Ces deux amendements suppriment, pour des raisons différentes, l'article 17, qui prévoit que « pour l'application de l'article 74 du code de procédure pénale, est présumée ne pas avoir une cause inconnue ou suspecte la mort violente d'un militaire au cours d'une action de combat se déroulant dans le cadre d'une opération militaire hors du territoire de la République. »
Le gouvernement propose de modifier cette rédaction, qui nous a paru en effet conduire à ouvrir trop systématiquement des enquêtes en recherche des causes de la mort. Dans certains cas - nous l'avons bien vu en Afghanistan - la cause de la mort au combat est évidente, et il est superfétatoire de déclencher une enquête : dans ce cas, le parquet dispose du renseignement judiciaire, fourni par la prévôté, qui est sur le terrain. En cas de mort suspecte, causée par une balle tirée dans le dos, par exemple, il en va autrement. A la moindre suspicion, il peut déclencher une enquête. J'avais rapporté le texte supprimant le tribunal aux armées. Dans les dernières années du tribunal aux armées de Paris, des enquêtes ont été ouvertes de manière intempestive, ce qui a eu un effet néfaste : les familles comprenaient mal que les enquêtes soient très rapidement refermées et en venaient même à voir de nouveau en l'armée une Grande Muette... Le texte du gouvernement précise qu'il n'est pas anormal de mourir au cours d'une action de combat. Au moindre doute, par exemple en cas de dispute, le juge pourra renverser la présomption.
L'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales impose une enquête effective, notamment dans l'arrêt Girard du 30 juin 2011. L'enquête en recherche des causes de la mort n'a pas vocation à se substituer à l'enquête pénale. Dès que les circonstances de la mort sont élucidées, l'enquête s'achève, et conduit à un classement sans suite ou à l'ouverture d'une enquête pénale. La procédure du renseignement judiciaire satisfait donc à l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans le rapport pour avis de la commission des lois sur l'article 17, aucun risque de non-compatibilité n'a été relevé. Je demande le retrait de l'amendement de la commission des lois ; sinon, mon avis est défavorable. Cette loi cherche à conforter l'armée, et éviter les manipulations.