toutefois, un certain nombre d'insuffisances persistent dans les indicateurs, qui, certes, s'expliquent sans doute par la nouveauté de ce budget « lolfisé ».

Ainsi, certains indicateurs ne font état ni des réalisations pour l'année 2004 ni des prévisions pour 2005, d'autres n'ont qu'un aspect quantitatif, sont sources d'ambiguïté ou ne semblent pas pertinents. Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, si vous comptez, au terme du prochain exercice budgétaire, réaliser un bilan de ces indicateurs et, par retour d'expérience, les adapter, éventuellement, afin d'en renforcer la pertinence ?

J'en viens aux grandes orientations de ce budget. Avec un peu plus de 5 milliards d'euros, il est en augmentation de 2, 5 %, soit plus que l'inflation prévisionnelle. Dans le contexte de rigueur budgétaire que nous connaissons aujourd'hui, il faut s'en féliciter. Toutefois, on doit garder à l'esprit que cette hausse intervient après un certain nombre de régulations effectuées au cours du précédent exercice, comme cela a été souligné lors de l'examen du projet de loi de règlement.

Ce budget en hausse devrait permettre de financer les quatre grandes priorités d'action du ministère. La première d'entre elles, c'est la contribution de l'agriculture aux attentes sociales nouvelles, largement prises en compte, d'ailleurs, dans le projet de loi d'orientation agricole, qui devrait être adopté définitivement dans un peu plus de deux semaines. J'en profite pour souligner les avancées importantes acquises au profit du secteur forestier, avec l'adoption de mesures ayant des répercussions financières substantielles.

L'incitation à l'initiative et l'innovation constituent une deuxième priorité. Sur ce point, je reviendrai sur les débats qui ont eu lieu, ici même, jeudi dernier, lors de l'examen des crédits de l'éducation nationale. Monsieur le ministre, prenant acte de la nécessité de soutenir davantage l'enseignement agricole, votre collègue Gilles de Robien s'est engagé à abonder ces crédits à hauteur de 10 millions d'euros, dont 4 millions proviendraient de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ». L'amendement n° II-145 du Gouvernement va dans le même sens. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser quelles actions seront spécifiquement visées ?

La poursuite des réformes structurelles constitue une troisième priorité. Sur ce point, je relève seulement, avec satisfaction, les efforts du ministère en termes de réduction des effectifs et de déconcentration de la gestion des crédits.

La quatrième et dernière priorité du ministère porte sur la maîtrise des risques qui menacent les activités agricoles. Je souhaite m'attarder sur ce point. Nous venons d'adopter, lors de l'examen du projet de loi de modernisation agricole, une série de mesures favorisant le développement de l'assurance récolte. Parmi celles-ci, figure un amendement que j'avais déposé sur l'initiative et avec le soutien de Jean-Paul Emorine, président de notre commission, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

...et qui prévoit l'extension progressive à l'ensemble des productions agricoles du mécanisme d'assurance récolte par décret. Si ce projet de loi devait être adopté définitivement en l'état sur ce point, ce que nous espérons, deux questions d'ordre financier resteraient à régler.

Première question : le problème de l'engagement financier de l'État. L'enveloppe nécessaire à la budgétisation de cet amendement peut être évaluée à une dizaine de millions d'euros supplémentaires, c'est-à-dire que le budget de l'assurance récolte passerait, globalement, de vingt à trente millions d'euros. Il s'agit d'une somme non négligeable en valeur absolue, mais acceptable au regard de la nécessité d'assurer le « décollage » de l'assurance récolte. Monsieur le ministre, quelles propositions pouvez-vous nous faire à cet égard ?

La seconde question à régler est celle de la réassurance. Vu l'importance des sommes en jeu, l'assurance récolte n'est pas, aujourd'hui, couverte par le marché de la réassurance privée. Or, une telle couverture est indispensable à la sécurisation du dispositif. Monsieur le ministre, quelles évolutions envisagez-vous sur ce point ?

Je souhaitais vous soumettre ces quelques interrogations. Je terminerai mon intervention en appelant, naturellement, à voter les crédits de cette mission et en vous donnant rendez-vous, dans quinze jours, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour l'adoption définitive du projet de loi d'orientation agricole.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Jean-Marc Pastor, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention portera sur le volet « développement rural » de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ». En effet, sur sept actions, cinq concernent directement le développement rural.

J'évoquerai, pour commencer, le cadre communautaire dans lequel s'inscrit son financement, ainsi que les inquiétudes auxquelles sa négociation donne lieu. Nous savons qu'une part essentielle des crédits que nous affectons au développement rural provient de Bruxelles. Le dernier compromis de la présidence luxembourgeoise sur les perspectives financières 2007-2013, qui proposait une réduction de 22 milliards d'euros de ces crédits, par rapport aux propositions initiales de la Commission, dont 13 milliards d'euros portant sur le développement rural, a été rejeté à la suite du veto britannique, et il y a fort à parier que celui qui lui succédera sera encore plus restrictif.

Dans ces conditions, nous pouvons nous interroger sur les choix opérés par le Gouvernement dans le présent projet de budget. En effet, il diminue la part nationale du cofinancement sur plusieurs mesures agroenvironnementales d'importance, telles que les contrats d'agriculture durable ou la prime herbagère agroenvironnementale. N'aurait-il pas mieux valu prendre acte de l'augmentation, peut-être pour la dernière fois en 2006, de la part communautaire du cofinancement sur ces mesures, pour maintenir la dotation nationale et, ainsi, augmenter globalement l'enveloppe qui leur est affectée ?

En effet, nous pouvons faire des CAD l'instrument de la multifonctionnalité. Pour peu que nous y consacrions les moyens nécessaires, ces contrats devraient permettre de concilier la nécessaire flexibilité, qui vise à répondre à la diversité des enjeux environnementaux, sociaux ou économiques, avec un minimum de stabilité institutionnelle, qui est la seule capable, en fait, d'assurer la pérennité indispensable à la mise en oeuvre de l'action publique et au remplacement des CTE, les contrats territoriaux d'exploitation.

Or, pour 2006, je constate que l'ensemble de ces contrats recevront, au total, y compris la part communautaire, quelque 350 millions d'euros en crédits de paiement et 162 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit une diminution respective de 12 % et de 25 %. En inscrivant seulement 64, 8 millions d'euros d'engagements nouveaux pour 2006 au titre de la part nationale, contre 108 millions d'euros en 2005, le ministère de l'agriculture ne remplira pas l'objectif des 10 000 CAD annuels qu'il s'était fixé et se contentera d'en financer seulement 6 000 supplémentaires.

La pluriactivité est depuis longtemps le lot des éleveurs des zones de montagne. Elle doit être favorisée, car les campagnes françaises connaissent un changement important dans la mesure où le champ d'application des politiques rurales s'est étendu progressivement, notamment au tourisme, au commerce, à l'industrie et à l'éducation.

À ce titre, l'État a contractualisé des crédits en faveur de la diversification dans les territoires ruraux et de l'aménagement du territoire. Il est de mon rôle de noter que le jaune budgétaire « Aménagement du territoire » présente des crédits en baisse pour 2006, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement, notamment pour ce qui concerne le ministère de l'agriculture et de la pêche.

Toutes ces politiques contractuelles ont été réaffirmées par la loi relative au développement des territoires ruraux, qui a été adoptée cette année. Or, sur les quatre-vingt-huit décrets et arrêtés prévus, à ce jour, seuls dix-huit ont été publiés. Quid des suivants, monsieur le ministre ?

S'agissant de la politique de la montagne, les indemnités compensatoires de handicap naturel bénéficient, pour 2006, de 250 millions d'euros de crédits, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, contre 234 millions d'euros prévus dans la loi de finances pour 2005. Cette hausse, qu'il faut certes souligner, est cependant insuffisante pour permettre au ministère de l'agriculture et de la pêche de porter à 40 % le différentiel d'indemnisation des vingt-cinq premiers hectares par rapport aux hectares suivants, alors qu'il avait été augmenté, chaque année, par tranche de 10 %, afin que puisse être atteint l'objectif de 50 % en 2007 initialement fixé.

J'évoquerai, pour finir, un sujet d'importance, qui fait l'objet de développements dans le rapport pour avis : l'emploi en zone rurale.

Si l'évolution de l'emploi en zone rurale a connu une nouvelle dynamique depuis une quinzaine d'années, elle s'est faite au détriment du secteur agricole proprement dit, qui ne représente aujourd'hui plus que 20 % de cet emploi.

Après la loi d'orientation agricole de 1999, la loi relative au développement des territoires ruraux, promulguée en début d'année, a cherché à remédier à cette situation. Parmi les mesures prises dans ce but, son article 59 a reconnu les groupements d'employeurs composés d'adhérents de droit privé et de collectivités territoriales. À l'occasion de son adoption, le secrétaire d'État chargé de l'agriculture de l'époque, M. Forissier, avait convenu de la nécessité de travailler sur le statut de l'employé rural en tant que multisalarié dans le cadre des groupements d'employeurs. Or aucune réflexion ne semble avoir été menée sur le sujet. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous apporter quelques lumières à ce propos ?

Monsieur le ministre, un autre aspect important du développement rural concerne la place de l'homme dans ces territoires. Quel cadre de vie lui proposez-vous ? Pour ma part, je suis très attaché, dans les zones rurales, à la préservation et au développement de la notion de services, qu'il s'agisse de services publics ou de services privés d'utilité publique, à l'image des médecins.

Monsieur le ministre, tout en appliquant le schéma de la LOLF, ne pourriez-vous pas nous proposer une autre présentation de la politique de développement rural, qui soit à la fois plus transversale et plus globale, éventuellement dans un cadre interministériel ? Le Parlement serait alors en mesure de connaître véritablement tous les aspects d'une telle politique. Ne serait-il pas également envisageable, dans l'immédiat, de prévoir certains rééquilibrages financiers, par un transfert de crédits de l'action 3 vers l'action 4 ?

Voilà, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les quelques éléments que je souhaitais évoquer dans le cadre de ce projet de budget. Pour conclure, je rapporterai, comme je m'y suis engagé, l'avis favorable que la majorité de la commission a donné à l'adoption de ces crédits. Vous l'avez senti, à titre personnel, je serai plus mesuré par rapport à cette position.

Sourires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, sur le banc de la commission, ainsi que sur quelques travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Gérard Delfau, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Delfau

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le cadre de l'examen des crédits de la mission ministérielle « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », mon intervention portera plus spécifiquement sur le secteur de la pêche. Après avoir brièvement évoqué les crédits qui y sont consacrés, je développerai plus avant l'important problème des ressources halieutiques et de ses répercussions financières.

J'aborde donc, d'abord, le volet « pêche » du présent projet de loi de finances, dont les crédits, au sein de la mission, sont regroupés dans l'action « Gestion durable des pêches maritimes et de l'aquaculture » du programme « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et du développement rural ». D'un montant de 32 millions d'euros pour l'année 2006, ils enregistrent une baisse d'environ 1 % par rapport au précédent budget.

Certes, cette diminution s'inscrit dans le cadre général du plan d'encadrement de la flotte de pêche européenne, tel qu'il résulte de la réforme de la politique commune de la pêche adoptée en 2002. Cependant, cette baisse des crédits pour 2006 ne laisse pas d'étonner, voire d'inquiéter : il faut le rappeler, elle intervient en effet après deux diminutions successives, de 5, 7 % pour 2005 et de 9, 5 % pour 2004. Si notre pays est contraint par Bruxelles de réduire sa flotte de pêche, il conserve pourtant la faculté d'aider à la modernisation des navires de pêche existants, et ce jusqu'au 31 décembre 2006.

Or un tel effort de modernisation est aujourd'hui indispensable : si notre flotte se réduit quantitativement, elle vieillit également dans le même temps, en raison notamment du coût élevé des investissements en matériel dans un secteur où, de surcroît, la majorité des exploitations sont des microentreprises. Il est donc urgent, monsieur le ministre, de permettre aux exploitants d'améliorer leurs navires, afin non seulement d'accroître leur productivité, mais aussi d'assurer une plus grande sécurité à bord et d'améliorer les conditions de travail, lesquelles, nous le savons, sont particulièrement pénibles. Quels moyens comptez-vous leur apporter sur ce plan ? Comment ces dotations évolueront-elles dans les prochaines années ?

J'en viens à mon second sujet, à savoir la gestion de la ressource halieutique, qui est à la fois une préoccupation permanente et d'une brûlante actualité. Comme nous le savons, la diminution des stocks est sujette à débat entre des scientifiques qui appellent à réduire l'effort de pêche au nom du principe de précaution et des professionnels de la pêche qui en contestent le bien-fondé. Estimant, sans doute à juste titre, qu'une raréfaction de la ressource était indéniable, les autorités communautaires ont entendu y remédier en réduisant les prélèvements.

Une telle décision s'est concrétisée par la réduction de la flotte de pêche communautaire que je viens d'évoquer : depuis 2000, le nombre de bateaux de pêche a ainsi diminué de 10, 3 % dans l'Union européenne. Cela s'est traduit également par une réduction des quotas de pêche et des totaux admissibles de capture, les institutions communautaires suivant de plus en plus fidèlement l'avis des organismes scientifiques d'évaluation des ressources.

C'est sur ce dernier point, monsieur le ministre, que je souhaite vous interroger. Le prochain conseil « pêche », qui se tiendra à Luxembourg le 19 décembre, devra justement fixer les quotas et totaux admissibles de capture pour l'année prochaine.

S'inspirant très fortement du dernier rapport du Conseil international pour l'exploration de la mer, présenté le 17 octobre dernier, la Commission européenne devrait préconiser une réduction importante de l'effort de pêche, voire le gel du prélèvement de certaines espèces.

Monsieur le ministre, vous allez recevoir très bientôt les professionnels du secteur, qui dénoncent les estimations résultant de ce rapport et estiment que le niveau des stocks reste convenable. Quels propos comptez-vous leur tenir ? Plus largement, quelle position défendrez-vous, au nom de la France, lors de ce conseil « pêche » ?

J'achèverai mon propos en évoquant la question, liée à la précédente, des contrôles. Nous le savons, ceux-ci nous permettent de nous assurer du renouvellement des ressources, même s'ils sont parfois mal ressentis par les professionnels. Afin de mieux les faire accepter par ces derniers, le Conseil économique et social suggère un certain nombre de pistes dans un rapport récent de M. Gérard d'Aboville : celui-ci prône ainsi la mise en place de contrôles communautaires sur une base uniforme, pour faire diminuer le nombre des contestations, ou encore la généralisation des contrôles à terre au détriment de ceux effectués en mer. Monsieur le ministre, vous avez sans aucun doute pris connaissance des préconisations de ce rapport : qu'en pensez-vous ? Entendez-vous en faire un objet de débat au sein des instances européennes ?

Voilà, résumés, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les différents éléments et les quelques questions que je souhaitais développer à propos de ce projet de budget pour 2006.

Pour conclure, je m'en tiendrai à rapporter fidèlement l'avis favorable qui a été donné par la commission des affaires économiques sur les crédits inscrits au titre de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », ...

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Delfau

M. Gérard Delfau, rapporteur pour avis. ...ce qui ne m'empêchera pas, évidemment, de me prononcer, à titre personnel, dans un sens différent.

Applaudissementssur les travées du RDSE et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est la première fois que nous examinons un budget de l'agriculture dans une présentation et selon une procédure entièrement conformes à la LOLF, et je voudrais commencer par me féliciter des bonnes conditions dans lesquelles ce débat se déroule.

Certes, les comparaisons d'un exercice à l'autre ne sont pas aisées, et tous les indicateurs ne sont pas encore satisfaisants. Cependant, je tiens à souligner l'apport de l'important travail de concertation et d'explication mené en amont : à cet égard, je remercie M. le ministre, ainsi que son prédécesseur, mais également le président de la commission des finances, qui sont venus développer les modalités et les enjeux de la LOLF devant notre commission. Ce premier budget « lolfisé » me semble donc de bon augure pour les prochains exercices.

Cela étant dit, deux sujets retiennent plus particulièrement mon attention cette année : la taxe sur le foncier non bâti, la TFNB, et l'assurance récolte.

S'agissant de la TFNB, deux points me semblent devoir être abordés.

Le premier point porte sur l'opportunité de l'exonération de 20 %. À cet égard, je me contenterai de citer un chapitre du rapport d'information de notre collègue Gérard Bailly, ici présent, sur l'avenir de l'élevage. Ce rapport a été publié il y a trois ans dans le cadre de la mission d'information que j'avais alors présidée au sein de notre commission. Y étaient très clairement résumés les problèmes posés par la TFNB pour le monde agricole : une base d'imposition dont l'évaluation archaïque n'a plus véritablement de rapport avec les prix actuels du marché ; une absence de prise en compte des contraintes environnementales liées à l'entretien de certains espaces fragiles ; enfin, un caractère confiscatoire marqué, du fait de taux élevés.

À défaut de supprimer - du moins pour le moment - la TFNB, cette exonération partielle, d'un coût de 140 millions d'euros, va redonner « un peu d'air » aux agriculteurs. Elle va aussi concrétiser les engagements pris tant par le président de la République à Murat que par nous-mêmes, parlementaires, lors de l'examen du projet de loi d'orientation agricole. Je souscris donc entièrement à cette mesure.

J'en arrive à un deuxième point important sur la TFNB : l'épineux problème de la compensation aux communes.

Nous avons eu à ce sujet un débat nourri, il y a une semaine. L'amendement déposé à cette occasion par le Gouvernement a répondu, me semble-t-il, aux inquiétudes fort légitimes exprimées par plusieurs de nos collègues, notamment par M. le président de la commission des finances et M. le rapporteur général.

En indexant l'évolution de cette compensation sur la dotation globale de fonctionnement, plus évolutive que les bases de la TFNB, le Gouvernement a donné aux principaux intéressés, les maires des communes rurales, la visibilité qu'ils attendaient.

Nous ne ferons pas pour autant l'économie d'un débat plus général sur la réforme de cette taxe et de ses bases d'imposition, monsieur le président de la commission des finances.

J'en viens au second sujet de mon intervention : l'assurance récolte.

La Haute assemblée a adopté, lors de l'examen du projet de loi d'orientation agricole, voici moins d'un mois, un amendement que j'avais déposé avec le rapporteur du texte, notre collègue Gérard César.

Prenant acte de l'inadaptation du système actuel d'indemnisation, dit de calamités agricoles, cet amendement visait à prévoir l'extension progressive du mécanisme d'assurance récolte à l'ensemble des productions agricoles, dans des conditions prévues par décret. Une telle généralisation devrait permettre à l'avenir, en élargissant la surface de mutualisation du dispositif, de réduire le niveau des primes et d'augmenter celui des indemnisations.

Reste à en tirer les conséquences budgétaires. Le Gouvernement a fait un effort notable sur ce point, en portant sa contribution de 10 millions d'euros en 2005 à 20 millions d'euros en 2006 et, en principe, à 30 millions d'euros en 2007.

Cela reste toutefois insuffisant ; cette extension nécessite en effet, dès l'année à venir, 10 millions d'euros supplémentaires.

Aussi vous proposerai-je un amendement, cosigné par nos collègues Gérard César et Gérard Cornu, qui tend à mobiliser la moitié de cette somme par une réaffectation de crédits au sein de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ».

Comme vous le constaterez, cet amendement vise à solliciter des lignes budgétaires finançant des actions dont le volume diminue, qui font l'objet d'importants cofinancements communautaires ou qui sont imputées sur des dépenses de fonctionnement.

J'évoquerai brièvement, pour conclure mon propos, la loi relative au développement des territoires ruraux que nous avons adoptée au début de l'année et, plus précisément, ses mesures d'application, dont la parution nous semble tarder, monsieur le ministre.

M. le ministre fait un signe d'acquiescement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Sur les quatre-vingt-deux décrets prévus, à la fin du mois de novembre, douze seulement ont effectivement été pris. Si l'on en retire les deux décrets qui sont devenus sans objet, soixante-huit décrets doivent donc encore être pris.

Nous attendons toujours, et avec une impatience croissante, le décret qui doit fixer la liste des communes inscrites en zones de revitalisation rurale, les ZRR.

On nous avait annoncé que ce décret serait publié au début de décembre. Or les maires - le tiers des communes de France sont concernées - commencent à ne pas comprendre pourquoi cela tarde tant, alors que les enjeux en cause sont lourds.

La tâche n'est certes pas évidente, puisqu'il s'agit d'un texte à vocation transversale, dont la grande majorité des mesures d'application est de nature interministérielle ; pas moins de neuf ministères sont concernés. Je pense cependant, monsieur le ministre, qu'il est important d'attirer votre attention sur la nécessité d'accélérer le rythme de parution des décrets. Ce texte, dont j'avais eu l'honneur d'être rapporteur, au nom de la commission des affaires économiques, est riche ; il a suscité des attentes significatives dans le monde rural : il ne faudrait pas les décevoir.

Cette recommandation vaut d'ailleurs également, de façon préventive, pour le projet de loi d'orientation agricole que nous nous apprêtons à adopter définitivement. Je ne doute pas que vous aurez à coeur, monsieur le ministre, d'y donner une suite favorable.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 90 minutes ;

Groupe socialiste, 55 minutes ;

Groupe Union centriste-UDF, 25 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 21 minutes ;

Groupe du rassemblement démocratique et social européen, 17 minutes.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.

En application des décisions de la Conférence des Présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser 10 minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de 70 minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. André Lejeune.

Debut de section - PermalienPhoto de André Lejeune

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la nouvelle présentation du budget a le mérite de définir des objectifs clairs, mais elle en rend la compréhension plus difficile, en particulier pour effectuer la comparaison avec les années précédentes.

Toutefois, après une étude attentive, il apparaît que ce budget a été conçu pour atteindre deux objectifs : annoncer médiatiquement des avancées et, de fait, agir pour démanteler les politiques existantes, en un mot, pour libéraliser l'agriculture.

En cela, monsieur le ministre, mes chers collègues de la majorité, vous êtes fidèle à l'orientation que vous voulez donner à l'agriculture française, orientation que vous nous avez montrée à travers le projet de loi d'orientation agricole que nous avons récemment examiné.

En premier lieu, je déplore que le débat sur ce budget ne nous permette pas de discuter de tous les moyens consacrés au secteur, en particulier des moyens émanant de Bruxelles.

En ce moment, les agriculteurs remplissent les imprimés de droits à paiement unique, les DPU. C'est un véritable « casse-tête » pour ceux qui ont repris une exploitation et pour ceux qui ont effectué d'importants changements pendant la période de référence.

Cette réforme va conditionner la valeur des exploitations pour plusieurs années et figer des situations inégalitaires. Les DPU répondent à l'objectif de la nouvelle politique agricole commune : diminuer les aides et la production en vue des discussions de l'OMC. Les agriculteurs craignent que les concessions ne soient trop importantes en ce qui concerne la baisse des barrières douanières.

Quel est l'avenir de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes, dont 3 % du montant communautaire sont prélevés à partir de cette année, la modulation entrant en application ? Quelle réponse pouvez-vous apporter aux éleveurs qui déplorent les retards des versements et le fractionnement de cette prime, retards et fractionnement qui déboucheront inévitablement sur des difficultés de trésorerie dans les élevages, comme c'est le cas dans de nombreux départements.

Debut de section - PermalienPhoto de André Lejeune

En monnaie courante, ce budget est en hausse de 2, 5 %, ce qui se traduit par une quasi-stagnation en monnaie constante. Il s'agit donc d'un budget qui n'échappe pas à la rigueur, ce qui aboutit à des carences graves dans certains secteurs. Je crains qu'il ne serve qu'à accompagner la diminution du nombre d'exploitants, allant à l'inverse de ce que réclament aujourd'hui les jeunes agriculteurs : « plus de voisins et moins d'hectares ».

Debut de section - PermalienPhoto de André Lejeune

Si vous annoncez un relèvement du plafond des aides à l'installation, il faut noter qu'une installation sur deux se fait sans aide d'État parce que les critères d'octroi de la dotation aux jeunes agriculteurs, la DJA, ne prennent pas suffisamment en compte certaines évolutions, notamment les efforts de valorisation de produits sur l'exploitation et l'agrotourisme.

C'est une question fondamentale pour le maintien d'une activité agricole dans les territoires ruraux les moins favorisés, qui ne peuvent se contenter de promesses portant sur un avenir plus ou moins lointain. À trop attendre, certains territoires seront morts.

La politique agro-environnementale fait l'objet, elle aussi, d'un abandon progressif.

Le nombre de contrats d'agriculture durable, les CAD, qui ne sont qu'une pâle copie des contrats territoriaux d'exploitation, les CTE, va encore diminuer pour avoisiner le nombre de 6 000 au lieu de 10 000. Le budget alloué aux CAD ne pourra pas permettre de faire face au renouvellement des mesures « herbe », ni permettre à de nouveaux agriculteurs de s'engager dans des systèmes de production multifonctionnels.

L'orientation que vous avez annoncée dans ce domaine n'est pas de nature à conforter les évolutions agro-environnementales ni la modernisation des exploitations, bien au contraire.

En ce qui concerne les indemnités compensatoires aux handicaps naturels, les ICHN, votre gouvernement ne tiendra pas sa promesse de revalorisation au titre des 25 premiers hectares. Vous devrez assumer cette décision politique qui prive les plus petits agriculteurs d'une aide substantielle dont ils ont bien besoin, surtout en zone de montagne, où ces agriculteurs sont les garants de la vie.

Les crédits affectés au redressement des exploitations en difficulté augmentent cette année, certes, mais nos collègues de l'Assemblée nationale n'ont pas manqué de stigmatiser la situation avec ironie, et ce sur tous les bancs.

L'augmentation, faible en volume, est en effet exponentielle par rapport à l'année passée, puisque cette ligne budgétaire avait été purement et simplement supprimée. Je ne surenchérirai pas, mais ce fonds reste bien inférieur aux besoins prévisibles.

Les dotations budgétaires de la filière bois diminuent de 5 %.

Or la non-application de la loi d'orientation forestière n° 2001-602 du 9 juillet 2001 n'a fait qu'augmenter de façon significative le décalage des dotations budgétaires avec les besoins. Le manque important de pistes forestières ainsi que les fermetures de gares de fret sont un handicap important tant pour la gestion des forêts que pour leur exploitation.

En ce qui concerne la filière lait, je déplore qu'il n'ait pas été envisagé de compenser le désengagement de certains groupes industriels.

Quant à la collecte, qui touche de plus en plus d'éleveurs, notamment en montagne, votre prédécesseur avait promis de s'attaquer à ces problèmes d'écoulement des productions, mais ses promesses, comme celles d'autres ministres auparavant, n'engageaient sans doute que ceux qui les ont écoutées.

Lors de la discussion du projet de loi d'orientation agricole, des débats fructueux ont porté sur la réforme de l'institut national d'appellation d'origine. Nous attendons une augmentation substantielle des crédits pour permettre à cet institut de remplir correctement sa mission.

Un autre secteur important pour notre pays, la pêche, ne bénéficie que de 32 millions d'euros alors qu'il est durement touché.

Les restrictions successives, auxquelles s'ajoutent les charges dues à la hausse des produits pétroliers, rendent ce secteur très fragile : c'est toute une filière qui est menacée.

Vos propositions budgétaires, monsieur le ministre, ne résolvent pas non plus le problème du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, le FFIPSA.

Refusant d'assumer la mensualisation, le gouvernement a demandé à la mutualité sociale agricole, la MSA, d'emprunter, ce qui a déséquilibré sa situation financière. C'était pour le Gouvernement la solution de facilité. Déplacer le problème, ce n'est cependant pas le régler. Un abondement de cette ligne budgétaire est indispensable et nous attendons toujours les mesures relatives à la retraite des conjoints et à l'amélioration de la retraite complémentaire obligatoire.

J'en viens à la formation agricole. L'augmentation de crédits en faveur des maisons familiales est une bonne chose, mais on ne peut pas dans le même temps mettre à mal le budget des lycées agricoles publics. Dans ma région, au lycée agricole d'Ahun, par exemple, la rigueur budgétaire va se traduire par une baisse de 3 % de la dotation horaire globale.

Une lettre de cadrage de la direction générale de l'enseignement et de la recherche ordonne la baisse du budget et l'ajustement de structures éducatives à cette réduction de moyens. En clair, l'administration choisit la fermeture pure et simple d'une filière. C'est une négation complète et explicite du service public d'enseignement qui a pour mission, rappelons-le, de scolariser les enfants et de répondre aux besoins des territoires.

Une de mes préoccupations porte sur le désengagement de votre ministère à l'égard de l'animation rurale ; j'ai déjà eu l'occasion de vous alerter sur cette situation qui ne cesse de se dégrader.

Aujourd'hui, les têtes de réseaux sont quasiment dans une situation de dépôt de bilan, et j'en suis à me demander s'il ne s'agit pas là d'une volonté de votre ministère de faire disparaître les associations.

La fracture avec les zones rurales est grandissante ; c'est pourquoi je vous demande de rétablir le dialogue avec ces associations.

Monsieur le ministre, la rigueur budgétaire est inadaptée à ce secteur d'activité, primordial pour nos zones rurales. Un tel budget ne permet pas d'envisager l'avenir dans de bonnes conditions.

À cette rigueur s'ajoutent des contradictions évidentes puisque, si les autorisations d'engagement sont en augmentation, les crédits de paiement sont en diminution. On peut chiffrer cette diminution à 3 % environ. C'est donc un budget en trompe-l'oeil.

Vous le savez, certaines créances du ministère de l'agriculture ne sont pas assumées.

Pour reprendre une expression de la FNSEA, je dirai que vous avez procédé à un « saupoudrage cosmétique sur la gestion des crises ». C'est au contraire une politique volontariste qu'il faut développer, monsieur le ministre, pour contrecarrer l'intensification de la dérégulation qui expose les agriculteurs aux à-coups du marché, d'autant plus qu'à la dérégulation viennent s'ajouter les inévitables accidents climatiques subis ces dernières années.

Le groupe socialiste ne pourra donc approuver votre budget.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Girod

Monsieur le ministre, le nombre de questions que je serai amené à vous poser au cours de cette intervention ne me permettra pas d'être aussi exhaustif que l'orateur précédent.

