Intervention de Isabelle Pasquet

Commission pour le contrôle de l'application des lois — Réunion du 17 octobre 2013 : 1ère réunion
Mise en oeuvre de la loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 relative à la continuité du service public dans les transports terrestres de voyageurs « service minimum » — Examen du rapport d'information

Photo de Isabelle PasquetIsabelle Pasquet, rapporteure :

L'impact de la loi sur la conflictualité se révèle difficile à apprécier, du fait notamment du caractère irrégulier et peu prévisible de la récurrence des mouvements sociaux. L'évolution du nombre de préavis de grève ou de jours de grève par agent à la RATP ou à la SNCF depuis 2007 ne semble pas liée à l'adoption de la loi mais plutôt aux mots d'ordre nationaux. Il n'est pas possible, d'après les personnes que nous avons auditionnées, d'établir une corrélation entre la loi et l'évolution de la conflictualité.

Nos recommandations visent essentiellement à mieux appliquer la loi. But affiché de ce texte, l'amélioration du dialogue social n'a pas été généralisée. Les institutions représentatives du personnel doivent être mieux associées à la définition du PTA et du PIU. La période de négociation préalable doit être mise à profit par toutes les parties pour éviter le conflit : si elle reste purement formelle, elle n'a aucune valeur ajoutée par rapport au préavis. La revalorisation du dialogue social en dehors des périodes de conflit est le seul moyen de réduire, à terme, le nombre et l'intensité des conflits sociaux dans les transports. Le dialogue social doit être une démarche permanente et non l'ultime recours lorsque le conflit devient inévitable, sous la menace d'un préavis de grève. Les litiges individuels doivent pouvoir être résolus par d'autres biais que l'alarme sociale.

Surtout, il faut revenir à l'équilibre de 2007 en supprimant les modifications apportées en 2012 par la loi « Diard », qui oblige les salariés ayant l'intention de faire grève d'informer leur employeur 24 heures à l'avance s'ils y renoncent ou, pour ceux qui étaient en grève, s'ils souhaitent reprendre le travail.

La stabilité des règles conciliant la défense des intérêts professionnels des salariés et la sauvegarde de l'intérêt général doit être recherchée. La loi « Diard » est venue la perturber, avec un effet contraire à celui initialement recherché puisqu'un salarié peut être artificiellement forcé de faire grève 24 heures de plus qu'il ne l'aurait souhaité.

Il faut également responsabiliser les AOT, qui doivent s'investir davantage dans la définition des dessertes prioritaires en cas de perturbation, notamment pour corriger des inégalités territoriales. Il est également important qu'elles approuvent le PTA et le PIU, quitte à les amender. Elles doivent aussi intégrer dans les conventions d'exploitation conclues avec les entreprises de transport des critères sociaux et environnementaux de qualité de service leur permettant par exemple de garantir des acquis sociaux, en particulier lorsque le recours à la sous-traitance est très répandu. L'article 12 de la loi, qui le prévoit, n'est pas appliqué, sinon par le Stif dans les contrats signés avec la RATP et la SNCF en 2012. L'Etat, AOT des trains d'équilibre du territoire, ainsi que de nombreuses régions sont en retard sur ce point.

La systématisation des bilans d'exécution des PTA et des PIU doit permettre aux AOT d'évaluer les choix de l'entreprise de transport, d'identifier l'origine de toutes les perturbations et, en cas de grève, de comprendre pourquoi la procédure de prévention des conflits a échoué. Des outils statistiques harmonisés de suivi des perturbations du trafic et de l'application de la loi devraient être mis en place. De fait, la SNCF ne dispose pas de statistiques consolidées sur les principales causes de perturbations prévisibles du trafic sur son réseau. Une typologie précise et uniforme doit être réalisée à l'échelle nationale.

Le secteur du transport interurbain, qui a échoué à conclure un accord de branche sur la prévention des conflits et ne dispose d'aucun outil statistique fiable, doit faire un effort particulier. Le dialogue social dans la branche doit donc reprendre : à la fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV) d'assurer le suivi de l'application de la loi.

Enfin, il est temps que le Gouvernement s'assure de l'application uniforme de la loi sur tout le territoire. Le ministère des transports devrait recenser les PTA et PIU pour obtenir un bilan exhaustif. Sur cette base, un travail de sensibilisation des AOT et de partage de leurs initiatives pourrait être entrepris.

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