Intervention de Isabelle Pasquet

Réunion du 21 octobre 2013 à 21h30
Programmation militaire pour les années 2014 à 2019 — Article 2 et rapport annexé

Photo de Isabelle PasquetIsabelle Pasquet :

L’article 2 du présent projet de loi de programmation militaire porte approbation d’un rapport annexé qui fixe les orientations relatives à la politique de défense et précise les orientations en matière d’équipement des armées à l’horizon 2025.

Au titre de la fonction de protection, le rapport fait mention, en son alinéa 165, de la flotte logistique FLOTLOG, qui est destinée à remplacer les actuels pétroliers ravitailleurs polyvalents et autres bâtiments de soutien et qui devrait comporter trois unités, dont la première devrait être commandée au lointain horizon 2025.

Après le retrait du pétrolier ravitailleur Meuse prévu en 2015, le soutien logistique des unités de combat ne sera plus assuré que par les bâtiments de commandement et de ravitaillement Var, Marne, et Somme, mis en service en 1983, 1987 et 1990.

La logistique, qui concerne le ravitaillement aussi bien en eau douce qu’en carburant pour l’aviation, en gasoil, en vivres, en munitions ou en pièces de rechange, est fondamentale pour la politique de défense.

Je centrerai plus particulièrement mon intervention sur le ravitaillement énergétique et sur les garanties de notre indépendance, dans le champ aussi bien militaire que civil.

Le transport de produits pétroliers sous pavillon français se trouve aujourd’hui en état d’urgence. Il est nécessaire de modifier la loi concernant l’approvisionnement des réserves stratégiques militaires et civiles en produits pétroliers, qui date de 1992.

Comme vous le savez, les seuls navires capables de transporter les matières énergétiques françaises, qu’elles soient pour les véhicules, l’industrie ou le chauffage, appartiennent tous à des armateurs étrangers qui peuvent les récupérer à tout moment.

Aujourd’hui, l’armateur MAERKS a annoncé son intention de dépavillonner ses navires.

En 1992, le législateur a redéfini les modalités de calcul des quantités de pétrole brut et de la capacité de transport maritime sous pavillon français.

La contrainte pour notre pays que constitue la dépendance de l’étranger pour ses approvisionnements en pétrole et en produits pétroliers a été à cette époque largement rappelée. L’escorte armée des navires pétroliers en transit a été parfois nécessaire, protection que le droit international ne permet à la France d’exercer qu’au profit de navires sous pavillon français.

La loi du 31 décembre 1992 portant réforme du régime pétrolier a ainsi redéfini des obligations auxquelles tous les opérateurs qui participent à l’approvisionnement pétrolier du pays sont soumis : constituer et conserver des stocks stratégiques de pétrole et de produits pétroliers, assurer l’existence d’une flotte pétrolière sous pavillon français, les propriétaires de raffineries de pétrole brut devant contrôler, en propriété ou par affrètement à long terme, une capacité de transport maritime sous pavillon français, mais également fournir aux pouvoirs publics des informations nécessaires à la connaissance par ceux-ci des conditions de l’approvisionnement pétrolier du pays et notifier aux pouvoirs publics les projets de construction, de modification ou d’arrêt des raffineries ou respecter les limitations aux échanges extracommunautaires de pétrole et de produits pétroliers qui pourraient être instituées en cas de tension internationale grave pour faire face aux engagements de la France ou pour l’application des mesures décidées par la Communauté européenne, notamment dans le cadre de l’Union européenne.

Les règles qui s’appliquent aux forces armées dans le domaine pétrolier et, en particulier, la constitution et la conservation des stocks de produits pétroliers à finalité militaire sont fixées par le ministre de la défense. Cependant, ce ministère est directement concerné par le dépavillonnement des pétroliers français. Celui-ci n’est pas sans incidence sur la possibilité d’escorte. De plus, ses répercussions en termes d’indépendance énergétique constituent des enjeux stratégiques majeurs pour notre pays.

Il s’agit aujourd’hui d’éviter la perte de ces navires transportant des produits pétroliers, la perte d’autonomie complète de la France en matière de transport de produits pétroliers et de ravitaillement en produits énergétiques stratégiques, la perte d’emplois très importante pour les marins – officiers et personnel d’exécution –, la perte de l’accréditation et des certificats des marins armant ces navires pétroliers.

Si une décision n’est pas prise en concertation avec les ministères de la défense, de l’énergie, des transports et de l’industrie, des dégâts irréparables se produiront. La France n’a, à ce jour, quasiment plus de navires sous pavillons français appartenant à des armateurs français et armés par des marins français qui pourraient être réquisitionnés par l’État en cas de crise.

C’est pourquoi, à côté des professionnels du secteur, nous alertons encore une fois le Gouvernement afin qu’il prenne une mesure rapide pour que des navires soient armés par des armateurs français sous pavillon de premier registre.

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