Au moment où nous évoquons le budget de l'agriculture sous l'empire d'une nouvelle loi organique qui cultive l'efficacité et qui vise à rendre aussi transparente que possible la gestion des finances de l'État vis-à-vis de nos concitoyens, il me revient à la mémoire que, voilà à peu près cinquante ans, j'accédais soudainement au statut d'agriculteur, prenant la tête d'une exploitation dans une région dont l'agriculture était réputée riche et possédait, entre autres atouts, celui d'être quasiment autosuffisante sur le plan énergétique.

Il est vrai que nous n'en étions alors qu'au début de la révolution qu'a constituée la mécanisation de l'agriculture et qu'une part non négligeable des surfaces était consacrée à alimenter le cheptel de trait.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Girod

Bien sûr, cette force animale était moins efficace que celle que nous connaissons maintenant, mais elle n'en était pas moins fondamentale pour l'agriculture de l'époque.

Eh bien, aujourd'hui, d'une façon qui n'est qu'apparemment paradoxale, je me trouve un peu replongé dans cette époque. En effet, après avoir vécu pendant cinquante ans sur l'illusion d'un pétrole inépuisable et bon marché, nous revenons à cette réalité d'une énergie fossile rare, aussi bien dans notre pays que dans le reste du monde, réalité qui se fera encore plus sentir dans les années qui viennent.

C'est ainsi que l'agriculture retrouve des perspectives qui s'étaient éloignées pendant longtemps, ce qui n'avait d'ailleurs fait qu'aggraver, dans notre pays, un fait auquel on n'a peut-être pas suffisamment prêté attention : la France est un pays vide, en ce sens qu'il est peu peuplé au regard de sa superficie.

À cet égard, la comparaison avec les autres pays d'Europe en termes d'occupation de l'espace est tout à fait éclairante : notre pays détient le record avec environ 65 ares de surface cultivable par habitant ; il est suivi par l'Espagne, qui affiche une moyenne d'à peu près 45 ares ; quant aux autres pays, ils ont des chiffres nettement inférieurs, allant même jusqu'à moins de 15 ares par habitant.

En découle la situation particulière de la France au sein de l'Union européenne : nous sommes acculés ou bien à mettre la moitié de notre territoire en jachère ou bien à trouver des débouchés extérieurs à l'Hexagone qui soient suffisamment rémunérateurs pour que nos agriculteurs puissent vivre et se maintenir.

Dans l'ambiance actuelle de déréglementation généralisée des marchés, de référence permanente aux prix du marché international - lequel ne concerne en fait que 10 % de la production agricole mondiale -, l'agriculture française se trouve tout naturellement accusée par le reste de l'Europe d'être un frein à la mise en place d'une économie libéralisée.

Or il me souvient que, après la guerre, alors que je n'étais pas encore agriculteur, mais un adolescent simple consommateur, la France est sortie de la période des restrictions avec quatre ou cinq ans d'avance par rapport à la Grande-Bretagne. Pourquoi ? Parce qu'il y avait une agriculture française et qu'il n'y avait pas d'agriculture britannique, l'existence du Commonwealth n'y changeant rien. Autrement dit, la sécurité alimentaire, ce n'est pas rien !

J'en viens à ma première question.

Monsieur le ministre, nous nous trouvons actuellement devant une réorganisation générale de l'agriculture, en particulier avec une reconversion possible vers la production de biocarburants.

Vous avez d'ailleurs présidé, le 21 novembre dernier, avec votre collègue M. François Loos, ministre de l'industrie, une table ronde consacrée aux biocarburants et qui semble avoir abouti de manière positive, ce dont je me réjouis. Je me réjouis surtout de constater que, s'agissant des biocarburants, la position de nos entreprises pétrolières évolue. En effet, quand le baril de pétrole était à 20 dollars, elles nous expliquaient qu'il fallait attendre qu'il soit à 40 dollars pour que les biocarburants deviennent rentables, mais, quand il atteignait 40 dollars le baril, il fallait attendre qu'il soit à 50, etc. Aujourd'hui, elles paraissent commencer à admettre l'utilité et la rentabilité des biocarburants, ou au moins de certains d'entre eux, et c'est une bonne chose.

Ainsi, de nouvelles perspectives s'ouvrent pour notre agriculture. Mais, en même temps, nous vivons une mondialisation effrénée. C'est pourquoi, monsieur le ministre, j'aimerais connaître votre sentiment devant le risque d'une arrivée massive de biocarburants de l'extérieur de nos frontières.

N'oublions pas que, dans les négociations de l'OMC, les pays qui s'expriment le plus, ce ne sont pas les pays pauvres : ce sont ceux du groupe de Cairns, en particulier le Brésil, l'Australie et la Nouvelle-Zélande, qui se préparent à inonder le monde d'un certain nombre de produits sur lesquels nous comptons pour sauver notre agriculture, notamment les biocarburants.

Je rappelle que le Brésil est en train de mettre au point une loi par laquelle il s'autorise lui-même à raser la forêt amazonienne sur une surface qui équivaut à deux fois l'étendue du Portugal ! Ce n'est certainement pas pour satisfaire les besoins des seuls consommateurs brésiliens !

Ma deuxième question rejoint l'une de celles que vous a posées l'orateur précédent et a trait à la forêt.

Élu d'un département forestier, je suis un peu perturbé par les décisions prises - de manière, semble-t-il, non coordonnée - par la SNCF et par l'ONF, décisions qui jettent un trouble certain dans les entreprises de sciage et chez les exploitants forestiers.

Quelles consignes donnez-vous à l'ONF, qui vit tout de même des deniers publics, pour aboutir à une commercialisation plus dynamique des bois dans notre pays ? Je sais bien qu'il y a eu la catastrophe provoquée par la tempête de 1999, mais cela ne suffit pas à expliquer toutes les difficultés que la filière forestière rencontre actuellement.

Ma troisième question concerne la politique agro-environnementale.

Moi, je veux bien que les agriculteurs soient des « nuls », des « bourreaux de la nature », etc., mais je ne suis pas certain que la manière dont on s'adresse à eux pour les amener à adopter des comportements plus écologiques soit vraiment la bonne. Il existe d'autres méthodes que le contrôle et la punition ! Vous avez d'ailleurs, dès votre arrivée à ce ministère, mis fin à un certain nombre d'excès qu'on avait pu constater, et je vous en remercie.

Cela dit, est-il bien sérieux que, à différents échelons, des responsables des contrôles effectués auprès des agriculteurs prennent leur plume pour leur imposer soudain des réglementations du type : « Si vous décidez de semer un engrais vert à telle date, vous n'aurez le droit de labourer que tel jour, et cela quelles que soient les conditions climatiques » ?

Monsieur le ministre, dans les crédits que vous sollicitez et que nous allons bien entendu vous accorder parce que nous avons confiance en vous et que nous savons que votre action va dans le bon sens, ne pourrait-il y avoir une petite place pour la formation des agents de contrôle de l'agriculture à la réalité des contraintes de l'agriculture ? Je crois que les agriculteurs vous en sauraient gré !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, aujourd'hui encore, l'agriculture structure la plupart de nos paysages et en fait la beauté. Sur l'ensemble du territoire, c'est un secteur économique qui compte, même si les agriculteurs représentent moins de 2 % de la population active.

Pour les 700 000 hommes et femmes qui continuent à faire vivre les campagnes françaises, pour tous ceux qui ne rechignent devant aucune adaptation afin de répondre aux contraintes de la mondialisation, pour tous ces agriculteurs qui contribuent au dynamisme de l'industrie agro-alimentaire, nous devons continuer à mener une politique agricole volontariste, à la hauteur des enjeux nationaux, communautaires et mondiaux.

Nous le savons, ce secteur rencontre des difficultés sur plusieurs fronts. Des difficultés qui, souvent, hélas ! se cumulent : les calamités naturelles, les crises sanitaires, la multiplication des normes, la libéralisation des marchés sont quelques-uns des facteurs qui fragilisent de nombreuses filières.

C'est pourquoi, afin d'aider l'agriculture à surmonter ces différents aléas, le soutien des pouvoirs publics est essentiel.

Le budget de l'agriculture, de la pêche, de la forêt et des affaires rurales pour 2006 est-il en mesure de répondre aux attentes des agriculteurs ? Je crains que non et cela pour plusieurs raisons.

La première est simple. Compte tenu de l'inflation et de probables gels budgétaires, l'augmentation affichée des moyens de 2, 5 % confirme en réalité la tendance des budgets précédents, soit une restriction des crédits.

Certes, ce budget ne représente qu'une partie des concours publics consacrés à l'agriculture puisque, avec 5 milliards d'euros, il représente à peine la moitié des crédits communautaires. Il faut aussi tenir compte des autres programmes, qui concernent l'enseignement agricole, la recherche, la sécurité sanitaire, ainsi que des mesures fiscales contenues dans la première partie du projet de loi de finances.

Autant dire qu'avec un budget aussi écartelé, les parlementaires peinent à avoir une vision d'ensemble.

Parmi les nombreuses mesures budgétaires pour 2006 relatives à l'agriculture, il en est une qui, on peut le dire, satisfait la profession agricole. En effet, la mesure d'allégement de 20 % de la taxe sur le foncier non bâti, qui représente un coût de 140 millions d'euros, permettra la diminution des charges pesant sur les exploitations.

La déduction pour aléas va également dans le bon sens.

Il faudra toutefois poursuivre les efforts fiscaux en direction des revenus agricoles. Ces derniers sont tellement fluctuants qu'il faudrait notamment revoir les différents régimes d'imposition et les modalités de calcul des bénéfices agricoles.

Il serait également souhaitable d'approfondir les systèmes d'indemnisation des risques agricoles, car certaines filières souffrent plus que d'autres. La responsabilité obligatoire et collective, fondée sur le principe de solidarité, doit demeurer au centre des dispositifs.

Il existe trois catégories de risques : les risques liés à l'approvisionnement et aux outils nécessaires à la production, ceux qui sont liés à l'activité de production et ceux qui concernent le produit et ses débouchés. Malheureusement, ces risques se concrétisent régulièrement. Lorsque le pétrole augmente, qu'il grêle et que les barrières douanières s'affaiblissent, certaines filières sont gravement menacées, et je pense plus particulièrement à celle des fruits et légumes.

L'été dernier, des orages de grêle ont une nouvelle fois endommagé des exploitations, causant des difficultés financières à de nombreux agriculteurs, notamment dans mon département, le Tarn-et-Garonne.

À ces crises conjoncturelles liées aux conditions climatiques s'ajoutent de véritables difficultés structurelles. Et ce n'est pas la loi d'orientation agricole, avant tout destinée à satisfaire les gros exploitants, qui va résoudre les problèmes rencontrés par la filière des fruits et légumes.

À l'issue des dernières rencontres avec les représentants de la profession, vous avez annoncé, monsieur le ministre, un soutien de 15 millions d'euros et une enveloppe de 25 millions d'euros de prêts de consolidation. Cependant, vous le savez, la filière a estimé ses pertes à 150 millions d'euros pour l'année 2005. Il est donc important d'élaborer un plan d'urgence spécifique au secteur des fruits de légumes.

En attendant, le budget national ne doit pas faire l'impasse sur les mesures soutenant ponctuellement les agriculteurs en difficulté. Il était temps de rétablir les crédits Agridiff, qui avaient été supprimés l'année dernière. Dommage qu'il ne s'agisse que d'une remise à niveau !

Les offices, qui sont des outils de régulation permettant de répondre aux crises sectorielles, mériteraient aussi un meilleur traitement. Depuis quelques années, ils sont soumis à des coupes sévères alors que sont reconnues leurs actions d'amélioration qualitative, de restructuration et de consolidation des filières.

Je voudrais dire un mot également de la mission interministérielle « Enseignement scolaire », qui est distincte de la mission dont nous discutons actuellement, mais qui participe au budget global de l'agriculture pour 2006, comme je l'indiquais tout à l'heure. Plus particulièrement, je souhaiterais évoquer l'enseignement technique agricole, car l'avenir de notre agriculture passe aussi par la formation.

Le métier d'agriculteur est de plus en plus technique et il est donc fondamental d'offrir aux jeunes qui le désirent un enseignement de qualité permettant leur intégration professionnelle.

Un geste très attendu a été fait en direction des maisons familiales rurales avec le vote en leur faveur d'une rallonge de 15, 5 millions d'euros ; on peut s'en féliciter.

S'agissant plus particulièrement de l'enseignement public, la progression serait de 7 % avec 687 millions d'euros en autorisations d'engagement et 687, 5 millions d'euros en crédits de paiement.

Comme nous l'avons tous répété au cours des différents débats budgétaires, la mise en oeuvre de la LOLF rend hasardeuse la comparaison entre les crédits du projet de loi de finances initiale pour 2005 et le projet de loi de finances pour 2006. Je vais donc m'en remettre au constat de ceux qui, sur le terrain, subissent les budgets. Depuis trois ans, la suppression de plusieurs centaines d'emplois, le plafonnement du nombre d'élèves, la restriction des horaires de formation fragilisent l'enseignement agricole public. Faute de moyens, les établissements sont dans l'obligation de refuser des élèves et de revoir à la baisse leurs conditions d'accueil et d'enseignement.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Ils exercent pourtant une véritable mission de service public et, à ce titre, méritent des perspectives budgétaires claires, en rapport avec leur rôle et leurs besoins.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Je vous remercie par avance de bien vouloir rassurer le monde de l'enseignement public agricole quant à son avenir.

Je voudrais enfin terminer sur un troisième et dernier volet, la protection sociale agricole, et plus particulièrement sur les retraites.

Depuis la mise en place du financement de la retraite complémentaire obligatoire, la mise en oeuvre de la mensualisation et la prise en compte de la situation des conjointes, la retraite agricole ne semble plus être une priorité. Or il est temps de s'intéresser au problème de la minoration des retraites des exploitants monopensionnés n'ayant pas cotisé sur la base d'une carrière complète. Nous connaissons bien les conditions de cotisation de certains agriculteurs, mais il faut également se rappeler les efforts que ces derniers ont consentis après la Seconde Guerre mondiale pour faire de l'agriculture française l'une des plus performantes au monde.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, si notre agriculture est fortement soumise au cadre communautaire, par le biais de la PAC, ainsi qu'aux pressions de l'OMC, le Gouvernement dispose néanmoins d'un certain nombre de leviers pour soutenir les exploitants.

Il me semble que les priorités annoncées n'affichent pas un volontarisme suffisant pour redonner confiance au milieu agricole, qui, malgré tous les sacrifices qu'il consent, doute de l'avenir de cette magnifique profession. Pour toutes ces raisons, vous comprendrez que les radicaux de gauche ne votent pas ce projet de budget.

Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur celles du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de budget de l'agriculture pour 2006 est examiné à l'issue du débat concernant le projet de loi d'orientation agricole, ce qui, à mes yeux, rend encore plus fade ce type d'exercice annuel où chacun s'exprime, certes, mais sans pouvoir changer une virgule au texte. C'est donc sous la double empreinte de la LOLF d'une part, et de la future loi d'orientation agricole, d'autre part, que le budget de l'agriculture nous est présenté dans un cadre de rigueur désormais habituel.

Je dirai tout d'abord quelques mots sur les effets de la loi organique relative aux lois de finances qui écarte de ce projet de budget des points aussi essentiels que l'enseignement agricole et la qualité sanitaire de l'alimentation. J'ose cependant espérer que cette présentation ne nous interdira pas de parler de ces sujets.

Par ailleurs, la LOLF, censée gérer les deniers publics avec rigueur, ce qui, a priori, pourrait satisfaire tout le monde, se traduit non par une rigueur de gestion, mais par une gestion de rigueur. Cette dernière prend tout d'abord la forme d'une chasse aux emplois ; ainsi, 1 000 postes sont supprimés au ministère et des centaines de suppressions sont enregistrées dans l'enseignement agricole public et privé.

Mission, programme, action, le mauvais film de la LOLF se trouve dans tous les budgets, avec son cortège de coupes sévères, de réductions de crédits, d'incitations à serrer la vis à tous les niveaux, pour tous les exécutants qui risquent gros en refusant de se couler dans le moule.

Autre aspect particulier du débat : il ne porte vraiment que sur 16 % des masses financières de l'agriculture pour 2006, dans la mesure où les financements communautaires pèsent 34 %, la protection sociale 47 % et les contributions des collectivités locales 3 %. Cet aspect relativise le débat et met en lumière le fait que rien n'est prévu pour faire face, demain, à la baisse significative des financements communautaires.

Enfin, la décentralisation au niveau régional des crédits des directions de l'agriculture et de la forêt n'est-elle pas le prélude à de fortes sollicitations à l'égard des budgets régionaux appelés à combler les lacunes béantes créées par les effets de la LOLF ?

L'année 2005 aura été marquée par la crise laitière initiée par les industriels de la transformation, qui ont anticipé les mesures de la PAC et l'évolution du commerce mondial.

En Bretagne, l'une des premières victimes de cette filière de la PAC est la laiterie Nazart située à Fougères, en Ille-et-Vilaine, qui a été mise en redressement judiciaire. Les autres industriels profitent de l'occasion pour imposer des prix encore plus bas aux producteurs et les contraindre à se regrouper au sein d'une coopérative de collecte. Quant aux quatre-vingt-quinze salariés concernés, ils risquent fort d'avoir de grandes difficultés à retrouver du travail quand la liquidation sera prononcée.

Ce triste exemple illustre malheureusement ce qui risque de se produire au centuple demain eu égard aux effets d'une réforme négative de la PAC et du bradage de l'agriculture à Hong-Kong.

Pour ce qui concerne la grippe aviaire, médiatiquement étouffée par le mouvement des banlieues, les premiers effets négatifs se font sentir. La baisse de 25 % de la consommation constatée au mois d'octobre et qui se poursuit entraîne un allongement automatique des durées de vide sanitaire et porte atteinte aux trésoreries des aviculteurs, déjà très éprouvées par les crises précédentes. Monsieur le ministre, des mesures spécifiques seront-elles prises pour atténuer les effets financiers de la crise sanitaire ?

Comme je le mentionnais tout à l'heure, de très nombreuses mesures du projet de loi d'orientation agricole viennent étayer et justifier ce projet de budget. Nous ne ferons pas la fine bouche, monsieur le ministre, au sujet de votre engagement à créer un groupe de travail relatif à l'installation des jeunes et aux modalités d'attribution de la dotation aux jeunes agriculteurs, la DJA. Le combat que je mène avec mes camarades depuis de nombreuses années mérite de connaître une issue favorable pour celles et ceux qui s'installent sans aide, mais qui s'installent malgré tout et se trouvent particulièrement exposés aux aléas du métier d'agriculteur.

Le syndicat des jeunes agriculteurs vient de nous solliciter à propos du financement du stage préparatoire à l'installation, qui n'est pas financé, ce qui n'augure rien de bon pour la suite des événements.

Beaucoup d'hypocrisie demeure autour de ce dossier crucial de l'installation. Ou bien nous décidons collectivement de tout faire pour installer un maximum de jeunes actifs dans nos campagnes - ce qui suppose des moyens financiers et un peu d'imagination pour l'accompagnement technique et financier de celles et ceux qui n'ont pas les diplômes requis -, ou bien nous poursuivons la politique actuelle, c'est-à-dire celle des discours sans acte, car ce n'est pas le plan crédit-transmission du projet de loi d'orientation agricole qui va régler le problème.

La question d'un réel revenu rémunérateur demeure une question centrale qui n'a été qu'effleurée et de façon peu convaincante compte tenu des mesures adoptées lors de l'examen du projet de loi d'orientation agricole.

Qu'il s'agisse de la valorisation des biocarburants, de l'organisation de l'offre ou de l'assurance récolte, toutes ces mesures pèseront peu et ne remplaceront pas l'impérieuse nécessité d'aboutir au paiement des produits agricoles à leur prix de revient réel par l'interdiction de la vente à perte, la réduction sensible des marges des centrales d'achat et l'amélioration du pouvoir d'achat des plus démunis.

C'est également toute une culture des modes de consommation qu'il faut revoir dans un monde où les produits élaborés à forte marge bénéficiaire ont pris le pas sur la cuisine domestique traditionnelle.

Concurrence et compétitivité restent les maîtres-mots du marché et continuent d'entraîner l'agriculture dans une course folle aux prix les plus bas pour tendre vers le prix mondial, qui est une véritable aberration économique, sans lien avec la réalité des prix, des coûts de production, des coûts sociaux et environnementaux.

Les pôles de compétitivité, qui regroupent les énergies par secteurs, relèvent de la même logique. Il y a fort à parier qu'ils vont favoriser le capital avant l'emploi, les exonérations de charges avant les salaires et les délocalisations avant l'emploi au pays.

La Bretagne, première région agricole de France, a obtenu, entre autres, le pôle « pêche » et le pôle « aliments de demain ». Elle ne fait cependant pas partie des pôles majeurs qui consomment l'essentiel des crédits. C'est dire l'importance consacrée à l'agriculture de demain dans un contexte pourtant difficile !

Les parlementaires que nous sommes ont été particulièrement sollicités au sujet de l'enseignement agricole public et privé. Hier encore, je recevais une délégation d'enseignants, de parents et d'élèves d'un lycée agricole public des Côtes d'Armor. Même après le transfert de 8, 5 millions d'euros du public en direction du privé, personne ne semble satisfait.

En réalité, la casse de l'enseignement agricole public a été programmée depuis trois ans. La première année, le seuil de recrutement des établissements a été imposé et limité. La deuxième année, les programmes ont été toilettés. Enfin, la troisième année, des classes de quatrième de l'enseignement agricole ont été fermées et des postes d'enseignants ont été supprimés. Demain, la fermeture d'établissements entiers est programmée.

Monsieur le ministre, tout cela est inadmissible au regard du rôle de formation et d'intégration des jeunes du monde rural dans le tissu économique social et culturel local. De surcroît, ces mesures viennent contredire votre volonté de mener une politique d'insertion des jeunes en difficulté.

Il m'est impossible de clore ce débat sans évoquer le sommet de l'OMC qui se tiendra à Hong-Kong du 13 au 18 décembre prochain. Sans vouloir tomber dans le catastrophisme, nombreux sont les agriculteurs de toute obédience syndicale qui pensent que le pire est à craindre.

Il faut tout d'abord relever la faiblesse de l'Europe, qui part divisée sur les questions agricoles en raison de l'importance respective qu'accordent les États à l'agriculture. Cette faiblesse est liée au fonctionnement même de l'Europe alors que des commissaires se permettent de narguer les États, comme l'a fait récemment M. Peter Mandelson en proposant des baisses de tarifs douaniers allant de 35 % à 60 %.

C'est non pas le résultat du référendum du 29 mai dernier qui affaiblit l'Europe, comme le prétendent certains, mais la surdité de celles et de ceux qui n'ont pas perçu le message des urnes traduisant la volonté de démocratiser le fonctionnement de l'Europe et de respecter les spécificités des pays qui la composent.

Les négociations vont faire monter la pression contre les agriculteurs sur trois domaines, à savoir les soutiens internes, les aides à l'export et l'accès au marché.

L'Europe a déjà baissé ses soutiens internes à trois reprises alors que les États-Unis n'entendent pas faire diminuer les leurs et en « redemandent » à l'Europe. Les aides à l'export sont désormais quasi démantelées. En revanche, les attaques qui portent sur l'accès au marché consistent à faire baisser significativement les protections douanières. À ce titre, les propositions de M. Peter Mandelson aboutiraient, en Europe, à une perte estimée à 600 000 emplois d'ici à 2014, les filières bovine et ovine pourraient perdre 20 % de leurs emplois, la filière porcine 28 % et la filière avicole 17, 5 %.

L'OMC veut appliquer les mêmes règles du jeu à des pays offrant des salaires différents, dont les conditions agronomiques, environnementales, climatiques et économiques sont très disparates. Il s'agit d'un véritable jeu de massacre dans lequel les pays les plus faibles seront les premières victimes. Il faut donc que la France oppose son veto à Hong-Kong et pose les bases d'une reconstruction démocratique et humaniste des règles de l'OMC.

Le fil rouge de la politique libérale - je devrais dire le fil blanc -, qui traverse la politique agricole française, la PAC et l'OMC, produit, à chaque niveau, les mêmes effets dévastateurs et ne crée pas les conditions d'une agriculture rémunératrice. La ruralité s'en ressent fortement. Une agriculture dynamique familiale ou multifamiliale est indispensable au regard de la souveraineté alimentaire, de l'environnement et des emplois très nombreux qu'elle génère en amont comme en aval.

La France rurale va mal. Entre 1966 et 2002, elle a perdu 8 950 boulangeries-pâtisseries, 33 200 boucheries, 73 000 épiceries. Elle a également été la première victime des politiques de casse des services publics pour ce qui concerne ses écoles, ses bureaux de poste, ses perceptions, ses gendarmeries.

Il est urgent d'inverser toutes les logiques politiques qui ont conduit à cette situation. Certes, le budget de l'agriculture ne peut à lui seul régler tous les problèmes de la ruralité, mais ses insuffisances nous conduisent à ne pas l'adopter.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vallet

Monsieur le ministre, je veux aborder la situation difficile de l'agriculture provençale, laissant le soin à d'autres collègues de mon groupe de traiter différents aspects du projet de budget que vous nous présentez.

Je sais que vous connaissez les difficultés de notre agriculture. J'apprécie l'aide ponctuelle que vous apportez à nos producteurs de fruits et légumes - 15 millions d'euros ont été octroyés à la filière afin de la soutenir, somme assortie d'une enveloppe de 25 millions d'euros de prêts de consolidation - mais la situation est encore plus grave que vous ne pouvez l'imaginer.

Dans mon département, de nombreuses terres sont en jachère, et le phénomène s'amplifie chaque année. De belles terres, irriguées grâce aux travaux gigantesques effectués par nos aïeux, sont délaissées aujourd'hui, n'étant plus viables économiquement et sont livrées à l'abandon complet. Leurs propriétaires ont comme seuls espoirs l'urbanisme ou la mise en place effective d'une véritable politique des biocarburants dans notre pays. Je rejoins en cela la remarque formulée précédemment par M. Paul Girod.

La commercialisation des fruits et légumes est étouffée par les grandes surfaces qui, sans aucune loyauté - j'allais ajouter sans aucune moralité -, avec le seul souci de leurs profits, préfèrent souvent les produits extracommunautaires, alors que les mêmes légumes, les mêmes fruits, souvent de bien meilleure qualité, se trouvent en abondance sur les grands marchés agricoles proches.

Par ailleurs, monsieur le ministre, et vous ne l'ignorez pas, il est difficile, voire impossible, de payer la main-d'oeuvre, notamment la main-d'oeuvre saisonnière, sans un allègement des charges.

Il est difficile, voire impossible aujourd'hui, qu'un agriculteur de notre région puisse investir sans aide de l'État.

Il est difficile, voire impossible, aux agriculteurs de financer de bonnes campagnes de promotion pour informer les consommateurs des bons produits de notre pays. Monsieur le ministre, n'est-il pas imaginable que l'État se substitue, en ce domaine, au monde agricole ?

L'agriculteur provençal, qui a accompli ses trente-cinq heures le mercredi soir, ne demande qu'à être un citoyen heureux, un travailleur qui aime sa terre, un contribuable discipliné, voulant décemment gagner sa vie.

L'agriculteur provençal attend un plan d'urgence. Monsieur le ministre, j'aimerais que vous puissiez m'apporter des réponses rassurantes à ce sujet.

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.

Mme Michèle André remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Piras

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'agriculture mérite une approche globale. Or, la segmentation engendrée par la LOLF, laquelle présente, par ailleurs, un intérêt notable, porte atteinte à cette vision d'ensemble.

En effet, outre la mission « APFAR », à savoir la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », qui est l'objet de cette séance, le ministère de l'agriculture gère des crédits inscrits à des missions interministérielles concernant la sécurité et la qualité sanitaires d'une part, l'enseignement agricole d'autre part, sans parler de la protection sociale agricole, qui, elle, relève de la loi de financement de la sécurité sociale.

Face à cet éparpillement, je me propose, dans cette intervention, même si elle porte essentiellement sur les crédits de la mission « APFAR », d'élargir quelque peu le champ de l'analyse.

Afin de nuancer la portée de notre sujet, il faut rappeler que si la mission « APFAR » représente 60 % du projet de budget de l'agriculture, ce même projet de budget ne représente que 16 % des masses financières consacrées à l'agriculture pour 2006.

Présenté, de l'aveu même de ses auteurs et rapporteurs, comme un simple projet de budget de reconduction, il manque cruellement d'ambitions et de moyens.

Par ailleurs, si les autorisations d'engagement sont en augmentation, les crédits de paiement, qui constituent la réalité pour 2006, diminuent de 0, 7 %, et même de 3 % si l'on tient compte de l'inflation.

Or, il est déjà notoire que de nombreuses créances du ministère de l'agriculture ne sont pas honorées. Si, à l'absence d'ambitions caractérisée, se greffe une absence de financement cachée, il faut vraiment être membre de la majorité gouvernementale pour combler de louanges un tel budget !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Piras

Le programme 154, par exemple, dénommé « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et du développement durable », qui représente 50 % des crédits de la mission « APFAR », comporte des actions essentielles, notamment l'appui au renouvellement des exploitations agricoles, la cessation d'activité, l'aide à la cessation anticipée ou à la réinsertion professionnelle.

Ce domaine revêt une importance particulière, compte tenu du « papi boum » que nous connaissons, et qui est source d'une profonde restructuration des exploitations agricoles.

Pour ce programme, si les autorisations d'engagement augmentent de 150 millions d'euros, les crédits de paiement, en revanche, baissent de 15 millions d'euros.

L'installation des jeunes et la restructuration ne peuvent demeurer des voeux pieux ou de simples arguments électoraux. Il m'avait semblé, pourtant, lors des débats sur les territoires ruraux ou sur le texte d'orientation agricole, que cette volonté était partagée par l'ensemble des orateurs.

Toujours dans ce programme, je tiens à dénoncer l'abandon marqué des politiques agro-environnementales et territoriales, qui constituent l'action n° 05. Ainsi, les crédits alloués par l'État diminuent de 25 % en 2006.

C'est au sein de cette action que se trouve le financement destiné aux contrats d'agriculture durable, les CAD, qui sont les tristes ersatz des contrats territoriaux d'exploitation, les CTE.

L'objectif annoncé, à savoir dix mille CAD annuels, ne sera pas atteint, seuls six mille contrats supplémentaires étant financés pour 2006.

En outre, il apparaît que si certaines régions n'utilisent pas l'ensemble de leurs crédits, d'autres sont obligées de refuser des dossiers. Une mutualisation des reliquats serait sans doute fort opportune.

