Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme nous le savons tous, la sécurité sanitaire a pour objectif de réduire la probabilité des risques ou la gravité des dangers qui menacent la santé de la population, ce qui implique une action primordiale des pouvoirs publics. L'État a le devoir d'apporter des réponses précises aux menaces et aux risques qui pèsent sur la santé de nos concitoyens.
En France, au cours des quinze dernières années, des progrès ont été accomplis en matière de sécurité sanitaire, et certains événements, tels que le drame de la canicule de 2003, la crise de la vache folle, l'arrivée de la grippe aviaire aux portes de l'Union européenne, ont montré aussi la nécessité de renforcer la sécurité sanitaire. Aujourd'hui, cette dernière doit être une priorité.
Nous devons tous rester en permanence vigilants face à l'apparition du sida, de l'hépatite C, du SRAS, du H5N1, et aux risques inhérents au bioterrorisme.
Même si nous observons des avancées, des améliorations restent encore à réaliser et il est nécessaire de renforcer la prévention. L'enjeu majeur de la mission « Sécurité sanitaire » est le financement du plan gouvernemental de protection contre un risque de pandémie de grippe d'origine aviaire. Monsieur le ministre, quels sont les sources et le montant des financements de ce plan ?
En effet, on peut s'interroger sur la capacité et la légitimité de l'assurance maladie à supporter à elle seule le coût de la prévention et de la protection contre la grippe d'origine aviaire. L'État ne doit pas se désengager du financement des dépenses de prévention sanitaire au moment même où les menaces liées à la grippe aviaire semblent bien réelles.
Jusqu'à présent, le financement du plan gouvernemental précité a été assuré par la contribution de l'assurance maladie et par le biais d'un fonds de concours rattaché au programme « Veille et sécurité sanitaires » de la mission à hauteur de 176 millions d'euros pour 2005 et de 175 millions d'euros pour 2006.
Par ailleurs, nous nous interrogeons sur la visibilité de la participation de l'État. Monsieur le ministre de la santé et des solidarités a déclaré que 177 millions d'euros de crédits d'État supplémentaires seraient inscrits au programme « Veille et sécurité sanitaires » de la mission « Sécurité sanitaire » ; nous nous en félicitons, mais nous regrettons de ne pas connaître les modalités d'inscription de ces crédits supplémentaires et nous estimons que l'État aurait dû prendre entièrement en charge le financement du plan contre la grippe aviaire.
Par ailleurs, la prévention d'une épidémie de grippe aviaire éventuellement transmise à l'homme est, à cette étape, avant tout un problème de prévention animale qui devrait porter essentiellement sur les élevages de volaille.
À ce stade, nous ne comprenons pas l'inscription d'une diminution de 4, 2 % des crédits en faveur des soins des maladies animales et de la protection des animaux. Cette baisse constatée est dangereuse aussi bien pour la surveillance des maladies animales que pour la sécurité sanitaire de nos concitoyens.
Certes, aujourd'hui, il est impossible de mesurer exactement quelle serait l'ampleur de l'épidémie si elle survenait sur notre territoire. Cependant, les crédits en faveur des soins des maladies animales et de la protection des animaux ne permettront pas de mettre en place une réponse concrète, même provisoire, en cas d'apparition de l'épizootie. Même le million d'euros prévu au titre d'un éventuel appel d'offres pour le marché de l'euthanasie des volailles contaminées ne suffira pas.
Monsieur le ministre, en cas de besoin, d'où viendront les fonds nécessaires à cette action ? Est-il prévu d'aider les éleveurs si un abattage se révélait nécessaire ? Quels fonds serviront à une éventuelle vaccination préventive des animaux ?
Par ailleurs, je veux insister en cet instant sur le rôle essentiel des vétérinaires pour améliorer la détection précoce de la grippe aviaire. En effet, l'échange rapide et l'analyse des échantillons de virus peuvent apporter une réponse immédiate. Sur le terrain, ces professionnels sont les premiers à pouvoir anticiper les crises et à assurer la veille sanitaire. Mais malheureusement, ce secteur médical souffre d'une diminution des personnels qui risque de mettre en péril l'accomplissement de certaines activités qui leur sont assignées. Ce n'est pas en réduisant le nombre de postes de vétérinaires qu'on aidera ces derniers à accomplir leur mission, qui est primordiale à notre époque. Quelles sont les intentions du Gouvernement à ce sujet ?
De plus, aujourd'hui, la prévention doit porter essentiellement sur les animaux. Nous nous étonnons donc de voir qu'une place prépondérante est donnée au ministère de la santé et des solidarités dans le traitement de cette crise. Le ministère de l'agriculture et de la pêche y a toute sa place.
Par ailleurs, j'aimerais savoir où nous en sommes précisément en matière d'élimination des farines animales. Que prévoit-on pour 2006 et pour les années suivantes ? Il faut rappeler que les loyers relatifs au stockage de ces farines s'élèvent à 39 millions d'euros par an. Est-il vraiment nécessaire que ce soit la collectivité publique qui paie pour les choix économiques du passé ? La situation doit se débloquer rapidement. Trop d'argent a déjà été gâché.
Nous nous félicitons de la création de I'AFSSET, héritière de I'AFSSE. Son rôle est déterminant, car elle améliorera la prévention et la réparation des atteintes à la santé liées au travail ; elle facilitera également la diffusion des connaissances en matière de santé au travail. Cependant, nous nous interrogeons sur l'articulation de ses missions avec celles des structures existantes, sur son rôle exact et sa composition. Il serait opportun que tous les acteurs concernés aient une vision globale de son fonctionnement.
Nous sommes par ailleurs fort préoccupés de la diminution drastique du nombre de postes ouverts au titre de la formation en médecine du travail. Ainsi, soixante-treize postes ont été ouverts en 2004 alors que seuls treize le seront cette année ! En agissant ainsi, vous provoquez l'arrêt pur et simple de la prévention sur le lieu de l'exercice professionnel, ce qui est très préoccupant. En réponse à cette baisse, la Direction générale de la santé évoque la nécessité de libérer des postes afin de mener à bien les différents plans lancés par M. Douste-Blazy, notamment le plan cancer. Or, la médecine du travail est l'un des acteurs principaux dans la prévention des cancers. Cette baisse n'est-elle pas contradictoire avec la création de I'AFSSET ? Monsieur le ministre, comment expliquez-vous cette décision, alors qu'il existe dans notre pays une pénurie de médecins du travail, pénurie qui demeurera en raison d'un grand nombre de départs à la retraite d'ici à 2010 ?
En réponse aux très fortes préoccupations des consommateurs et des citoyens, nous avons créé, depuis 1998, de nombreuses agences pour évaluer les risques sanitaires. Cependant, depuis plusieurs années, on constate une complexité dans le partage des compétences des différentes agences, voire des conflits de compétences et un manque de coordination des structures. En outre, la circulation de l'information sanitaire n'est pas optimale. La coordination fait souvent défaut. Par ailleurs, le rapport de la Cour des comptes du mois de mars 2005 a lui aussi relevé des difficultés de coordination entre les organismes et les administrations de tutelle.
Nous observons aussi un problème de coordination entre les deux ministères concernés, c'est-à-dire, d'une part, le ministère de l'agriculture et de la pêche et, d'autre part, le ministère de la santé et des solidarités, qui continuent de travailler chacun de leur côté et d'apporter des réponses qui ne sont nullement concertées.