Intervention de Aurélie Filippetti

Réunion du 17 octobre 2013 à 15h00
Indépendance de l'audiovisuel public — Adoption des conclusions de deux commissions mixtes paritaires

Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis extrêmement heureuse et satisfaite du travail que nous avons accompli ensemble. Je tenais à vous remercier très chaleureusement de la qualité de vos apports, qui ont permis d’enrichir considérablement le projet de loi.

Il s’agit d’un texte majeur, d'un texte important, non par le nombre de ses articles – même si celui-ci a augmenté –, mais par une dimension symbolique extrêmement forte, puisqu’il aura renforcé de manière inédite l’indépendance de l’audiovisuel public et sa continuité.

Les travaux parlementaires ont permis de moderniser l’organisation et les compétences de la régulation audiovisuelle dans ce pays, qui repose sur le CSA. Je tiens à saluer, sur ce point, votre concours précieux.

Si je devais retenir quatre mots clés pour la nouvelle régulation audiovisuelle que nous avons mise en place, il s'agirait de ceux-ci : indépendance, impartialité, lucidité et modernité.

Indépendance, car cette nouvelle régulation avait d'abord pour objet de parvenir à un mode de nomination des présidents des entreprises de l’audiovisuel public qui soit conforme aux exigences d'une société démocratique. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel procédera désormais à ces nominations. Il s'agit d'une avancée majeure au regard des dysfonctionnements et des soupçons qui étaient apparus depuis la réforme de 2009.

L’indépendance accrue conférée au CSA parachève ce mouvement. Nous avons en effet accompli un autre progrès, qui constitue une première en France : la majorité et l’opposition parlementaires seront associées, dans une relation de responsabilité, à la nomination des futurs membres du CSA, qui s'effectuera à la majorité des trois cinquièmes des membres des commissions chargées de la culture des deux assemblées. Cette grande réforme suscitera évidemment une profonde évolution, aussi bien des mentalités que du fonctionnement même du CSA, tout en lui conférant une très forte légitimité. Aussi, en complète cohérence avec l'objectif d'un renforcement de l’indépendance du secteur audiovisuel fixé par le projet de loi, le statut du CSA a été modifié : il devient une autorité publique indépendante.

Impartialité, car la nomination des membres du CSA s'appuiera désormais sur des critères de qualification afin d’assurer la nomination de personnalités à la compétence et à l'expérience indiscutable. Vos travaux ont d’ailleurs enrichi le projet de loi en ce sens.

En outre, les règles relatives aux incompatibilités auxquelles seront soumis les membres du Conseil ont été améliorées. Les modalités de communication du collège sur ses propres décisions seront clarifiées. Le CSA rendra compte, dans son rapport annuel, des études ayant fondé ses décisions d’attribution de fréquences afin que soient mieux compris le sens des décisions du régulateur et les arguments sur lesquels elles se fondent. Enfin, les nominations au CSA respecteront la parité.

Lucidité, car, compte tenu des enjeux économiques auxquels est confronté le secteur audiovisuel, des dispositions consacrent une plus large place à la prise en compte des équilibres économiques de l’audiovisuel par le CSA. Ces avancées, attendues, permettront de moderniser le fonctionnement du CSA en le rendant plus ouvert aux enjeux économiques.

Afin de garantir à la fois le développement des acteurs en place et la viabilité économique des nouveaux acteurs autorisés, toute décision d’autorisation de nouveaux services nationaux susceptibles d’affecter de manière importante le marché en cause sera désormais précédée d’une étude d’impact. Cette amélioration était, elle aussi, extrêmement attendue. Elle sera importante pour le paysage audiovisuel français.

Par ailleurs, le maintien de la publicité en journée sur les chaînes de France Télévisions donne une visibilité nécessaire non seulement à l’entreprise, mais aussi aux autres acteurs de l’audiovisuel. Elle permettra de ne pas accroître la contrainte budgétaire après 2016 dans une période où doivent être réalisés, vous le savez, des efforts considérables en vue du redressement des comptes de la société et des finances publiques.

Modernité, enfin, car la régulation a été adaptée à l’ère numérique. D’autres dispositions issues des travaux parlementaires ont permis une modernisation concernant les sujets arrivés à maturité.

Désormais, le CSA pourra réserver un appel d’offres concernant une fréquence disponible à des chaînes qui souhaitent passer en haute définition, sans pour autant que celles-ci changent de profil éditorial. Cette évolution, attendue des téléspectateurs, est importante.

Le CSA enregistrera en outre les déclarations des distributeurs et des éditeurs concernant les SMAD, les services de médias audiovisuels à la demande – c'est-à-dire la télévision de rattrapage –, et il pourra régler les différends quant à la distribution de ces services.

Le CSA voit également son rôle accru dans l’organisation dynamique du marché de la télévision numérique terrestre. Il pourra autoriser les changements de modèle économique des chaînes, notamment le passage du payant au gratuit.

Votre assemblée a souhaité que cette nouvelle compétence du CSA soit encadrée. Je m'en félicite et, comme vous, je souhaite que l’agrément délivré par le CSA, pour le passage du payant au gratuit, ne mette en péril ni le pluralisme ni, évidemment, les équilibres publicitaires du secteur. Cet encadrement est un apport du Sénat, et je constate que la commission mixte paritaire en a confirmé toute l’importance.

Enfin, à l’issue du riche débat qui s'est déroulé à la Haute Assemblée, un amendement a entraîné une évolution dans les relations entre producteurs et diffuseurs, permettant à ces derniers de prendre des parts de coproduction dans les œuvres à des conditions préservant tant l’indépendance des producteurs que la circulation des œuvres.

Nous sommes tous conscients que certains débats techniques ou de régulation doivent encore se poursuivre et nécessiteront donc un second temps législatif. Le Gouvernement sait qu’il peut compter sur l’engagement du Sénat pour œuvrer à ce que notre paysage audiovisuel soit un espace d’indépendance, de création et de développement.

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