S'agissant des indemnités compensatrices de handicap naturel, les ICHN, les engagements ne seront, une fois de plus, pas tenus. En effet, les crédits devaient augmenter de 10 % pour permettre de porter à 40 % le différentiel d'indemnisation des vingt-cinq premiers hectares par rapport aux hectares suivants. Ce non-respect des engagements est fort préjudiciable pour les petits agriculteurs, ce coup de pouce leur ayant été légitimement promis au regard de leur situation difficile.

Monsieur le ministre, à travers ces orientations, vous vous méprenez en ne soutenant pas toutes ces petites exploitations parsemées sur le territoire qui font le charme et la qualité de nos campagnes et garantissent un aménagement du territoire cohérent.

De même, je regrette vivement qu'au sein du programme 227, « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés », les crédits pour la promotion des produits agricoles à l'étranger soient en baisse, ce mouvement étant constant depuis plusieurs années.

Devant la concurrence exacerbée, comment justifier une telle orientation ?

L'examen de ce programme est l'occasion d'aborder la gestion des crises agricoles récurrentes, ce problème étant loin d'être réglé. Je m'attarderai sur la crise qu'ont connue, cette année encore, succédant à celle de 2004, le secteur des fruits et légumes, mais également celui de la viticulture.

Monsieur le ministre, je vous ai alerté, à de nombreuses reprises, sur le désespoir qui gagnait les agriculteurs, notamment dans mon département de la Drôme.

Les professionnels estiment que, sur le territoire français, la perte de chiffre d'affaires est de l'ordre de 150 millions d'euros, alors que, par ailleurs, les charges fixes ont notablement augmenté, qu'elles portent sur l'énergie ou la main-d'oeuvre, et que la concurrence est extrême.

Le marasme est réel et profond, perceptible à la simple lecture des chiffres. Ainsi, pour la Drôme, une exploitation fruitière moyenne avec des productions diversifiées - pêches, abricots, pommes, poires, kiwis - va afficher une perte de l'ordre de cinquante mille euros cette année.

Il faut savoir également que, sur mille exploitations arboricoles, 80 % ne dégageront pas de bénéfice de la saison estivale.

En matière viticole, les pertes sont de l'ordre de 1 500 euros à l'hectare, une exploitation moyenne ayant perdu cette année aux environs de 60 000 euros.

Je vous invite, monsieur le ministre, à venir dans mon département pour constater l'évolution.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Avec plaisir !

Debut de section - PermalienPhoto de René-Pierre Signé

Nous aussi ! Mais il n'invite pas tout le monde !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Piras

En effet, une personne qui ne serait pas venue depuis quelques années dans les secteurs anciennement arboricoles ne reconnaîtrait plus les paysages.

Chaque année, des milliers d'hectares sont arrachés, aucune production alternative n'ayant émergé par ailleurs. De nombreux agriculteurs ne voient leur salut que dans la vente de leurs terres, renonçant à leur outil de production, qui ne leur permet plus de subvenir à leurs besoins.

À la fin du mois d'octobre dernier, j'ai rencontré, accompagné de mes collègues parlementaires de la Drôme, de toutes couleurs politiques, des représentants de la profession qui nous ont fait part de leur grande déception et de leur profond découragement face aux mesures de compensation insuffisantes qui leur étaient proposées.

J'aimerais maintenant aborder deux domaines ne relevant pas directement de cette mission.

J'évoquerai, tout d'abord, le fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, le FFIPSA.

Depuis 1996, je suis intervenu chaque année sur feu le BAPSA, et, à cette occasion, j'ai eu la chance, sous la précédente législature, de vivre une avancée considérable en matière de retraite agricole et d'y participer, avancée due, notamment, à un plan quinquennal de revalorisation promis et respecté et à la mise en place de la retraite complémentaire.

Si l'on fait abstraction de l'instauration de la mensualisation, on ne peut que noter que cette législature est, au contraire, marquée par la stagnation, voire la régression.

Je ne reviendrai pas sur l'ensemble des critiques émises à l'encontre du FFIPSA pour 2006, ma collègue Christiane Demontès ayant, dans son intervention sur ce projet de budget, parfaitement présenté la situation dramatique de ce fonds : 1, 724 milliard d'euros de déficit en 2005, 1, 748 milliard d'euros prévus pour 2006. Si l'on ajoutait les soldes cumulés des années précédentes, cela représenterait, à la fin de 2006, 40 % des prestations du régime.

Les causes sont identifiées et étaient malheureusement prévisibles : à la fin de 2004, refus de l'État d'assurer l'équilibre du BAPSA, et, donc, transfert du déficit constaté au FFIPSA ; surestimation des recettes du tabac qui lui sont affectées ; suppression de la subvention d'équilibre et modification de l'affectation de la cotisation sociale de solidarité.

L'article L. 731-4 du code rural permet à l'État de verser une dotation destinée à équilibrer ce fonds. Votre refus d'y recourir, ainsi que l'absence de propositions et de mesures d'équilibre pérennes, condamnent à terme la protection sociale agricole.

La majorité actuelle en sera comptable. À une situation alarmante, vous répondez par l'inertie.

L'enseignement agricole, qui constituera un sujet important, est également frappé de plein fouet par la pénurie budgétaire, terme utilisé par les représentants de l'enseignement tant public que privé.

Loin de s'améliorer, la situation s'aggrave chaque année un peu plus : suppression des crédits de remplacement, réduction des heures d'enseignement alors que les contenus restent identiques, suppression de nombreux dédoublements, suppression des heures de soutien, non-harmonisation des régimes indemnitaires des personnels ATOSS, sous-dotation structurelle en emplois d'enseignant, absence de promotion de personnels enseignants sous-classés, réduction des crédits de formation des enseignants, versement très tardif des acomptes de subvention de fonctionnement, versement tardif des crédits de bourse, l'avance étant faite aux familles par les associations.

A ce sujet, il apparaît qu'il manquerait environ 7 millions d'euros pour solder les bourses sociales de 2005 et honorer les obligations de 2006.

A l'Assemblée nationale, l'insuffisance manifeste de financement des maisons familiales et rurales, sur laquelle nous sommes nombreux à avoir manifesté notre incompréhension, a été en partie résolue grâce à un redéploiement du programme « Enseignement technique agricole » : on a déshabillé Pierre pour habiller Paul, alors que Pierre était déjà mal habillé !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Piras

Les insuffisances du projet de budget pour 2006 vont renforcer cet affaiblissement de l'enseignement agricole. Or, la qualité de ce dernier est unanimement reconnue : point n'est besoin de rappeler les résultats remarquables en matière d'insertion scolaire, de réussite aux examens et d'insertion professionnelle qu'il obtient. Sa remise en cause va même plus loin, puisque, dans l'espace rural où ils se situent la plupart du temps, ces établissements jouent un rôle en matière de développement économique, d'attractivité culturelle et d'animation du territoire.

Au lieu de pérenniser la pénurie, le Gouvernement devrait, au contraire, préserver et développer cet enseignement, qui a fait ses preuves.

Le tableau de l'agriculture que je viens de dresser est bien sombre. Dans l'intérêt de nos agriculteurs et de notre agriculture, et en dehors de tout esprit partisan, j'aurais tant voulu pouvoir dire ici que le projet de budget pour 2006 allait nous sortir de la sinistrose !

À l'écoute de mon intervention, vous comprendrez certainement, monsieur le ministre, que tel n'est pas le cas, et que je ne pourrai, non plus que les collègues de mon groupe, voter en faveur d'un tel projet de budget.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Murat

Le temps de parole qui m'est imparti ce soir étant compté, vous me pardonnerez certainement, monsieur le ministre, d'entrer très rapidement dans le vif de mon propos.

Je tiens tout de même à souligner l'effort consenti en faveur des agriculteurs et du monde rural, tant par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin que par celui de Dominique de Villepin, effort qui ne se dément pas, et ce dans un contexte budgétaire très tendu - nous n'aurons de cesse de le répéter - et un contexte communautaire et mondial difficile.

Dans un premier temps, je souhaiterais obtenir la confirmation des engagements que vous avez formulés il y a peu quant à la revalorisation des indemnités compensatrices de handicap naturel, les ICHN.

En effet, si la dotation inscrite dans le projet de budget pour 2006 est en augmentation de 7 millions d'euros, elle n'intègre pourtant pas la réévaluation de 10 % sur les vingt-cinq premiers hectares annoncée par votre prédécesseur. Ce dernier s'était en effet engagé, en 2003, à revaloriser les ICHN de 50 % sur les vingt-cinq premiers hectares, au profit des exploitations les plus modestes.

Si cette revalorisation est intervenue lors des deux premiers exercices budgétaires de la législature, il faut bien noter que tel n'est plus le cas. Or, comme cette dotation est destinée à compenser les handicaps dans les zones agricoles en difficulté en restreignant les surcoûts d'exploitation et qu'à ce titre elle constitue un complément de revenu indispensable pour les agriculteurs, l'inquiétude de ces derniers est grande.

Il me semble donc nécessaire de poursuivre l'action engagée en la matière et, de ce fait, de soutenir l'activité agricole de ces territoires.

Au sujet des ICHN, une interrogation se fait de plus en plus pressante, en particulier en Corrèze, quant au projet de la Commission de modifier les critères de délimitation et donc, de redéfinition des zones défavorisées. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous apporter quelques éclaircissement et, je l'espère, nous rassurer ?

Évoquant l'activité agricole en zone de montagne, il me vient tout naturellement à l'esprit de vous interpeller sur le difficile problème de la collecte du lait.

En effet, si rien n'est fait, on peut craindre dans ces zones l'arrêt de certaines collectes, ou, tout du moins, de grosses difficultés difficilement gérables par les agriculteurs, dues aux coûts trop élevés, aux conditions de déplacement difficiles, et parfois même aux conditions climatiques dégradées.

Parce qu'il s'agit bien là du devenir de nombreuses exploitations, corréziennes ou autres, j'espère, monsieur le ministre, que cette problématique fera l'objet d'une réflexion particulièrement attentive au cours de l'année 2006.

Je souhaiterais ensuite vous interroger sur la mise en application de la réforme du service public de l'équarrissage.

Depuis près de dix années, les entreprises de boucherie supportent les conséquences morales et financières des diverses mesures de sécurité sanitaire dues à la crise de la vache folle.

Parmi ces mesures, figure le retrait des os de la colonne vertébrale des bovins de plus de douze mois. Classés MRS, c'est-à-dire matériaux à risque spécifié, ces os sont éliminés par un circuit autorisé, assuré par les équarisseurs, dont les frais sont partiellement couverts par une aide de 1 000 euros dans le cadre légal de la clause dite de minimis.

Après avoir mené une réflexion de fond sur la rationalisation des coûts d'équarrissage, les professionnels de la boucherie artisanale ont établi un protocole d'expérimentation afin d'examiner les modes collectifs de collecte ou de partage des os de la colonne vertébrale.

Or, dans le même temps, et sans attendre le résultat de l'expérimentation, le ministère de l'agriculture a décidé de réduire l'aide dont bénéficient les bouchers de 50 % dès le 1er janvier 2006. Il semble pourtant indispensable, pour mener à bien matériellement l'expérimentation, que soit octroyé un temps minimum de réalisation de cette mutation excluant toute dégressivité de l'aide.

Je pense, monsieur le ministre, que vous aurez à coeur de me répondre sur ce sujet.

Je conclurai en évoquant l'avenir du FFIPSA. Je suis intervenu longuement lors de l'examen du PLFSS, le projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais je tenais à réitérer ce soir mes propos.

Vous avez indiqué que le Gouvernement ferait des propositions en la matière avant la fin de la discussion de la loi de finances ou d'ici à l'examen du projet de loi de finances rectificative. Il est primordial, en effet, pour la survie même de ce régime, que les engagements pris soient traduits concrètement dans les plus brefs délais.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Absolument !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Murat

M. Bernard Murat. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, mais je crois qu'il faudra aller plus loin pour sauver la protection sociale agricole et je suggère que l'on s'appuie sur les propositions du comité de surveillance du FFIPSA, s'agissant notamment de la révision des règles de compensation démographique en maladie et en vieillesse.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m'attacherai, dans mon intervention, à commenter ces deux volets importants de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » que constituent respectivement la pêche et la forêt.

J'évoquerai tout d'abord la situation de la pêche.

La pêche française traverse une crise profonde à laquelle aucune réponse n'est apportée, comme le confirme la faiblesse du budget d'intervention pour 2006.

En effet, la politique de la mer enregistre une baisse de 1, 13 % des crédits, ceux-ci s'élevant seulement à 32 millions d'euros. Comment s'en contenter, si l'on veut prendre des mesures concrètes pour faire des économies d'énergie et élaborer un plan de sortie de flotte ? La mobilisation de fonds communautaires ne suffira pas à la modernisation nécessaire de ce secteur et ne justifie en aucun cas le désengagement de l'État.

N'oublions pas que cette activité représente plus de 20 000 emplois en mer et 50 000 emplois induits. Elle constitue un pôle économique et culturel essentiel pour la France.

La nouvelle politique européenne de la pêche laisse à la Commission une maîtrise presque totale sur la gestion des flottes, la ressource et la commercialisation. Toutes les perspectives de gestion intégrée sont rejetées et les aides à la modernisation sont bloquées. De fait, on interdit ainsi l'installation des jeunes et on accélère les sorties de flotte, c'est-à-dire la cessation d'activité !

Au nom d'une politique de protection de la ressource et pour satisfaire les monopoles agro-alimentaires qui tiennent le marché, ce sont les pêcheurs de nos côtes qui sont sacrifiés. L'existence même de certains secteurs est remise en cause, comme la pêche à l'anguille, que la Commission prétend interdire. Cette dernière a également proposé, mercredi dernier, la prolongation de l'interdiction de la pêche à l'anchois dans le golfe de Gascogne pendant le premier semestre 2006, ainsi qu'une réduction de 15 % des prises de cabillaud.

C'est d'un contrôle beaucoup plus rigoureux de la pêche illicite, qui alimente les grandes fermes d'élevage nordiques, dont nous aurions besoin, et non d'une interdiction de la pêche des sujets adultes, que nous pratiquons et qui relève d'une gestion intégrée et de traditions spécifiques.

Mais il faudrait aussi parler du diktat européen sur la taille des espèces, totalement inadapté à notre biotope, et qui ignore tant les études scientifiques que l'autorégulation pratiquée par les pêcheurs.

La France va-t-elle enfin reprendre la main en Europe et entendre les instances professionnelles, qui demandent une véritable politique de gestion de la ressource, ainsi que la sauvegarde de l'emploi ? Les professionnels doivent être entendus dans le cadre de la réforme concernant la préservation de la ressource halieutique.

De plus, nous savons que les restrictions sur une ressource, voire sur plusieurs, entraînent automatiquement un report sur une autre ressource. Cela s'est passé, en octobre dernier, en Haute-Normandie. Les pêcheurs qui ne pouvaient plus pêcher le maquereau se sont réorientés vers la coquille, biologiquement saine, mais dont le marché est fragile. D'ailleurs, les tonnages conséquents de coquilles Saint-Jacques ont entraîné une baisse considérable des prix sur les criées des Côtes-d'Armor.

Le Conseil économique et social a rappelé qu' « une réduction de quotas brutale pouvant aller jusqu'à des interdictions totales peut avoir un effet définitif et condamner une flottille ou un port. Le retour du poisson associé à la perte des outils de production serait alors un paradoxe inacceptable. »

Si la question des ressources halieutiques est évidemment primordiale, il serait regrettable de casser des outils portuaires aux seuils d'équilibres économiques fragilisés, de perdre des savoir-faire et des équipages, alors que ces ressources sont, sous certaines conditions de bonne gestion, renouvelables.

Enfin, allez-vous également améliorer le dispositif « aléa carburant », qui exclut de fait 90 % de la flotte, pourtant durement touchée de ce point de vue ?

À l'heure actuelle, la hausse du carburant n'est pas intégralement compensée. Vous cherchez sans doute des solutions en collaboration avec le ministère des finances pour y remédier. Mais, monsieur le ministre, la situation est urgente : l'augmentation du fioul peut en effet représenter pour certains patrons pêcheurs 30 % à 40 % de leurs charges de fonctionnement.

Nous attendons beaucoup du plan d'avenir pour la pêche que vous devez présenter en 2006. Mais, en l'état actuel des choses, la politique que vous avez retenue dans ce domaine ne nous paraît pas satisfaisante.

J'en viens à la situation de la forêt.

La filière bois n'avait pas besoin de voir ses crédits diminuer de 5, 5 %. Vous semblez pourtant mesurer l'importance de ce secteur d'activité non seulement pour l'emploi, puisque vous notez dans le document budgétaire que près de 450 000 emplois sont concernés, mais aussi en termes de préservation de la biodiversité, de loisirs et de paysage.

Pourtant, tous les crédits sont en baisse par rapport à l'année dernière. Ainsi, les autorisations d'engagement et les crédits de paiement ont perdu 18 millions d'euros entre 2005 et 2006.

Prenons, par exemple, l'action « Développement économique de la filière forêt-bois ». Dans le cadre de la loi d'orientation agricole, nous nous étions tous accordés sur l'importance de valoriser la ressource « forêt » dans un cadre de gestion durable et d'utiliser pleinement le potentiel de production biologique des forêts françaises. Telle est d'ailleurs la double finalité de cette action n° 01. Or force est de constater que la politique budgétaire retenue ne permettra pas de remplir correctement ces missions.

D'autre part, le Gouvernement ne semble pas disposé à suivre les objectifs fixés par la loi d'orientation sur la forêt du 9 juillet 2001. Les besoins sont pourtant considérables. La liste d'attente pour le financement des pistes forestières est ainsi de plusieurs années. De même, la fermeture généralisée des gares de fret porte un coup très dur à la filière : 58 % seulement de l'accroissement naturel du bois sont récoltés !

La balance commerciale de la filière reste donc déficitaire, alors même que la demande ne cesse de croître, compte tenu de la hausse des tarifs du pétrole, du gaz et de l'électricité. Et ce n'est pas en réduisant le budget consacré à la forêt que l'on facilitera le développement, aujourd'hui entravé, de la filière bois.

Enfin, je tiens à revenir sur l'importance des missions de l'Office national des forêts, l'ONF, notamment en ce qui concerne la lutte contre l'effet de serre.

Pour lutter contre l'effet de serre en multipliant les puits de carbone, il ne suffit pas de préserver les superficies couvertes par la forêt. Il faut aussi exploiter ladite forêt en bon père de famille, couper assez de bois pour lui permettre de se régénérer, et valoriser toutes les parties de l'arbre entre le bois d'oeuvre, la pâte à papier et le bois de chauffage. Ces missions relèvent du service public et nous espérons que le pouvoir politique n'ira pas privatiser les forêts domaniales après avoir vendu au privé les dernières entreprises publiques !

Nous avions déjà souligné, au cours du débat sur la loi d'orientation agricole, les dangers d'une prise de participation facilitée de l'ONF dans les sociétés privées. En effet, une logique purement économique, forcément induite par la multiplication de telles prises de participations, dénaturera sans aucun doute le caractère d'intérêt général des missions d'un tel établissement public, missions qui existent, je vous le rappelle, en dépit du caractère industriel et commercial de cet établissement.

La loi d'orientation agricole prévoit que l'ONF peut réaliser ces investissements sans l'autorisation préalable de l'État. Notre rapporteur justifie cette mesure par la nécessité pour cet établissement public de réaliser plus librement ce type d'investissements, qui sont indispensables à son développement.

Les choix budgétaires qui sont faits ici entérinent cette logique de désengagement progressif de l'État dans le financement de ces missions de service public. Ainsi, entre 2005 et 2006, les crédits destinés aux principaux opérateurs de l'État, dont l'ONF fait partie, ainsi que les emplois qu'ils représentent, ont diminué.

Ni le programme « Forêt » ni les dispositions budgétaires relatives à la pêche ne donnent les moyens aux secteurs et aux opérateurs de relever les défis économiques ou environnementaux à venir. Vous comprendrez donc que les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen s'opposent à leur adoption.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite consacrer mon intervention, d'une part, aux conditions d'accès à la profession agricole et, d'autre part, à la situation particulière de l'agriculture de montagne.

L'accès à la profession agricole nécessite des filières de formation dotées de moyens de financement adéquats et des conditions satisfaisantes d'installation des jeunes agriculteurs.

S'agissant du financement de l'enseignement agricole, vous avez été saisi, monsieur le ministre, des vives préoccupations des maisons familiales rurales, dont la situation a été prise en compte par l'Assemblée nationale à l'occasion de la première lecture. Depuis lors, ce sont les établissements de l'enseignement agricole technique qui ont fait état de leurs inquiétudes face aux perspectives offertes par le projet de loi de finances.

C'est pourquoi notre collègue Françoise Férat, rapporteur pour avis du budget de l'enseignement agricole, a présenté la semaine dernière des amendements visant à permettre à ces établissements de poursuivre leurs activités dans des conditions satisfaisantes.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, confirmer au Sénat que les solutions financières arrêtées par la Haute Assemblée sont désormais à l'abri de toute remise en question et apportent ainsi les garanties attendues et nécessaires à cette filière d'enseignement ?

D'autres questions de première importance concernent les conditions d'installation des jeunes agriculteurs.

Il s'agit, en premier lieu, du financement des stages préalables à l'installation et des stages dits « de six mois ». Les chambres d'agriculture s'inquiètent, vous le savez, de l'éventuelle remise en cause des crédits apportés par l'État à ces actions. Les assurances que vous avez pu donner ces dernières semaines concernant le maintien des moyens destinés à leur financement jusqu'en fin d'année 2005 ont temporairement rassuré la profession, et je vous en remercie.

Même si les jeunes agriculteurs sont de mieux en mieux formés et effectuent différents stages durant leur scolarité, comme vous me l'avez écrit le mois dernier, l'utilité de ces stages professionnels sur une période prolongée est reconnue par tous. Ils permettent en effet aux futurs exploitants d'acquérir des compétences et connaissances pratiques qui leur seront d'une grande utilité quotidienne tout au long de leur carrière.

Monsieur le ministre, quelles assurances pouvez-vous donner à notre assemblée sur le financement futur de ces stages, notamment pour l'année 2006 ?

Il est un autre point sur lequel la profession agricole attend des éclaircissements et des assurances : le volume des contrats d'agriculture durable qui pourront être signés l'an prochain. Les prévisions budgétaires font en effet état d'une nette réduction de leur nombre, de 9 000 en 2005 à 6 000 en 2006, ce qui représenterait, d'après les prévisions des services de la chambre d'agriculture de mon département, seulement douze nouveaux contrats pour l'année à venir.

Vous comprendrez, monsieur le ministre, qu'une telle dotation est bien insuffisante pour un département tel que la Haute-Savoie, qui veut conserver une agriculture dynamique et vivante, ce qui suppose, selon ses prévisions et objectifs, plusieurs dizaines d'installations nouvelles par an.

L'évocation de ce département haut-savoyard me conduit tout naturellement aux préoccupations spécifiques de l'agriculture de montagne.

J'évoquerai tout d'abord la question de la revalorisation des indemnités compensatrices de handicaps naturels, les ICHN, qui est, vous le savez, une absolue priorité dans nos départements alpins, et dans les départements montagnards en général, comme l'ont dit plusieurs orateurs.

Conscient de l'importance de ce dispositif, le Gouvernement s'était engagé, en 2003, à relever de 50 % le montant de cette aide spécifique à l'agriculture de montagne pour les 25 premiers hectares exploités.

Grâce aux remises à niveau successives inscrites depuis lors dans les budgets de votre ministère, la bonification a atteint 30 %. Toutefois, le respect de l'objectif de 50 % nécessiterait un nouvel abondement en 2006, qui n'a pas jusqu'alors été prévu.

Aujourd'hui, l'agriculture de montagne, dont la situation est à maints égards fragilisée, a besoin de cette mesure et ne peut attendre 2007, date que vous avez récemment annoncée, pour bénéficier d'un hypothétique relèvement des ICHN.

C'est pourquoi j'ai tenu à déposer, comme l'avait fait le rapporteur spécial de ce budget à l'Assemblée nationale, M. Alain Marleix, un amendement rétablissant le montant des crédits affectés à cette mesure à un niveau conforme aux engagements pris par le Gouvernement en 2003 et renouvelés, le 21 octobre 2004, par M. le Président de la République.

Étant donné l'impact décisif de cette indemnité sur l'avenir des petites exploitations de montagne, il est primordial que le projet de budget pour 2006 réserve les crédits nécessaires, et je vous remercie, monsieur le ministre, de l'accueil que vous pourrez réserver à cet amendement.

Au-delà des interrogations immédiates portant sur la revalorisation des ICHN, c'est toute la question des perspectives de financement du second pilier de la politique agricole commune pour les années 2007 à 2013 qui est posée. Ce « second pilier » permet, nous le savons, de financer les mesures agro-environnementales et, en particulier, de compenser les handicaps naturels des régions les moins favorisées du point de vue de leur climat et des conditions d'exploitation.

À la suite de la question d'actualité que je vous avais posée ici même, le 3 novembre dernier, et de nos échanges en marge de la discussion du projet de loi d'orientation agricole, vous m'avez répondu que la France oeuvrerait dans le cadre des négociations européennes « pour que soit reconnue au second pilier de la politique agricole commune sa juste place ».

Je vous remercie de cette réponse, dont vous savez qu'elle était très attendue par les exploitants, notamment les éleveurs. Mais, au-delà de ces assurances de principe, vous serait-il possible de communiquer au Sénat quelques orientations chiffrées sur les propositions qui seront formulées par notre pays ?

Enfin, je veux souligner l'importance d'autres questions, qui portent de réelles attentes en montagne.

La première a trait à la modernisation des bâtiments d'élevage. Dans mon département, il a en effet été nécessaire que le conseil général apporte une contribution, équivalente à celle de l'État, au plan de modernisation des bâtiments d'élevage, pour permettre de résorber la « file d'attente » qui s'était constituée faute de crédits suffisants. Cette situation, vous le concéderez, n'est guère satisfaisante. Est-il possible d'espérer, en 2006, un niveau d'abondement par l'État plus en rapport avec le nombre de demandes demeurant en instance de financement ?

Enfin, vous le savez, les responsables des unités de sélection et de promotion des races bovines ont connu, cet automne, de sérieuses inquiétudes à la suite du « gel » des crédits de génétique animale. Leurs préoccupations n'ont pas été totalement apaisées par la décision que vous avez pu obtenir de « dégel spécial » de ces financements à hauteur de 1 million d'euros, mesure dont nous prenons acte et dont nous vous remercions.

En effet, le budget que nous examinons prévoit une réduction de 4 millions d'euros des moyens attribués à la politique de sélection des races bovines.

Si cette décision devait être confirmée, les conséquences pour la génétique française, essentielle à la qualité du cheptel et dont les performances sont largement reconnues, y compris hors de nos frontières, seraient très lourdes.

Je suis conscient, monsieur le ministre, des difficultés de tous ordres qui contraignent la préparation de ce projet de loi de finances, notamment en ce qui concerne vos crédits, mais, pour autant, l'agriculture de montagne ne saurait apparaître comme le parent pauvre du budget que vous présentez et défendez aujourd'hui. Aussi, je vous remercie vivement d'avance des éléments, positifs je l'espère, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

M. Jean-Paul Amoudry. ...que vous pourrez apporter en réponse à ces questions, tout particulièrement pour ce qui concerne la compensation des handicaps naturels.

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yvon Trémel

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'année 2005 nous aura donné l'opportunité exceptionnelle d'échanger, à trois occasions, autour de l'agriculture et du développement rural : loi relative au développement des territoires ruraux, loi d'orientation agricole, loi de finances.

L'abondante production législative et le talent de tous les intervenants dans les débats n'auront cependant pas mis fin à une situation objectivement observée pas les élus des territoires ruraux et maritimes. Les paysans et les marins n'ont pas grand moral, monsieur le ministre ! Ils sont confrontés à des crises répétitives, entraînant des départs, des appels à l'aide, des révoltes parfois, une déstabilisation et une insécurité face aux réalités concrètes qui se cachent derrière des sigles de plus en plus redoutés : PAC, PMPOA, FFIPSA, TAC créent un réel malaise que l'on ne peut ni occulter ni ignorer.

Les agriculteurs et les marins ont dès lors un besoin urgent de « signes » positifs, capables de redonner lisibilité, repères, souffle et espoir. Trouve-t-on de tels signes dans le projet de budget ? Hélas ! non, monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Une analyse rapide de ce projet de budget, centrée autour de trois thèmes - l'écart entre les inscriptions budgétaires et les attentes, besoins et promesses, l'enjeu du développement rural, l'avenir de la pêche - permet de démontrer qu'il est possible de le lire de manière différente.

Je constate avec effroi que la LOLF n'a rien changé : selon les travées, nous n'avons ni les mêmes ophtalmologues ni les mêmes opticiens !

Parlons d'abord du grand écart entre les inscriptions budgétaires et les attentes, besoins et promesses. Nous n'ignorons pas les contraintes qui ont pesé sur l'élaboration du projet de budget, mais ce dernier nous paraît construit au plus juste, fortement dépendant des financements communautaires, inadapté par rapport aux réalités vécues et, de surcroît, trop décalé par rapport à vos engagements ou à ceux de votre prédécesseur, monsieur le ministre. Les données chiffrées, déjà citées par nombre d'orateurs, permettent d'en juger concrètement.

Pour le renouvellement des exploitations agricoles, il y a peu de moyens de paiement nouveaux pour les dossiers 2006.

Pour l'hydraulique, la traduction des engagements pris au congrès des maïsculteurs ne figure pas.

Pour l'ICHN, qui a fait l'objet de nombreuses interventions, le surcoût de 10 %, évalué à 35 millions d'euros par an, n'est pas budgété.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yvon Trémel

Pour la prime herbagère agro-environnementale, la dotation bénéficiera à 59 000 exploitants, mais il n'y aura pas, ou peu, de nouveaux entrants.

Pour la mesure rotationnelle, il n'y a pas non plus de crédits pour les nouveaux entrants.

Par ailleurs, on l'a dit, 6 000 CAD, ce n'est pas suffisant par rapport aux besoins.

Le plan « bâtiments d'élevage », annoncé en 2004, connaît un réel succès, mais, là encore, la « file d'attente » est longue : 37 millions d'euros sont inscrits en crédits de paiement. Les engagements antérieurs à 2006 représentent déjà 33 millions d'euros.

