Intervention de Yvon Collin

Réunion du 6 décembre 2005 à 15h00
Loi de finances pour 2006 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Photo de Yvon CollinYvon Collin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, aujourd'hui encore, l'agriculture structure la plupart de nos paysages et en fait la beauté. Sur l'ensemble du territoire, c'est un secteur économique qui compte, même si les agriculteurs représentent moins de 2 % de la population active.

Pour les 700 000 hommes et femmes qui continuent à faire vivre les campagnes françaises, pour tous ceux qui ne rechignent devant aucune adaptation afin de répondre aux contraintes de la mondialisation, pour tous ces agriculteurs qui contribuent au dynamisme de l'industrie agro-alimentaire, nous devons continuer à mener une politique agricole volontariste, à la hauteur des enjeux nationaux, communautaires et mondiaux.

Nous le savons, ce secteur rencontre des difficultés sur plusieurs fronts. Des difficultés qui, souvent, hélas ! se cumulent : les calamités naturelles, les crises sanitaires, la multiplication des normes, la libéralisation des marchés sont quelques-uns des facteurs qui fragilisent de nombreuses filières.

C'est pourquoi, afin d'aider l'agriculture à surmonter ces différents aléas, le soutien des pouvoirs publics est essentiel.

Le budget de l'agriculture, de la pêche, de la forêt et des affaires rurales pour 2006 est-il en mesure de répondre aux attentes des agriculteurs ? Je crains que non et cela pour plusieurs raisons.

La première est simple. Compte tenu de l'inflation et de probables gels budgétaires, l'augmentation affichée des moyens de 2, 5 % confirme en réalité la tendance des budgets précédents, soit une restriction des crédits.

Certes, ce budget ne représente qu'une partie des concours publics consacrés à l'agriculture puisque, avec 5 milliards d'euros, il représente à peine la moitié des crédits communautaires. Il faut aussi tenir compte des autres programmes, qui concernent l'enseignement agricole, la recherche, la sécurité sanitaire, ainsi que des mesures fiscales contenues dans la première partie du projet de loi de finances.

Autant dire qu'avec un budget aussi écartelé, les parlementaires peinent à avoir une vision d'ensemble.

Parmi les nombreuses mesures budgétaires pour 2006 relatives à l'agriculture, il en est une qui, on peut le dire, satisfait la profession agricole. En effet, la mesure d'allégement de 20 % de la taxe sur le foncier non bâti, qui représente un coût de 140 millions d'euros, permettra la diminution des charges pesant sur les exploitations.

La déduction pour aléas va également dans le bon sens.

Il faudra toutefois poursuivre les efforts fiscaux en direction des revenus agricoles. Ces derniers sont tellement fluctuants qu'il faudrait notamment revoir les différents régimes d'imposition et les modalités de calcul des bénéfices agricoles.

Il serait également souhaitable d'approfondir les systèmes d'indemnisation des risques agricoles, car certaines filières souffrent plus que d'autres. La responsabilité obligatoire et collective, fondée sur le principe de solidarité, doit demeurer au centre des dispositifs.

Il existe trois catégories de risques : les risques liés à l'approvisionnement et aux outils nécessaires à la production, ceux qui sont liés à l'activité de production et ceux qui concernent le produit et ses débouchés. Malheureusement, ces risques se concrétisent régulièrement. Lorsque le pétrole augmente, qu'il grêle et que les barrières douanières s'affaiblissent, certaines filières sont gravement menacées, et je pense plus particulièrement à celle des fruits et légumes.

L'été dernier, des orages de grêle ont une nouvelle fois endommagé des exploitations, causant des difficultés financières à de nombreux agriculteurs, notamment dans mon département, le Tarn-et-Garonne.

À ces crises conjoncturelles liées aux conditions climatiques s'ajoutent de véritables difficultés structurelles. Et ce n'est pas la loi d'orientation agricole, avant tout destinée à satisfaire les gros exploitants, qui va résoudre les problèmes rencontrés par la filière des fruits et légumes.

À l'issue des dernières rencontres avec les représentants de la profession, vous avez annoncé, monsieur le ministre, un soutien de 15 millions d'euros et une enveloppe de 25 millions d'euros de prêts de consolidation. Cependant, vous le savez, la filière a estimé ses pertes à 150 millions d'euros pour l'année 2005. Il est donc important d'élaborer un plan d'urgence spécifique au secteur des fruits de légumes.

En attendant, le budget national ne doit pas faire l'impasse sur les mesures soutenant ponctuellement les agriculteurs en difficulté. Il était temps de rétablir les crédits Agridiff, qui avaient été supprimés l'année dernière. Dommage qu'il ne s'agisse que d'une remise à niveau !

Les offices, qui sont des outils de régulation permettant de répondre aux crises sectorielles, mériteraient aussi un meilleur traitement. Depuis quelques années, ils sont soumis à des coupes sévères alors que sont reconnues leurs actions d'amélioration qualitative, de restructuration et de consolidation des filières.

Je voudrais dire un mot également de la mission interministérielle « Enseignement scolaire », qui est distincte de la mission dont nous discutons actuellement, mais qui participe au budget global de l'agriculture pour 2006, comme je l'indiquais tout à l'heure. Plus particulièrement, je souhaiterais évoquer l'enseignement technique agricole, car l'avenir de notre agriculture passe aussi par la formation.

Le métier d'agriculteur est de plus en plus technique et il est donc fondamental d'offrir aux jeunes qui le désirent un enseignement de qualité permettant leur intégration professionnelle.

Un geste très attendu a été fait en direction des maisons familiales rurales avec le vote en leur faveur d'une rallonge de 15, 5 millions d'euros ; on peut s'en féliciter.

S'agissant plus particulièrement de l'enseignement public, la progression serait de 7 % avec 687 millions d'euros en autorisations d'engagement et 687, 5 millions d'euros en crédits de paiement.

Comme nous l'avons tous répété au cours des différents débats budgétaires, la mise en oeuvre de la LOLF rend hasardeuse la comparaison entre les crédits du projet de loi de finances initiale pour 2005 et le projet de loi de finances pour 2006. Je vais donc m'en remettre au constat de ceux qui, sur le terrain, subissent les budgets. Depuis trois ans, la suppression de plusieurs centaines d'emplois, le plafonnement du nombre d'élèves, la restriction des horaires de formation fragilisent l'enseignement agricole public. Faute de moyens, les établissements sont dans l'obligation de refuser des élèves et de revoir à la baisse leurs conditions d'accueil et d'enseignement.

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