Intervention de Jean-Pierre Chevènement

Réunion du 21 octobre 2013 à 14h45
Programmation militaire pour les années 2014 à 2019 — Demande de réserve

Photo de Jean-Pierre ChevènementJean-Pierre Chevènement :

La France n’est pas le gendarme de l’Afrique. Elle est à son service, au service de son développement, inséparable de sa sécurité, mais elle ne peut non plus se laisser entraîner dans des conflits sans fin. Ainsi, s’agissant du Mali, il ne faut pas se voiler la face : sans une refondation du pacte national malien recueillant l’assentiment des populations, au Nord comme au Sud, les groupes djihadistes armés pourraient reprendre le dessus. L’expérience accumulée sur tous les continents montre que l’on ne peut éradiquer le terrorisme qu’avec l’appui des populations. La France n’est donc pas au Mali pour l’éternité. Les États africains doivent le savoir : ils sont les responsables au premier chef de leur sécurité.

Les conflits sahéliens font apparaître les interconnections entre plusieurs régions : Afrique de l’Ouest, Maghreb, Machrek, Golfe, Pakistan, Afghanistan, voire Caucase et Asie centrale. Le cours heurté des révolutions arabes suscite de légitimes inquiétudes. Puis-je vous rappeler, monsieur le ministre, la recommandation adoptée à l’unanimité par la commission des affaires étrangères et formulée dans le rapport d’une délégation sénatoriale coprésidée par M. Gérard Larcher et moi-même, intitulé « Sahel : pour une approche globale » ? Elle appelle à prendre garde à la montée de l’islamisme radical et au continuum que peuvent présenter l’islamisme politique, le salafisme et le djihadisme, avec toutes les dérives auxquelles nous devons être capables de faire face.

Le rapport annexé au projet de loi de programmation militaire prône un engagement dynamique de la France dans l’OTAN, certes pour y exprimer sa vision, sans que l’on en sache beaucoup plus à ce sujet, sinon la réaffirmation du rôle de l’Europe et d’une hypothétique « défense européenne crédible et autonome ». La mention faite d’une « combinaison appropriée de capacités nucléaires conventionnelles et de défense antimissiles » est, je l’espère, une concession de langage, car nous n’avons pas les moyens d’une défense antimissiles de territoire, aléatoire et dont le principe est contradictoire avec celui de la dissuasion. Le rapport d’ailleurs n’en fait pas mention.

Ce qui est important, monsieur le ministre, c’est le maintien de notre autonomie stratégique, au bénéfice de la liberté d’action de la France.

Je réaffirme ici, à cette occasion, l’importance de la dissuasion pour ceux qui croient à la pérennité de la France et à son rôle d’équilibre dans la construction d’une Europe réellement européenne. Nous sommes certes les alliés des États-Unis, mais nous ne devons pas nous trouver dans une position de vassalité qui serait humiliante et, en fin de compte, démobilisatrice pour l’esprit de défense, inséparable de l’esprit national.

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