S'agissant du PMPOA, la mise aux normes est un levier majeur pour la compétitivité de l'élevage de demain et un moyen de conserver notre potentiel de production, notamment en lait. Le projet de budget pour 2006 prévoit 39 millions d'euros en crédits de paiement, mais 8 millions d'euros seulement sont prévus pour les nouveaux dossiers, alors que nous arrivons à l'échéance de décembre 2006 et que nous avons la certitude que les besoins financiers liés à l'application de la règle d'écoconditionnalité seront élevés.

Pour la sélection animale et végétale, la dotation en crédits de paiement est de 12, 4 millions d'euros, à comparer aux 16, 1 millions d'euros inscrits en 2005, année au cours de laquelle, du fait des gels de crédits, les moyens réels disponibles ont été de 9, 5 millions d'euros. Nous savons ce qui va se produire : des organismes comme les EDE, les établissements de l'élevage, les UPRA, les unions pour la promotion et la sélection des races, ou l'institut de l'élevage vont connaître des difficultés accrues et seront amenés à solliciter financièrement davantage les éleveurs.

La forêt bénéficie de 303 millions d'euros en crédits de paiement. Nous assistons à un désengagement de l'État pour la troisième année consécutive. La forêt privée, qui représente 75 % de la forêt française, est particulièrement touchée. Vous avez d'ailleurs fait un aveu, monsieur le ministre, lors du débat budgétaire à l'Assemblée nationale : vous êtes toujours à la recherche du financement des cinquante-cinq emplois dont ont besoin les centres régionaux de la propriété forestière.

Les autorisations d'engagement et les moyens de paiement pour la lutte contre les maladies animales sont également en diminution. Comment le comprendre et l'accepter en plein contexte de menace d'épizootie de grippe aviaire ?

L'enseignement agricole est évoqué par tous les orateurs. Je crois qu'il y a vraiment le feu, feu que la dizaine de millions d'euros qui ont été débloqués dans la hâte et la douleur n'éteindrons sans doute pas, monsieur le ministre. Nos interlocuteurs sur le terrain demandent des réponses aux questions qu'ils se posent sur les suppressions de poste envisagées et sur les reclassements promis aux enseignants mal classés.

J'arrête là un inventaire que j'ai voulu présenter sans esprit polémique, mais, monsieur le ministre, je souhaite bon courage aux fonctionnaires des DRAF et des DDAF, les directions régionales et départementales de l'agriculture et de la forêt, qui vont devoir affronter les questions, les déceptions, les frustrations et les expressions de mécontentement ! Leur situation devient de plus en plus intenable, et c'est bien la crédibilité de l'État qui est en jeu.

J'en viens au développement rural.

Le plan national de développement rural arrive à échéance à la fin de 2006. Nous sommes déjà entrés dans la préparation d'un nouveau plan qui doit couvrir la période 2007-2013. C'est donc bien maintenant que le Gouvernement, le Parlement, les collectivités territoriales, les représentants des organisations agricoles et forestières doivent se mettre au travail pour préparer des orientations et être prêts au 1er janvier 2007.

Sur ce sujet, je souhaite formuler quelques observations et quelques questions, monsieur le ministre.

Oui, le rural est de retour. Nous le constatons au travers du virage démographique qu'a fort bien décrit Jean-Marc Pastor, rapporteur pour avis. Dans ce contexte, le rôle de l'État en matière de stratégie, de soutien et d'accompagnement du développement rural devient primordial.

En la matière, trois priorités se dégagent.

Le développement de la multifonctionnalité en agriculture est la première. Et, à mon tour, monsieur le ministre, je vous demande quand seront signés les très attendus décrets d'application de la loi relative au développement des territoires ruraux, qui, même si elle n'est pas suffisante, va dans le sens de la multifonctionnalité ?

S'agissant de l'eau, deuxième priorité, allons-nous prendre le rythme qui nous permettra d'être prêts pour l'objectif très ambitieux qui nous est fixé en 2015 ?

Troisième priorité : les services publics et les services à la personne, thème qui a donné lieu à une intense mobilisation dans nos zones rurales et qui doit être au coeur du futur plan national de développement rural.

Par ailleurs, j'approuve tout à fait la proposition relative à la création de pôles d'excellence ruraux. Cela va dans le sens du développement rural. Pourriez-vous nous en dire un peu plus, monsieur le ministre, sur les critères, le calendrier et les moyens de financement ?

Je terminerai mon intervention par deux questions relatives à la pêche, sur laquelle mon amie Yolande Boyer va, avec la compétence que nous lui connaissons, centrer toute son intervention.

Le fonds de prévention des aléas de la pêche, le FPAP, a été mis en place en novembre 2004. Sera-t-il maintenu au-delà du 31 décembre 2005 ?

D'autre part, vous avez annoncé, le 14 octobre, à Nantes, un plan stratégique pour l'avenir de la pêche. Nous souhaiterions savoir de quelle manière il va se mettre en place. En particulier, avez-vous l'intention de présenter - ce serait intéressant - un projet de loi d'orientation sur la pêche ?

Vous le constatez, monsieur le ministre, au fur et à mesure que se déroule le débat, les questions affluent et se recoupent très souvent ; agriculteurs, marins, mais aussi sénateurs attendent vos réponses et y seront très attentifs.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Adeline Gousseau

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis de voir que notre agriculture est une nouvelle fois à l'honneur dans cet hémicycle, quelques semaines après le vote de la loi d'orientation agricole. Cette loi a permis de doter l'agriculture d'instruments, notamment juridiques, capables de lui permettre d'affronter plus sereinement son avenir.

Le projet de loi de finances pour 2006, qui nous occupe à présent, repose sur une nouvelle nomenclature budgétaire. Le budget de l'agriculture se trouve donc séparé en plusieurs missions, comme cela a déjà été souligné : la mission spécifique dont nous débattons ce soir, « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », et trois missions interministérielles également importantes, « Sécurité sanitaire », « Enseignement scolaire » -qui prévoit un programme « Enseignement technique agricole » - et « Recherche et enseignement supérieur ».

Ces missions traduisent indéniablement la volonté de construire une agriculture résolument tournée vers l'avenir.

Pour ce qui la concerne, la mission « Agriculture, pêche forêt et affaires rurales » progresse de 2 %, à 4, 98 milliards d'euros, soit légèrement plus que la moyenne de 1, 8 % des autres missions. D'une manière générale, mes chers collègues, ce budget, dont je m'attacherai à discuter quelques points, répond à l'impérative nécessité de développer l'agriculture en cohérence avec les attentes de notre société dans les domaines de l'environnement, de la qualité et de l'aménagement du paysage.

À la même époque, l'année dernière, j'avais insisté sur la nécessité de mettre en place l'assurance récolte le plus rapidement et le plus efficacement possible. Je suis heureuse d'avoir été pleinement entendue sur ce point, puisque je note un effort important dans ce domaine. En effet, la dotation a été doublée, passant à 20 millions d'euros. Cette politique est sans doute l'une des pistes de travail les plus fructueuses pour aider l'agriculture de demain, tout en étant compatible avec nos engagements à l'égard de l'OMC.

Il convient indéniablement de souligner cet effort et de l'accentuer dans les années à venir.

L'avenir de notre agriculture repose en outre sur l'enseignement agricole. Ainsi, nous sommes nombreux dans cet hémicycle à avoir été sollicités par des établissements d'enseignement agricole. Ceux-ci semblaient particulièrement inquiets de la baisse drastique des crédits qui leur étaient destinés, baisse d'autant plus dommageable qu'elle risquait de toucher un secteur si nécessaire à l'insertion et à la réussite de jeunes qui ne sont pas toujours parmi les plus favorisés. Je suis tout particulièrement heureuse des efforts financiers importants qui ont été obtenus en leur faveur par le Sénat, lors de la discussion des crédits de la mission « Enseignement scolaire », jeudi dernier.

Je souhaite de tout coeur que notre discussion d'aujourd'hui confirme ces orientations bienvenues. Je tiens à saluer à cette occasion le travail remarquable effectué par l'encadrement et les professeurs de ces établissements techniques agricoles qui contribuent à l'intégration scolaire et professionnelle de nombreux jeunes, qui trouvent dans cet enseignement une nouvelle motivation scolaire et un véritable projet d'avenir. Ils ont besoin de notre soutien inconditionnel.

Enfin, élaboré dans un contexte de transition économique et d'ouverture commerciale particulièrement difficile, le budget de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » s'inscrit dans la continuité des efforts consentis depuis trois ans et dégage, malgré les lourdes contraintes, des marges de manoeuvre pour des actions prioritaires telles que la modernisation des exploitations, les aides à l'installation ou le développement des débouchés.

J'insisterai notamment sur l'action en faveur du renouvellement des générations dans l'agriculture, qui me semble tout à fait primordiale.

Cet effort est concrétisé par la création dans ce budget, à la faveur de la nouvelle nomenclature financière, d'une ligne spécifique intitulée « Appui au renouvellement des exploitations agricoles ». Avec plus de 236 millions d'euros, les fonds attribués dans ce domaine progressent de 2 %, ce qui, dans le contexte budgétaire contraint qui caractérise le budget pour 2006, montre que vous considérez cette action comme une priorité que je partage tout à fait.

Voilà autant de points importants, monsieur le ministre, qui fondent le volontarisme et la qualité de votre budget. C'est pourquoi je le voterai avec conviction

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention, courte et ciblée, s'articulera autour de trois points : les biocarburants, le déficit chronique du FFIPSA et l'assurance récolte.

Premier point, le projet de loi d'orientation agricole, que nous sommes sur le point d'adopter, jette enfin les bases de la politique française de développement des biocarburants. Bientôt, cette loi déterminera les taux d'incorporation obligatoire que je souhaite aujourd'hui rappeler : 5, 75 % du total des carburants à la fin de l'année 2008, 7 % à la fin de l'année 2010 et 10 % à la fin de l'année 2015.

Le groupe UC-UDF du Sénat, qui a toujours été attaché à la valorisation de cette filière, s'en est félicité lors de l'examen du projet de loi dans notre assemblée. Cependant, pour que l'ambition affichée de donner de nouveaux débouchés à l'agriculture tout en concourant à la préservation de notre environnement soit une vraie réussite, ces objectifs doivent être atteints à partir de la production française. Ce serait un comble d'avoir à importer des biocarburants pour assurer les taux d'incorporation affichés !

Pour cela, nous devons, dès aujourd'hui, pouvoir décliner, pour chaque filière, diester ou éthanol, des objectifs en termes de volume de production et de surface. C'est à ce prix que la production française de biocarburants s'assurera des débouchés solides dans les années à venir. A cela doit, bien entendu, s'ajouter une politique industrielle ambitieuse. Je sais que le Gouvernement a pleinement de la conscience de la situation. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser cette politique ?

S'agissant, enfin, du FFIPSA, je n'ai pu participer au débat organisé dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Toutefois, monsieur le ministre, lorsque le BAPSA a été supprimé, votre prédécesseur s'était engagé à ce que nous puissions continuer à discuter du financement des prestations sociales agricoles dans le cadre de l'examen des crédits de l'agriculture. C'est la raison pour laquelle je souhaite rappeler à cette tribune la situation plus que préoccupante de ce fonds, situation qui a d'ailleurs été constatée par la Cour des comptes.

Le FFIPSA cumule les handicaps : son bilan d'ouverture, au ler janvier 2005, fait apparaître une dette sur l'État de 3, 2 milliards d'euros résultant des déficits cumulés du BAPSA. A cela, il faut ajouter un déficit structurel d'environ 1, 9 milliard d'euros pour 2005 et, vraisemblablement, pour 2006.

Au total, le besoin de financement cumulé de ce fonds, qui assure la couverture des risques « maladie » et « accident » ainsi que l'assurance vieillesse de base des non-salariés agricoles, atteint environ 6 milliards d'euros. Comment un tel déficit va-t-il pouvoir être couvert ? C'est une question essentielle pour le monde agricole, très inquiet de la suppression de la subvention d'équilibre que l'État versait traditionnellement au BAPSA.

En novembre 2005, le comité de surveillance du FFIPSA a appelé le Gouvernement à prendre ses responsabilités face à cette situation. Il a notamment proposé que soient envisagés une diversification des ressources, une renégociation des règles de compensation démographique et le recours à un emprunt dont l'État prendrait en charge les annuités.

M. Copé s'est engagé devant l'Assemblée nationale à prendre en charge partiellement la créance figurant au bilan d'ouverture du FFIPSA, ainsi que la diversification des ressources et la réforme des règles de compensation démographique préconisées par le comité de surveillance présidé par Yves Censi. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, a réaffirmé au Sénat sa détermination à trouver un financement pérenne.

Devant l'ampleur du déficit, augmenter l'autorisation de découvert du FFIPSA est loin d'être satisfaisant. Monsieur le ministre, l'État sur ce sujet manque à ses devoirs lorsqu'il n'assure pas, comme il aurait dû le faire, l'équilibre de ce fonds. Ce n'est pas moi, simple parlementaire rural, qui le dis, c'est la Cour des comptes !

Même si le FFIPSA n'est plus rattaché aux crédits du ministère de l'agriculture, vous êtes l'avocat de l'agriculture et des agriculteurs, qui comptent sur vous. C'est la raison pour laquelle j'aimerais connaître votre position sur ce sujet et les actions qui vont être prises par les différents ministères concernés pour assurer la pérennité du financement de ce fonds.

Enfin, un dernier point me semble primordial à souligner dans la nouvelle présentation des crédits de la mission agriculture, l'assurance récolte. Vous doublez les crédits affectés à ce dispositif, ce n'est pas négligeable, et même très important, dans un budget que nous savons contraint.

Je me réjouis de la volonté affichée du Gouvernement d'accompagner son développement et de favoriser son extension. Toutefois, pour rendre l'assurance récolte réellement attractive aux agriculteurs et aux assureurs, il convient d'agir à un double niveau.

Premièrement, il faut mener une politique incitative par le biais de la prise en charge d'une partie des primes d'assurance. C'est ce que vous avez fait en 2005 et cela a porté ses fruits, puisque 65 000 contrats ont été signés ; on ne peut que vous en féliciter. Or, les crédits débloqués pour 2006 sont pour l'instant insuffisants à cette prise en charge partielle. Non seulement ces aides doivent être maintenues, mais elles doivent l'être à un niveau identique à celui de cette année.

Deuxièmement, il faut prévoir un mécanisme de réassurance pour que les assureurs continuent de proposer ce type de contrat. A l'heure actuelle, les assureurs ne pourront pas aller beaucoup plus loin, le risque étant trop important.

Allégement des primes et réassurance garantie par l'État, tels sont les deux principes qui fondent les techniques d'assurance dans le monde entier. Il ne peut en être autrement chez nous.

Pour ma part, vous savez que je suis, depuis de nombreuses années, un ardent défenseur de l'assurance récolte. Je déposerai donc à nouveau, sur les articles non rattachés, et comme sur le projet de loi d'orientation agricole, un amendement demandant la garantie de l'État en matière de réassurance. C'est, à mon sens, la condition sine qua non pour que l'assurance récolte, après un bon début, arrive à l'objectif que vous avez fixé, c'est-à-dire environ 200 000 contrats.

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Yolande Boyer

Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, dans le cadre de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », mon intervention portera uniquement sur la pêche.

Certes, en termes financiers, son importance est minime. Jugez-en donc ! Le budget proposé est de 32 millions d'euros ; comparés aux 48 millions d'euros du budget consacré au cheval dans la même mission, cela peut sembler dérisoire !

Debut de section - PermalienPhoto de Yolande Boyer

Mais elle demeure et, je le souhaite, elle demeurera un secteur économique essentiel pour notre pays.

Je citerai quelques chiffres pour conforter mon propos. Ils ont trait, tout d'abord, à la réalité géographique de la France, qui possède une façade maritime sans commune mesure avec celle des pays voisins ; ensuite, au nombre d'emplois embarqués : environ 20 000, qui en induisent plus de 50 000 à terre ; enfin, à une production de 885 000 tonnes pour une consommation évaluée à 2 150 000 tonnes.

A l'appui de ces chiffres, je souhaite faire une analyse sur l'avenir de ce secteur qui, de mon point de vue, demeure essentiel, et ce pour plusieurs raisons.

En premier lieu, et cela paraît évident, il y a le poisson. La consommation française par habitant est bien supérieure à la moyenne européenne, et la production française est largement insuffisante.

En second lieu, il y a la pêche, qui joue un rôle essentiel dans ces régions littorales. Elle constitue, en effet, une activité permanente, avec de nombreux emplois induits. Ces emplois à terre sont liés à la construction et à l'entretien des navires, au déchargement, à la transformation du poisson, aux équipements annexes.

La pêche est donc une activité structurante en termes sociaux et en termes d'aménagement du territoire. Elle ne représente certes pas un secteur d'activité économique majeur par son poids dans l'économie nationale, mais la considérer uniquement sous l'angle de la production de denrées de consommation serait trop restrictif.

Elle est, en effet, un élément majeur de la vie de nos côtes, un gage d'équilibre à ne pas négliger. Ne risque-t-on pas de fragiliser l'existence de nos ports et de nos activités portuaires dans leur ensemble en la soutenant trop peu ? Elle est un acteur historique, économique, culturel et environnemental de nos côtes, « un acteur de la vie du littoral », comme le souligne le Conseil économique et social.

Elle est aussi un vecteur d'image positif, car elle porte les valeurs de courage, de ténacité et de solidarité. Elle fonde l'identité du littoral et, comme c'est le cas pour la Bretagne, celle d'une région tout entière.

Debut de section - PermalienPhoto de Yolande Boyer

Il demeure cependant des interrogations fortes sur l'avenir et sur la manière de surmonter ces contradictions.

Il faut, bien sûr, rappeler que la pêche est fortement communautarisée. Autrement dit, la politique commune des pêches à l'échelon européen encadre fortement la pratique du métier. Les propositions de la Commission européenne sont d'ailleurs très offensives sur le plan des autorisations de TAC et de quotas.

La problématique qui se pose aujourd'hui me semble parfaitement résumée dans la phrase suivante : « Sans poissons la pêche disparaîtra. Sans pêcheurs, ou sans navires, la filière s'écroulera ».

Debut de section - PermalienPhoto de Yolande Boyer

Pour illustrer mon propos, je parlerai, en premier lieu, de la ressource.

La consommation de produits aquatiques est en hausse régulière de 2 % par an depuis 15 ans. La France se situe en troisième position derrière l'Espagne et le Portugal : 34, 2 kilos par an par habitant et, pour le seul poisson, 23, 7 kilos par an et par habitant, à comparer aux 17, 5 kilos comptabilisés en 1988.

Quant à la ressource, elle est soumise à de nombreuses pressions - pollution, réchauffement climatique, prédateurs, pêcheurs non professionnels - et prête à polémiques.

La préservation de la ressource, dont dépend l'avenir de la pêche, est une préoccupation majeure.

Comment améliorer son évaluation ? L'enjeu est de taille. Les désaccords et controverses entre scientifiques et professionnels sont nombreux, les premiers agissant au nom du principe de précaution, les seconds mettant en avant, avec raison, leur expérience, leur savoir-faire, leur connaissance du milieu par son observation quotidienne. Une charte, issue d'un travail de concertation, devait être signée, ce qui laissait de l'espoir. Où en est-on aujourd'hui ?

Il faut certainement aller, comme le suggère le rapport du CES, vers une codécision, car il est temps de reconnaître l'effort et la prise de conscience des pêcheurs.

Ce rapport du CES se prononce également pour une gestion collective des quotas par les organisations de producteurs, individuellement et temporairement répartis ensuite entre les adhérents.

Il se prononce aussi pour une concertation entre les comités régionaux de pêcheurs et une organisation des producteurs regroupés sur une base régionale. Ne serait-ce pas là une juste collaboration ?

Des comités régionaux et locaux des pêches défendent une gestion durable de la ressource. Ils marquent ainsi leur volonté de prendre part à un développement raisonné du littoral, notamment dans le cadre du projet de parc national marin en mer d'Iroise, qui suscite tensions et oppositions.

Ce dossier complexe semble pâtir d'une gestion confuse et par trop administrative. Il fait, peut-être à tort, planer le spectre d'une réglementation lourde et contraignante. Les pêcheurs bretons y voient, eux, « un instrument pilote à l'instauration d'une gestion durable et partagée de la mer côtière, assurant le respect de l'ensemble des usagers ». Il faut tenir compte de leur avis.

Je parlerai, en second lieu, des moyens. Il faut aussi assumer le renouvellement des navires et, pour cela, il convient de s'interroger sur ce que doit être un plan de sortie de flotte.

Au cours des vingt dernières années, la France a réduit sas flotte de moitié. Celle-ci est vieillissante En effet, la moyenne d'âge des navires est de 23 ans, alors qu'elle devrait être de 15 ans.

Cette politique a pour conséquence, d'une part, des problèmes de sécurité, d'autre part, des craintes pour l'avenir.

L'exemple de l'action menée par le conseil régional de Bretagne est particulièrement intéressant. Il finance, en effet, des actions de diagnostic-sécurité-conditions de travail pour les constructions neuves ou pour les modernisations qui donnent lieu à subvention. Il intervient également dans la formation, l'aide à l'installation, sur les aspects portuaires. La Bretagne affirme ainsi sa volonté de défendre l'avenir de la pêche. L'État doit associer les régions et les départements à ses réflexions et projets.

Monsieur le ministre, le plan d'avenir pour la pêche que vous avez lancé à Nantes le 14 octobre dernier, répondra-t-il à ces questions ? Tiendra-t-il compte des propositions très pertinentes faites dans le rapport du CES ? Vous l'annoncez pour le début de l'année prochaine et, paradoxalement, le budget 2006 ne reflète ni ne démontre la volonté de donner de moyens réels à ce plan. Pouvez-vous nous apporter des précisions à ce sujet ?

Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Yolande Boyer

Quoi qu'il en soit, il convient d'établir une véritable politique de la pêche qui permette d'assurer aux professionnels un revenu correct. Celui-ci étant, en effet, incertain et irrégulier, il doit passer par un système d'assurance performant, d'où l'importance du fonds de prévention des aléas de la pêche et de sa reconduction.

La pêche subit une crise dont elle n'est pas encore sortie. La situation, qui est due, pour une grande part, aux augmentations successives de fioul intervenues de façon impressionnante ces derniers mois, est catastrophique pour les entreprises de pêche. Je rappellerai, à mon tour, que ces hausses représentent 30 % à 40 % des charges de fonctionnement pour certains patrons pêcheurs.

Après cette analyse préoccupante sur la situation de la pêche en France, j'en viens au budget proprement dit.

Celui-ci ne nous semble pas être à la hauteur des enjeux : comment la pêche peut-elle survivre sans compromettre ses ressources ? Quelle politique de sortie de flotte pourrait permettre de garder des navires performants ? Comment réduire les charges sans cesse croissantes ?

La baisse globale du budget de 1, 12 %, alors que l'inflation atteint 2 %, ne répond pas à ces questions. La diminution des crédits pour l'adaptation du secteur représente 35 % ; cela concerne aussi les criées. Enfin, les 3 millions d'euros destinés à l'ajustement de l'effort de pêche semblent bien insuffisants.

Ainsi, face aux défis auxquels la pêche est confrontée, les crédits proposés, je le répète, ne sont pas à la hauteur. Ce budget fait apparaître le peu d'intérêt politique du Gouvernement pour ce secteur d'activité.

C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, le groupe socialiste ne votera pas vos propositions.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre agriculture est confrontée à des enjeux de taille.

Si elle est, sans conteste, performante sur les marchés internationaux, elle doit néanmoins s'adapter en permanence à un environnement international marqué par les négociations au sein de l'OMC et par la réforme de la PAC de juin 2003.

Cette évolution globale s'accompagne d'une crise d'identité au sein d'un monde agricole dont la situation est incontestablement de plus en plus fragile.

L'année 2006 sera cruciale. Elle marquera à la fois la mise en oeuvre des droits à paiement unique et l'entrée en vigueur des règles d'écoconditionnalité pour le versement des aides communautaires.

Outre la nécessaire simplification de la PAC, souvent évoquée, certes, mais pour laquelle il apparaît que de nombreux efforts restent encore à fournir, tant par nos agriculteurs que par les fonctionnaires, je voudrais soulever quelques questions.

Je me ferai, pour commencer, le porte-parole des producteurs de cultures COP qui caractérisent, notamment, mon département, l'Eure-et-Loir. Il est une équation qui vaut pour la majorité des filières agricoles, à savoir, d'une part, la hausse des charges de production - fuel, engrais, produits phytosanitaires - et, d'autre part, la baisse des prix des produits agricoles.

Vous n'êtes pas sans savoir combien les échéances financières de l'automne posent de sérieux problèmes à la profession et qu'un versement anticipé des aides au titre de la PAC aurait permis de soulager la trésorerie des exploitations. Dès lors, la question est simple : comment faire mieux la prochaine fois et comment aller plus vite, monsieur le ministre ?

Je voudrais aborder, dans un deuxième temps, la question des énergies nouvelles, dites renouvelables, dont il n'est plus besoin de vanter les mérites tant en termes de débouchés pour l'agriculture qu'en termes d'avantages environnementaux.

La future loi d'orientation agricole contient, certes, des mesures fiscales incitatives au profit des biocarburants, sans compter les possibilités de recours à l'autoconsommation d'huiles végétales pures comme carburant par les exploitations agricoles.

La France a, par ailleurs, pris des engagements en matière de politique énergétique pour augmenter progressivement l'incorporation de biocarburants. Elle a même prévu d'aller au-delà de ce que prévoit le droit communautaire. Cependant, pour atteindre l'objectif de 5, 75 % en 2008, un appel d'offres doit encore être lancé par le Gouvernement.

Pouvez-vous nous en dire plus aujourd'hui, monsieur le ministre ? Sait-on comment va se faire la répartition des volumes entre les filières ? Tous les moyens sont-ils déployés pour satisfaire l'échéancier d'objectifs que nous nous sommes fixé ?

Le troisième point de mon intervention concerne le sort réservé, l'année même de la modulation, au financement des contrats d'agriculture durable, les CAD.

Malgré l'intérêt qu'il présente et l'espoir qu'il suscite, je déplore la trop grande rigidité de cet outil qui demeure trop inadapté aux situations les plus couramment rencontrées par les exploitants et de facto j'appelle de mes voeux la mise au point de nouveaux concepts de contractualisation plus conformes aux réalités et aux attentes du monde rural ; je sais, monsieur le ministre, que vous y êtes très sensible.

Je voudrais, enfin, évoquer un sujet qui me tient à coeur, celui de l'enseignement technique agricole, dont nombre de mes collègues ont déjà parlé.

Cette filière subit depuis plusieurs années des réductions de crédits qui menacent son activité et conduisent même, depuis l'an passé, à des fermetures de classes, alors que cette voie est - c'est un fait avéré - performante et synonyme d'intégration sociale pour de nombreux jeunes. J'en veux pour preuve l'employabilité importante des jeunes scolarisés, l'excellent taux de remplissage des formations proposées et la dynamique ainsi créée en termes de développement de nos territoires.

Or le ministère de l'éducation nationale n'a pas bien estimé les besoins et n'a pas doté la filière des crédits qui lui sont nécessaires pour assumer efficacement sa mission.

Après un premier rattrapage à l'Assemblée nationale, le Sénat, jeudi dernier, sur proposition de notre commission des finances, a voté un abondement supplémentaire de 5 millions d'euros. Le Gouvernement, à son tour, a présenté en séance un amendement tendant à transférer 10 millions d'euros supplémentaires, dont six millions proviennent du ministère de l'éducation nationale.

Il semble indispensable que le ministère de l'agriculture fasse, lui aussi, un effort substantiel en direction des établissements concernés, à l'instar de ce que vous avez octroyé aux maisons familiales rurales, monsieur le ministre.

Pouvez-vous confirmer devant nous que tel sera bien le cas et que vous abonderez à hauteur de 4 millions d'euros la somme dégagée par votre collègue Gilles de Robien, ce qui nous permettrait d'atteindre la somme globale de 15 millions d'euros ?

Telles sont, monsieur le ministre, quelques-unes des préoccupations dont je voulais vous faire part. Je n'ignore pas que votre tâche est rude et que vous déployez beaucoup d'énergie pour faire entendre la voix de la France sur la scène européenne.

Tenez bon ! Sachons ne pas sacrifier les valeurs et les fondements de notre agriculture sur l'autel de la mondialisation et agissons, au plan national, pour faire tout ce qui est en notre pouvoir afin de faciliter le quotidien du monde agricole et de ses acteurs.

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Létard

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les moines de l'abbaye St-Bertin ont entrepris la mise en valeur du marais audomarois dès le IXe siècle en creusant des canaux. Ce marais a une superficie de 3 700 hectares, dont 500 hectares de cultures légumières sont encore cultivés par cent vingt familles de maraîchers. Un réseau de 560 kilomètres de « wateringues » et de « watergangs », chemins d'eau parcourus par des barques traditionnelles, dessert les parcelles cultivées et les prairies humides.

Le marais est, certes, devenu un lieu touristique, mais il est, avant tout, un lieu de production maraîchère très important de la région Nord-Pas-de-Calais. Le chou-fleur y est récolté deux fois par an et l'on y produit également cinquante autres espèces de légumes, dont les endives. La faune et la flore y sont extrêmement riches et diversifiées.

Or, comme toutes les zones humides comparables à celle-ci, le marais audomarois est menacé de toute part. L'utilisation excessive d'engrais azotés favorise le phénomène d'eutrophisation des canaux. Les berges doivent être entretenues sous peine d'éboulement, phénomène qu'aggrave encore la prolifération inquiétante de rats musqués.

Ce que l'on peut constater en visitant le marais audomarois, c'est que, sans la main de l'homme, ce paysage, façonné par des siècles de labeur, pourrait à terme disparaître, mettant en péril tout un écosystème permettant, notamment, de contribuer à la régularisation du régime des eaux, à leur qualité par l'épuration des fertilisants et des pesticides, à la biodiversité et, enfin, à la réduction de l'effet de serre par séquestration du carbone.

Au plan national, les grandes zones humides agricoles couvrent de l'ordre de 3 millions d'hectares dont un million sont exploités en prairies, des superficies plus petites l'étant pour le maraîchage et la pisciculture d'étang.

L'Union européenne a reconnu l'importance de ces zones et la nouvelle politique agricole commune devrait leur accorder une place plus large. Or leur histoire, en particulier dans notre pays où ces territoires étaient reconnus pour la qualité et la quantité de leurs productions, essentiellement maraîchères, a contribué à en faire des espaces supportant un niveau d'imposition plus important que d'autres zones de culture.

La loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux a constitué une première avancée dans le sens d'une prise en compte des spécificités de ces espaces.

Comprenant un certain nombre de dispositions relatives à la préservation, à la restauration et à la valorisation des zones humides, cette loi a, notamment, dans son article 137, prévu pour ces zones une exonération totale de taxe foncière sur les propriétés non bâties.

Quant à l'article 25 octies du projet de loi d'orientation agricole, il met l'accent une nouvelle fois sur l'importance de soutenir le maintien des activités traditionnelles et économiques dans les zones humides « qui contribuent à l'entretien des milieux sensibles, notamment les prairies naturelles et les marais salants ».

Ce nouvel article, s'il contribue à renforcer l'attention prêtée à ces territoires fragiles, n'apporte pas pour autant de moyens nouveaux pour les aider. Or chacun s'accorde à reconnaître que, en raison des conditions d'exploitation particulières, le fait d'exercer des activités dans ces zones humides entraîne un surcoût. A cet égard, l'on peut citer, entre autres, les difficultés d'accès, le morcellement des parcelles, les espèces invasives à réguler, sans compter les phénomènes naturels tels que les inondations.

Pour toutes ces raisons, l'ensemble du réseau des gestionnaires de ces milieux ont proposé, dès 2002, de créer une indemnité stable spéciale zones humides, qui s'inspirerait de l'indemnité compensatoire de handicaps naturels, l'ICHN, qui a été octroyée aux zones de montagne.

D'ailleurs, un premier exemple de ce qu'il conviendrait de faire est déjà expérimenté dans le marais poitevin qui bénéficie, depuis 2003, d'une application spécifique de l'ICHN.

Rejoignant la préoccupation déjà exprimée par plusieurs de mes collègues mobilisés par l'avenir des zones humides, je pense que l'instauration d'une indemnité stable spéciale zones humides devient une nécessité de plus en plus pressante.

En effet, les difficultés économiques rencontrées par les exploitants de ces régions sont bien réelles et nécessitent un traitement immédiat. Il est de notre intérêt collectif de préserver ces espaces naturels dont l'existence présente une utilité sociale et environnementale fondamentale. D'avance, je vous remercie, monsieur le ministre, de l'attention que vous voudrez bien porter à ce dossier.

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Raoult

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais évidemment m'associer aux propos tenus par mes collègues du groupe socialiste, tout en apportant quelques éléments de réflexion supplémentaires concernant les difficultés que rencontrent un certain nombre de nos agriculteurs dans leur diversité culturelle, sociale et géographique.

Tout d'abord, s'agissant des droits à paiement unique, les agriculteurs sont perplexes. Les documents leur semblent si compliqués qu'ils ont du mal à les comprendre et un certain nombre d'entre eux, je dois le dire, baissent les bras devant une pression réglementaire de plus en plus lourde. Certains sont même paniqués. Il faut dire qu'ils ne sont pas tous nés à l'époque d'Internet et de l'informatique !

C'est la raison pour laquelle ils souhaiteraient que les documents administratifs soient un peu plus lisibles, même s'il convient de noter un certain progrès dans ce domaine par rapport à l'année dernière.

La mise en place de l'écoconditionnalité en est l'illustration. Même si j'approuve l'esprit de ce texte et ses intentions, les agriculteurs ont tout de même gardé un mauvais souvenir de Noël 2004 et du fameux Livre jaune.

Cette année, à partir d'un dépliant qui sera distribué au début de 2006, chaque agriculteur devra se procurer les fiches détaillées par mesure auprès des organisations professionnelles agricoles, avec un registre des traitements phytosanitaires, un registre d'élevage. Je souhaite, surtout dans ce domaine, que soit mis fin à un système de sanction brutal pour entrer dans une démarche plus volontaire, plus motivée et plus pédagogique.

Les services de votre ministère doivent faire un effort important en matière d'explications et d'informations.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Raoult

L'obligation pour les agriculteurs d'appliquer le code de l'environnement est certes judicieuse, mais encore faut-il qu'ils soient tous informés des espèces protégées ou des habitats naturels, par exemple.

Entre les contrôles de la direction départementale de l'agriculture et de la forêt, la DDAF, de la direction régionale de l'agriculture et de la forêt, la DRAF, de la direction départementale des services vétérinaires, la DDSV, ou de l'Office national interprofessionnel des céréales, de l'ONIC, qui vérifie les bonnes conditions globales agricoles et environnementales, les agriculteurs ont parfois le sentiment d'être les souffre-douleur de l'administration.

Je souhaiterais qu'ils disposent d'un délai supérieur à dix jours pour formuler leurs observations après un contrôle. À mon sens, ce serait une mesure judicieuse. Sans faire de la démagogie, ce qui m'importe, c'est l'esprit dans lequel ces contrôles sont opérés.

Si nous ajoutons encore les formulaires à remplir pour les demandes de remboursement partiel de la TIPP, le diagnostic amiante à réaliser avant la fin de l'année ou encore des dispositifs tels que la mise en place des bandes enherbées le long des rivières, nous constatons que toutes ces mesures tendent à créer un climat de découragement qui est préjudiciable aux agriculteurs. Certains jeunes agriculteurs désirant s'installer sont même effrayés à l'idée de devoir remplir toutes ces paperasseries et de subir ces contrôles plus ou moins vexatoires. Dans le parc naturel de ma région, j'ai rencontré, au cours de mes permanences, des agriculteurs vraiment désespérés face à une administration parfois un peu dure.

Les crédits nécessaires à la mise en place du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole, le PMPOA sont en volume a priori suffisants, grâce notamment à l'aide des départements, des régions et des agences de l'eau. Au-delà de cette question, je souhaiterais que les éleveurs disposent d'un délai supplémentaire pour finaliser leur dossier. Cet assouplissement permettrait de ne laisser personne de côté. En effet, on enregistre ces dernières semaines une inflation importante du nombre de dossiers. Je ne pense pas que l'administration aura le temps de les examiner tous ; il faut donc accorder un délai supplémentaire.

Par ailleurs, je veux également vous sensibiliser, monsieur le ministre, sur la situation difficile des éleveurs laitiers.

Les producteurs voient le prix du lait baisser, et les compensations par les subventions ne sont pas suffisantes. Les industriels coopératifs ou privés sont alarmés par la concurrence étrangère sur le marché du lait. Or la baisse des crédits que vous proposez dans votre projet de budget est ressentie comme une provocation et fait apparaître un écart entre les discours et les actes.

J'en viens maintenant à une remarque plus générale.

Certes, on a alerté l'opinion publique sur les risques que présente la peste aviaire mais, en même temps, c'est toute la filière volaille que l'on met en jeu. Dans mon département, un maire a interdit que la cantine scolaire serve du poulet ! On ne peut tolérer de tels excès, qui conduisent à remettre en cause cette filière. Face à une campagne médiatique mal maîtrisée, il ne faut pas créer un sentiment de panique. Le principe de précaution est certes souhaitable, mais la situation est vraiment fâcheuse.

En outre, je souhaite également que vous mettiez très rapidement en oeuvre, monsieur le ministre, le plan de développement des biocarburants que vous avez annoncé.

Ce plan soulève de nombreux espoirs chez les agriculteurs ; je pense aux céréaliers, mais surtout aux betteraviers. Vous le savez, le nouveau règlement du Conseil prévoit une baisse du prix du sucre de 39 %. Or, je peux en témoigner dans ma propre région, il n'y a pas que les gros agriculteurs qui produisent des betteraves à sucre. Il faut que la fabrication du bioéthanol apparaisse comme une chance ; cela suppose la mise en oeuvre d'un projet industriel fort et une volonté politique ferme.

Je lancerai enfin une piste de réflexion.

Nous devons apporter un soutien plus actif aux filières plus courtes liées à un terroir ; il faut revenir au maximum au terroir et aux traditions alimentaires et infléchir le modèle global de consommation. Les consommateurs des pays développés sont prêts à payer plus cher les produits lorsque ceux-ci sont de qualité. N'est-il pas temps de demander la création d'un répertoire mondial des produits d'origine ? Il faut protéger la propriété intellectuelle des noms, des dénominations et des pratiques ; le Roquefort et le champagne illustrent la viabilité économique potentielle de cette nouvelle logique de terroir.

En conclusion, monsieur le ministre, je souhaiterais que vous favorisiez un peu plus encore l'agriculture bio, l'agriculture raisonnée.

Certes, dans le cadre de ce programme, vous avez accordé, cette année, une prime, mais la diminution du nombre de contrats d'agriculture durable va contrarier, à mon avis, cet objectif. L'agriculture raisonnée doit être vécue comme une chance, comme un défi à relever. En la matière, votre politique est encore un peu trop timide.

Les négociations prévues à Hong Kong créent un climat d'incertitude chez les agriculteurs. Je regrette toujours que l'on ait abandonné l'idée de la préférence communautaire. De plus, nous faisons aujourd'hui des propositions sans aucune garantie de contrepartie.

Les Américains continuent d'aider leurs agriculteurs par le biais des marketing loans, des aides alimentaires ou des crédits à l'exportation. Or les discussions sur le Farm Bill ne commenceront qu'en 2007, soit après nos négociations. J'ajoute qu'un dollar faible crée aujourd'hui des écarts dans les taux de change, et donc des distorsions monétaires. Le différentiel de compétitivité est d'origine purement monétaire. Je crains que le jeu de la négociation ne soit biaisé ; on joue en réalité au poker menteur.

Il nous faut manifester une très grande pugnacité pour défendre les intérêts de nos agriculteurs, et nous devons toujours avoir à l'esprit le fait que l'indépendance alimentaire est aussi importante que l'indépendance énergétique ou militaire.

Eu égard à ces enjeux, votre projet de budget ne répond pas à toutes ces attentes, monsieur le ministre. C'est pourquoi le groupe socialiste votera contre.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Pour ma part, je vous féliciterai monsieur le ministre.

Grâce à vous, en effet, nous avons adopté la loi d'orientation agricole, qui est la marque d'une agriculture moderne, qui traduit notre mobilisation pour faire en sorte que l'agriculture soit une chance pour notre pays et un atout pour les femmes et les hommes qui en vivent ainsi que pour la vie rurale, car il n'y aura pas de vie rurale sans agriculture.

Dans ce projet de budget, vous proposez, monsieur le ministre, un certain nombre de mesures qui traduisent cette volonté et qui engagent notre pays dans une agriculture qui répond, me semble-t-il, à plusieurs impératifs : la sécurité sanitaire, nous venons d'en parler ; un meilleur respect de notre environnement grâce aux techniques agri-environnementales ; la création d'emplois par le biais de l'industrie agroalimentaire.

Les crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » augmentent de 2 %, soit un peu plus que le budget de l'État. Vous avez repris, monsieur le ministre, un certain nombre de priorités.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

J'insisterai sur l'agriculture de montagne, qui bénéficiera, notamment, l'an prochain, de 37, 1 millions d'euros pour la modernisation des bâtiments d'élevage. Il fallait quand même le faire !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Ainsi, nous pourrons non seulement payer les engagements antérieurs à 2006, mais également mettre en place de nouveaux programmes. C'est un signal fort. Et je ne parle pas des mesures visant à favoriser l'installation des jeunes agriculteurs ou d'autres dispositions encore que vous proposez pour développer l'agriculture. Le volet montagne n'est donc absent de ce projet de budget ; grâce à vous, nous avons pu le consacrer dans la loi d'orientation agricole.

Toutefois, il est vrai que des interrogations demeurent ; nous vous solliciterons, monsieur le ministre, pour augmenter les crédits relatifs à la compensation des handicaps naturels. C'est un dossier financier difficile et il importe que nous soyons tous mobilisés.

Je veux également vous féliciter, monsieur le ministre, parce que vous vous battez pour défendre la PAC.

Mes chers collègues, il s'agit d'un combat difficile. Les Britanniques avaient réussi à nous complexer : en défendant la politique agricole commune, nous passions pour des archaïques ! Eh bien non, au contraire ! Assurer l'avenir de cette agriculture, c'est s'inscrire dans la modernité ! Et que l'on cesse de comparer l'agriculture aux avancées technologiques ou aux transferts de technologie, car l'agriculture présente également des avancées technologiques.

À cet égard, je ferai remarquer que les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » augmentent de 13 %. Je souhaite que Agropolis, le pôle international de recherche et d'enseignement supérieur agronomique, soit lancé à Montpellier. Nous vous attendons, monsieur le ministre, car la région a beaucoup investi. Regrouper dans un seul pôle l'École nationale supérieure agronomique de Montpellier, l'Institut national de la recherche agronomique ou encore des organismes de recherche constitue un atout. Cela prouve que l'agriculture se positionne par rapport aux avancées réalisées dans la recherche et les technologies.

De même, monsieur le ministre, en matière d'enseignement, vous proposez une augmentation des crédits de 5, 8 %. Cela n'était pas arrivé depuis longtemps ! Dont acte !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

On compare les crédits de la PAC aux crédits de la recherche, mais il faut rappeler que la recherche n'est pas une politique commune. Les crédits publics des États ou de l'Europe sont nettement supérieurs aux crédits que nous consacrons à la PAC. N'ayons donc aucun complexe, au contraire ! Je dirai même : « bravo, monsieur le ministre ! », car vous avez su rappeler au commissaire, lors de la réunion de préparation de la conférence qui se tiendra à Hong Kong, qu'il fallait respecter les engagements qui avaient été approuvés, dans le cadre de la réforme de la PAC, par tous les pays. La PAC est réformée, mes chers collègues ! Nous sommes en train de mettre en oeuvre cette réforme, et l'année 2006 sera le temps fort du découplage et des droits à produire, entre autres. Nous entrons dans une étape décisive. Ce n'est donc pas le moment d'aller casser ce que tout le monde a accepté ; nous verrons bien en 2013 !

Monsieur le ministre, je le sais, vous êtes déjà mobilisé, mais je veux attirer votre attention sur le secteur de la viticulture.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Ce secteur connaît une crise conjoncturelle. Vous vous êtes mobilisé pour offrir aux agriculteurs des possibilités de distillation ; les AOC ont distillé près de un million d'hectolitres.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Je crois que vous recevrez les viticulteurs jeudi soir. Il importe que nous nous mobilisions tous pour profiter de cette mesure jusqu'au 20 décembre : la distillation est indispensable pour écouler les stocks et espérer voir remonter les cours.

Par ailleurs, ce secteur connaît également une crise structurelle. Certes, les viticulteurs et leurs représentants ne seront jamais tous d'accord parce qu'il existe une grande diversité des produits. Toutefois, il faut que l'on sache clairement si la gestion des marchés se fait au niveau national ou au niveau des bassins de production. Monsieur le ministre, quelle est votre attitude par rapport à la segmentation ? Certes, certains vins AOC sont de grande qualité, mais il y a aussi de bons vins de cépages issus du terroir.

L'accord avec les Etats-Unis prévoit un certain nombre de mesures qui posent problème ; je veux parler de l'utilisation des copeaux de chêne ou encore de la désalcoolisation. Les viticulteurs sont très angoissés, et nous devons là encore répondre à cette attaque.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

... car il ne s'agit pas seulement de condamner tous les excès. Je sais, monsieur le ministre, que nous pouvons vous faire confiance.

Pour ma part, je vous fais confiance et je voterai votre projet de budget.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.- Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Monsieur le ministre, face à l'ampleur de la crise qui frappe la viticulture dans de nombreuses régions, et plus particulièrement en Languedoc-Roussillon, je veux lancer ici un cri d'alarme, peut-être même le dernier avant qu'il ne soit trop tard.

Je vous l'ai déjà dit, ici même et à de très nombreuses reprises, nombre de viticulteurs ressentent une immense détresse matérielle et morale, comme un sentiment d'abandon, de désespérance, mais aussi de colère.

Dans ma vie d'élu, je n'avais jamais rien perçu de tel.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Encore une fois, je veux souligner que le climat, déjà particulièrement tendu jusqu'à ce jour, est devenu carrément explosif face à une situation qui peut être considérée comme la plus catastrophique depuis 1976, année des événements tragiques de Montredon.

Monsieur le ministre, je crains des actes désespérés - et je le dis avec une profonde gravité. Je vous le déclare comme je le ressens. Il n'y a dans mes propos nulle exagération, nulle volonté d'exposer de façon plus dramatique encore une situation qui ne l'est que trop.

Je vous l'ai dit à plusieurs reprises : des drames humains sont en train de se nouer du fait d'une crise qui, depuis des années, n'en finit pas de se prolonger et de s'aggraver.

Sachez, monsieur le ministre, que les souvenirs tragiques de 1976 hantent toujours nos mémoires en terre d'Aude et en Languedoc-Roussillon. Ce n'est pas Gérard Delfau qui me démentira.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Sachez aussi qu'il y va de la vie ou de la mort d'un grand nombre d'exploitations situées bien souvent sur des territoires fragiles. Il y va, dans notre région, du maintien ou de la disparition de pans entiers de notre économie.

Faut-il encore une fois rappeler que ce secteur d'activité, si souvent dénigré - et encore ces derniers temps - « pèse » au plan national plus de 9 milliards d'euros. Il représente à l'exportation, chaque année, l'équivalent d'une centaine d'Airbus ou de cinq cents rames de TGV. L'ensemble de la filière viti-vinicole, au sens le plus large, emploie quelque 800 000 personnes en équivalents temps plein.

La crise est sévère, monsieur le ministre, et s'il fallait une seule preuve de l'ampleur du désespoir, nous la trouverions dans la demande faite par la profession elle-même de procéder à l'arrachage définitif de plants. C'est un véritable crève-coeur pour des hommes et des femmes qui ont emprunté et investi, qui se sont endettés pour améliorer toujours et sans cesse la qualité.

A quoi donc ces efforts ont-ils abouti ? Leurs revenus ont été amputés de 40 à 50 %. Comment s'étonner dès lors que certains viticulteurs, pour survivre, soient obligés d'emprunter à court terme auprès des banques ?

Je ne m'étendrai pas davantage sur les solutions à mettre en oeuvre pour sortir rapidement mais durablement de la crise, solutions qui sont d'abord des mesures d'extrême urgence, puis des mesures de court terme ou de moyen terme. Je les ai développées en de si nombreuses occasions, dans cette même enceinte, qu'il est inutile d'y revenir.

Vous les connaissez, monsieur le ministre. Vous connaissez les attentes fortes du monde viticole, qui vous a fait part de ses propositions. Vous avez également entre les mains, le rapport du Sénat intitulé L'avenir de la viticulture française : entre tradition et défi du Nouveau Monde, auquel Gérard César, Gérard Delfau, Bernard Piras et moi-même avons travaillé durant des mois.

Bref, je n'insiste pas davantage. Sur ce dossier, nous nous sommes tout dit.

Mais aujourd'hui, compte tenu des jours difficiles que nous nous apprêtons à vivre si rien n'est entrepris, je m'interroge : vous a-t-on donné les moyens de combattre efficacement cette crise ? Sauf votre respect, j'en doute, monsieur le ministre

C'est pourquoi, plusieurs de mes collègues parlementaires du Languedoc-Roussillon et moi-même en appelons solennellement aujourd'hui au Premier ministre.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur certaines travées du RDSE. M. Auguste Cazalet applaudit également.

M. Guy Fischer remplace Mme Michèle André au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon temps de parole étant limité, je ne parlerai que de ce que je connais le moins mal, à savoir la forêt. Au demeurant, je parlerai non pas de toute la forêt, mais seulement de la forêt publique, plus précisément de la forêt publique communale.

Monsieur le ministre, vous avez prouvé depuis de nombreux mois que vous étiez son ami. Vous vous êtes intéressé à nos problèmes, et je crois que vous allez continuer à le faire, puisque vous nous avez conviés en début d'année prochaine à une table ronde.

S'agissant de votre action, j'ai deux compliments et trois petits reproches à vous adresser. Si vous préférez, je ferai deux sourires et trois grimaces.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Mon premier motif de très large satisfaction est le maintien du versement compensateur.

Vous savez à quel point nous nous sommes battus en ce sens. Pour la troisième année, budget après budget, nous maintenons ce crédit, indispensable pour que vive le régime forestier grâce auquel les communes forestières assurent une bonne partie de l'approvisionnement en bois de la filière - 7, 5 millions de mètres cubes par an.

Je rappelle que la loi du 9 juillet 2001 d'orientation sur la forêt dispose que « les forêts publiques satisfont de manière spécifique à des besoins d'intérêt général, soit par l'accomplissement d'obligations particulières dans le cadre du régime forestier, soit par une promotion des activités telles que l'accueil du public, la conservation des milieux, la prise en compte de la biodiversité et la recherche scientifique. »

Toutefois, je ne suis pas tout à fait d'accord avec l'interprétation selon laquelle le versement compensateur devrait être considéré comme une subvention versée à un opérateur de programme, en l'occurrence l'Office national des forêts, l'ONF.

Il est bien plus que cela. C'est une subvention de fonctionnement destinée à financer la gestion durable des forêts communales. Ce n'est donc pas une dépense de fonctionnement, c'est bien plutôt un investissement « moral », si je puis inventer cette notion dont la pertinence financière n'est pas forcément avérée...

En effet, il permet de planifier la gestion forestière grâce à l'aménagement forestier, qui organise durant quinze à vingt ans la vie de la forêt, la sylviculture, la croissance et la régénération des peuplements, les travaux de culture ou d'équipement de la forêt, la vie technique et économique de la forêt - la désignation des arbres à abattre, la vente des bois, les coupes, la programmation des actes de gestion -, et, bien entendu, la protection de la forêt.

Cependant, nous avons quelque crainte quant à la pérennité de ce versement compensateur. S'il a été maintenu durant trois ans, nous appréhendons l'issue de la négociation du futur contrat de plan entre l'État et l'ONF.

Monsieur le ministre, vous serez saisi, après le prochain bureau de la Fédération nationale des communes forestières de France, d'une motion qui vous rappellera, si vous l'aviez oubliée, l'importance extrême que nous accordons à ce versement.

Mon deuxième motif de satisfaction n'est pas à proprement parler budgétaire. Il tient à l'existence du fonds d'épargne forestière que le Parlement avait créé et que nous avons eu tant de mal à faire passer dans les faits. Nous sommes tout de même très contents que vous ayez mené à bien ce projet. Non seulement la loi visant à sa création a été votée, mais encore les décrets ont été publiés et le correspondant bancaire a été sélectionné - c'est le Crédit agricole. Peut-être nous confirmerez-vous que les premiers comptes d'épargne forestière pourront être signés dès le début de 2006.

C'est une bonne nouvelle pour les communes forestières, c'est une bonne nouvelle pour l'investissement, c'est une bonne nouvelle pour la forêt et pour notre pays !

Il reste à souhaiter que le marché du bois recouvrera quelque peu la santé pour permettre aux communes de constituer une épargne, aussi modeste soit-elle. Si nous avions pu disposer de ce fonds d'épargne forestière au moment où les chablis étaient nombreux, nous serions plus avancés.

J'en viens maintenant aux motifs de grimaces.

Premièrement, le budget général pour la forêt est en baisse. Pour cette raison, vous avez d'ailleurs été un peu tancé devant l'Assemblée nationale. Les crédits de paiement diminuent de 5, 5 %. Les autorisations d'engagement représentent 295 millions d'euros, soit seulement 6 % du budget de votre ministère, pour 27 % du territoire métropolitain.

Deuxièmement, les moyens consacrés à l'amélioration de la gestion et de l'organisation de la forêt enregistrent une forte baisse. Les crédits de paiement diminuent de 14, 8 %. Les moyens consacrés à l'investissement forestier sont faibles : ils se montent à 35, 5 millions d'euros pour les autorisations d'engagement et à 46, 4 millions d'euros pour les crédits de paiement, sans compter, il est vrai, les 6 millions d'euros du programme des interventions territoriales de l'État, le PITE, de la filière bois Auvergne-Limousin et la hausse de la participation de l'Europe.

Pour le nettoyage et la reconstitution des forêts détruites par les tempêtes - hélas ! il faut encore parler de cet événement dramatique -, les autorisations d'engagement se montent à 28 millions d'euros, et à 56 millions d'euros si l'on y ajoute les crédits du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole, le FEOGA, à parité. C'est bien peu, compte tenu des besoins. Pour les seules forêts communales, comme je vous l'écrivais dans ma lettre du 23 décembre 2004, 24 millions d'euros par an pendant cinq ans seraient nécessaires pour achever de reconstituer les 60 000 hectares qui doivent encore l'être.

S'agissant des autres investissements forestiers- boisement, reboisement, amélioration et desserte des peuplements -, il ne reste que 7, 5 millions d'euros en autorisations d'engagement. À ce compte-là, il n'est pas facile d'assurer une gestion de qualité, comme nous en avons l'ambition.

Troisièmement, je regrette la disparition de l'aide à l'acquisition de forêts par les communes.

Bien que ce fût une petite ligne budgétaire, monsieur le ministre, elle n'en était pas moins intéressante. En effet, nous avons à lutter contre les conséquences d'un décret « scélérat » qui a obligé les caisses de retraite complémentaire à vendre leurs actifs forestiers. On se demande bien pourquoi !

Un certain nombre de communes voudraient pouvoir éviter que ce patrimoine ne se disperse. Bien qu'elles aient le plus grand respect pour la forêt privée, je comprends qu'elles soient attachées à ce patrimoine. C'est peu de chose, mais les maires auraient apprécié que ce crédit fût maintenu.

Il règne dans les communes forestières une atmosphère de nervosité. Sont intervenues récemment l'augmentation des frais de certification PEFC - le programme européen des forêts certifiées -, l'augmentation des honoraires de l'ONF et la cotisation volontaire obligatoire sur toutes les ventes de bois effectuées à compter du 1er septembre 2005. Cette dernière est d'autant moins acceptée que nous ne sommes pas assurés que l'association interprofessionnelle France Bois Forêt, que nous avons eu tellement de mal à mettre sur pied, et au profit de laquelle cette cotisation est collectée, saura utilement l'utiliser.

Nous voulons vous aider, monsieur le ministre, à construire un marché du bois dynamique, qui permette d'appuyer une industrie du bois modernisée. Je sais que vous avez cette volonté. Il faut aussi pouvoir vous en donner les moyens.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention vise, sans grande illusion, à attirer votre attention sur un problème qui, pour paraître marginal d'un point de vue financier, n'en est pas moins essentiel pour les départements du sud de la France. Il s'agit, en effet, des incendies de forêts et de la meilleure manière d'y faire face.

On s'obstine à ne pas voir qu'en séparant, d'un côté, ce qui relève de l'intervention et de ses moyens et, d'un autre côté, ce qui relève de l'aménagement de la forêt, de son entretien régulier, des moyens qu'on y consacre, on se condamne à l'impuissance.

Une amélioration des dispositifs d'alerte et d'intervention qui ne s'accompagne pas d'une politique active d'entretien et d'aménagement de la forêt est non seulement vouée à l'échec, mais, à terme, elle sera contre-productive. Le paradoxe, qu'il faudra bien un jour ne pas ignorer, est le suivant : plus un dispositif d'intervention est efficace, plus il risque, à terme, de conduire à une catastrophe.

Je m'explique.

Plus un dispositif de lutte est efficace, moins il y aura d'incendies de moyenne importance durant des années, mais les rares départs de feu qui, un jour, fatalement, ne seront pas circonscrits, seront catastrophiques. Ce n'est qu'une question de temps.

La forêt n'est pas une poudrière, un dépôt de carburant qu'il suffirait de bien garder pour être à l'abri de l'incendie. Elle est plutôt comparable à un dépôt de gaz qui fuirait. La biomasse, produite de manière continue, à défaut d'être détruite par l'homme, l'animal ou le feu, s'accumule sur place et augmente d'autant le risque.

Plus tardive sera sa destruction, plus catastrophique sera l'incendie qui ne manquera pas de se déclarer un jour. Quand ? On ne sait pas, mais tout doute est exclu. C'est d'ailleurs ce que l'on observe.

On aurait donc pu espérer que la LOLF rende plus facile une vue synthétique des interventions de l'État en matière de traitement des incendies de forêts, sous ses deux volets complémentaires, le volet aménagement et entretien de la forêt et le volet lutte proprement dite.

Constatons qu'il n'en est rien et que l'un et l'autre relèvent de missions différentes, ce qui interdit aux parlementaires non seulement toute proposition, même marginale, de redéploiement de crédits, mais aussi toute vue synthétique du problème.

Quant aux indicateurs de performances, on les cherche, et quand on les trouve, on s'interroge. Le seul indicateur retenu en matière de prévention des risques par l'amélioration forestière est « le taux d'extinction des feux de forêt naissants ». Or, il est particulièrement non pertinent. En effet, le nombre de feux naissants éteints mesure probablement l'efficacité des dispositifs d'alerte et d'intervention, mais il ne dit rien de l'efficacité des mesures prises en matière d'entretien et d'aménagements des ouvrages de défense de la forêt contre l'incendie, ou DFCI. La vitesse de propagation des incendies et leur taille seraient probablement des indicateurs plus pertinents.

Constatons aussi que les crédits de l'action n°04 « Prévention des risques et protection de la forêt », du programme 149 « Forêt », avec une dotation de 50, 7 millions d'euros, baissent de 0, 62 %. Les crédits strictement consacrés aux actions de prévention des incendies de forêts régressent aussi : 28 millions d'euros contre 30, 9 millions d'euros en 2004 et 32 millions d'euros en 2003.

Au sein de ceux-ci, le Conservatoire de la forêt méditerranéenne, créé et doté de ressources fiscales spécifiques - taxe sur les briquets et allumettes, fiscalité sur les tabacs en hausse -, après les grands incendies du début des années quatre-vingt-dix, voit ses capacités d'action s'amenuiser encore.

Certes, avec 9, 98 millions d'euros, il conserve sa dotation de 2005, mais, en euros constants, il s'agit d'une régression, surtout par rapport à 2004, puisque la loi de finances rectificative pour 2003 l'avait doté de 11 millions d'euros. Il est vrai que l'été 2003 avait été particulièrement tragique : 58 000 hectares avaient brûlé dans les départements méditerranéens, un record depuis l'instauration de la base de données Prométhée.

L'alerte passée, on en revient aux bonnes vieilles habitudes : pourquoi continuer à dépenser de l'argent pour la forêt puisqu'elle ne brûle plus ? C'est aussi une bonne vieille habitude de réduire les crédits pour les opérations non télégéniques au profit de celles qui le sont plus, comme l'a clairement montré la Cour des comptes dans son rapport de 2000.

Ainsi, en 2005, le ministère de l'intérieur a-t-il bénéficié d'une participation de 1, 3 million d'euros du Conservatoire de la forêt méditerranéenne pour le financement des SDIS. Quand on sait que, lors de sa création, le Conservatoire bénéficiait d'une dotation de 15 millions d'euros, on mesure la régression, en euros courants, et a fortiori en euros constants.

Malheureusement, le constat établi en 2000 par la Cour des comptes demeure d'actualité : « Le constat s'est donc confirmé que l'État négligeait la prévention, peu visible, et privilégiait l'achat d'un matériel » - et toutes les opérations - « destiné à une lutte active et plus spectaculaire contre les incendies. »

Compte tenu de l'enthousiasme et de l'attention que porte M. le ministre à mes propos, il me faudra sans doute les répéter l'an prochain !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Je prenais des notes pour vous répondre !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Doublet

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget que nous examinons aujourd'hui est un budget de transition. C'est la première fois, en effet, que nous débattons de l'agriculture avec une nouvelle nomenclature budgétaire issue de la LOLF.

Cette nouvelle présentation traduit la volonté du Gouvernement d'avoir une agriculture résolument tournée vers l'avenir. En outre, elle permet de mieux appréhender les différents niveaux d'aides et de pouvoir les mettre en perspective. Elle répond également au besoin d'avoir une agriculture forte et mieux à même d'affronter un environnement international et européen de plus en plus compétitif tout en répondant aux attentes de notre société.

Nous examinons donc les crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ». Cette mission est assortie de missions interministérielles, à savoir la sécurité sanitaire ainsi que l'enseignement agricole.

Je reviendrai quelques instants sur l'enseignement technique agricole. Je me réjouis, en effet, du transfert de 15, 5 millions d'euros qui a été décidé par l'Assemblée nationale. Mais cet effort n'apporte qu'une réponse incomplète aux besoins de l'enseignement technique agricole, qui s'élèvent à 29 millions d'euros.

Ainsi, l'enseignement agricole privé subit des reports de charges importants d'une année sur l'autre. De plus, il est obligé de faire l'avance, aux familles bénéficiaires, d'une partie du montant des bourses alors que celui-ci n'est pas budgété de manière suffisante.

La Haute Assemblée doit donc veiller à abonder ces crédits afin de donner tous les moyens nécessaires à ces établissements, qui représentent une voie d'insertion professionnelle remarquable compte tenu de leur rôle éducatif et d'insertion sociale.

La nouvelle présentation permet de mieux se rendre compte des cofinancements existants et de leur interpénétration, ce qui entraîne un effet de levier important. On s'aperçoit ainsi que la France continue de bénéficier des dépenses agricoles de l'Union européenne et que celles-ci augmentent, passant de 10, 3 milliards d'euros en 2004 à 10, 5 milliards d'euros en 2006.

Cet acquis fondamental doit être préservé, car l'agriculture est la seule véritable politique publique intégrée au niveau communautaire. Je me félicite à ce sujet que les financements communautaires soient garantis jusqu'en 2013, en vertu des accords de Luxembourg.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Absolument !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Doublet

Monsieur le ministre, certains de nos agriculteurs sont quelquefois découragés en raison des difficultés économiques, des coûts de production trop élevés, des prix de vente anormalement bas et d'une concurrence excessive. Aussi, le soutien à notre agriculture passe par l'augmentation des crédits aux agriculteurs en difficulté, par la majoration des prêts bonifiés de consolidation de la dette, et par la poursuite de la réforme des mécanismes de protection contre les calamités.

Il faut également optimiser les moyens visant à moderniser les exploitations. C'est le cas du plan « Bâtiment », qui poursuit son déploiement. Il en est de même du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole.

Quelques points restent à améliorer. Un effort supplémentaire doit être fait sur le renouvellement des exploitations, car les installations escomptées sont en diminution, ce qui se traduit par une baisse des crédits consacrés à la dotation aux jeunes agriculteurs, la DJA. Certaines inquiétudes se font jour également concernant la pérennisation du financement institutionnel des prestations sociales et les retraites. Monsieur le ministre, quelles pistes pouvez-vous nous indiquer pour ces différents sujets ?

Après ces considérations d'ordre général, j'aimerais maintenant aborder avec vous certains points qui me tiennent particulièrement à coeur.

Le premier, qui est important, concerne l'eau : en effet, avec le réchauffement climatique, cette ressource va avoir tendance à se raréfier. Nous en avons eu un triste aperçu cet été dans notre région Poitou-Charentes, et plus particulièrement en Charente-Maritime, département que vous connaissez très bien, monsieur le ministre.

Je regrette donc que les dotations pour l'hydraulique n'aient pas pris la mesure de l'enjeu que représente la maîtrise de l'eau. Le Sénat a adopté, dans le cadre de la loi sur l'eau, un amendement visant à la création de réserves d'eau. Il faut poursuivre dans cette direction et donner enfin à la politique de l'eau des ressources budgétaires dignes de ce nom.

Dans notre département, la production de maïs a pâti du manque d'eau et de l'interdiction faite aux agriculteurs d'arroser. Il faut donc encourager la création de retenues de substitution pour l'irrigation agricole. Mais la complexité de ce qui est demandé pour les études et la lourdeur des procédures administratives retardent fortement les réalisations, d'autant que les besoins en soutiens financiers pour réaliser ces projets sont très élevés.

Ces retenues de substitution doivent s'inscrire dans une politique plus globale avec la continuation du programme des réserves de réalimentation et la gestion raisonnée de cette ressource.

Le deuxième point qui me préoccupe est le problème des zones humides. Monsieur le ministre, nous avons eu un dialogue fructueux sur le sujet. Le nombre des agriculteurs-éleveurs dans ces zones spécifiques ne cesse de décliner et les outils agri-environnementaux utilisés actuellement - opérations groupées d'aménagement foncier ou OGAF, opération locale agri-environnementale ou OLAE, contrat territorial d'exploitation ou CTE, groupement agricole d'exploitation ou GAE, contrat d'agriculture durable ou CAD - ne suffisent pas à garantir une gestion durable de ces zones.

Il nous faut donc envisager la création d'un outil mieux adapté à cette gestion. C'est pourquoi la création d'une indemnité spéciale zone humide s'est peu à peu imposée, à l'image de ce qui se fait pour les zones de montagne avec l'indemnité compensatrice du handicap naturel.

Le principe étant acquis, il reste le problème du chiffrage d'une telle mesure et de son mode de calcul, qui doivent tenir compte des spécificités de l'exploitation des prairies permanentes et des marges économiques faibles issues de l'activité d'élevage.

Il faudra aussi déterminer les conditions d'accès à cette indemnité, car, à la différence des zones de montagne, de nombreuses exploitations ont plus de 20 % de leur surface en dehors du marais et ne sont pas situées en zones défavorisées. Où en est votre réflexion sur le sujet, monsieur le ministre ? Un calendrier avec un déroulement de la procédure est-il envisageable dans les mois qui viennent ? On ne peut laisser perdurer la situation actuelle.

Enfin, le troisième et dernier point qui me préoccupe est le problème des biocarburants. C'est un défi majeur, car ceux-ci contribueront à assurer de manière croissante notre indépendance énergétique. Nous éprouvons une certaine satisfaction en constatant que le plan de développement des biocarburants, annoncé par le Premier ministre le 13 septembre dernier, a pu être mis en place rapidement. Le programme est ambitieux, tant par les volumes de production annoncés que par les pistes d'exploitation ouvertes.

Le département de la Charente-Maritime est particulièrement intéressé par l'ouverture des appels d'offres sur les biodiesels à l'ester éthylique d'huile végétale, qui permettra le développement de nouvelles capacités au travers de procédés encore plus respectueux de l'environnement utilisant, en lieu et place du méthanol, de l'éthanol produit de l'agriculture.

La région Poitou-Charentes, première région productrice d'oléagineux, compte profiter de ces nouvelles opportunités non seulement pour les débouchés, mais également pour l'implantation d'unités de production sur son territoire.

Une usine est, en effet, en projet sur le site de La Pallice à La Rochelle, suite à une expérimentation réussie développée par un centre régional de recherche du nom de Valagro. Cette unité produira un ester éthylique de colza. Il faut ici étudier le problème de l'investissement, car le coût de production est encore deux à quatre fois plus élevé que celui des carburants fossiles.

De plus, ces produits n'étant pas des carburants, à quelle taxation seront-ils soumis ? La taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, leur sera-t-elle applicable ? Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner quelques indications sur ce dossier d'actualité ?

En conclusion, je dirai que le bilan plus que positif de l'examen des crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêts et affaires rurales » me conduit, monsieur le ministre, à vous apporter mon soutien et à voter les crédits que vous nous présentez.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bailly

Dans un contexte économique difficile et dans un cadre de maîtrise globale des dépenses publiques, vous nous présentez, monsieur le ministre, un budget de l'agriculture en hausse de 2, 5 %, supérieur à l'inflation prévisionnelle. Je m'en réjouis pour les agriculteurs.

Ceux-ci sont en effet assez anxieux du fait, d'une part, de la mise en place de la nouvelle PAC à compter du ler janvier 2006 - année test pour la mise en oeuvre des droits à paiement unique, les DPU, et l'application des bonnes conditions agricoles et environnementales -, et, d'autre part, de l'ouverture, dans une semaine, de cette fameuse et inquiétante conférence de Hong-Kong dont les résultats seront décisifs pour l'agriculture européenne.

Nous connaissons votre fermeté à ce sujet, monsieur le ministre, et nous savons que vous ferez tout pour ne pas sacrifier notre agriculture sur l'autel des éventuels gains pour l'industrie et les services. Obtenir un accord international à tout prix ne peut pas vouloir dire brader notre agriculture, qui fait vivre des centaines de milliers de personnes dans nos campagnes, qui nous assure une alimentation de qualité et autosuffisante et, en plus, qui permettra demain une importante production énergétique avec les biocarburants, comme vient de le rappeler mon collègue Michel Doublet.

Monsieur le ministre, je souhaiterais vous interroger sur quatre points.

Tout d'abord, j'aimerais que vous nous rassuriez sur l'indemnité compensatoire de handicap naturel. Il semble que sa revalorisation ne soit pas assurée cette année, alors qu'elle l'avait été chaque année depuis 2003. Cela inquiète nos exploitants de montagne, car cet apport constitue pour eux, vous le savez, un complément indispensable de revenu.

Ensuite, quelles vont être les solutions pour les éleveurs dont le CTE arrive à terme en 2005 ou 2006 ? En 2000 et 2001, de nombreux agriculteurs ont signé des contrats territoriaux d'exploitation comprenant des mesures herbagères. Dans le Jura, quinze CTE vont arriver à terme à la fin de 2005 et quatre-vingt-trois y arriveront à la fin de l'année 2006. Les agriculteurs nous interrogent sur la suite qui sera donnée.

La fusion des enveloppes consacrées aux contrats d'agriculture durables, les CAD, à la prime herbagère et plus globalement, aux mesures agri-environnementales, offrira plus de souplesse en matière de gestion des priorités. Mais les agriculteurs seront-ils assurés de l'obtention nécessaire des crédits consacrés à ces différentes politiques contractuelles ? Dans mon département, cela représente 2, 4 millions d'euros en 2006 et 2007.

De même, pourquoi est-il impossible pour une exploitation agricole en CTE de reprendre le contrat d'une autre exploitation bénéficiant de la prime herbagère agro-environnementale, ou PHAE, au cours des cinq ans, sans reverser les primes, alors que le nouvel exploitant s'engage à poursuivre le contrat du cédant ?

Je m'interroge aussi sur l'avenir de cette prime herbagère pour la période 2007-2013 ; vous en connaissez l'importance.

En 2007, les contrats PHAE arriveront à terme. Ce soutien aux systèmes herbagers constitue une part non négligeable du revenu des exploitations qu'il convient de conserver. Or les premiers projets du nouveau règlement de développement rural pour 2007-2013 ne font pas état, en tant que tel, d'un soutien aux productions herbagères. Seules sont mentionnées des mesures agro-environnementales auxquelles les États membres pourraient souscrire.

La profession agricole souhaite la reconduction des dispositifs actuels. Une remise à plat de ces derniers risque de conduire à la définition d'un cadre encore plus restrictif pour les exploitants, notamment en termes de chargement et de fertilisation. Ces deux critères étant déjà particulièrement faibles - c'est le cas, par exemple, dans mon département -, les agriculteurs ne comprendraient pas ces nouvelles exigences. Monsieur le ministre, pouvez-vous me donner des informations sur ce sujet ?

Enfin, j'en viens au problème laitier, qui a été peu abordé au cours de cette discussion. Les critères définis par l'Office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers, l'ONILAIT, pour gérer la réserve laitière départementale soulèvent des difficultés sur le terrain, d'autant plus qu'ils changent sans cesse.

Dans mon département, pour les petits producteurs installés dans un cadre sociétaire, - ce que nous souhaitons tous -, la référence laitière est actuellement calculée en divisant la référence laitière de la société par le nombre d'associés. La répartition de la référence entre les associés, au sein de la société, n'est pas prise en compte. En revanche, en cas de départ de l'un des associés, c'est bien sa propre référence qui sera prise en compte et non la moyenne arithmétique de la référence laitière de la société par associé.

Dès lors, pourquoi ne pas considérer comme petits producteurs les membres de la société produisant moins de 100 000 litres de lait ? Qu'en est-il dans les autres départements ?

Les organisations professionnelles souhaiteraient que ce critère soit assoupli afin que la Commission puisse prendre en compte des éléments particuliers, sans avoir à en référer systématiquement à l'ONILAIT, ce qui prend en outre beaucoup de temps.

Plus globalement, le problème laitier faisait déjà partie de mes préoccupations l'an dernier, car les inquiétudes des producteurs demeurent, malgré la relative stabilisation de la baisse des prix et l'accord obtenu au moment du Salon de Rennes en septembre dernier. Dans mon département, par comparaison avec les autres productions, c'est toujours le secteur laitier qui affiche les revenus les plus faibles, malgré les contraintes qui pèsent sur la production laitière et en dépit de l'appellation d'origine contrôlée dont elle bénéficie.

Le compromis de Rennes prévoyait de reprendre la discussion à partir de janvier 2006 pour réguler le marché du lait de façon pérenne. Où en est-on à ce sujet ? N'oublions pas que le nombre de producteurs laitiers a beaucoup diminué et continue de baisser en raison des contraintes que connaît cette filière qui ne peut plus se permettre de supporter des baisses de prix.

Monsieur le ministre, les grandes négociations que vous aurez à aborder l'année prochaine, aux niveaux européen et mondial, réclameront toute votre vigilance. Je souhaite que vos collègues des finances ne vous fassent pas perdre trop de temps avec des restrictions et des gels de crédits en 2006 !

Cela étant, vous avez toute ma confiance et, dès ce soir, je voterai votre projet de budget.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goulet

M. Daniel Goulet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n'ai aucune réserve sur aucun des différents aspects de votre projet de budget

M. Gérard Delfau s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goulet

Je souhaite aborder, à mon tour, ce sujet, qui a été évoqué par la plupart des intervenants qui m'ont précédé, sans faire de distinction quant au bien-fondé des deux formes d'enseignement, privé et public, sans chercher à les opposer ou à les mettre en concurrence, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goulet

...connaissant leurs difficultés spécifique, et en soulignant au contraire leur complémentarité à bien des égards.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goulet

Sachant que certains de nos amis se sont dépensés sans compter dans cette enceinte pour la cause de l'enseignement public, vous ne serez pas surpris, monsieur le ministre, que l'ancien enseignant de l'école privée que je suis vous entretienne de l'enseignement privé.

Par une longue correspondance, très explicite, je vous ai informé, voilà quelque temps, d'un certain nombre de points importants concernant une situation que je vis quotidiennement en tant qu'administrateur d'un certain nombre de ces établissements.

Vous avez bien pris la mesure du rôle irremplaçable et incontournable que jouent l'enseignement agricole et toutes les formations au profit de notre agriculture et, au-delà, du monde rural dans son ensemble, qui s'implique de plus en plus sur notre territoire.

Grâce à la formation dispensée dans ces établissements, dont c'est la singulière vocation, nous serons en mesure de préparer les jeunes à affronter leurs problèmes particuliers aujourd'hui et, surtout, demain.

En effet, c'est dans les établissements privés que s'apprécie le meilleur taux d'insertion scolaire, puis professionnelle et, pour tout dire, sociale, grâce à des pédagogies adaptées et individualisées selon des pratiques modulées en alternance, formules dont le Gouvernement s'aperçoit aujourd'hui qu'elles constituent les seuls remèdes aux difficultés d'apprentissage et d'insertion pour les jeunes en mal de mieux être et d'avenir.

Pour parler de ce que je connais à peu près bien - mais la situation doit être identique dans d'autres régions -, je prendrai l'exemple de la Normandie.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goulet

Notre rapporteur n'y sera pas indifférent, puisque c'est mon voisin dans l'Eure !

Le Conseil régional de l'enseignement agricole privé coordonne un large éventail de formations, allant des métiers de l'agriculture à ceux de l'aménagement de l'espace rural, dans des domaines aussi divers que les travaux forestiers, le bois, l'horticulture, les espaces verts, l'aide aux personnes, la commercialisation, la promotion et la qualité des produits, les laboratoires, les contrôles. Toutes ces formations, qui préparent à l'emploi de demain, se trouvent aujourd'hui dans une situation de crise, sans avoir de perspective d'en sortir, à moins que vous ne nous apportiez de bonnes nouvelles dans votre réponse tout à l'heure, monsieur le ministre ; en disant cela, je ne plaisante pas, je vous l'assure !

Alors que tous les établissements sans exception et, dans l'Orne, parmi d'autres, les lycées de Briouze, de Nonant-le-Pin, de Giel, de Sai, de Champthierry - qui seront d'ailleurs très heureux de figurer dans le-, ont passé des contrats avec l'Etat, ce dernier se place en pleine contradiction avec ses engagements et avec ses objectifs véritables qui consistent à assurer la pérennité des emplois, à garantir aux jeunes des formations en adéquation parfaite avec leurs aspirations pour leur permettre d'exercer les métiers de la vie active.

C'est ainsi - à moins que vous me démentiez, je le répète -, que des décisions d'amputation de moyens importants sont transmises aux établissements concernés par vos propres relais administratifs - je vous rends attentif à ce fait, monsieur le ministre -, à savoir les directions régionales de l'agriculture, et contredisent, en réalité, les bonnes résolutions et les promesses de rattrapage financier que l'État annonce par ailleurs. Ce n'est plus acceptable !

En fait, nous avons le sentiment d'une baisse caractérisée des dotations, aux établissements, du Conseil national de l'enseignement agricole privé, alors que les besoins sont de plus en plus importants et justifiés.

En d'autres termes, cela signifierait la suppression inavouée de plusieurs centaines de postes d'enseignant, c'est-à-dire la fin des classes de quatrième et la réduction de la filière de service en milieu rural, alors que trois cents postes d'enseignant font déjà défaut sur tout le territoire.

Bien que les dispositions d'affectation qui devraient être confortées fassent l'objet de contrats, pourquoi les frais de remplacement des personnels et de stage des élèves ne sont-ils plus pris en compte depuis deux ans ?

Nous risquons d'entrer dans un cycle de régression de la qualité de l'enseignement, dans un esprit que ni vous ni nous ne voulons voir se développer, car il porterait atteinte à la confiance réciproque des agriculteurs et des services dans les départements.

Je vous laisse donc, monsieur le ministre, face aux conséquences fâcheuses qu'il nous faudrait tirer d'une situation qui deviendrait intolérable, ce que personne ne souhaite !

Je vous demande donc de nous donner des indications claires, qui soient autant d'assurances face aux préoccupations vives et réelles des élèves, de leurs parents, des personnels, des directions d'établissements de formation, mais aussi des élus locaux, qui sont très intéressés par le rôle et les actions de ces établissements d'enseignement dont ils sont très proches.

Afin que je puisse exprimer sans réserve mon vote, que je souhaite favorable, soyez sans ambiguïté, vous aussi, monsieur le ministre, dans vos réponses sur cet aspect de votre budget, auquel vous attachez une importance majeure, nous en sommes convaincus, aussi grande que l'intérêt que nous portons au reste de votre budget, sur lequel vous êtes assuré de notre soutien.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Fournier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2006, dans sa partie agricole, prévoit un budget de 4, 98 milliards d'euros, en augmentation de plus 2 %, soit 1, 7 % des dépenses du budget de l'Etat.

Ce budget de l'agriculture intervient une nouvelle fois dans un contexte budgétaire contraint et ce, après une réalisation du budget pour 2005 rendue difficile par des coupes plus ou moins importantes dans certains crédits.

Avant tout, je tiens à saluer les efforts constants du Gouvernement en direction du monde agricole, qui tendent à travers plusieurs textes, notamment la loi sur le développement des territoires ruraux ou le projet de loi d'orientation agricole, à soutenir et à développer notre agriculture.

Le projet de budget qui nous est présenté aujourd'hui contient plusieurs priorités qui sont soutenues par des augmentations de moyens substantielles auxquelles je ne peux évidemment qu'adhérer.

Je me félicite de la hausse significative des dotations du plan « bâtiments d'élevage » et du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole, qui progressent respectivement de 14 % et 49 %. Ce sont des indicateurs déterminants de la volonté d'investissement des éleveurs.

Dans mon département, ces deux dossiers sont bien gérés grâce à l'action concertée de l'Etat, de la direction départementale de l'agriculture et de la forêt, du conseil général de la Loire et de la chambre d'agriculture qui accomplissent, en commun, un travail de qualité. Le déblocage des crédits, suite à une avance de 2006 sur 2005 des crédits d'Etat, permet de satisfaire tous les dossiers de plus de 30 000 euros d'investissements, hors stockage de fourrage, avec une liste d'attente raisonnable, inférieure à six mois.

L'affectation, dans les mesures agro-environnementales, d'une dotation de 3 millions d'euros pour les agriculteurs qui souhaitent promouvoir et développer un système d'agriculture raisonnée me semble être une très bonne chose. Cela devrait leur permettre de mieux s'adapter aux très importantes évolutions réglementaires liées aux nouvelles exigences environnementales. Ils pourront, ainsi, mieux se préparer aux grands défis de demain.

Les crédits destinés aux agriculteurs en difficulté connaissent une augmentation extrêmement importante. Le dispositif « agriculteurs en difficulté », dit AGRIDIFF, qui permet une aide momentanée, constitue à mes yeux un outil important de régulation des crises agricoles. Il est doté d'un montant de 10 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement. Selon le rapport de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture, l'APCA, cette dotation « permet de réaliser des analyses et des suivis, soit 302 dossiers en 2005, ainsi que des plans de redressement, soit 1 596 dossiers en 2005 ». Par ailleurs, le fonds d'allégement des charges financières est doublé, passant de 2, 4 millions d'euros à 5 millions d'euros.

A contrario, je note une diminution des crédits consacrés à la dotation aux jeunes agriculteurs. Je m'en inquiète fortement, monsieur le ministre, car mon département a connu un rajeunissement sensible des exploitants lié à la mise en place d'une politique d'incitation à l'installation des jeunes : dans la Loire, 29 % de chefs d'exploitation sont âgés de moins de quarante ans.

Cette question est primordiale, car, à travers eux, c'est aussi l'attractivité de nos territoires ruraux et l'image de toute une profession qui se jouent.

Nous attendons beaucoup de l'adaptation des prêts bonifiés aux jeunes agriculteurs, qui devrait permettre, comme vous l'avez annoncé, monsieur le ministre, de baisser les taux d'intérêt dès le 1er janvier prochain.

En revanche, les engagements ne sont pas concrétisés budgétairement en matière d'indemnités compensatoires aux handicaps naturels et d'hydraulique : création de retenue de taille modeste, pour 20 millions d'euros. Je soutiendrai à ce sujet l'amendement de mon collègue Jean-Paul Amoudry, qui vise à relever le montant des crédits affectés à leur financement.

De plus, nous assistons à la diminution des crédits affectés aux contrats d'agriculture durable, les CAD. En outre, les dotations 2006 pour la prime herbagère agrienvironnementale, la PHAE, ne permettront pas de tenir les engagements prévus. La dotation pour les CAD prévoit quant à elle 6 000 contrats, soit un nombre inférieur au nombre des contrats territoriaux d'exploitation, les CTE, arrivant à échéance en 2006.

Concernant le volet social, le fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, le FFIPSA, connaît des difficultés structurelles. À l'occasion de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, M. Philippe Bas a été rassurant et a souligné que les prestations sociales agricoles seront servies l'année prochaine à tous les exploitants agricoles. Nonobstant, nous devons nous attacher à trouver des mesures de financement pérennes ; elles se justifieraient d'autant plus que les agriculteurs acquittent leurs cotisations sociales à parité avec les assurés sociaux des autres régimes.

Pour ce qui est des options fiscales, la loi prévoit un allégement de 20 % de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, la TFNB. Lors du débat sur le budget des recettes des collectivités locales, le 29 novembre dernier, j'ai indiqué à M. Jean-François Copé que, sur le fond, je ne trouvais pas cette réforme opportune, car, si elle est favorable aux agriculteurs - ce dont je me félicite -, elle pourrait être lourde de conséquences pour les ressources des communes rurales.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Fournier

J'ai été satisfait de la réponse du Gouvernement, dont un amendement prévoyant que l'État compensera les pertes de recettes supportées par les communes et les EPCI à fiscalité propre en raison de l'exonération de TFNB a été adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Fournier

À compter de 2007, cette compensation évoluera chaque année d'un coefficient égal au taux de croissance de la dotation globale de fonctionnement. Les engagements consentis par le Gouvernement au Sénat devraient satisfaire les uns et les autres.

Enfin, je ferai une dernière remarque sur les problèmes financiers que rencontrent les établissements d'enseignement agricole publics et privés et sur leurs incidences sur l'avenir des formations. Trois grands lycées agricoles privés de la Loire m'ont fait part de leur préoccupation et de leur incompréhension. En effet, alors que le nombre des demandes d'admission y est en hausse depuis plusieurs années, ils sont obligés de refuser des élèves, faute de places et de moyens. Ils attendent des subventions dont le paiement a pris du retard. Par ailleurs, on constate l'absence de crédits pour les bourses versées aux stagiaires et pour la fourniture de manuels scolaires, ainsi que la suppression des classes de quatrième et de troisième.

Lors du vote du budget à l'Assemblée nationale, monsieur le ministre, vous avez pris en compte les inquiétudes des Maisons familiales et rurales en transférant 15, 5 millions d'euros de crédits vers le programme « Enseignement technique agricole ». Jeudi dernier, dans le cadre de l'examen de la mission « Enseignement scolaire », mon collègue Jean-Claude Carle avait déposé un amendement, que j'ai cosigné, visant à un abondement complémentaire des crédits du titre II du programme « Enseignement technique agricole ». Il a été retiré, parce qu'il a été satisfait par le Gouvernement. Toutes ces mesures vont dans la bonne direction, monsieur le ministre.

Pouvez-vous aujourd'hui nous rappeler très clairement les efforts consentis par le Gouvernement et les moyens obtenus pour l'enseignement agricole, afin de rassurer tous les membres de cette communauté éducative ?

Monsieur le ministre, vous avez bien sûr mon soutien, et, de nouveau, je vous remercie très sincèrement de l'attention que vous portez au monde agricole et au développement de nos territoires ruraux.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

M. Adrien Gouteyron remplace M. Guy Fischer au fauteuil de la présidence.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai récemment présenté devant vous le projet de loi d'orientation agricole, rapporté par Gérard César, Joël Bourdin étant rapporteur pour avis de la commission des finances.

Ce texte trace des perspectives pour l'agriculture française dans les quinze prochaines années, dans un cadre international et communautaire en évolution. Il offre au secteur agricole une ambition et des moyens, et, conformément au cap fixé par le Président de la République, doit permettre de bâtir une « agriculture économiquement forte et écologiquement responsable ».

La commission mixte paritaire constituée pour examiner ce projet de loi doit se réunir cette semaine, et c'est le 22 décembre prochain que la Haute Assemblée pourra se prononcer définitivement.

Le projet de budget que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui donne donc dès 2006 les moyens financiers nécessaires pour s'inscrire dans le cadre tracé par cette loi d'orientation.

Nous sommes également, nombre d'entre vous l'ont rappelé, dans la dernière ligne droite des négociations de l'OMC, une semaine avant le sommet de Hong-Kong. Naturellement, cette échéance est très importante pour la France, et, si nous sommes très attachés au multilatéralisme, nous n'entendons pas pour autant que le cycle de Doha remette en cause les principes fondateurs de la PAC telle qu'elle résulte des réformes de 2002 et de 2003. Notre détermination est totale, et le Premier ministre l'a répétée aujourd'hui même, lors du déjeuner, quand il a reçu à Matignon Peter Mandelson, commissaire européen au commerce.

Notre action a permis de rassembler autour de nos thèses un nombre important de nos partenaires européens - nous ne sommes donc pas isolés, bien loin de là - et d'enrayer une nouvelle dégradation de l'offre européenne qui aurait pu être de nature à remettre en cause la réforme de la PAC de 2003 et la préférence communautaire. Mais autant vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous restons particulièrement vigilants !

Nous sommes fermes sur ces positions, d'abord parce que l'agriculture est un secteur stratégique pour notre pays, bien sûr, y compris pour ses industries agroalimentaires, mais aussi parce que, s'agissant des enjeux européens, il nous faut mettre en oeuvre parallèlement, avec pragmatisme et progressivité, la réforme de la PAC de 2003, qui est pleinement engagée depuis 2005.

Vous le savez, sans la politique agricole commune, et c'est certainement pour cette raison qu'elle est parfois attaquée, l'agriculture française n'en serait pas là où elle en est aujourd'hui. La PAC, je le rappelle, représente 8 milliards d'euros d'aides directes annuelles pour la « ferme France » au titre du premier pilier, et 2 milliards au titre du deuxième, et ce jusqu'en 2013.

J'ouvre ici une parenthèse afin de répondre à Gérard Cornu au sujet des dates de paiement des aides. La France a toujours eu pour principe de payer au premier jour permis, soit désormais le 1er décembre. Je souligne que ce n'est pas une obligation, mais bien un choix politique national en faveur de notre agriculture.

Nous pouvons au demeurant obtenir des dérogations lorsque des conditions exceptionnelles exposent les agriculteurs à de graves difficultés financières ; ces dérogations ne peuvent toutefois pas porter sur plus de 50 % des crédits de l'exercice en cours. C'est ainsi que cette année, parce que nous souhaitions aider les filières concernées, nous avons obtenu un paiement anticipé de l'aide laitière au 16 octobre et de la prime à la brebis et à la chèvre et de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes au 1er novembre.

La politique agricole qui est conduite articule les trois niveaux : international, communautaire et national. Il faut que nous soyons bons à chacun de ces échelons pour que l'agriculture française reste sur le podium mondial, qui, là encore, ne compte que trois marches.

Le projet de budget pour 2006 a été établi de façon à donner des moyens dès l'année prochaine et à poursuivre l'adaptation progressive de l'agriculture française selon une triple exigence, qui, je crois, est partagée sur toutes les travées de la Haute Assemblée.

Il nous faut d'abord avoir une agriculture forte, alors que l'environnement international est de plus en plus compétitif : vous aviez raison, monsieur Courteau, de souligner que ce dernier point est particulièrement bien illustré par le domaine viticole. Nous devons également mettre en oeuvre la politique agricole commune rénovée. Enfin, il est indispensable de répondre aux attentes de plus en plus larges de nos concitoyens en matière de protection de l'environnement et de qualité sanitaire des aliments, attentes que M. Jacques Blanc a évoquées tout à l'heure.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez d'autant plus que vous êtes en train d'examiner l'ensemble du projet de loi de finances : nous sommes dans un contexte difficile de contrainte budgétaire. Malgré cela, l'effort en faveur de l'agriculture et de la pêche est maintenu puisque le projet de budget du ministère s'élève à 5 011 millions d'euros en crédits de paiement, soit une hausse de 2, 5 %. Cette enveloppe, dans le cadre de la LOLF - à laquelle, je le reconnais, nous devons encore nous habituer, parce que dans un premier temps nous perdons tous un peu nos repères -, regroupe les moyens attribués à quatre missions, dont trois sont interministérielles. Vous vous êtes déjà prononcés sur l'enseignement agricole, et vous examinerez ce soir la mission « Sécurité sanitaire ». J'évoquerai donc principalement la première mission : « Agriculture, pêche et affaires rurales », qui représente 2 951 millions d'euros.

Je rappellerai toutefois que le total des concours publics à l'agriculture représentent 29 milliards d'euros : près de 10 milliards d'euros de financements européens, que j'ai déjà mentionnés ; 12, 5 milliards d'euros pour la protection sociale agricole, dossier très important que beaucoup d'entre vous ont évoqué ; enfin, et nombre d'entre vous l'ont abordé aussi, notamment M. Amoudry, les aides des collectivités locales.

Nous avons donc bâti ce budget suivant quatre orientations, dans le respect de l'esprit de la loi d'orientation agricole qui va voir le jour sous peu : il s'agit de sécuriser les revenus des exploitants ; de stimuler l'initiative et l'innovation, notamment à travers l'enseignement agricole et la recherche ; de développer l'agriculture en cohérence avec les attentes de la société dans les domaines de l'aménagement du territoire, du respect de l'environnement et de la sécurité de l'alimentation ; enfin, d'adapter l'organisation de l'administration pour que le ministère soit en mesure d'accompagner ces mutations décisives de l'agriculture.

Notre première ambition est donc d'avoir une agriculture forte, ce qui passe d'abord, soyons clairs et simples, par la garantie du revenu des exploitants.

L'agriculture est confrontée à des aléas spécifiques, climatiques et économiques. Dans la continuité des actions engagées en 2005 par Hervé Gaymard, notamment l'assurance-récolte, le projet de budget répond à ces enjeux. J'ajoute que la politique de maîtrise des risques intervient évidemment en complément des accords négociés avec l'Union européenne quant au maintien des aides et à leur découplage partiel.

Vous savez que le Premier ministre m'a demandé de déposer d'ici à quelques semaines un mémorandum pour réfléchir à l'évolution que nous souhaitons pour la PAC, en particulier en matière de gestion des risques, et j'espère qu'un très grand nombre d'États de l'Union joindront leur signature à la mienne, ce qui donnera à ce document la plus grande force politique possible.

Pour répondre à ces crises qui sont le lot des agriculteurs, le projet de budget pour 2006 prévoit une majoration des crédits destinés aux agriculteurs en difficulté : cette ligne, qui avait eu tendance à baisser dans les budgets précédents, est dotée de 10 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Des prêts bonifiés de consolidation de dette et des prêts « calamité » sont également prévus, pour un montant correspondant à environ 220 millions d'euros de moyens d'intervention, sous forme d'enveloppe de prêts.

Nous poursuivons la réforme des mécanismes de protection contre les calamités agricoles, point que nous avons largement abordé dans la discussion du projet de loi d'orientation agricole : la dotation du dispositif d'incitation à l'assurance-récolte - lequel, expérimenté en 2005, a été un formidable succès sur le terrain - progresse de 100 %, atteignant 20 millions d'euros en 2006. Je souligne, monsieur Soulage, car je vous sais très attentif à cette question, que la dotation inscrite dans le projet de loi de finances pourra être abondée par le fonds national de garantie des calamités agricoles.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

En outre, j'accueillerai favorablement tout à l'heure l'amendement proposé par le président de la commission des affaires économiques, Jean-Paul Émorine.

L'assurance-récolte poursuit son développement parallèlement au dispositif traditionnel du fonds des calamités agricoles, qui a été fortement mobilisé, notamment, pour indemniser les conséquences de la très grande et très grave sécheresse de l'été 2005.

L'objectif du Gouvernement est clair, et la loi d'orientation agricole le précise grâce à l'amendement de Gérard César et à la commission des finances du Sénat : nous souhaitons développer de nouveaux produits d'assurance dans tous les secteurs et dans toutes les exploitations qui ne bénéficient pas à ce jour d'une offre assurantielle en matière de calamités naturelles.

Je suis donc disposé à réaffecter, comme Jean-Paul Emorine l'a demandé, 2, 5 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement en faveur de ce dispositif. En complément, l'épargne personnelle, dans le cadre de la déduction pour aléas, est favorisée grâce à la revalorisation du plafond de déduction.

S'agissant des charges des agriculteurs, le projet de budget pour 2006 prévoit de nouvelles marges de manoeuvre pour les exploitants.

Les charges ne sont en effet pas seulement de nature sociale ; il y a également la hausse des carburants. Telle est la raison pour laquelle à Rennes, lors du salon de l'élevage, le Premier ministre a annoncé des aides pour faire face à la hausse des prix des carburants ; elles sont inscrites dans le projet de loi de finances rectificative.

Par ailleurs, le fonds d'allégement des charges financières est doublé, sa dotation passant de 2, 4 millions d'euros en 2005 à 5 millions d'euros en 2006.

Je précise également à M. le président Emorine et à M. Collin - je sais qu'un débat a eu lieu entre les commissions à ce sujet -, que la mesure d'exonération de 20 % sur la taxe sur le foncier non bâti est mise en oeuvre pour bénéficier aux exploitants et à eux seuls.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

En effet, l'article 9 du projet de loi de finances dispose, conformément au souhait de tous, que le propriétaire devra rendre cet avantage au fermier, sous forme d'une réduction des charges de fermage.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Monsieur le président de la commission des finances, vous avez également alerté le Gouvernement - vous l'aviez déjà fait l'an passé quand le Président de la République s'était exprimé sur ce sujet à Murat - sur la compensation financière des collectivités, et je me réjouis que vous ayez adopté l'amendement présenté par mon collègue Jean-François Copé.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Je m'en doute !

Cet amendement indexe cette compensation sur l'évolution de la dotation globale de fonctionnement : cette adaptation préserve et garantit l'autonomie financière de nos communes, à laquelle tous les sénateurs, comme tous les élus, sont très légitimement attachés.

Les producteurs de fruits et légumes ont enregistré dans diverses productions de très importantes difficultés de commercialisation de leurs produits, comme certains d'entre vous l'ont indiqué. Ces difficultés se poursuivent dans de nombreuses régions : les Pays de la Loire, la Provence, la Côte d'Azur, le Languedoc-Roussillon.

Sur la base des attentes formulées par les professionnels concernés, et après avoir rencontré de nombreux parlementaires des départements connaissant des difficultés, nous avons mis en place un plan de soutien doté de 15 millions d'euros de crédits, une enveloppe de prêts bonifiés à hauteur de 25 millions d'euros.

Je considère que les premiers efforts doivent être complétés, et je finalise actuellement l'élaboration de mesures structurelles nouvelles qui seront annoncées très prochainement.

J'ai également saisi la Commission européenne pour que des dispositions soient prises, permettant à l'avenir d'assurer une surveillance renforcée des importations - en effet, cette année a été difficile à cet égard - et le déclenchement d'une clause de sauvegarde sur les pommes, car c'est dans ce domaine que nous avons actuellement les principales difficultés.

Certains d'entre vous ont évoqué les difficultés du secteur laitier que tous les élus connaissent bien ; les départements de l'Ouest ont rencontré un certain nombre de problèmes à cet égard. Nous suivons avec attention les avancées de la mission que j'ai confiée à M. Benard, qui a déjà conduit une mission de médiation sur le prix du lait. Je souhaite, bien sûr, que cette mission se poursuive et que nous ayons, en 2006, un prix du lait qui soit clair.

Je précise également, puisque certains d'entre vous, notamment M. Raoult, ont évoqué les difficultés de financement de l'entreprise Nazart dans le département de l'Ille-et-Vilaine, que nous venons de signer des financements en faveur des producteurs fragilisés, sous la forme d'attribution de sommes qui sont compatibles avec les aides de minimis.

J'évoquerai maintenant les innovations visant à renforcer la compétitivité de l'agriculture et du secteur agroalimentaire.

Des mesures innovantes sont programmées pour les industries agroalimentaires - je rappelle que ces dernières représentent 12 % à 13 % des emplois dans notre pays -, et tout particulièrement pour les petites et moyennes entreprises évoquées par M. Piras.

Bien évidemment, nous maintenons les outils traditionnels d'aide à l'investissement. De nouvelles opérations seront encouragées à hauteur de 25 millions d'euros d'autorisations d'engagement, auxquelles s'ajoutera un financement communautaire. Dans le cadre du programme national de développement des industries agroalimentaires initié par Nicolas Forissier, 5, 5 millions d'euros seront également consacrés à de nouveaux outils et aux pôles de compétitivité que certains d'entre vous ont évoqués - ils sont très importants sur tout le territoire -, en liaison avec la banque de développement des petites et moyennes entreprises.

MM. Beaumont et Paul Girod, notamment, ont évoqué les biocarburants. Ces derniers représentent un formidable débouché pour l'agriculture et un enjeu pour le respect des accords de Kyoto. Notre objectif est clair : il s'agit de multiplier par six les surfaces d'ici à 2010. Et nous nous en donnons les moyens, puisque le Premier ministre a fixé de nouveaux objectifs d'incorporation : 5, 75 % en 2008, 7 % en 2010 et 10 % à l'horizon 2015. Monsieur César, ce point a été également introduit dans le projet de loi d'orientation agricole sous forme d'amendement.

Pour la réalisation de l'objectif 2008, un appel à candidatures portant sur 1, 8 million de tonnes de biocarburants a été publié le 25 novembre dernier. Il permettra, dès le début de l'année prochaine, la délivrance d'agréments aux opérateurs. Avec François Loos, nous avons reçu également la profession agricole, les distributeurs de carburants, les fabricants d'automobiles ; il existe une véritable volonté de l'ensemble des partenaires d'avancer dans tous ces domaines, qu'il s'agisse de l'utilisation du diester ou de l'éthanol.

Notre deuxième ambition est l'adaptation de l'agriculture, pour que cette dernière réponde encore mieux aux attentes de la société.

Nous devons améliorer notre effort en faveur de l'environnement. Cela signifie la modernisation des équipements des exploitants en soutenant l'investissement, comme l'a souligné M. Fournier. Le plan « bâtiment » se poursuit en 2006, avec une dotation de 72 millions d'euros en autorisations d'engagement, en progression de près de 15 % par rapport à 2005. Grâce au cofinancement communautaire, c'est en fait le double qui est mobilisé à ce titre. Les collectivités territoriales abonderont aussi ce dispositif, ce dont je les remercie. Je rassure d'ailleurs M. Bourdin : le PMPOA est doté de 90 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 40 millions d'euros en crédits de paiement. Il concerne surtout les régions les plus exposées aux risques de pollution. Les dotations budgétaires - je l'indique parce que c'est nouveau -sont pour la première fois inscrites dès le projet de budget initial pour en garantir le bon financement.

Mmes Boyer et Didier, M. Delfau et d'autres intervenants encore ont évoqué la pêche. Des efforts spécifiques sont nécessaires à cet égard. Un conseil des ministres « pêche » se réunira à partir du 20 décembre ; il sera difficile, car la Commission vient de faire un certain nombre de propositions qui sont dures pour les pêcheurs, lesquels ont d'ailleurs manifesté au cours des derniers jours. Toujours est-il que nous allons nous battre à l'occasion de ce conseil des ministres.

Dans le projet de budget pour 2006, nous améliorons la sécurité des pêcheurs avec 32 millions d'euros, dont 3 millions d'euros consacrés à la régulation quantitative de la flotte et 5, 5 millions d'euros à l'amélioration qualitative de cette dernière.

Nous allons également travailler sur les droits à produire. Comme M. Trémel l'a évoqué, tout cela sera repris dans le plan d'avenir de la pêche que j'ai annoncé à Nantes en octobre dernier et que je souhaite traduire sous la forme d'un projet de loi d'orientation pour la pêche au cours de l'année 2006. Je souhaite en tout cas que ce texte soit préparé pour être inscrit le moment venu à l'ordre du jour du Parlement.

Nous devons également préserver nos territoires et maintenir nos activités agricoles.

La dotation de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes progresse de 3 millions d'euros. Une nouvelle mesure est proposée aux agriculteurs qui s'engagent dans une démarche de développement durable. Dotée de 1, 5 million d'euros dès 2006, elle complète les dispositifs préexistants notamment dans le domaine de l'agro-environnement avec, là encore, un cofinancement communautaire.

Je précise à MM. Bailly et Lejeune que les préfets auront la possibilité d'ouvrir la prime herbagère agri-environnementale aux bénéficiaires des CTE herbagers.

Mme Létard et M. Doublet ont évoqué les zones humides et l'éventualité de mesures particulières, à l'instar de l'expérimentation menée dans le marais poitevin. Un amendement a été examiné à l'occasion de la discussion du projet de loi d'orientation agricole, et nous réfléchirons, monsieur Doublet, dans le cadre du prochain programme de développement rural, à la mise en oeuvre d'un dispositif spécifique d'ICHN adapté aux zones humides. Ce dispositif, qui est en cours d'évaluation par les inspections générales des ministères de l'agriculture et de l'environnement, pourrait concerner le Valenciennois, les marais charentais et toutes les zones de marais de notre pays.

MM. Jacques Blanc, Pastor, Murat et Amoudry m'ont interrogé sur la montagne. Les indemnités compensatoires de handicap naturel ont fait l'objet de revalorisations depuis 2002. Nous sommes maintenant arrivés à un total de crédits de 510 millions d'euros, ce qui signifie que le montant des ICHN - part nationale et part communautaire - a été revalorisé de près de 30 %. Le projet de budget pour 2006, en hausse de 7 millions d'euros, consolide la revalorisation accordée cette année de 10 % du différentiel d'indemnisation des vingt-cinq premiers hectares par rapport aux hectares suivants. Cet effort doit être poursuivi, et nous y reviendrons dans un instant à propos d'un amendement.

M. Gaillard, notamment, a évoqué, toujours avec talent, la question de la forêt. J'ai essayé, monsieur le sénateur, de limiter l'impact de la régulation budgétaire en 2005. Vous connaissez bien le fonctionnement de l'État, et vous savez donc que la baisse de crédits de la mission n'est qu'apparente, car il y a un changement du périmètre budgétaire consacré à la forêt : d'une part, 8, 3 millions d'euros d'autorisations d'engagement qui étaient confiés au préfet des régions Auvergne et Limousin ont été transférés au ministère de l'intérieur, mais sont toujours destinés aux interventions forestières ; d'autre part, dans le souci de maximiser les retours communautaires dans le cadre du second pilier, le cofinancement de l'Union européenne passe de 40 % en 2005 à 50 % en 2006. Le total des crédits destinés à la reconstitution forestière après l'ouragan de 1999 est donc constant, grâce à cette stricte compensation.

M. Collombat a évoqué également ce sujet à propos de la défense de la forêt. Les crédits forestiers nationaux et communautaires augmentent de 1 %. Il faudrait certes faire mieux, car, si l'on veut protéger la forêt, la forêt méditerranéenne en particulier, des efforts d'entretien toujours supplémentaires sont nécessaires.

J'évoquerai brièvement la protection sociale agricole. De nombreuses questions ont été posées sur l'équilibre du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, le FFIPSA, qui s'est substitué au BAPSA, le budget annexe des prestations sociales agricoles.

Je voudrais d'abord dire de manière très solennelle devant la Haute Assemblée qu'il n'y a aucun risque de non- versement des prestations sociales des non-salariés agricoles. Comme c'est le cas depuis plus de quarante ans pour les régimes agricoles, et pour l'ensemble des régimes de base, les engagements pris seront tenus par la collectivité nationale.

Cependant, il est exact que, du fait de la suppression du BAPSA, des difficultés sont apparues en 2004 et en 2005 quant à l'équilibre comptable de ce régime. Jean-François Copé, Philippe Bas et moi-même sommes bien conscients de la nécessité pour nous de trouver des solutions en vue d'un équilibre pérenne.

Je vous indique d'ores et déjà que le Gouvernement a déposé un amendement dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2005, afin de transférer à l'État, avant le 31 décembre 2005, 2, 5 milliards d'euros d'emprunt contractés pour le compte du FFIPSA, ce qui correspond à l'annonce que Jean-François Copé avait faite lors de la discussion budgétaire et aux engagements que j'ai pris devant le Sénat lors de l'examen du projet de loi d'orientation agricole.

S'agissant du ministère de l'agriculture lui-même, outil au service des agriculteurs, nous prenons part à la réforme de l'État en essayant de rationaliser nos moyens en personnels, leur adaptation aux missions prioritaires, et surtout en ayant la volonté de toujours simplifier les relations entre l'usager et l'administration.

Grâce aux départs à la retraite, nous aurons des marges de manoeuvre pour nos effectifs. Deux cents départs à la retraite ne seront pas remplacés. La maîtrise des effectifs est rendue possible grâce à des gains de productivité et grâce à une politique de simplification administrative et d'allégement de la réglementation.

S'agissant de la gestion du projet de budget pour 2006, je précise devant le président de la commission des finances et le rapporteur spécial que nous l'avons souhaitée la plus déconcentrée possible : 2, 4 milliards d'euros seront gérés localement.

Nous avons mis en place des responsables de budgets opérationnels au niveau des directions régionales de l'agriculture et de la forêt et des directions départementales des services vétérinaires des chefs-lieux de région, pour avoir une approche territoriale plus efficace.

L'enseignement technique agricole, dont vous avez déjà voté le budget, s'inscrit dans cette nouvelle approche. Son enveloppe est en hausse de 5 % et, au cours des discussions sur les crédits de la mission, deux abondements de 15, 5 millions d'euros et de 15 millions d'euros ont été votés. Je remercie mon collègue Gilles de Robien qui a permis la réalisation de ces mouvements.

Comme l'ont dit Mme Gousseau ainsi que MM. Fournier et Goulet, cet enseignement est de qualité ; il participe, avec des résultats exceptionnels - il y a en effet de vrais débouchés -, à l'intégration professionnelle des jeunes. Ces crédits doivent donc être utilisés dans un esprit d'équité entre les diverses familles de l'enseignement : l'enseignement public, l'enseignement privé, les maisons familiales rurales et l'aide sociale aux élèves.

Je précise à M. César que les redéploiements qui seront réalisés pour permettre ces financements porteront sur le PMPOA et les offices agricoles.

J'ajoute, à l'attention de MM. Gérard Le Cam et Jean-Paul Amoudry, que les stages des jeunes seront bien financés.

J'en viens à l'organisation des établissements publics. Les réformes sont en cours dans les haras nationaux et à l'Office national des forêts. Nous allons maintenant engager la réforme des offices d'intervention. Le regroupement des sièges nationaux est programmé à Montreuil, et une réflexion est lancée sur les modifications de l'organisation régionale de ces établissements. L'objectif est de rationaliser l'organisation, de maîtriser les charges de structure afin de servir mieux et plus vite les agriculteurs. Comme vous le souhaitez, monsieur Bourdin, ces budgets seront progressivement réorganisés pour refléter le nouveau cadre budgétaire du ministère.

Avant de conclure, j'évoquerai quelques sujets que je n'ai pas pu regrouper sous un thème plus général.

M. du Luart va, me semble-t-il, retirer un amendement qui vise à éviter qu'un produit ne fasse l'objet de plusieurs droits acquittés au bénéfice de l'INAO, par exemple, une indication géographique prioritaire et un label rouge.

Il n'est pour l'instant pas envisageable d'insérer une telle disposition dans notre législation. C'est pourquoi je remercie M. du Luart d'accepter de retirer sa proposition. Nous étudierons avec lui les moyens de présenter une nouvelle mouture de cet amendement en loi de finances.

Nombre d'entre vous ont évoqué la loi relative au développement des territoires ruraux. M. Emorine s'est demandé, à juste titre, pourquoi les décrets d'application n'ont pas encore été pris.

Je peux d'ores et déjà vous indiquer que le 22 décembre prochain, lorsque je viendrai présenter la version définitive du projet de loi d'orientation agricole devant la Haute Assemblée, je vous donnerai en même temps un calendrier précis des décrets d'application y afférent.

Je vous rappelle que la loi relative au développement des territoires ruraux comporte 240 articles, dont 140 directement applicables, et que 80 décrets simples en Conseil d'État sont nécessaires pour l'appliquer ; seize sont publiés à ce jour, deux sont en cours de signature. Par ailleurs, une douzaine de décrets est au Conseil d'État et une quarantaine en cours de consultation interministérielle. Nous allons accélérer le rythme.

Le fonctionnement de l'État est très compliqué, surtout lorsque plusieurs ministères sont concernés. Certains ministères, qui ne sont d'ailleurs pas à l'origine du texte, ont accepté de s'en saisir à la suite de la volonté manifestée par le Parlement. Cela prend toujours un peu de temps, et nous nous bagarrons pour faire en sorte que les choses avancent le plus rapidement possible.

J'ajoute, et c'est un point très important, que le décret relatif aux zones de revitalisation rurale a été publié le 18 novembre au Journal officiel et que l'arrêté constatant le classement des communes, qui est attendu par les maires, est en cours de signature.

M. Murat a soulevé la question de l'équarrissage. La durée de conservation des déchets à risque chez les bouchers a été augmentée afin de diviser par deux le coût de ce service. Pour accompagner la réforme, le Gouvernement leur apportera en 2006 un soutien dont nous discutons actuellement les modalités avec les représentants de la profession.

Parallèlement, j'ai souhaité qu'une expérimentation puisse permettre de rationaliser, dès le début du mois de novembre, et pour une durée de cinq mois, les coûts consacrés à la collecte et au transport des déchets. Nous verrons comment poursuivre éventuellement cette expérimentation au cours de l'année 2006, afin de trouver un fonctionnement adapté.

Je conclurai avec la question de la viticulture, qui a été évoquée, entre autres, par MM. Jacques Blanc et Roland Courteau. Certains vignobles du secteur vitivinicole connaissent une situation très difficile.

S'agissant de certains vignobles du Languedoc-Roussillon ou du Bordelais notamment, le Gouvernement a pris des mesures conjoncturelles, à destination des exploitations les plus fragilisées, mais aussi des mesures structurelles. L'objectif est d'aboutir à la maîtrise de la production, de favoriser l'exportation, car nous perdons des parts de marché, ce qui n'est pas normal.

Nous avons engagé 4, 5 millions d'euros au titre de la procédure « agriculteurs en difficulté », 17 millions d'euros d'aides en trésorerie, 45 millions d'euros de prêts de consolidation, 7 millions d'euros étant réservés pour l'aide à l'exportation.

J'ai bien conscience de l'insuffisance de ces mesures au regard de la situation du secteur, du niveau du stock et du volume des dernières vendanges. Nous allons continuer d'encourager les viticulteurs à s'orienter vers la distillation de bouche, qui est possible jusqu'à la fin du mois de décembre pour trois millions d'hectolitres. Enfin, nous envisageons de nouvelles mesures, et nous rencontrerons dès demain des responsables de la profession pour évoquer des dispositions de soutien complémentaires.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de budget est une nouvelle étape de la modernisation et de l'adaptation de notre agriculture. Il constitue un support indispensable à la loi d'orientation agricole que le Sénat a adopté en première lecture.

Je souhaitais, en vous le présentant, traiter le plus grand nombre possible des questions que vous vous posiez. Sans doute n'ai-je pas répondu aux treize questions de M. Lejeune, mais il reconnaîtra avec moi que l'entreprise était difficile !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Je tiens tout d'abord à remercier M. le ministre des précisions qu'il vient de nous apporter.

S'agissant du FFIPSA, je voudrais être sûr d'avoir bien compris. L'État va-t-il verser 2, 5 milliards d'euros au FFIPSA dans la loi de finances rectificative ? En d'autres termes, le déficit budgétaire de 2005 se trouvera-t-il aggravé de 2, 5 milliards d'euros ?

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

L'État va reprendre la dette.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

C'est une opération où l'on reprend la dette sans que cela passe en charge ? Pourriez-vous être plus précis sur ce point, monsieur le ministre ?

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Monsieur le président, je reconnais là votre technicité et - pardonnez-moi de le dire - votre malice.

En fait, le déficit du FFIPSA comprend deux aspects : la dette globale, c'est-à-dire le stock, si j'ose dire, et le flux.

En premier lieu, le Gouvernement a l'intention de reprendre dans son budget une partie du stock. Il vous proposera, par voie d'amendement, de se substituer aux droits et obligations de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole.

En second lieu, le Gouvernement est confronté à un autre défi qui consiste à dégager du flux, puisque le besoin de financement est de 1, 7 milliard d'euros. Nous avons donc besoin de trouver des ressources pérennes pour financer le flux.

En d'autres termes, nous devons, dans un premier temps, dégonfler le stock avant, dans un second temps, de proposer d'autres mesures pour financer le flux.

Cette question a été largement évoquée lors de la discussion du projet de loi d'orientation agricole. Nous devons trouver des solutions pérennes. Un premier début de solution consiste à dégager une partie du déficit, l'État reprenant le déficit qu'il a lui-même fait porter par la Caisse de mutualité sociale agricole.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » figurant à l'état B.

Autorisations d'engagement : 4 311 162 007 euros ;

Crédits de paiement : 2 932 991 922 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

L'amendement n° II-145, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Crédits de paiement

Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural

Dont Titre 2

Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés

Forêt

Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture

Dont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Cet amendement est un complément à l'amendement gouvernemental adopté lors du vote de la Mission « Enseignement scolaire », qui a attribué 10 millions d'euros au programme 143 « Enseignement technique agricole », destinés notamment à l'aide sociale aux élèves, dont 6 millions d'euros provenant du budget du ministère de l'éducation nationale.

Le redéploiement proposé ici, au sein de la Mission « Agriculture, pêche et affaires rurales », doit permettre de rééquilibrer le précédent amendement dont le solde était positif de 4 millions d'euros. Ces redéploiements se feront dans un certain nombre de programmes du ministère de l'agriculture.

Compte tenu des crédits qui ont déjà été votés, il s'agit d'un nouvel abondement de 15 millions d'euros au programme « Enseignement technique agricole » pour équilibrer les dotations, comme l'ont rappelé plusieurs sénateurs, notamment l'aide sociale aux élèves sous forme de bourses.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

M. le ministre a déjà évoqué ce sujet dans sa réponse aux orateurs. La commission des finances émet un avis favorable sur cet amendement. Elle estime que cette proposition de redéploiement va dans le bon sens puisque l'enseignement technique agricole risquait d'être privé de ressources.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. Jean-Claude Carle, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je tiens à remercier M. le ministre de l'effort qu'il consent en faveur de l'enseignement technique agricole. Conjugué à celui qui a été fait voilà quelques jours par M. Gilles de Robien, il permet en effet d'abonder les crédits de 15 millions d'euros.

Cet effort, certes important, est indispensable, car les établissements de l'enseignement technique agricole sont dans une situation très difficile. Cela ne les empêche pas de réaliser un excellent travail en permettant souvent à des jeunes en difficulté d'obtenir un métier.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. Bernard Piras, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Piras

Comme je l'ai dit dans mon intervention liminaire, on déshabille Paul pour habiller Pierre. Mais comme Paul était déjà mal habillé, cela ne résout pas le problème. Il aurait à mon avis fallu trouver d'autres solutions. Nous voterons contre cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. Jean-Marc Pastor, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Plusieurs des amendements qui nous sont soumis visent à prélever de l'argent sur une des actions phares de la loi d'orientation agricole.

Monsieur le ministre, vous avez précisé à la tribune que, à la suite de la loi d'orientation agricole, vous vouliez développer, pour les années 2006, 2007 et 2008, une sorte de contrat entre la société et l'agriculture, autour de l'environnement. Or, votre première démarche consiste à prélever de l'argent sur les CAD, qui correspondent pourtant à la seule intervention de l'Etat en direction des exploitants agricoles. Alors que vous aviez prévu de financer 10 000 CAD en 2006, il n'y en aura finalement que 6 000.

Certes, et nous en avons bien conscience, l'enseignement agricole se trouve dans une situation difficile et mérite à ce titre une attention particulière. Mais il est dommage de commencer à amputer le financement d'un volet phare du projet de loi d'orientation agricole avant même son entrée en application ! C'est vrai pour le présent amendement et pour un autre que nous serons amenés à examiner dans un instant.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

L'amendement n° II-129 rectifié bis, présenté par MM. Amoudry, Jean Boyer, Jacques Blanc, Deneux, Badré et Besse, Mme Létard, MM. Vial et Hérisson, Mme Férat, MM. Fournier, Jarlier, Murat et Carle, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Crédits de paiement

Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural

Dont Titre 2

Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés

Forêt

Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture

Dont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Jean-Paul Amoudry.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

Les indemnités compensatrices de handicap naturel, ou ICHN, permettent la présence d'agriculteurs dans les zones défavorisées, spécialement en montagne, où elles constituent un complément indispensable de revenu pour les agriculteurs. Sans cet apport, les conséquences sur la vie dans les vallées et dans les massifs, comme en matière d'aménagement du territoire seraient extrêmement lourdes.

Le ministre de l'agriculture s'était engagé, en 2003, à porter à 50 % sur trois ans le différentiel d'indemnisation des vingt-cinq premiers hectares par rapport aux hectares suivants, afin d'aider les exploitations de taille modeste à se maintenir sur l'ensemble du territoire. Après une augmentation de 10 à 20 % en 2004, puis de 20 à 30 % en 2005, le projet de budget pour 2006 ne prévoit aucune mesure nouvelle. Il est indispensable de poursuivre cette évolution, en inscrivant une nouvelle tranche de 10 % en 2006, pour atteindre, en 2007, l'engagement annoncé.

C'est pourquoi il est proposé de majorer de 16 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 15, 424 millions d'euros en crédits de paiement les crédits inscrits sur l'action 05 du programme 154 « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural » pour 2006. La répartition entre autorisations d'engagement et crédits de paiement correspond à la proportion retenue par le projet de budget pour la couverture en crédits de paiement des nouveaux engagements : 241 millions d'euros sur 250 millions.

En compensation, des efforts d'économie supplémentaires peuvent être réalisés sur les dépenses de fonctionnement des offices agricoles, dont les frais de structure justifient un effort de rationalisation, puisque la réforme des offices agricoles, annoncée par le Gouvernement, a été mise en oeuvre, dans le cadre de l'article 29 du projet de loi d'orientation agricole. Il est donc proposé une réduction de 16 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 15, 424 millions d'euros en crédits de paiement inscrits des dépenses de l'action 04 du programme 227 « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés » pour 2006, au titre de la subvention pour charges de service public versée aux opérateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Le Gouvernement a déjà indiqué qu'une amélioration des crédits d'ICHN était intervenue au cours des années précédentes, se traduisant par une revalorisation de 30 % sur trois ans du montant moyen de l'indemnisation.

Pourquoi ne pas aller plus loin ? Il ne faut néanmoins pas oublier que la revalorisation proposée nécessiterait probablement une négociation avec la Commission européenne puisque nous arrivons au terme du programme de développement rural. Dès lors, il conviendrait que le Gouvernement négocie cette revalorisation dans le cadre de la nouvelle programmation budgétaire 2007-2013.

Puisque c'est une question qui enchaîne le Gouvernement à la Commission européenne, je souhaiterais connaître l'avis de M. le ministre avant de donner celui de la commission.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

L'amendement de M. Jean-Paul Amoudry a été déposé en termes quasiment identiques à l'Assemblée nationale par M. Alain Marleix, député du Cantal. Voyons d'abord l'état des lieux que j'ai rappelé à l'instant, comme vient de le faire M. le rapporteur spécial : nous avons augmenté en trois ans le montant de l'indemnisation de 30 %, ce qui constitue un geste fort.

Il est vrai que cette indemnité pourrait naturellement encore augmenter. Nous avons ajouté cette année 7 millions d'euros au financement national, le financement des ICHN comportant en effet une part nationale et une part communautaire.

L'amendement n° II-129 rectifié bis représenterait un surcoût de 16 millions d'euros. La difficulté tient à la nécessité de recueillir l'accord de la Commission européenne pour le mettre en oeuvre. Et cet accord ne sera pas obtenu immédiatement pour la raison que vient d'indiquer M. Joël Bourdin.

En effet, nous arrivons à la fin de la programmation du développement rural et nous attendons, pour décider de la nouvelle programmation, de connaître les perspectives financières européennes et de voir ce qui se passera au sommet des chefs d'État et de gouvernement de la semaine prochaine.

Pour l'instant, et tant que l'incertitude européenne n'est pas levée, la démarche engagée au travers de l'amendement n° II-129 rectifié bis est prématurée. Je vous demande donc, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer provisoirement cet amendement. Ce faisant, je vous assure de notre volonté politique de poursuivre la revalorisation de l'ICHN en zone de montagne et de mettre en oeuvre cette disposition dès que nous aurons connaissance des moyens précis du deuxième pilier, qui nous permettront d'établir la programmation 2007-2013.

Sachez que le Gouvernement partage votre état d'esprit et que nous pourrons peut-être, en cours d'année, trouver des solutions en fonction des financements européens mis à notre disposition. Mais, pour l'instant, je le répète, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

Je voudrais bien pouvoir accéder à la demande du ministre, et je comprends les interférences, dans cette affaire, entre le droit européen et notre situation.

Toutefois, je voudrais rappeler qu'un engagement a été pris pour cinq ans, il n'y a pas si longtemps. Il devait arriver à son terme en 2007, et je pense qu'il est difficilement soutenable, à l'égard de l'ensemble du monde rural, d'alléguer en cours de route que nous devons nous en référer à des décisions européennes.

Par ailleurs, je pense qu'il est intéressant pour le Gouvernement de pouvoir s'appuyer, lors de la négociation, sur un vote du Parlement sur cette question.

Enfin, je souligne que la situation actuelle n'est pas satisfaisante, malgré les efforts qui ont été faits et qui ont porté le différentiel d'indemnisation à 30 % aujourd'hui. L'objectif était d'atteindre 50 % en 2007, et nous aurions dû en être à 40 % cette année. Je crois que nous pouvons trouver, dans le cadre de la LOLF, les moyens nécessaires pour financer cette opération, s'agissant d'une des branches de l'agriculture les plus fragilisées, et ce pour différentes raisons tenant aux contraintes climatiques, environnementales et à toutes sortes de difficultés. Je souhaite donc que le Sénat puisse se prononcer sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Je comprends très bien la position de M. Jean-Paul Amoudry.

Je tiens cependant à souligner qu'il a gagé son amendement sur le fonctionnement des offices. Or, si nous prélevions 16 millions d'euros sur le fonctionnement des offices, dont les crédits s'élèvent à 100 millions d'euros, nous remettrions complètement en cause ce fonctionnement, et les offices ne seraient plus en mesure d'assurer le paiement des aides du premier pilier aux agriculteurs.

Il y a là, monsieur Amoudry - et mon propos tend simplement à votre information - une difficulté réelle qui pourrait porter un préjudice important à la profession agricole.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. Jean-Marc Pastor, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Je retrouve des propos que j'ai tenus en tant que rapporteur sur le volet du développement rural : j'avais en effet soulevé la question que vient de poser à l'instant même notre collègue Amoudry avec son amendement, à savoir l'engagement pris pour arriver aux 50 % de différentiel d'indemnisation.

J'ai donc tendance, pour ma part, à adhérer à l'esprit de cet amendement.

Les membres du groupe socialiste considèrent comme important d'attirer l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'approfondir cette démarche. Les ICHN sont en effet un encouragement direct adressé à des exploitations qui connaissent des situations difficiles, comme les exploitations de montagne.

Cela dit, il serait dangereux d'adopter cet amendement si une augmentation des ICHN devait aboutir, demain, à la suppression des offices !

Nous avons tous reconnu, lors du débat sur la loi d'orientation agricole, c'est-à-dire assez récemment, l'impérieuse nécessité de conforter toutes les filières économiques. Or, ces dernières dépendent quand même, pour une très grande partie, du fonctionnement des offices.

On ne peut pas, sur ces questions, dire tout et son contraire en quinze jours de temps ! J'ajoute que nous venons de discuter deux amendements proposés directement ou indirectement par la majorité gouvernementale, l'un pour réduire les interventions en faveur du développement durable et l'autre pour augmenter au contraire ces interventions ! Essayons quand même d'être cohérents ! Voilà pourquoi le groupe socialiste s'abstiendra.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Delfau

Je comprends et j'approuve l'esprit de cet amendement.

En revanche, je saisis l'occasion fournie par le gage de l'amendement de M. Amoudry, qui risque d'affaiblir les offices, pour exprimer ma préoccupation quant à un office parmi d'autres, celui de la viticulture. Je n'ai pas pu prendre part à la discussion générale sur cette mission, puisque je suis aujourd'hui rapporteur pour avis sur le sujet de la pêche, au nom de la commission des affaires économiques. J'ai par ailleurs entendu avec émotion l'intervention de mon collègue et ami Roland Courteau sur la situation de la viticulture.

Je tiens à vous dire, monsieur le ministre, à la fin de ce débat, que je suis consterné par la faiblesse de vos réponses, ou plus exactement par le refus du Gouvernement, depuis trois ou quatre ans, de prendre en charge jusqu'au bout ce sujet. Si ce dernier, certes - et nous en convenons tous - est très difficile, il faut néanmoins bien qu'à un moment donné un gouvernement, un ministre, un Premier ministre aident à rendre les arbitrages nécessaires. Nous ne sommes pas gouvernés sur ce sujet !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Delfau

Les parlementaires que nous sommes n'ont pas d'interlocuteur au Gouvernement ! Nous sommes complètement laissés de côté ! Le mois de janvier sera celui du rendez-vous, et je souhaite, monsieur le ministre, que vous preniez d'ici là conscience de la nécessité, au-delà des rencontres coutumières, routinières, dans vos bureaux de la rue de Varenne, d'exposer à tout prix la gravité de la situation à l'ensemble de la profession, des élus et du Gouvernement.

Arrivé au Sénat en 1980, j'avais dit la même chose au ministre de l'agriculture de l'époque, M. Pierre Méhaignerie. Ensuite sont venues des mesures courageuses et nécessaires, et la viticulture a trouvé un second souffle, et pas seulement dans le Languedoc-Roussillon.

Nous nous trouvons à un moment identique, monsieur le ministre, et cette responsabilité repose sur vos épaules

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Nous sortons du débat, mais je voudrais répondre à MM. Gérard Delfau, Roland Courteau, Jacques Blanc et à d'autres.

Le Gouvernement, monsieur Delfau, est très conscient de la gravité de la situation. Mais j'aimerais aussi, et je vous le dis de manière très solennelle, que vous ne vous contentiez pas d'interpeller le Gouvernement. Puisque nous mettons en marche des mesures de distillation et de réduction de la production, je souhaiterais que vous diffusiez ce message-là sur le terrain, dans vos départements.

Ce faisant, vous nous aideriez beaucoup, et nous pourrions ensemble faire nettement plus, car, s'il est facile de revendiquer, il faut aussi, là où vous êtes acteur, participer, pas simplement par le langage - je sais que vous êtes très sincère, monsieur Delfau -, et nous aider à mettre en place les mesures de restriction de la production. En effet, sans restriction de la production et sans mesures à l'exportation, quel que soit le gouvernement, quel que soit l'argent public investi, nous ne sortirons pas de cette situation ! Je sais pouvoir compter sur votre sens de la responsabilité républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Je tiens à rappeler ce qu'a très justement indiqué M. le ministre tout à l'heure : il s'agit d'un amendement de redéploiement. Si les crédits sont augmentés, comme le propose l'amendement n° II-129 rectifié bis, ce sont effectivement les offices qui en pâtiront.

Cela me paraît difficilement acceptable. J'ajoute qu'il faut, de temps en temps, faire primer le principe de réalité sur le principe de plaisir. L'augmentation des crédits demandée est suspendue à des négociations qui auront lieu dans quelque temps avec l'Union européenne.

Cet amendement n'est pas applicable dans l'immédiat. Je crois donc qu'il vaudrait mieux surseoir, le garder en mémoire parce qu'il va dans le bon sens. Mais ne nous créons pas de complications.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

J'avais cru possible la compensation contenue dans cet amendement, dans la mesure où elle avait été étudiée au Sénat ; je n'avais donc pas le sentiment de porter un coup fatal aux offices. Par ailleurs, j'ai entendu M. le ministre annoncer, à la fin de son intervention, une réforme des offices, une rationalisation. Je pensais donc, en toute bonne foi, que cette compensation était envisageable.

Cela étant, je m'interroge sur la marge de manoeuvre véritable qui est laissée au Parlement dans le cadre de la LOLF : si, quand nous étudions une proposition, on nous explique, comme dans le cas présent, que ce n'est pas défendable car cela risque de tuer les offices, on peut s'interroger sur la capacité du Parlement à formuler des propositions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

Puisque, d'une part, M. le ministre a indiqué que des possibilités existaient au niveau des discussions européennes et que, d'autre part, nous connaissons sa pugnacité, sa volonté de défendre ce dossier, et son engagement solennel, je retire cet amendement, même si ce retrait est teinté d'une certaine amertume. Sachez néanmoins, monsieur le ministre, que le monde agricole et nous tous serons extrêmement vigilants.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

L'amendement n° II-129 rectifié bis est retiré.

L'amendement n° II-131 rectifié bis, présenté par MM. Emorine, César et Cornu, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Crédits de paiement

Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural

Dont Titre 2

Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés

Forêt

Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture

Dont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Gérard César.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Cet amendement vise à financer par une réaffectation de crédits au sein de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » le quart de l'enveloppe budgétaire - 10 millions d'euros - nécessaire pour 2006 à l'extension progressive du mécanisme d'assurance récolte à l'ensemble des productions agricoles.

À cette fin, il vous est proposé de procéder à un prélèvement de 2, 5 millions d'euros sur le programme 154 « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et développement rural », ce prélèvement étant réaffecté au sein du programme 227 « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés ».

Une telle réaffectation interne à un programme ne pouvant faire l'objet d'un amendement en loi de finances, je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre, de nous préciser la façon dont vous allez financer cette opération. Par ailleurs, quelles assurances pouvez-vous nous donner ?

Tel est l'objet de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Au début de ce débat, j'ai précisé - ce problème avait déjà été évoqué lors de l'examen de la loi d'orientation agricole - que les crédits inscrits ne me semblaient pas à la hauteur de l'extension de l'assurance récolte prévue dans cette loi.

Par conséquent, la commission est favorable à cet amendement qui va dans le bon sens.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Très favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. Jean-Paul Emorine, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Je soutiens bien évidemment cet amendement dont je suis cosignataire. Je souhaite faire une remarque au Gouvernement.

Monsieur le ministre, après le vote de la loi d'orientation agricole, j'ai constaté avec étonnement que le plus grand journal de référence du monde agricole, La France agricole, titrait en première page : « L'assurance récolte : le Gouvernement se désengage ».

L'assurance récolte a été l'un des thèmes forts de la discussion du projet de loi d'orientation agricole. C'est aussi un thème auquel je suis très attaché, car, outre les crises qui affectent différents secteurs - je pense, par exemple, à la crise de la viticulture -, le monde agricole souffre aujourd'hui de problématiques majeures.

La première est celle des prix dans le cadre de l'Union européenne et de l'Organisation mondiale du commerce.

La seconde est celle des aléas climatiques, qui fragilisent une exploitation agricole, surtout quand un jeune vient de s'y installer, et cela malgré le Fonds national de garantie des calamités agricoles. Je pense aux années difficiles en raison de la sécheresse, 2003 et 2005 pour une partie de territoire, au cours desquelles les rendements en maïs ont baissé de 50 % ! Les exploitations agricoles sont fragilisées durablement. Il existe des prêts de « consolidation de la dette », terme qui me choque à chaque fois que je l'entends, même si je comprends très bien l'esprit dans lequel ils sont faits.

Le mécanisme de l'assurance récolte permettra de conforter la stabilité de l'ensemble des exploitations agricoles de notre pays, puisque c'est son élargissement progressif qui a été retenu dans la loi d'orientation. C'est d'ailleurs ce qui nous a permis d'obtenir l'unanimité sur cette mesure.

Pourquoi cette assurance récolte est-elle nécessaire ? À Hong Kong, avec l'Union européenne représentée par le commissaire Mendelson, vous allez être en première ligne, monsieur le ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Monsieur Piras, permettez-moi de vous faire remarquer que le ministre de l'agriculture sera vraisemblablement à Hong Kong.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

M. Jean-Paul Emorine.Je tiens beaucoup à sa présence à Hong Kong. Je ne voudrais pas, en effet, que se renouvelle la mauvaise expérience que j'ai vécue à Seattle, où M. François Huwart, le ministre du commerce extérieur, n'était pas accompagné du ministre de l'agriculture. Ce dernier était absent pendant la négociation, et c'était un peu dommage. Voilà pourquoi je souhaite que le ministre de l'agriculture française soit présent à Hong Kong au côté du ministre du commerce extérieur !

Applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Piras

Nous ne sommes pas en désaccord sur ce point !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

J'insiste sur cette assurance récolte, car, voilà quelques années, mon collègue Marcel Deneux et moi-même avons rédigé un rapport sur l'évolution de la politique agricole commune. Nous nous sommes rendus aux Etats-Unis et en Espagne. Je vous rappelle, mes chers collègues, que le gouvernement américain consacre à l'assurance récolte de 4 milliards à 5 milliards de dollars !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Piras

C'est le modèle américain que vous cherchez ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Mon cher collègue, si je vous donnais la nature de mon exploitation, sur laquelle j'ai travaillé toute ma vie, vous constateriez qu'elle n'a rien de comparable avec une exploitation américaine ! Laissez-moi vous dire en toute amitié, cher collègue Bernard Piras, que ma volonté est surtout de défendre la notion d'entreprise agricole.

À Hong Kong, vous serez face à des Américains qui auront préservé leur activité agricole grâce à l'assurance récolte, monsieur le ministre. Voilà pourquoi ce thème me tient à coeur.

Je voudrais convaincre mon collègue Jean-Paul Amoudry et démontrer que la LOLF donnera peut-être au Parlement - le président Arthuis y est très attentif - des marges de manoeuvre.

S'agissant de l'assurance récolte, nous demandons seulement, contrairement au titre de journal que je mentionnais, que l'Etat ne se désengage pas. Les dotations visant à financer l'aide aux cotisations d'assurance récolte - 10 millions d'euros en 2005 pour 60 000 contrats - devraient se révéler insuffisantes si de nombreux autres contrats étaient souscrits. Pour 2006, le montant affiché s'élève à 20 000 euros.

Dans un premier temps, nous proposons un redéploiement de crédits au sein du ministère de l'agriculture. Avec votre appui, monsieur le ministre, peut-être pourrons-nous, dans un second temps, atteindre 30 millions d'euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Je ne reviendrai pas sur la symbolique de la ponction des crédits consacrés à l'agriculture durable, puisque mon collègue Jean-Marc Pastor s'est exprimé sur ce point tout à l'heure. Chacun voit midi à sa porte, je le comprends.

En revanche, je comprends un peu moins que le Gouvernement soit d'accord avec cette proposition, qui me fournit une illustration parfaite du manque d'intérêt - que j'évoquais tout à l'heure - pour un entretien véritable et durable de la forêt méditerranéenne.

M. Gérard César s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

La façon la plus simple, la plus pérenne, la moins coûteuse pour entretenir cette forêt, c'est le sylvopastoralisme. Mais il n'est viable que grâce à un certain nombre d'aides : il y a eu les aides européennes, les contrats territoriaux d'exploitation, etc. On compte effectivement sur les nouveaux contrats. Mais on ponctionne, on ponctionne... Cela prouve bien que personne ne s'intéresse vraiment à ce problème !

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. Paul Raoult, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Raoult

Je ferai tout d'abord un constat sur la forme. La LOLF me laisse toujours quelque peu perplexe, car elle restreint, selon moi, la capacité d'intervention des parlementaires. En effet, nous sommes obligés de réfléchir par mission, et l'on ne nous donne même pas le choix. Quoi que vous en disiez, nous avons en réalité moins de liberté qu'avant !

Second constat, avec la nouvelle règle du jeu que vous avez donnée tout à l'heure, la recherche d'argent pour l'enseignement agricole se fait au détriment d'un certain nombre d'actions.

Quand on connaît le rôle de l'enseignement agricole tant pour des formations non agricoles, comme l'agroalimentaire, qu'en termes d'insertion sociale, pour un certain nombre de jeunes en difficulté qui sont rejetés par l'enseignement général et qui trouvent une formation et du travail grâce aux formes nouvelles de l'enseignement agricole, le fait que les moyens financiers nécessaires à la formation scolaire dans l'enseignement agricole, cet enseignement de base qui, par rapport à l'enseignement général, est l'un des meilleurs enseignements, n'aient pas été inscrits initialement dans le budget paraît aberrant.

Après les MAE, puis les CTE - c'était déjà difficile ! -, on s'en prend maintenant aux CAD ! Dans mon parc naturel régional, entre 300 et 400 MAE sont devenus CTE et, maintenant que nous avons des CAD, on nous dit qu'il faut attendre une nouvelle possibilité financière !

De plus, j'apprends que le nombre de CAD va encore diminuer dans le cadre des transferts de crédits ! Comment les agriculteurs des petites exploitations familiales de l'Avesnois, qui font de l'élevage laitier et dont le revenu diminue parce que le prix du lait baisse, vont-ils entretenir les haies, les pâturages ? Ils trouvaient de l'aide grâce aux MAE puis aux CTE et aux CAD. On va maintenant leur dire qu'ils auront moins d'argent en raison de la disparition de mesures qui présentaient pourtant un intérêt environnemental fondamental ? En effet, si l'on n'aide pas les agriculteurs à entretenir ces haies, elles disparaîtront et, si l'on supprime le bocage, c'est la biodiversité qui en pâtira ! Voilà, concrètement, ce qui va se passer, et vous le savez !

On se fait plaisir ! Mais si un effort est nécessaire pour l'assurance récolte, ce que je comprends, cela ne peut se faire au détriment des actions agro-environnementales qui existent depuis des années et qui ont fait leur preuve !

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

J'avais pris l'engagement auprès de la présidence que nous terminerions ce débat avant vingt et une heures. Je m'aperçois que je vais perdre mon pari, mais je trouve ce débat particulièrement intéressant !

Je ne peux pas laisser dire que la LOLF nous prive de marges de manoeuvre. En effet, mes chers collègues, quel était le système antérieur ? Le seul choix que vous aviez était de baisser les crédits et rien d'autre. La LOLF vous ouvre une possibilité, celle de procéder à des arbitrages pour transférer des crédits à l'intérieur d'une mission, en les prélevant sur un programme au profit d'un autre programme. Il s'agit quand même d'une marge tout à fait appréciable qui donne du relief aux débats !

Il y a un moment passionnant, c'est celui de la discussion générale, avec les différentes interventions à la tribune. Mais la discussion des amendements constitue également un moment assez riche.

Je me souviens avec émotion de la discussion des crédits de l'enseignement scolaire, mission interministérielle, l'enseignement agricole abandonné, en quelque sorte, par l'agriculture, avec un gage de crédits peut-être légèrement insuffisants, mais nous avons trouvé une solution. Je vous ai écoutés, les uns et les autres. Cela n'a pas été simple, monsieur le ministre, que de boucler ce budget ! Quand je pense qu'on a laissé partir, à l'article 9 du projet de loi de finances, 140 millions d'euros correspondant à une diminution de 20 % de la taxe sur le foncier non bâti...

M. le ministre rit

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Enfin, je le dis comme ça. C'est voté, on n'y reviendra plus. Mais je n'ai pas résisté à l'envie de vous le dire...

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. Gérard César, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

C'est en tant que rapporteur de la loi d'orientation agricole que je répondrai à M. Collombat. Contrairement à ce qu'il a dit, nous avons fait beaucoup pour la forêt dans cette loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

J'ai parlé des incendies de forêt, pas de la forêt en général !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

S'agissant des incendies, nous avons voté pour la première fois la défiscalisation pour ceux qui sont regroupés en associations syndicales autorisées de défense des forêts contre l'incendie, ou DFCI !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Et pour la première fois, nous avons voté des crédits défiscalisés concernant les massifs forestiers pour ceux qui acceptent un plan de gestion. Voilà ce que je tenais à préciser à M. Collombat.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limité.

Je mets aux voix les crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », ainsi modifiés.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Nous allons maintenant procéder au vote des crédits du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » figurant à l'état B.

Autorisations d'engagement : 135 460 000 euros ;

Crédits de paiement : 110 900 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits du compte d'affection spéciale « Développement agricole et rural ».

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

J'appelle en discussion l'article 74, et les amendements tendant à insérer un article additionnel, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêts et affaires rurales ».

II. - AUTRES MESURES

Dans le deuxième alinéa de l'article L. 514-1 du code rural, les mots : « pour 2005, à 1, 8 % » sont remplacés par les mots : « pour 2006, à 2 % ».

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

L'amendement n° II-78 rectifié bis, présenté par MM. J. Blanc, Trillard et César, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Dans la seconde phrase du troisième alinéa de l'article L. 514-1 du code rural, les mots : « au double » sont remplacés par les mots : « au triple »

La parole est à M. André Trillard.

Debut de section - PermalienPhoto de André Trillard

Cet amendement a pour objet de permettre de réduire les écarts constatés en termes de niveau d'imposition entre les chambres d'agriculture. L'assiette de la taxe pour frais de chambres d'agriculture varie, en effet, de un à six selon les départements.

Il s'agit de donner aux chambres d'agriculture, qui ont l'assiette la plus faible, la possibilité, après accord de la tutelle, de pouvoir rattraper leur retard, en augmentant leur taux d'imposition plus rapidement que les autres chambres d'agriculture.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Je me prononcerai après avoir entendu l'avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Les taux d'imposition constituent, certes, des indicateurs intéressants, mais je souhaite appeler l'attention du Sénat sur le fait que les valeurs imposées varient parfois de un à cinq, d'un département à l'autre. Il faut donc relativiser les choses.

L'amendement est adopté.

L'article 74 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

L'amendement n° II-92, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article 74, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Dans la première phrase du second alinéa de l'article L. 641-8 du code rural, le nombre : « 0, 08 » est remplacé par le nombre : « 0, 10 ».

II. - Cette disposition entre en vigueur à compter de la récolte 2005/2006.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Cet amendement a été élaboré en lien avec la profession viticole.

Il nous faut améliorer le financement de l'institut national des appellations d'origine, l'INAO, dont nous avons longuement débattu lors de l'examen de la loi d'orientation agricole, et auquel nous avons accordé un rôle nouveau, et important, en matière de qualité.

Nous sommes convenus, avec les AOC, que la dotation de l'État à l'INAO serait augmentée de 695 000 euros et que les établissements bénéficieraient d'une légère revalorisation du droit sur les vins.

L'amendement n° II-92 vise donc à porter le montant maximum du droit sur les vins de 0, 08 euro par hectolitre à 0, 10 euro par hectolitre. Nous relevons légèrement les droits sur les vins, tandis que l'État, de son côté, inscrit dans son budget l'augmentation de sa dotation à l'INAO.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

M. Joël Bourdin, rapporteur spécial. La commission des finances n'aime guère les augmentations de taux, de droits, de cotisations, etc. Mais puisque, en l'occurrence, M. le ministre nous assure que les victimes sont consentantes, l'avis de la commission est favorable.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Delfau

S'il fallait une démonstration de la vacuité de la politique gouvernementale en matière viticole, elle serait faite à présent !

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Mais qui conforte les AOC, sinon le Gouvernement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Delfau

Je le répète, il ne faut pas traiter ce problème de fond par des mesures ponctuelles, surtout quand celles-ci auront pour conséquence de prélever un peu plus d'argent sur une viticulture déjà exsangue !

Depuis trente ans, je n'ai cessé, ce qui était normal, de soutenir l'effort des AOC, et de l'INAO en particulier.

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Les AOC ont donné leur accord à cette mesure !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Delfau

J'affirme que nous ne pouvons continuer de cette façon, sans visibilité, sans savoir exactement sur qui et sur quoi portent les mesures !

Monsieur le ministre, il nous faut enfin, le plus vite possible, définir une politique viticole - et je suis certain que, sur les travées de la commission, mes propos trouvent des échos -, car nous n'en avons pas, et c'est pourquoi la profession tout entière est en train de périr !

Même si je n'ai absolument rien contre le principe de l'augmentation de ce prélèvement, je m'abstiendrai donc, parce que ce n'est ni le lieu ni le moment de prendre une telle mesure, et que ce n'est pas ainsi que nous améliorerons une situation déjà très dégradée.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

La parole est à M. Jean-Marc Pastor, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Mes chers collègues, nous subissons une crise viticole qui ne fait que commencer, ...

Debut de section - Permalien
Dominique Bussereau, ministre

Depuis trente ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

...même si nous en observons les signes depuis plusieurs mois maintenant.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Depuis trois ans !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Il me semble tout de même inopportun, en pleine crise viticole, au moment où M. le ministre, lui-même - nous l'avons entendu -, demande aux parlementaires de s'associer à la réflexion collective pour trouver des solutions à cette crise, d'augmenter un prélèvement qui pèse sur les viticulteurs ! C'est tout de même dommage !

Je comprends tout à fait que l'État ait besoin de se procurer des ressources, et l'INAO aussi, certainement, mais j'aurais préféré que l'on précise cette démarche, qui concerne les viticulteurs.

Bien entendu, monsieur le ministre, j'ai noté que les représentants des AOC étaient favorables à cette mesure. Mais j'aurais souhaité, par la même occasion, que vous nous précisiez quelle allait être l'action de l'INAO contre la crise, afin que, ensemble, nous fassions un geste pour essayer d'en sortir. Il est donc bien dommage que nous ne le fassions pas avec cet amendement, qui pourrait nous permettre d'y voir plus clair, dans une situation délicate.

C'est la raison pour laquelle je m'abstiendrai.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 74.

L'amendement n° II-133 rectifié, présenté par MM. du Luart, Cléach, Fillon, Fournier et Bizet, est ainsi libellé :

Après l'article 74, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa de l'article L. 641-9-1 du code rural est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Un même produit ne peut faire l'objet de plusieurs droits acquittés au bénéfice de l'Institut national des appellations d'origine. »

La parole est à M. Bernard Fournier.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Gouteyron

L'amendement n° II-133 rectifié est retiré.

Nous avons achevé l'examen des crédits relatifs à la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales » et les crédits du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-trois heures quinze.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à vingt-et-une heures cinq, est reprise à vingt-trois heures quinze.